M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Bignon, je connais votre engagement en faveur de la biodiversité.
Vous le savez, voilà encore quelques années, quand je me suis engagé pour l’écologie, beaucoup de gens ridiculisaient un tel engagement : « À quoi bon s’intéresser aux petites fleurs et aux petits oiseaux ? Il y a bien d’autres sujets beaucoup plus importants. » Or, aujourd’hui, des scientifiques du monde entier ont fait un rapport précis sur l’état de la biodiversité ; cela passe, en effet, par la mesure des petites fleurs et des petits oiseaux, chez nous, en France, comme partout dans le monde.
Pour ma part, je suis fier d’être un ministre nommé par un Président de la République qui a reçu ces scientifiques. C’est la première fois qu’un Président de la République fait de la biodiversité un enjeu dans la politique internationale, dans la diplomatie française, de même niveau que le climat. Par ailleurs, il demande au Gouvernement d’agir, ici et maintenant, dans sa politique pour la biodiversité.
Je veux vous donner deux exemples pour garder espoir, car vous m’avez semblé céder un peu au fatalisme ; pour ma part, je ne céderai jamais au fatalisme sur ce sujet.
Dans les années 1970 et 1980, le bouquetin avait quasiment disparu des Pyrénées et des Alpes ; aujourd’hui, il y en a dix mille en France. Dans les années 1970, il n’y avait plus que trois espèces de poisson dans la Seine ; aujourd’hui, il y en a près de quarante. Pourquoi ? Parce que nous avons su prendre des mesures de prévention, de lutte contre les problèmes de pollution, à la racine. En matière d’eau, il s’agit de la lutte contre les pollutions industrielles et de l’amélioration du traitement des eaux usées, et, pour continuer avec l’exemple du bouquetin, il s’agit de la protection des endroits où il peut se développer.
C’est exactement ce que nous allons continuer à faire. Nous le faisons à travers la création de l’Office français de la biodiversité, qui disposera de 5 000 agents dédiés à la biodiversité sur l’ensemble du territoire français, et celle du parc naturel forestier. Nous allons protéger près de 30 % du territoire national, comme nous l’a demandé le Président de la République.
M. le président. Il faut conclure !
M. François de Rugy, ministre d’État. Croyez en notre détermination à agir pour l’écologie en général et pour la biodiversité en particulier. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
manifestations du 1er mai (III)
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Bas. Monsieur le ministre de l’intérieur, j’aimerais que nous puissions nous en tenir aux faits. C’est à cela que servent les questions d’actualité.
Le 1er mai dernier, plusieurs dizaines de manifestants ont pénétré, certains par effraction, dans l’enceinte de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière pour échapper aux gaz lacrymogènes. Cette irruption dans un lieu de soins était de nature à susciter une légitime émotion.
Heureusement, aucune agression ne semble avoir été commise, et les manifestants n’ont apparemment pas pénétré dans les bâtiments. Je veux saluer ici le sang-froid, le calme et le formidable professionnalisme dont ont fait preuve les personnels de santé pour maintenir les patients à l’abri de cette agitation qui a fait peur.
Las, on ne peut dire que le Gouvernement ait fait preuve du même sang-froid si l’on en juge par ses déclarations : « On a attaqué un hôpital », « on a agressé son personnel soignant », « c’est une intrusion violente », avez-vous dit successivement, monsieur le ministre. « C’est un acte scandaleux », avez-vous ajouté, monsieur le Premier ministre. « C’est une exaction inqualifiable et indigne », a déclaré la ministre de la santé. Quant au président de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’ancien ministre Le Guen, il a ajouté : « C’est un acte de pure barbarie. »
Alors, monsieur le ministre, sur quels faits le Gouvernement s’est-il fondé pour donner l’alarme aux Français sur des violences qui n’ont pas eu lieu ? Que s’est-il passé exactement à la Pitié-Salpêtrière le 1er mai ? Et si vous avez été induit en erreur par de fausses informations,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Philippe Bas. … quelles conséquences en avez-vous tiré ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur. Il est effectivement important de regarder l’ensemble des faits qui se sont déroulés sur le périmètre de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.
Une partie des manifestants n’a pas suivi le parcours prévu. En empruntant la rue Jeanne-d’Arc, elle a bloqué, de fait, la tête du cortège qui était ouvert, comme je l’ai souligné voilà quelques instants, par des forces de sécurité, comme cela se fait de manière traditionnelle.
À ce moment-là, un certain nombre de heurts assez violents ont eu lieu. Ils ont débuté dès quatorze heures trente. Ensuite, nous avons assisté à une attaque. Un commissariat a été pris pour cible. Des images très claires de violences montrent qu’il y avait volonté d’y pénétrer. Il était quinze heures quarante-sept.
À seize heures une, certains casseurs ont tenté de s’introduire dans une école primaire. Vous avez pu voir, notamment sur les réseaux sociaux, le témoignage de la responsable du site.
À seize heures quarante-sept, boulevard de l’Hôpital, un CRS est tombé. Ses camarades l’ont évacué sous les cris de « Achevez-le ! », comme je l’ai rappelé. Il a été traîné jusqu’à l’hôpital.
Dans ce créneau horaire, deux effractions ont eu lieu : l’une, par l’entrée principale ; l’autre, par l’entrée secondaire. Les images ont notamment montré trois individus franchissant une grille de plus de trois mètres de haut, qu’ils ont ensuite ouverte en brisant la chaîne et la serrure du portail, avant d’entrer dans les lieux.
Quand je me suis rendu sur place pour prendre des nouvelles de la santé du CRS blessé, je n’étais pas informé de cette intrusion. Par contre, les responsables hospitaliers qui m’ont accueilli m’ont fait part de leur émotion. C’est sur la base de leur émotion, filmée par les chaînes d’information, que je me suis prononcé. C’est sur la base de cette émotion extrêmement forte que j’ai dénoncé ces faits.
Monsieur Bas, jamais, je crois, dans l’histoire d’une manifestation, nous n’avons assisté à une telle situation avec l’attaque successive d’in commissariat, d’une école primaire et l’entrée, de force – car il y a bien eu bris de serrure –, dans un hôpital.
M. le président. Il faut conclure !
M. Christophe Castaner, ministre. C’est la raison pour laquelle j’ai utilisé ce mot.
Face aux événements du lendemain et à la polémique qui était née et qui mettait en cause la qualité exceptionnelle du travail de nos forces de sécurité, j’ai préféré utiliser le même terme que celui de la directrice en évoquant une « intrusion ». (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.)
maisons de services au public
M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Jacques Le Nay. Madame la ministre de la cohésion des territoires, lors de sa conférence de presse du 25 avril dernier, le Président de la République a annoncé une disposition en faveur des milieux rural et périurbain, à savoir le déploiement de maisons de services au public sous la nouvelle appellation « France service ».
Notre pays compte déjà plus de 1 300 maisons de services au public qui permettent non seulement de pallier la fermeture de services publics, mais aussi la fracture numérique dans certains territoires. Mises à disposition par les collectivités territoriales, aidées par l’État et par différents organismes publics ou privés, ces maisons de services au public sont, sans aucun doute, un gage d’attractivité du territoire lorsque leur fonctionnement et leur organisation sont bien assurés.
Le Président de la République a annoncé leur déploiement à raison d’un France service par canton. Je m’interroge sur cette intention. En effet, le dispositif mis en place sur l’initiative des communes et des EPCI avait pour objectif de constituer un bon maillage territorial. Il n’est pas rare de compter deux ou trois maisons de services au public dans certains cantons ruraux, en raison de leur étendue ou, tout simplement, de l’existence de bassins de vie dépassant les limites administratives du canton. Ne pensez-vous pas, madame la ministre, que le principe d’un seul France service par canton aboutisse à un affaiblissement du dispositif existant ?
Toutefois, la question essentielle me semble être celle du financement : depuis quelques mois, les projets en cours sont gelés, faute de crédits. Pouvez-vous nous indiquer les dispositions financières qui permettront de mettre en œuvre ces engagements du Président de la République ?
Enfin, compte tenu de la situation particulière des territoires ultramarins, quelles mesures comptez-vous prendre dans le cadre de ce dispositif pour assurer la continuité territoriale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. La semaine dernière, en Charente, le Premier ministre a précisé les modalités de déploiement des maisons France service, annoncées par le Président de la République. Ces maisons, vous avez raison de le souligner, monsieur le sénateur Le Nay, constituent le prolongement naturel des maisons de services au public, souvent encore trop peu connues de nos concitoyens et qui correspondent à un réel besoin de proximité, largement exprimé lors du grand débat.
Il existe aujourd’hui 1 340 maisons de services au public sur l’ensemble du territoire. Le Premier ministre a annoncé la création de 500 nouvelles maisons.
Au regard du maillage actuel, l’objectif du Gouvernement est de couvrir en priorité, et le plus rapidement possible, les endroits où l’on ne trouve pas de maisons de services au public, qu’il s’agisse des cantons ruraux, des quartiers ou des territoires ultramarins.
Bien évidemment, nous ne fermerons aucune des maisons de services au public existantes, portées, comme vous l’avez rappelé, par les collectivités territoriales, par La Poste et parfois par des associations. Il s’agit de mettre de nouveaux services là où il n’y en a pas. Encore une fois, nous ne fermerons aucune MSAP.
Par ailleurs, et vous l’avez également souligné, les niveaux de services peuvent différer d’une maison à l’autre. Nous voulons mettre en place un bouquet de services minimums pour obtenir le label « maison France service ».
Ces maisons seront financées par l’État et par les opérateurs, à hauteur de 36 millions d’euros, ainsi que par la Caisse des dépôts et consignations, qui vient d’annoncer une enveloppe exceptionnelle de 30 millions d’euros. Il convient d’ajouter les montants consacrés par les collectivités territoriales, lesquelles assurent, en général, environ la moitié des financements de fonctionnement. (MM. Philippe Bonnecarrère et Pierre Louault applaudissent.)
loi biodiversité et espèces protégées
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. Ronan Dantec. Ma question s’adresse à M. François de Rugy et complétera celle de Jérôme Bignon.
Le Président de la République a eu des mots forts pour commenter le rapport dramatique de l’IPBES, évoquant des faits « cruels » et la nécessité de changer de modèle économique de production. Il n’est pas le premier à trouver les mots. Tout le monde se rappelle l’orfèvre en la matière que fut Jacques Chirac, lors du sommet de la Terre, à Johannesburg. À l’inverse de ses prédécesseurs, qui ont finalement beaucoup laissé brûler la maison, Emmanuel Macron sera-t-il le premier à définir et appliquer des politiques publiques à la hauteur de ces défis redoutables ? La crédibilité de la réponse passera par des actes, rien que par des actes, et par de vrais investissements.
À l’heure où, mû par une légitime émotion, notre pays se mobilise pour reconstruire une cathédrale au cœur de son histoire, l’État peut-il laisser se perdre des pans entiers de son patrimoine naturel ? Aujourd’hui, 120 espèces endémiques sont en danger d’extinction en France, notamment dans les territoires ultramarins, où beaucoup de ces espèces se portent bien plus mal que le bouquetin dans les Alpes.
Nous avons voté, dans la loi Biodiversité, et j’ai eu l’honneur de porter cet amendement, un article disposant que toutes ces 120 espèces devraient, d’ici au 1er janvier 2020, faire l’objet d’un plan national d’action. Je vous rejoins sur ce sujet : les plans nationaux d’action se sont souvent traduits par des résultats remarquables.
Monsieur le ministre d’État, ma question est simple et précise : où en est-on ? La France tiendra-t-elle cet engagement et à quel coût ? Sauver la biodiversité ne consiste bien évidemment pas à se payer de mots, mais à investir résolument dans l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jérôme Bignon applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous avez raison, monsieur le sénateur, nous sommes à un moment important pour la biodiversité, marqué à la fois par le rapport de l’IPBES, que vous avez cité, par le G7 des ministres de l’environnement, à Metz, sous l’égide de François de Rugy, qui a tenu à mettre la biodiversité au cœur des discussions intergouvernementales, et par le discours du Président de la République, après sa rencontre avec les scientifiques de l’IPBES, qui a déclaré que nous allions agir.
Nous allons agir en consacrant le premier conseil de défense écologique, qui se tiendra autour du Président de la République avant la fin de ce mois, à la préservation de la biodiversité. Nous allons agir sur la transition agricole, nous allons agir sur l’étalement urbain et la lutte contre l’artificialisation des sols, nous allons agir sur la lutte contre le gaspillage et les déchets.
Vous posez une question précise sur les espèces endémiques en danger, qui doivent faire l’objet, comme vous l’avez souligné, depuis la loi Biodiversité de 2016, de plans de protection, dits plans nationaux d’action, ou PNA.
Nous avons lancé 65 PNA, dont 16 pour des espèces ou des plantes ultramarines. Comme nous le savons tous, les grands enjeux se situent très largement en outre-mer, où est concentrée 80 % de notre biodiversité.
Ces 65 plans, en cours de mise en œuvre, concernent à la fois des espèces classiques en métropole – je pense, par exemple, au milan royal ou à l’aigle de Bonelli – et des espèces ultramarines : l’iguane des Petites Antilles, le gecko vert de La Réunion, les tortues marines des Antilles et de la Guyane. Un plan concernant l’albatros des TAAF est également en cours de lancement.
Nous allons continuer ce travail indispensable sur ces plans. C’est à l’ordre du jour de l’Agence française pour la biodiversité, et bientôt de l’OFB, ou Office français de la biodiversité, qui sera créé au 1er janvier 2020. Nous allons travailler pour lancer des plans complémentaires et peut-être en regrouper certains afin de couvrir les 120 espèces concernées. C’est notre objectif, et il est important.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour la réplique.
M. Ronan Dantec. Je vous remercie de cette réponse précise, madame la secrétaire d’État.
Le milan royal n’étant pas une espèce endémique, cela signifie qu’il reste encore probablement une centaine d’espèces endémiques en voie de disparition qu’il convient de protéger par des plans.
J’espère que nous tiendrons, à quelques mois près – il est clair que l’échéance du 1er janvier 2020 ne sera pas atteinte –, cet engagement international de la France, car il s’agit bien d’un engagement international.
déficit des comptes sociaux
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Milon. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, lors de l’examen du PLFSS pour 2019, votre collègue chargé du budget annonçait fièrement que le bon vieux trou de la sécurité sociale, qui aggrave les déficits publics depuis 2002, allait être rebouché. Et cela, dès 2019, disait-il, avant le retour à l’équilibre promis par le Premier ministre dans son discours de politique générale.
Je vous ai bien écoutée à l’époque, et vous disiez : « Pour la première fois depuis dix-huit ans, la sécurité sociale retrouvera l’équilibre, c’est une bonne nouvelle pour les jeunes générations. »
La bonne nouvelle n’était, semble-t-il, qu’une fake news. En effet, la sécurité sociale pourrait afficher, à la fin de l’année, un déficit de 3,6 milliards d’euros. C’est ce qu’annonce le Haut Conseil du financement de la protection sociale, dans son rapport du mois de mars. Il y précise même qu’aucun équilibre n’est envisageable avant la fin du quinquennat.
Les promesses d’un petit excédent de 600 millions d’euros se sont envolées, le discours de la fin de l’année a été happé par la réalité.
Comment, madame la ministre, pouvez-vous expliquer et justifier un tel décalage entre les prévisions présentées comme la preuve incontestable de la bonne gestion du Gouvernement et la réalité des chiffres de la fin de l’année 2019 ? Quels objectifs se fixe désormais le Gouvernement en termes de réduction du déficit de la sécurité sociale ?
Enfin, comment allez-vous, en l’absence d’excédents, financer les nouveaux moyens confiés à la CADES, qui n’avaient été déclarés conformes à la Constitution qu’en raison des excédents prévisionnels du budget de la sécurité sociale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Vous avez raison, monsieur Milon, mais il ne s’agit évidemment pas d’une fake news. C’est simplement l’évolution des comptes.
Cet automne, lors de l’examen du PLFSS pour 2019, nous avons présenté un budget qui devait être à l’équilibre en 2019. Aujourd’hui, le Haut Conseil du financement de la protection sociale prévoit effectivement un déficit de 3,6 milliards d’euros pour 2019.
Je veux tout de même rappeler les efforts considérables de gestion qui ont été faits pour redresser les comptes sociaux. En mars dernier, lors de la clôture des comptes, nous avons présenté, avec Gérald Darmanin, le plus faible déficit annuel de la sécurité sociale depuis 2001 : à la fin de 2018, il atteignait 1,2 milliard d’euros, en baisse de 3,9 milliards d’euros par rapport à 2017. Notre gestion des comptes sociaux a donc été tout à fait remarquable. Cela montre concrètement le sérieux budgétaire et financier du Gouvernement.
La loi du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales a réduit, de facto, les recettes des administrations de sécurité sociale : l’anticipation, en janvier 2019, de l’exonération des cotisations sociales sur les heures supplémentaires représente un manque de 1,3 milliard d’euros pour les comptes sociaux, de même que l’annulation de la hausse de la CSG pour les retraités modestes, ceux qui perçoivent moins de 2 000 euros de pension. Ces mesures expliquent les projections du Haut Conseil du financement de la protection sociale.
Nous allons travailler tous ensemble pour réduire ce déficit, de façon à reprendre la trajectoire initialement prévue. Nous vous présenterons tout cela lors de l’examen du PLFSS pour 2020. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.
M. Alain Milon. Malheureusement, les prévisions du Haut Conseil remettent sérieusement en cause la viabilité financière du projet de réforme des retraites.
Le Gouvernement a fait le choix d’une communication sur le maintien de l’âge de départ à la retraite à 62 ans. Dire la vérité aux Français sur la nécessité de prolonger l’effort entrepris par les précédentes réformes me semble être de nature à créer la confiance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Serge Babary, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Babary. Monsieur le Premier ministre, le 2 mai dernier, à Amboise, ville paisible des bords de Loire, le Président de la République, Emmanuel Macron, a rencontré le Président italien Sergio Mattarella. Cette rencontre avait pour objet de célébrer la personnalité universelle de Léonard de Vinci, mort voilà cinq cents ans.
Cet évènement symbolique rappelait l’amitié franco-italienne, quelque peu mise à mal, et surtout préfigurait, en en donnant le coup d’envoi, les festivités des cinq cents ans de la Renaissance en Val de Loire. Tout portait donc à s’attendre à un moment festif pour la population…
Las, une tornade sécuritaire s’est abattue sur la ville. Je ne résiste pas à l’envie de vous détailler les consignes passées aux habitants : circulation interdite en ville de sept heures à dix-sept heures ; stationnement interdit toute la journée, et ce depuis la veille, à sept heures ; interdiction d’aller et venir pour les piétons de sept heures à treize heures à proximité du château ; interdiction pour les habitants de paraître aux fenêtres et aux balcons. (Rires.)
M. Pierre-Yves Collombat. C’est beau, la popularité ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. Eh oui !
M. Serge Babary. Certes, cette dernière interdiction, envisagée dans un premier temps, a finalement été annulée. Outre l’interdiction de manifester, il y avait aussi interdiction de naviguer sur la Loire.
Cette ville touristique de 13 000 habitants, très active, accueillant près de 1 million de visiteurs par an, s’est trouvée bouclée et désertée. Une ville fantôme vidée de toute vie, un véritable désert, commentent les habitants bloqués chez eux. Tous les commerces ont leur rideau baissé. Une ambiance aussi impressionnante que ridicule…
M. Jean-Pierre Sueur. Ô combien !
M. Serge Babary. On peut rétorquer qu’une menace terroriste est toujours présente. Ressort alors l’image de la visite du général de Gaulle, en 1959, émergeant d’une marée humaine en liesse, au pied du château.
Vu de Paris, vu de Rome, cette ville « sous cloche », comme le titrait le journal local, marquait peut-être un signe fort de l’amitié franco-italienne, mais, vu d’Amboise, c’était la sidération, l’image d’une ville parfaitement vide.
M. le président. Il faut conclure !
M. Serge Babary. Il y a donc des questions à se poser sur les rapports d’un Président avec le peuple et de ce pouvoir avec la nation.
Le traitement de la sécurité par le vide est-il vraiment nécessaire ? S’agit-il, là aussi, d’une nouvelle doctrine sécuritaire pour les déplacements présidentiels ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste – Mme Michelle Meunier et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, à chaque fois que nous recevons un hôte étranger du niveau du Président italien, nous devons garantir au mieux la sécurité.
Les circonstances de la semaine dernière étaient exceptionnelles : quelques jours auparavant, et je n’entrerai pas plus avant dans les détails, quatre personnes projetant un attentat contre les forces de sécurité de l’Élysée avaient été interpellées. L’enquête se poursuit, et une autre interpellation a eu lieu aujourd’hui même. L’instruction est placée sous l’autorité du procureur de Paris, dans le cadre de la section C1 chargée des activités terroristes. Pour ces raisons, il nous a semblé nécessaire d’être particulièrement vigilants.
J’ai ensuite eu connaissance, monsieur le sénateur, de dispositions qui m’ont paru disproportionnées. Certaines des mesures que vous évoquez, et que je ne remets nullement en cause, ont pu être amplifiées par souci de protection et de précaution maximum. Nous avons décidé d’en lever quelques-unes, à la suite des interrogations des élus locaux et de la presse locale, qui ne nous semblaient pas tout à fait adaptées à la situation.
Quand il s’agit de célébrer un moment aussi important et d’assurer la sécurité d’un Président de la République, quel qu’il soit, et celle d’un Président étranger, nous pouvons tous convenir qu’il est nécessaire de prendre certaines dispositions contre un risque terroriste, hélas ! permanent. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
prix des carburants
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Joël Bigot. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
« Coup de chaud sur les prix à la pompe », titre cet après-midi un quotidien du soir.
En novembre 2018, le Président de la République s’était prononcé favorablement pour la mise en place d’une taxe flottante « anti-pic » pour lutter contre l’augmentation exponentielle du prix des carburants. Aucune suite n’y a été donnée… Or c’est bien cette augmentation des prix de l’essence qui avait déclenché le mouvement social des « gilets jaunes », à l’automne dernier – mouvement qui, à ce jour, continue de mobiliser.
Devant la poursuite de cette hausse des prix du baril, et malgré le gel de la taxe carbone, vous avez exprimé, mardi dernier, votre refus de recourir à une taxe flottante sur les carburants. Initiée sous le gouvernement de Lionel Jospin et instaurée encore à l’été 2012, par voie d’arrêté, pour une période de trois mois, cette taxe permet de réduire instantanément le prix à la pompe de 3 ou 4 centimes.
Élu de Maine-et-Loire, je connais bien les difficultés rencontrées par nos concitoyens qui n’ont d’autre choix que d’utiliser leur voiture pour l’ensemble de leurs trajets quotidiens, faute d’alternatives en matière de transports collectifs, et vous le savez. Il ne suffit pas de dire aux Français qu’ils doivent « se libérer du pétrole ».
J’ai évoqué la taxe flottante, mais d’autres mesures pourraient être actionnées en direction des marges des distributeurs, lesquels, me semble-t-il, ne traversent pas de crise majeure, bien au contraire. Je pense surtout aux grands groupes pétroliers, dont les bénéfices sont en forte hausse, pour ne pas dire explosifs, ces dernières années. Eux aussi devraient pouvoir contribuer à la transition énergétique, ce qui allégerait d’autant la fiscalité pesant sur les ménages. L’effort fiscal doit incontestablement être mieux réparti.
Ma question est donc très simple : quelles solutions, à court terme, le Gouvernement est-il en mesure de proposer pour épargner aux Français une nouvelle ponction excessive sur leur pouvoir d’achat en raison de l’augmentation du prix du baril ?