M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, sur l’article.

M. Olivier Cadic. Huawei ne fera pas partie des constructeurs du réseau sans fil d’urgence américain à cause des interrogations du gouvernement américain au sujet de sa sécurité nationale. Cette déclaration a été faite par le département du commerce américain, non pas de l’administration Trump, mais de l’administration Obama. C’était il y a huit ans déjà.

Il y a sept ans, notre collègue Jean-Marie Bockel précisait dans son rapport sur la cybersécurité que la société Huawei avait reconnu qu’elle analysait l’ensemble des flux de communication – courriers électroniques, conversations téléphoniques –, afin de mieux assurer la sécurité des flux de ses clients.

Le régime chinois, qui affirme vouloir dominer le monde d’ici à 2050 et qui dispose désormais d’un président potentiellement à vie, ne reconnaît pas la démocratie et les droits de l’homme comme valeur universelle. Définie par sa Constitution comme un « État socialiste de dictature démocratique populaire », la Chine compte plusieurs dizaines de milliers de prisonniers politiques et un millier de musulmans détenus dans des camps au Xinjiang.

Sa maîtrise de la technologie lui a permis de créer un « cybermur » pour imposer un contrôle social à sa population, en combinant réseaux sociaux, caméras à reconnaissance faciale et intelligence artificielle. Cette dictature 5G utilise ses « routes de la soie » pour tenter de prendre subrepticement le contrôle de pays en liant son aide à la signature de contrats d’équipements technologiques. Après Djibouti, la Chine aura installé 10 000 caméras sur l’île Maurice d’ici à la fin du mois de juin.

Dès la fin du mois de janvier, j’ai interrogé le ministre des affaires étrangères sur la position de la France vis-à-vis de Huawei, en particulier en ce qui concerne le déploiement de la 5G. Il avait alors partagé sa préoccupation avec notre commission.

Deux ou trois jours plus tard, le Gouvernement déposait un amendement relatif à ce sujet au projet de loi Pacte, qui ne concernait pas un équipementier en particulier. Je l’avais voté, partageant le sentiment d’urgence qui animait le Gouvernement pour bloquer l’implantation d’équipements qui auraient pu contrevenir à la défense de nos libertés publiques.

Je me réjouis que le Gouvernement ait persisté en nous proposant ce texte, même si je regrette qu’il ne bannisse pas officiellement Huawei, comme d’autres grandes démocraties. L’Europe compte deux constructeurs européens pour la 5G. La Chine, il faut le rappeler, ne pratique pas la réciprocité.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié quinquies, présenté par Mme Noël, MM. D. Laurent et Piednoir, Mme Lamure et MM. Charon, B. Fournier, Pierre, Bonhomme et Laménie, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

nationale,

insérer les mots :

la fabrication, l’importation, l’exposition, l’offre, la location, la vente ou

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Cet amendement a pour objet de soumettre les équipementiers à la procédure d’autorisation préalable, à l’instar de ce qui existe déjà pour les opérateurs. En effet, pour la pleine efficacité du dispositif prévu, les équipementiers sont les plus à même de répondre à l’ensemble des sollicitations sur l’appareil ou le logiciel visé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Nous avons déjà évoqué cette question en commission : l’extension aux équipementiers de la procédure d’autorisation préalable rendrait le nouveau régime difficilement compréhensible et rendrait en partie inutile le régime d’autorisation en vigueur au titre du code pénal, régime qui fonctionne bien.

Le régime d’autorisation visé dans cette proposition de loi porte sur l’exploitation des équipements et non pas sur les équipements eux-mêmes. Ne brouillons pas la logique de ce texte.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. J’ajoute que l’article R. 226-3 du code pénal permet justement, comme l’a bien rappelé Mme le rapporteur, d’assurer ce besoin de sécurité auquel vous faites référence.

L’avis du Gouvernement est donc également défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié quinquies.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Artano et Cabanel, Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, MM. Requier, Roux, Vall et Delcros et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer les mots :

de cinquième génération et des générations ultérieures

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise le périmètre technologique couvert par les dispositions de l’article 1er.

La commission a restreint le champ d’application du dispositif de demande d’autorisation préalable en faisant explicitement référence aux réseaux 5G et aux éventuelles générations ultérieures.

Or, dans la perspective du déploiement, les opérateurs de télécommunications mobiles s’appuient plutôt sur une transition d’une technologie vers l’autre sans interruption, bien qu’il s’agisse effectivement de technologies distinctes.

Dans tous les cas, il ne semble pas opportun de fixer ce genre de disposition dans la loi, car il s’agit avant tout d’une question technique devant être réglée par des techniciens. In fine, cela complique le texte.

C’est pourquoi il est proposé ici de supprimer la mention de la 5G et des générations ultérieures.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. D’une part, les dispositions de cet amendement contreviennent à la position de la commission.

D’autre part, tout le monde considère comme une avancée – je pense à nos collègues qui sont confrontés à des problèmes de déploiement de la 4G – le fait que cette proposition de loi limite son champ à la 5G. Il s’agit précisément de permettre le déploiement de la 4G sans risquer que les équipements utilisés pour cette dernière ne soient de nouveau soumis à des autorisations, qui ne seront donc pas nécessaires.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. Si nous concentrons l’objet de cette proposition de loi sur la 5G, c’est parce qu’elle présente des spécificités techniques – intelligence des portées, virtualisation – et des usages différents.

Il nous semble que, là encore grâce à l’article R. 226-3, la sécurité de la 4G est assez bien assurée. Nous avons pleinement conscience des enjeux.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 15 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement était porté par Yvon Collin, président de la Commission supérieure du numérique et des postes, la CSNP.

Toutefois, compte tenu des deux avis défavorables qui ont été exprimés, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 15 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Artano et Cabanel, Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, MM. Requier, Roux, Vall et Delcros et Mmes Saint-Pé et Morhet-Richaud, est ainsi libellé :

I. -Alinéa 4

Après le mot :

confidentialité

insérer les mots :

, la disponibilité

II.- Alinéa 10, première phrase

Après le mot :

confidentialité

insérer les mots :

, à la disponibilité

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Le triptyque « intégrité-confidentialité-disponibilité » constitue le socle fondamental utilisé par tous les acteurs de la cybersécurité.

À l’article 1er, deux de ces termes sont mentionnés parmi les objectifs de l’autorisation d’exploitation de réseaux 5G à la suite de l’intégration par la commission de la notion de confidentialité.

Nous proposons de mentionner également la disponibilité du réseau. En effet, l’accès à l’infrastructure de réseau est un élément fondamental à prendre en compte lors des demandes d’autorisation. Lors d’un service-level agreement, la disponibilité réseau est un paramètre permettant d’évaluer les performances d’un fournisseur.

M. le président. L’amendement n° 8, présenté par M. Iacovelli, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 9

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« L’autorisation d’exploitation mentionnée au premier alinéa du I soumet les opérateurs mentionnés à l’article L. 1332-1 du code de la défense à une obligation de notifier officiellement au Premier ministre toute modification, mineure ou majeure, des appareils mentionnés au premier alinéa du I, quel qu’en soit l’initiateur.

« Les modalités de la notification officielle mentionnée au troisième alinéa du présent II sont fixées par décret.

« La notification officielle mentionnée au même troisième alinéa ouvre au Premier ministre la possibilité, après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la Commission supérieure du numérique et des postes, qui se prononcent dans un délai d’un mois à compter de leur saisine, de mettre fin par voie de décret à une autorisation d’exploitation telle que mentionnée au premier alinéa du I, ce qui implique le dépôt d’un nouveau dossier de demande d’autorisation tel que mentionné au premier alinéa du présent II.

II. – Alinéa 10

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art L. 34-12. – Le Premier ministre refuse par décision motivée l’octroi ou la prolongation de l’autorisation prévue à l’article L. 34-11 s’il estime qu’il existe un risque sérieux d’atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale résultant du manque de garantie du respect des règles mentionnées aux a, b et e du I de l’article L. 33-1 relatives à l’intégrité, à la sécurité, à la confidentialité et à la continuité de l’exploitation des réseaux et de la fourniture de services.

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Par cet amendement, nous proposons de compléter le dispositif mis en place par la proposition de loi par un moyen simple et efficace pour l’État de vérifier en continu le bien-fondé des autorisations préalables. Nous introduisons pour les opérateurs concernés par ce texte une obligation de notification au Premier ministre de toute modification apportée à leur matériel par les équipementiers.

Si les modalités de cette modification sont fixées par décret, on peut supposer que le Gouvernement ne fera pas peser sur les opérateurs une trop lourde charge et s’en tiendra à l’envoi d’une patch note détaillée, qui suffira amplement.

La notification confère alors au Premier ministre la possibilité, après consultation de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’Arcep, et de la CSNP, de revenir sur une autorisation et d’y mettre fin. Cela n’empêche pas le dépôt d’un nouveau dossier de demande d’autorisation.

L’objet de cet amendement, mes chers collègues, est donc de pallier la difficulté posée par la modification contenue des logiciels par un système d’autorisation préalable. Cette solution n’est pas incompatible avec la proposition d’établir un rapport annuel sur les autorisations délivrées. Elle est même complémentaire, puisque l’adoption de cet amendement offrirait à l’administration la matière pour constituer une formidable base de données des équipements 5G utilisés par les opérateurs d’importance vitale et de leurs différentes versions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La mention relative à la disponibilité du réseau que Mme Carrère propose d’insérer nous paraît tout à fait légitime ; elle apporte une clarification utile.

La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 16 rectifié bis.

L’amendement n° 8 de M. Iacovelli vise à répondre à une véritable préoccupation, à savoir les mises à jour des logiciels et leur traitement.

À l’Assemblée nationale, Mme la secrétaire d’État a indiqué qu’une distinction serait opérée entre les mises à jour mineures et les mises à jour majeures. Et, au cours des auditions auxquelles nous avons procédé, nos interlocuteurs ont bien insisté sur cette différence entre les premières, qui ont lieu une ou deux fois par an, et les secondes, qui peuvent être quotidiennes, sans qu’il soit possible de le contrôler et de les surveiller.

Les auteurs de cet amendement proposent de rendre obligatoire la notification de toute modification d’appareil. Il nous a paru qu’une telle obligation serait disproportionnée, car les modifications mineures peuvent être très nombreuses.

De plus, il est proposé que le Premier ministre puisse abroger sa décision sur le fondement d’une simple déclaration. Or, si la modification effectuée venait à mettre l’opérateur en situation de manquement aux conditions qui lui étaient imposées par l’autorisation, il serait quoi qu’il en soit sanctionné. Il est donc a priori inutile de prévoir une abrogation dans ce cas-là.

Enfin le II de cet amendement tend à réécrire l’alinéa 10 de l’article 1er dans un sens complètement contraire à la rédaction retenue par la commission.

Aussi, même si l’idée de la notification est intéressante, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 8.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. Pour des raisons identiques à celles qu’a excellemment invoquées Mme le rapporteur, l’avis du Gouvernement est favorable sur l’amendement n° 16 rectifié bis et défavorable sur l’amendement n° 8.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 16 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 8 n’a plus d’objet.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié quater est présenté par Mme Morhet-Richaud, MM. Chaize, Gremillet, Revet et Charon, Mme Imbert, M. D. Laurent, Mmes Gruny et Garriaud-Maylam et MM. B. Fournier et Milon.

L’amendement n° 3 rectifié septies est présenté par Mme Noël, M. Piednoir, Mme Lamure et MM. Charon, Pierre, Bonhomme et Laménie.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette liste énumère les différents appareils concernés en référence à la terminologie utilisée dans les standards internationaux associés aux réseaux radioélectriques mobiles de cinquième génération et de générations ultérieures.

La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié quater.

Mme Patricia Morhet-Richaud. Cet amendement vise à encadrer les appareils soumis à autorisation préalable à une liste précise et exhaustive d’équipements de cinquième génération et générations ultérieures, en se référant à la terminologie utilisée dans les standards internationaux associés aux réseaux mobiles de cinquième génération et de générations ultérieures.

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié septies.

Mme Sylviane Noël. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Je remercie tout d’abord Mme Morhet-Richaud et Mme Noël d’avoir rectifié chacune leur amendement, après notre débat en commission, de manière que l’un et l’autre soient examinés en séance publique, ce qui nous paraissait important.

Nos collègues proposent qu’il soit exigé que l’arrêté qui liste les appareils soit rédigé en des termes faisant référence à des normes techniques internationales.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous rassurer sur le fait que les termes de l’arrêté listant les équipements concernés seront dénués d’ambiguïté ? On pourrait d’ailleurs imaginer qu’un guide accompagnant l’arrêté soit publié, pour désigner les équipements concernés en utilisant les termes de normes techniques internationales. On l’a bien vu, dans le domaine de la 5G, le développement sera véritablement international.

Même si cette disposition peut paraître de nature réglementaire, la commission a donc émis un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. Nous sommes effectivement favorables à ce qu’il soit fait référence à la terminologie utilisée dans les standards internationaux associés aux réseaux 5G pour définir la liste des appareils dont l’exploitation sera soumise à autorisation préalable. En ce sens, nous avons déjà engagé des discussions techniques avec les opérateurs dans le cadre de l’élaboration des textes d’application de la proposition de loi.

Toutefois, on peut discuter de savoir si une disposition d’un tel niveau de précision relève de la loi ; il nous semble qu’elle relève plutôt du pouvoir réglementaire…

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis de sagesse sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié quater et 3 rectifié septies.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 9 rectifié est présenté par Mme Artigalas, MM. Mazuir, Boutant, Montaugé, Daunis et M. Bourquin, Mme Conconne, M. Courteau, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Todeschini, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mmes G. Jourda et Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 17 rectifié bis est présenté par MM. Collin, Artano et Cabanel, Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, MM. Requier, Roux, Vall et Delcros et Mme Saint-Pé.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 7, seconde phrase

Après le mot :

appareils

insérer les mots :

ainsi que le périmètre géographique d’exploitation

La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié.

Mme Viviane Artigalas. La commission, sur proposition de Mme le rapporteur, a supprimé la référence au périmètre géographique dans le dossier de demande d’autorisation, considérant que cette information ne devait en aucun cas permettre à l’État de s’immiscer dans la politique d’achat des opérateurs.

Nous sommes d’accord pour dire qu’il ne faut pas que, à terme, l’application du régime d’autorisation préalable permette à l’État d’imposer aux opérateurs le choix des équipementiers par zone géographique. Mais si nous approuvons cet objectif, il nous semble cependant que la suppression, au stade de l’instruction du dossier, de l’information relative au périmètre géographique d’exploitation n’est pas la bonne solution. En effet, comment instruire une demande d’autorisation sans connaître le lieu géographique du déploiement et de l’exploitation du réseau ?

Il est bien évident que la décision du Premier ministre d’autoriser, ou non, l’exploitation d’un réseau sera en partie guidée par la présence, ou non, de sites ou d’installations sensibles. Si les services de l’État ne disposent pas de cette information, cela pourrait les conduire au rejet d’une demande qui aurait vocation à s’appliquer sur tout le territoire.

Or un large consensus s’est exprimé dans le cadre de cette proposition de loi pour, justement, éviter l’exclusion totale d’un équipementier.

Aussi, au travers de notre amendement, nous proposons d’en revenir au texte de l’Assemblée nationale, qui prévoit que le dossier de demande d’autorisation remis par l’opérateur précise le lieu géographique d’exploitation pour lequel l’autorisation est sollicitée.

Nous défendrons un autre amendement tendant à préciser que l’autorisation ne doit pas, à terme, permettre à l’État d’imposer aux opérateurs une répartition et une pluralité d’équipements sur un ou plusieurs périmètres géographiques.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié bis.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement est identique à celui que vient de présenter Mme Artigalas. Et puisque ce qui est bon pour les Hautes-Pyrénées est bon pour le Lot, la Haute-Garonne et le Tarn-et-Garonne, je considère qu’il est défendu ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Ces amendements identiques tendent à revenir sur la position retenue par commission, qui a supprimé la référence au périmètre géographique en réponse à l’inquiétude des opérateurs, qui craignent, à juste titre, que l’État ne leur dicte leur politique d’achat.

Lors de son audition devant la commission, Mme la secrétaire d’État nous avait assurés du contraire. Mais la commission, ce n’est pas l’hémicycle, et peut-être va-t-elle nous expliquer quels sont les objectifs du Gouvernement.

Toujours est-il que la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements identiques, dont les dispositions, je le répète, en plus d’aller à l’exact opposé de la position de la commission, auraient pour conséquence de rigidifier les choses. Sans compter que certains opérateurs pourraient vouloir, ultérieurement, dans une autre zone géographique, déposer une nouvelle demande d’autorisation, laquelle pourrait alors être refusée, alors qu’elle a été acceptée ailleurs…

Enfin, comme vous l’avez indiqué, nous en débattrons de nouveau de ce problème lors de l’examen de votre amendement n° 10 rectifié, dont l’adoption pourrait apporter une clarification.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire dÉtat. Effectivement, lors de mon audition devant la commission, j’avais indiqué qu’il ne fallait pas confondre les objectifs.

Sur ce point-là, le Gouvernement est très clair : l’objectif est d’autoriser des équipements qui ne présentent pas de faille de sécurité, qui sont soumis à des conditions d’utilisation, etc. Certes, dans l’analyse des dossiers, la dimension géographique sera envisagée sur un plan technique, mais, très clairement, nous n’avons pas à orienter les opérateurs dans leur choix d’équipements sur le territoire.

En outre, ce ne serait pas très efficace : dans le déploiement de leurs équipements, les opérateurs adoptent des logiques de positionnement géographique requérant un minimum d’intervenants sur un même territoire, de façon à pouvoir monter plus rapidement de la 4G vers la 5G, à déployer plus rapidement leurs équipements et à faciliter leur maintenance.

Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Je vais maintenir mon amendement.

Je crois que nous ne nous comprenons pas bien, madame la secrétaire d’État : comment fera l’État pour savoir où vont se déployer les réseaux de la 5G si ce n’est pas indiqué dans le dossier ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 rectifié et 17 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Boutant et Mazuir, Mme Artigalas, M. Todeschini, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mmes G. Jourda et Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard, Montaugé, Daunis et M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le Commissariat aux communications électroniques de défense est consulté pour avis dans le cadre de l’examen du dossier de demande d’autorisation.

La parole est à M. Michel Boutant.

M. Michel Boutant. Si cet amendement était adopté, le Commissariat aux communications électroniques de défense, ou CCED, serait consulté pour avis sur l’octroi de l’autorisation préalable, en raison de ses missions et de ses compétences.

Rattaché au service de l’économie numérique à Bercy, ce commissariat a acquis en décembre 2017 une compétence nationale qui lui confie la responsabilité de l’ensemble des obligations légales des opérateurs.

À ce titre, il a notamment pour fonction de s’assurer que les équipementiers et les opérateurs mettent en place les systèmes d’interception et les équipements nécessaires aux techniques de renseignement.

Il est également chargé de définir et de faire réaliser des systèmes permettant d’assurer les interceptions légales de communications sur les réseaux des opérateurs, qu’il s’agisse d’interceptions requises par des magistrats ou d’interceptions de sécurité entrant dans le cadre de la protection de l’État et de ses intérêts économiques, de la sécurité nationale ou de la lutte contre le terrorisme.

En liaison étroite avec le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, le SGDSN, qu’il assiste de son expertise, il doit, selon le décret du 29 décembre 2018, assurer en situation de crise la coordination de l’action des différents opérateurs, afin que ceux-ci fournissent des prestations adaptées aux besoins des services ministériels, des entreprises ou des organismes placés sous tutelle et informer les autorités gouvernementales sur l’état des liaisons nationales et internationales de communications électroniques.

Son rôle dans le dispositif serait d’autant plus important si l’on en croit les conclusions du rapport que le coordinateur européen de lutte contre le terrorisme, Gilles de Kerchove, a remis au Conseil le 7 juin dernier.

Ce rapport souligne en effet les incidences de la mise en place de la 5G sur les autorités judiciaires et les forces de l’ordre, en particulier pour ce qui concerne l’interception légale de communications et l’urgence des mesures à prendre afin que cette capacité soit préservée.

Le rapport identifie trois risques liés au développement de la 5G : le chiffrage des communications de bout en bout, celui de la carte SIM et l’architecture virtuelle et fragmentée de la 5G.

Le coordinateur européen recommande ainsi de tenir compte des éléments suivants : l’enregistrement de tous les fournisseurs et l’obligation qui leur est faite d’extraire une copie de surveillance complète et non cryptée ; l’obligation de structurer leur réseau de manière que les données de localisation soient toujours disponibles ; enfin, l’obligation de coopérer, afin de permettre des mesures techniques comme l’identification du numéro de carte SIM. La mise en œuvre de ces recommandations entre, à l’évidence, dans le cadre du rôle dévolu au commissariat.

Vous l’aurez compris, tant de compétences et de fonctions en font un acteur tout désigné dans le processus d’examen des dossiers pour l’octroi d’une autorisation préalable.