M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. On sait le problème rencontré en ce moment avec General Electric, dont la direction affirme volontiers que les turbines à vapeur ne sont plus dans l’air du temps et qu’il faut aller vers l’utilisation des énergies renouvelables. Mais savez-vous, mes chers collègues, que les turbines à vapeur fabriquées par cette entreprise fonctionnent à l’hydrogène et n’émettent pas du tout de CO2 ?
La création d’une filière hydrogène propre est un impératif économique de première urgence. Lors d’une mission au Japon, nous avons pu constater à quelle vitesse ce pays est en train de se doter d’une véritable filière hydrogène. Encore faut-il qu’elle soit propre.
Dans le nord de la Franche-Comté, outre General Electric, il y a Faurecia, qui vient de mettre en place un institut international de l’hydrogène, en liaison avec des universités technologiques. Il faut saisir de telles possibilités de créer une véritable filière et, surtout, des écosystèmes industriels.
Madame la ministre, nous sommes dans l’urgence ! Si nous voulons que ce texte ne se résume pas à de l’affichage, nous devons impérativement avancer très vite et faire en sorte que chaque loi de finances prévoit des investissements extrêmement lourds en faveur de la mise en place de cette filière hydrogène qui nous fait cruellement défaut aujourd’hui. Certains pays voisins agissent très vite et très fort !
M. le président. L’amendement n° 131 rectifié, présenté par Mmes Lamure et Micouleau, M. Daubresse, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson, Mme Berthet, MM. D. Laurent et Frassa, Mme Estrosi Sassone, M. Danesi, Mmes Deromedi et Lavarde, MM. Genest et Chatillon, Mmes Noël et Bonfanti-Dossat, MM. Revet, Buffet, Vogel, Chaize et Vaspart, Mmes Ramond et Gruny, M. Sido, Mmes Di Folco et A.M. Bertrand et MM. Pierre, Mandelli, Rapin, Saury, Husson, Lefèvre et Laménie, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° D’atteindre un niveau de puissance commandable de 8 % de la puissance totale installée du parc de production électrique en 2030 ; à cette date, pour parvenir à cet objectif, les effacements industriels doivent représenter 5 % de puissance commandable et les effacements résidentiels doivent représenter 3 % de puissance commandable sur l’ensemble de la puissance totale installée du parc de production électrique. »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. L’évolution du mix de production d’électricité et des usages de consommation nécessite le développement de solutions de flexibilité pour remédier aux tensions sur le système électrique.
Le pilotage de la consommation de pointe par les effacements présente des atouts importants et multiples pour la transition énergétique : économies d’énergie, contribution à la sécurité d’approvisionnement. Or, malgré ces atouts majeurs, les effacements sont aujourd’hui très insuffisamment développés.
Le présent amendement vise donc à ajouter un objectif ambitieux de politique énergétique relatif au pilotage de la consommation dans les secteurs industriel et résidentiel, de manière à renforcer dès à présent les sources de flexibilité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. Le projet de PPE ne contient pas d’éléments chiffrés relatifs à la puissance commandable de la production électrique ou aux effacements industriels ou résidentiels d’ici à 2030. Dès lors, il est préférable de ne pas en introduire dans le code de l’énergie.
En revanche, mes chers collègues, je vous proposerai tout à l’heure d’adopter l’amendement n° 470, qui vise à inscrire dans le texte un objectif de capacités installées d’effacements industriels et tertiaires d’au moins 6,5 gigawatts en 2028.
La préoccupation parfaitement légitime de Mme Lamure sera satisfaite par ces précisions. C’est pourquoi la commission souhaite le retrait du présent amendement, faute de quoi son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. L’équilibre du système électrique peut effectivement être géré à l’aide de capacités pilotables, aussi bien au niveau de la production qu’à celui de la consommation.
Je suis certes favorable au développement des effacements de consommation ; néanmoins, en se focalisant sur la seule demande, les auteurs de cet amendement font l’impasse sur les capacités de production pilotables offertes, notamment, par le nucléaire, le gaz et une partie de l’hydroélectricité. Or ces sources d’énergie représenteront, de fait, beaucoup plus que 8 % de la puissance totale installée dans le parc de production en 2030.
Dès lors que vous visez surtout les effacements, madame la sénatrice, l’amendement n° 470 de la commission me semble répondre à votre préoccupation. Je vous propose donc de retirer l’amendement n° 131 rectifié.
M. le président. Madame Lamure, l’amendement n° 131 rectifié est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Lamure. Non, monsieur le président, je le retire au profit de l’amendement n° 470 de la commission.
M. le président. L’amendement n° 131 rectifié est retiré.
L’amendement n° 160, présenté par MM. M. Bourquin et Courteau, Mmes Préville, Artigalas et Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Montaugé, Tissot, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ….° De porter la part de fret ferroviaire et fluvial pour le transport terrestre de marchandises à hauteur de 40 % à l’horizon 2050. »
La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Le secteur des transports représente un tiers de la consommation finale d’énergie en France.
Dans le cadre des objectifs de la politique nationale énergétique, il est essentiel d’apporter un soutien particulier au développement du fret ferroviaire et fluvial, afin de pouvoir réduire les émissions de gaz à effet de serre et atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.
L’article 11 de la loi du 3 août 2009 sur la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement fixait comme objectif d’atteindre en 2022 une part modale de 25 % pour le fret non routier et non aérien. Or, en 2017, le transport ferroviaire et fluvial de marchandises ne représentait que 11,5 % du total, bien loin de cet objectif initial de 25 % fixé par la loi.
Nous proposons, par cet amendement, de fixer un objectif de 40 % en 2050, en cohérence avec l’article 51 du projet de loi d’orientation des mobilités, actuellement en discussion, qui prévoit d’améliorer l’efficacité des transports de marchandises afin de renforcer la compétitivité des territoires et des ports, d’accélérer le report modal et de diminuer l’impact environnemental du fret. Nous proposons de compléter l’article L. 100-4 du code de l’énergie et de fixer dans la loi cet objectif ambitieux de soutien au fret ferroviaire et fluvial.
Permettez-moi, madame la ministre, de vous dire combien j’ai le cœur gros de voir le train Perpignan-Rungis circuler régulièrement à vide. Vous êtes désormais ministre des transports et de l’environnement : vous avez le devoir de faire en sorte que ce train fonctionne de nouveau normalement et emporte les primeurs à Rungis, pour que 25 000 camions supplémentaires n’encombrent plus les routes et les autoroutes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur. L’amendement tend à introduire dans le code de l’énergie un objectif qui relève davantage de la politique des transports.
Par ailleurs, on notera que l’article 51 du projet de loi d’orientation des mobilités, en cours d’examen, prévoit déjà la définition d’une stratégie pour le développement du fret ferroviaire ; je pense que Mme la ministre sera plus complète que moi sur ce point.
Enfin, les aspects énergétiques du transport pourront être abordés dans le cadre du volet de la PPE portant sur la réduction de la consommation énergétique et des objectifs relatifs au carburant de la loi quinquennale.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Nous évoquerons ce sujet plus tard.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je partage bien évidemment l’objectif de favoriser le report modal, notamment pour le transport de marchandises.
Comme l’a dit M. le rapporteur, l’un des cinq programmes prioritaires de la programmation des infrastructures qui fait partie de la loi d’orientation des mobilités prévoit d’investir 2,3 milliards d’euros, dans les dix prochaines années, pour développer les modes de transport alternatifs à la route que sont le ferroviaire et le fluvial.
Pendant trop longtemps, on s’est donné des objectifs sans prévoir les leviers d’action. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Fabien Gay. C’est vrai ! C’est encore le cas avec l’article 1er !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Vous rappeliez les objectifs qui avaient été fixés par les lois Grenelle de l’environnement, monsieur le sénateur Gay. Je pourrais pour ma part vous parler d’une époque où l’on voulait doubler le trafic de fret ferroviaire, qui représentait alors 50 milliards de tonnes-kilomètre !
M. Roland Courteau. C’est vrai !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Aujourd’hui, retroussons-nous les manches, investissons ces 2,3 milliards d’euros pour permettre le développement du transport ferroviaire et fluvial de marchandises ! C’est ainsi que nous atteindrons cet objectif, très important compte tenu du poids des transports dans nos émissions de gaz à effet de serre.
Je ne me satisfais pas de la situation de la ligne Perpignan-Rungis et je regrette d’avoir été mise devant le fait accompli. Peut-être étiez-vous au courant de l’état des wagons, mais la ministre des transports n’en avait pas été informée. (Mme Cécile Cukierman s’exclame.) Je l’ai dit et je le redis : je ne me résous pas à ce que les marchandises soient transportées par la route.
Vous nous reprochez de faire rouler un train vide. Que n’auriez-vous pas dit si nous l’avions arrêté ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Pascal Savoldelli. Franchement !
Mme Cécile Cukierman. C’est de l’abus !
Mme Élisabeth Borne, ministre. La SNCF s’est engagée à faire rouler ce train, qui est à la disposition des chargeurs. Ceux-ci peuvent donc utiliser le service tel qu’il existe jusqu’à présent. Une réunion se tient aujourd’hui même à Perpignan avec tous les acteurs, y compris les représentants du cluster logistique d’Occitanie. Je remercie d’ailleurs la région Occitanie de son implication dans ce dossier. La bonne façon d’avancer, c’est que tout le monde se mette autour de la table et que des chargeurs utilisent ce train. Vous comprendrez qu’il n’entre pas dans mes prérogatives ou dans mes pouvoirs de ministre de charger des marchandises dans ce train, mais je compte bien que la réunion d’aujourd’hui permette d’aboutir !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Hier soir, Mme Wargon nous expliquait qu’il n’y avait pas lieu d’aborder la question du transport ferroviaire et fluvial de marchandises dans ce projet de loi. Or on voit bien que le traitement de la problématique de l’énergie et du climat est conditionné par la façon dont nous organiserons demain le transport, et plus particulièrement celui des marchandises.
Madame la ministre, on ne peut pas rester silencieux après vous avoir entendue tenir de tels propos. Il faut éviter les caricatures : je n’ai jamais défendu un service public inefficace ; je me bats pour des services qui répondent aux besoins des populations, aux besoins des entreprises, aux besoins du développement économique de notre pays. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics – le Gouvernement, l’État, les collectivités territoriales et, tout particulièrement en l’occurrence, les conseils régionaux – d’agir ensemble.
On ne peut pas se contenter, comme vous le faites, de se déclarer favorable au développement du fret ferroviaire et fluvial dans notre pays et attendre que, demain, des entrepreneurs se portent volontaires pour faire transporter leurs marchandises par le rail ou la voie d’eau.
Nous ne pouvons pas attendre, parce qu’il y a une urgence environnementale, sanitaire et en termes d’organisation logistique. À la lumière de ce qui se passe dans un certain nombre de pays, il apparaît que, lorsque le fret ferroviaire et le fret fluvial sont bien organisés, la logistique et, partant, la performance s’en trouvent améliorées.
Oui, il y a une urgence, et vous ne pouvez pas ne rien faire ! Comme mes collègues, je ne suis pas dogmatique et je ne me suis jamais opposée par principe aux aides aux entreprises. En revanche, nous tenons à ce qu’elles soient assorties de conditionnalités. Aujourd’hui, un certain nombre d’aides publiques sont accordées aux entreprises : conditionnons-les à une réorganisation de la logistique en faveur du fret ferroviaire et du fret fluvial. Vous verrez, cela donnera des résultats !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir au moins tenté de répondre. Mon rappel au règlement n’était donc pas hors sujet !
Quelle place souhaite-t-on donner au fret fluvial et au fret ferroviaire à l’horizon 2050 ? Je ne doute pas de votre sincérité lorsque vous annoncez 2,3 milliards d’euros d’investissements en faveur du développement du fret ferroviaire et fluvial, mais comment expliquer la situation actuelle de la ligne Perpignan-Rungis ? Le service est efficient, fiable, il n’encourt aucun reproche de la part des acteurs économiques du marché d’intérêt national de Rungis, que je connais bien. Il fonctionne six jours sur sept. Le coût de la rénovation de cette ligne a été estimé par Fret SNCF entre 25 millions et 30 millions d’euros. (Mme la ministre le conteste.) Vous contestez la SNCF, vous contestez M. Pepy, vous contestez tout le monde, mais, en définitive, on se retrouve avec un train fantôme !
Pour que Fret SNCF investisse une telle somme, il faut bien sûr qu’elle puisse s’appuyer sur un contrat et une pérennité de service. Ne dites pas qu’il n’y a pas de solution : il suffit de donner à Fret SNCF le monopole sur la ligne Perpignan-Rungis pour qu’elle investisse dans sa rénovation. Il n’y aura alors plus de train fantôme.
Madame la ministre, je n’ai guère apprécié que vous nous demandiez ce que nous aurions dit si la circulation du train avait été arrêtée. On n’est pas à Disneyland ! On ne regarde pas les trains fantômes passer à vide ! Vous avez les agents de la SNCF, vous avez les locomotives, vous avez les rails, vous avez tout ! Faites attention aux éléments de langage que l’on vous fournit !
Accordez à Fret SNCF le monopole sur la ligne Perpignan-Rungis et l’entreprise investira de 25 millions à 30 millions d’euros sur une durée de trente ans : on ne verra plus 250 camions circuler chaque jour sur nos routes pour transporter les primeurs à Rungis !
Les intentions, c’est bien ; les actes, c’est mieux, madame la ministre !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Pourquoi voit-on un train complètement vide circuler six jours sur sept ?
M. Bruno Sido. Cela ne se voit pas !
M. Martial Bourquin. C’est uniquement parce que la SNCF ne veut pas porter la responsabilité de l’arrêt de cette ligne !
M. Pascal Savoldelli. Oui !
Mme Esther Benbassa. Tout à fait !
M. Martial Bourquin. De son côté, le groupe Primever affirme que la SNCF annonçait depuis longtemps l’arrêt de la ligne le 12 juillet, et au plus tard le 31 décembre, en raison de la vétusté des wagons. En général, dans un tel cas, on prévoit plusieurs années à l’avance la réparation ou le remplacement des wagons.
Madame la ministre, vous avez hérité de la situation, dites-vous. Il n’est pas trop tard pour prendre ce dossier à bras-le-corps et dire à la SNCF que, en votre qualité de ministre, vous voulez que ce train roule,…
M. Martial Bourquin. … pour éviter que des milliers de camions supplémentaires ne circulent sur les routes.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Madame la ministre, vous nous dites qu’affirmer des intentions ne suffit pas, que vous préférez les actes. Mais vos actes, où sont-ils ?
Dans notre pays, la part de la voie d’eau et du ferroviaire dans le transport de marchandises est de près de 11 % : c’est, malheureusement, l’un des plus faibles taux en Europe. La Suisse est l’exemple d’un pays moderne où les marchandises sont transportées pour une large part autrement que par la route. Notre pays est, pour sa part, mal placé dans les classements internationaux en matière de logistique.
Madame la ministre, vous dites préférer les actes. Or le projet de loi d’orientation des mobilités ne traite que très peu de la question du transport des marchandises, l’objet principal de ce texte étant les mobilités du quotidien : aucune proposition en vue d’instaurer un nouveau modèle économique permettant d’envisager un véritable report modal vers la voie d’eau et le ferroviaire n’a été présentée.
Lors de l’examen du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, nous n’avons pas non plus avoir de véritable discussion sur le fret ferroviaire. Je rappelle que c’est pendant la navette qu’a été annoncée la filialisation de Fret SNCF, qui s’apparente presque à un abandon. La situation de la ligne Rungis-Perpignan apparaît à cet égard comme l’aveu de l’absence d’une politique du transport de marchandises par le train.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Lors de l’examen du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, vous nous avez dit, madame la ministre, que le fret ferroviaire n’était pas le sujet ; lors du débat sur la LOM, ce n’était pas non plus le sujet ; nous discutons aujourd’hui du projet de loi relatif à l’énergie et au climat, ce n’est toujours pas le sujet…
Madame la ministre, il me semble que nous étions tombés d’accord sur le fait qu’un défi est devant nous : le volume de marchandises transportées va tripler dans les vingt prochaines années. Aujourd’hui, la part du fret ferroviaire est à peine supérieure à 10 %. Si nous n’agissons pas, la tendance s’accentuera et nous aurons des problèmes.
Investir 2,3 milliards d’euros n’est pas suffisant. Sur les quelque trente gares de triage que compte notre pays, certaines sont en très mauvais état et sont menacées de fermeture, leur rénovation nécessitant des investissements lourds. Si, demain, on ferme les gares de triage, c’en sera fini du fret ferroviaire.
Par ailleurs, vous signez des deux mains des accords de libre-échange : il y en a treize en tout sur la table. Les marchandises vont donc affluer, notamment dans nos ports et nos aéroports. Or, nos ports n’étant pas connectés au réseau ferroviaire, la circulation des camions va s’intensifier.
Il faut relever ces défis de fond, mais vous n’apportez pas de réponse : 2,3 milliards d’euros, cela peut à peu près suffire à financer à un plan d’urgence, mais il faudra beaucoup plus d’argent si nous voulons porter la part du fret ferroviaire à 20 %.
Enfin, faut-il tout confier au privé ou conserver une maîtrise publique ? Depuis l’ouverture à la concurrence, la part du fret ferroviaire est passée de 16 % à 10 %. Par conséquent, l’ouverture au privé ne permet pas de relever ces défis d’avenir.
M. le président. L’amendement n° 470, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° De favoriser le pilotage de la production électrique, avec pour objectif l’atteinte de capacités installées d’effacements industriels et tertiaires d’au moins 6,5 gigawatts en 2028. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Gremillet, rapporteur. Il s’agit d’ajouter, parmi les objectifs de la politique énergétique, un objectif général de pilotage de la production, associé à un objectif quantitatif de développement des effacements conforme à la cible envisagée dans la future PPE.
Je veux dire à notre collègue Élisabeth Lamure que, comme je m’y étais engagé, cet amendement satisfait celui qu’elle a accepté de retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. J’ai eu l’honneur de commettre, voilà une dizaine d’années, un rapport d’information sur la pointe électrique – je crois d’ailleurs qu’il en reste quelques exemplaires… (Sourires.) Le sujet, simple en apparence, est en réalité très complexe.
Des entreprises ont été créées pour gérer la pointe électrique. On peut mettre à l’arrêt, totalement ou partiellement, certaines industries, voire seulement certaines machines dans certaines usines, mais les dispositifs existants ne sont pas rentables pour les industriels.
J’appelle donc votre attention, madame la ministre, sur le fait qu’il faut discuter avec les industriels pour définir le niveau raisonnable de rémunération à leur accorder pour qu’ils arrêtent leurs machines.
Il y a la pointe électrique, mais il y a aussi l’extrême pointe. La pointe électrique coûte très cher à produire : souvent, pour assurer la fourniture d’électricité en période de pointe ou d’extrême pointe, il faut soit démarrer des centrales à charbon, soit importer de l’électricité d’Allemagne – celle-ci étant produite, on le sait, à partir du lignite. (M. Roland Courteau approuve.)
Dans ce débat, on ne parle jamais du compteur Linky. Pourtant, l’un des objectifs de son déploiement était bien de permettre, à terme, aux particuliers de pratiquer l’effacement volontaire. Arrêter un radiateur électrique une demi-heure ou un réfrigérateur un quart d’heure est sans conséquence, mais cela compte en période d’extrême pointe. Le compteur Linky le permet.
Madame la ministre, on ne s’est pas suffisamment intéressé à cette fonctionnalité du compteur Linky. Il ne faut jamais oublier que le tertiaire et le logement représentent la plus grande part de la consommation d’électricité. Par conséquent, il y a là un gisement considérable d’économies d’énergie en période de pointe, quand la production d’électricité coûte extrêmement cher.
Cet amendement est excellent, je le voterai.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 88 rectifié, présenté par MM. Dantec, A. Bertrand, Cabanel, Collin, Corbisez, Gold, Jeansannetas, Labbé, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 29
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … À la sûreté nucléaire. Ce volet prévoit des scénarios alternatifs prenant en compte l’arrêt définitif d’un ou de plusieurs réacteurs nucléaires pour des raisons de sûreté. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Il s’agit de remédier à une lacune des scénarios. En effet, le cas où, après quarante ans de fonctionnement, un certain nombre de centrales nucléaires devraient être arrêtées n’a pas été prévu. Il arrive que les soudures soient moins solides que prévu… On ne peut pas exclure que nos centrales, toutes construites sur le même modèle, ne puissent pas être prolongées aussi facilement qu’on le croit au bout de quarante ans.
La PPE étant, par définition, un document prospectif, il est tout à fait essentiel de prendre en compte le cas où il serait nécessaire de fermer des centrales plus tôt que ne le prévoit la PPE.
Je rappelle que le président de l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, a déclaré devant les membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’Opecst, que la prolongation des centrales au-delà de quarante ans n’était pas encore acquise, du fait du niveau des exigences de sûreté.
Il est donc important que la PPE comporte un scénario alternatif, pour le cas où plusieurs tranches nucléaires devraient être fermées plus tôt que prévu. (M. Bruno Sido acquiesce.)
Je vois que M. Sido approuve ; je suis pour ma part d’accord avec ce qu’il a dit à propos du compteur Linky : on a effectivement manqué d’ambition !
Pour conclure, j’indique que la PPE prévoit le cas inverse de celui que j’ai évoqué. Cet amendement vise à rééquilibrer les choses entre les différents scénarios.
M. le président. L’amendement n° 40 rectifié ter, présenté par Mmes Préville et Lepage, MM. Tissot, Lurel, Antiste et Daudigny, Mme Grelet-Certenais, M. Temal, Mmes Jasmin et Monier et MM. Manable, Kerrouche, Jacques Bigot et Jacquin, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 33
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit des scénarios alternatifs prenant en compte l’arrêt définitif d’un ou de plusieurs réacteurs nucléaires pour des raisons de sûreté. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Il s’agit de tenir compte, en responsabilité, du principe de réalité, qui s’impose à nous.
Nos centrales sont vieillissantes ; de 2021, pour Tricastin I, à 2031, pour Chinon, trente-deux réacteurs vont être amenés à subir un quatrième réexamen périodique, parce qu’ils auront atteint quarante ans de fonctionnement. Bien évidemment, nous ne savons pas quel sera le résultat de ces réexamens.
Dans son rapport de 2018, dont je vous conseille la lecture, mes chers collègues, l’ASN indique qu’elle se prononcera en 2020 sur le programme d’EDF concernant l’ensemble des réacteurs de 900 mégawatts, soit trente-deux réacteurs sur cinquante-huit. Par la suite, elle encadrera la poursuite du fonctionnement de chaque réacteur par des prescriptions techniques pour réalisation de travaux.
Je me suis particulièrement intéressée à la centrale de Golfech, la plus proche de chez moi. Dans le même rapport, l’ASN indique que « ses performances en matière de sûreté nucléaire sont en retrait par rapport à l’appréciation générale que l’ASN porte sur EDF. Dans le domaine de la sûreté nucléaire, l’ASN constate que la qualité des opérations d’exploitation s’est détériorée par rapport aux années précédentes, ce qui se traduit par la déclaration de nombreux événements significatifs pour la sûreté, dont quatre classés au niveau 1 de l’échelle INES. »
Il nous faut donc être vigilants et prévoir dans la PPE un scénario alternatif permettant de prendre en compte l’arrêt définitif éventuel d’un ou de plusieurs réacteurs nucléaires pour raisons de sûreté.