M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, vous avez raison : l’issue de la première procédure de choix des internes de médecine générale laissait craindre de fortes tensions dans de nombreux services de pédiatrie de petite et de grande couronne du fait d’une répartition des internes qui n’était pas en adéquation avec les besoins de fonctionnement de ces services.
Plusieurs pistes ont fait l’objet de discussions avec l’ensemble des parties prenantes. La mise en évidence d’un problème de conformité lors de la première procédure de choix a conduit l’ARS Île-de-France à relancer en urgence la procédure. La commission de répartition s’est de nouveau réunie le 22 octobre dernier pour proposer un nombre de postes ajusté, une répartition plus équilibrée et plus pertinente, ainsi que des mesures de soutien aux internes affectés par ce changement.
Les nouveaux choix ont été faits le mardi 29 octobre, en accord avec les internes et leurs représentants : 182 internes ont choisi le stage de médecine générale en pédiatrie pour le semestre d’hiver 2019, contre 159 lors de la première procédure, soit 23 internes de plus, avec une répartition plus équilibrée entre Paris, la petite et la grande couronne.
L’objectif d’une meilleure adéquation entre les besoins des services de pédiatrie d’Île-de-France et les choix des internes a donc été atteint.
Toutefois, comme chaque semestre, des postes restent vacants dans certains établissements, le nombre de postes ouverts étant réglementairement supérieur au nombre d’internes susceptibles de les choisir.
Sur les territoires en situation de fragilité, notamment dans le nord des Yvelines, les organisations territoriales devront être adaptées, avec le soutien de l’ARS.
Enfin, conformément aux engagements pris par l’ARS, les 267 internes ayant changé de lieu de stage entre le premier et le second choix bénéficieront d’une prime exceptionnelle de 400 euros par mois durant toute la durée de leur stage.
pêche et obligation de débarquement
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 635, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Michel Canevet. L’obligation de débarquement des produits de la pêche, appelée également « interdiction de rejet », est particulièrement sensible. Dans un grand pays maritime comme le nôtre, il importe de porter une attention particulière aux questions relatives à la pêche.
L’interdiction de rejet entraîne, notamment, des difficultés en cas de quotas épuisés. De même, il est difficile de sélectionner dans les filets les espèces à rejeter. Il faut également tenir compte des contraintes de stockage sur les navires, des temps de tri, des opérations de manutention ou des adaptations nécessaires des bateaux dans la mise en œuvre de cette obligation, entrée en vigueur depuis le 1er janvier dernier. La question de l’adaptation des structures portuaires se pose également.
Le comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins du Finistère, qui a beaucoup travaillé sur le sujet, a formulé des propositions visant en particulier à adapter les quotas de pêche afin de tenir compte des risques de surpêche de certaines espèces, à améliorer la sélectivité des engins de pêche, à mettre en place des mécanismes d’exemption, d’évitement ou de fermeture de certaines zones de pêche et surtout à valoriser les rejets. Il est en effet inacceptable de pêcher des poissons qu’il faut ensuite rejeter.
Monsieur le ministre, quel est votre sentiment sur cette question ? Quelles adaptations peut-on envisager ? Peut-on infléchir la position de la Commission européenne ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, vous le savez, la France s’est opposée à la Commission européenne sur l’obligation de débarquement. Nous pensions que ce n’était pas utile, que cela ne ferait que poser une contrainte supplémentaire aux pêcheurs. Nous avons cependant pris acte de cette décision et l’obligation de débarquement fait désormais partie de la politique commune de la pêche (PCP).
Nous avons beaucoup échangé avec le comité départemental des pêches du Finistère, comme avec tous les comités départementaux et régionaux, ainsi qu’avec le comité national. Nous avons notamment travaillé sur la question des risques liés à cette obligation de débarquement.
Notre objectif est vraiment d’inciter à une meilleure sélectivité. Eu égard au contexte actuel, notamment à la future PCP et à la question du Brexit, ajouter des contraintes aux pêcheurs n’est pas une bonne chose.
Sans renier cet objectif, la France a beaucoup œuvré auprès du Conseil, à Bruxelles, pour minimiser les conséquences négatives de cette obligation sur l’activité des navires, notamment en matière de quotas limitants. Je crois que nous y sommes parvenus.
Ainsi, s’agissant des stocks pour lesquels les avis scientifiques préconisaient un TAC 0, les États membres ont mis en place, sous l’impulsion de la France, une bourse d’échanges obligatoires permettant aux producteurs des États ne disposant initialement pas de quotas de couvrir leurs prises accessoires inévitables. Cela me semble très important.
En outre, le travail appuyé de la France au cours des dernières années permet de profiter de nombreuses souplesses dans la mise en œuvre stricte de l’obligation de débarquement : exemption de minimis, exemption pour haut taux de survie autorisant le rejet de certaines espèces dans des pêcheries identifiées, flexibilité interzonale, flexibilité interespèce…
Ce travail s’est fait avec les représentants des professionnels, que vous voyez beaucoup. Comme vous l’avez souligné, le ministère et moi-même nous sommes beaucoup inspirés des pistes identifiées par le comité départemental des pêches du Finistère.
L’enjeu consiste aujourd’hui à accompagner les professionnels. Je pense notamment à la nécessité, pour les producteurs, de déclarer systématiquement les rejets à leur vraie hauteur. Nous travaillons sur cette question.
Je pense également aux volumes des anciens rejets de poissons ayant la taille commerciale et désormais inclus dans le calcul des TAC.
Nous faisons tout pour essayer de répondre positivement aux contraintes et aux demandes des pêcheurs.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour la réplique.
M. Michel Canevet. Je voudrais remercier le ministre que je sais très sensibilisé sur ce sujet extrêmement important dans le Finistère et pour la pêche en général. Je l’invite à venir dialoguer avec les professionnels dans le Finistère. Je pense que cet échange sera fructueux.
pêche du saumon dans l’adour
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 759, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Max Brisson. Chaque année, le département des Pyrénées-Atlantiques est le théâtre de tensions entre pêcheurs amateurs installés sur les bords des gaves d’Oloron et de Pau et pêcheurs professionnels qui exercent leur activité dans l’estuaire de l’Adour.
Deux points de vue s’opposent dans un climat de moins en moins serein. À l’embouchure, la pêche, supposée trop forte, empêcherait le saumon de remonter les gaves. Les associations de pêcheurs amateurs et de défense de l’environnement dénoncent un risque pour le renouvellement de l’espèce et les maires de la communauté de communes Béarn des Gaves une menace sur une filière touristique majeure.
Gestion rigoureuse, pratiques vertueuses et déclaration systématique de la totalité des captures, les pêcheurs professionnels répliquent que la menace sur le renouvellement de l’espèce relève du fantasme et que les règles sont respectées.
Le 25 juin dernier, en l’absence d’une autorisation du concessionnaire du port, à savoir le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, le tribunal administratif de Pau enjoignait le préfet des Pyrénées-Atlantiques de mettre en œuvre son pouvoir de police pour que la pêche aux filets dérivants dans le port de Bayonne cesse. En aucun cas, la décision de la juridiction administrative ne se fondait sur une analyse de la gestion des stocks.
En juillet, le comité interdépartemental des pêches publiait une étude selon laquelle le stock de saumons en migration dans l’Adour se portait bien et ne nécessitait pas de mesures de gestion supplémentaires.
Monsieur le ministre, pour vous qui étiez venu au port de Saint-Jean-de-Luz-Ciboure voilà un an jour pour jour et qui connaissez bien ce territoire et ses acteurs, il n’est pas besoin de grands mots pour comprendre la difficulté de la situation. Déjà, en avril, je vous demandais qu’une étude indépendante soit mandatée par l’État afin d’objectiver la situation en termes de ressources, d’atténuer ces tensions croissantes et de rétablir un peu de sérénité.
Au regard des derniers événements, je renouvelle ma demande. Pouvez-vous vous engager à ce qu’une étude objective soit lancée afin de déterminer dans quelle mesure le renouvellement du saumon est réellement menacé dans l’Adour et dans les gaves ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur Max Brisson, votre question sur l’organisation de la pêche du saumon dans les fleuves côtiers du Pays basque et dans leurs embouchures, et notamment dans celle de l’Adour, a bien évidemment retenu toute mon attention.
Comme vous l’avez souligné, en juin dernier, une décision de justice a interdit la pêche dans le port de commerce de Bayonne. Le tribunal exige des préfets qu’ils fassent appliquer les dispositions du code de transport interdisant la pêche dans les ports de commerce, sauf dérogation du gestionnaire du port – en l’espèce, la région Nouvelle-Aquitaine.
Les services de l’État, au niveau national comme au niveau départemental, se sont beaucoup impliqués dans ce dossier, avec un rôle important donné au Comité de gestion des poissons migrateurs, commission administrative compétente pour régler les usages et organiser la concertation. Ces acteurs locaux mettent en œuvre la gestion des pêcheries de saumon, dans le cadre des directives internationales de l’Organisation de conservation du saumon de l’Atlantique Nord et de la réglementation nationale. Si je le précise, c’est parce qu’il y a des contraintes et des règles incontournables.
Vous soulevez le besoin d’information pour apaiser les tensions entre les pêcheurs amateurs et les pêcheurs professionnels, et vous avez entièrement raison. Je pense qu’il faut renforcer nos connaissances scientifiques pour objectiver la situation de l’état des stocks.
D’après les suivis réalisés localement, dans le cadre du Comité de gestion des poissons migrateurs, la situation actuelle montre de façon objective une amélioration de l’état de la population des saumons sur l’Adour, vous l’avez dit.
Vous souhaitez la réalisation d’une étude permettant une meilleure connaissance du saumon, qui pourrait inclure un volet sur la conciliation des activités de pêche professionnelle et de loisirs. Je suis favorable à une telle étude, qui me paraît intéressante, car elle permettrait de disposer de données objectives, une bonne fois pour toutes, allais-je dire.
Toutefois, l’initiative doit venir des acteurs locaux, le Gouvernement n’étant pas en capacité d’agir directement. J’en ai discuté avec le président du Comité départemental des pêches de votre département, et peux évoquer de nouveau le sujet avec la région et la CCI. Je fais pleinement confiance aux services de l’État engagés localement dans un dialogue constructif pour essayer de mettre en place cette étude, avec le Comité départemental des pêches, le propriétaire et le concessionnaire.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir bien séparé ce qui relève, d’une part, du code de transport et, d’autre part, de la gestion de la ressource.
Je vous remercie également de soutenir l’étude que j’ai évoquée, en vous appuyant sur votre connaissance extrêmement fine de ce dossier particulier.
Je compte sur vous et les services de l’État pour fédérer les acteurs, afin de réaliser cette étude, nécessaire pour apaiser les tensions.
crise de la filière forestière en moselle et dans le grand est
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 974, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, l’été dernier, les forêts du Grand Est, particulièrement du massif vosgien, ont été les victimes d’attaques d’un insecte xylophage qui prolifère lors des étés chauds et secs : le scolyte.
En 2018, des milliers de mètres cubes de bois ont dû être abattus dès les premiers signes d’attaque et mis en vente. Mais l’afflux massif de résineux a fait baisser des deux tiers le prix moyen du mètre cube.
Malheureusement, l’hiver 2018-2019 a été clément, et l’été 2019 encore plus chaud et sec que celui de 2018. Aujourd’hui, l’Office national des forêts (ONF) parle de centaines de milliers de mètres cubes de bois à traiter, soit des dizaines de milliers d’arbres à couper au plus vite et à commercialiser.
C’est une véritable tempête silencieuse. Le volume est d’ailleurs supérieur à celui qui avait été constaté à l’issue des tempêtes de Noël 1999.
Cependant, il n’y a aucun moyen de lutter efficacement contre cet insecte, vivant sous l’écorce des arbres, si ce n’est un hiver froid et des arbres capables de se défendre en produisant de la sève et des terpènes à haute concentration, s’ils ne souffrent pas de stress hydrique. Vous en conviendrez, à l’avenir, ces conditions d’absence de sécheresse et de froid hivernal risquent d’être plus difficiles à réunir. Aussi, dans plusieurs articles de presse, l’ONF annonce à court ou moyen terme la disparition de tous les résineux dans les forêts situées à moins de 500 mètres d’altitude.
En outre, la disparition des résineux entraîne une fragilisation de l’ensemble du biotope forestier. Ainsi, de nombreux feuillus souffrent à leur tour de l’assèchement du sol consécutif à la disparition des résineux et, stressés, sont eux aussi sensibles à différentes attaques. Les frênes de Moselle sont touchés par la chalarose, les hêtres, particulièrement sensibles à la sécheresse, souffrent beaucoup et meurent également nombreux.
En Moselle, le président des communes forestières, Michaël Weber, et le président des propriétaires forestiers privés, Didier Daclin, ont attiré mon attention sur les pertes financières très importantes déjà subies et à venir. Pour certaines communes, et parfois pour certains propriétaires ou groupes de propriétaires, cela se chiffre en centaines de milliers d’euros.
Aujourd’hui, du producteur au transformateur scieur, toute la filière bois est profondément touchée. L’État n’est pas en reste, puisque nous sommes propriétaires collectivement de près de 70 % des forêts du Grand Est, et donc touchés par cette catastrophe.
Aussi, monsieur le ministre je voudrais savoir quelles mesures d’urgence vous comptez mettre en place pour accompagner la filière, notamment les propriétaires publics comme privés, face à ce désastre sanitaire, au-delà des 16 millions d’euros débloqués dernièrement et bien insuffisants selon tous les acteurs. Allez-vous, comme l’a fait Jean Glavany en 1999, mettre en place un grand plan d’aides pluriannuelles, avec le concours financier du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural) et du FSUE (Fonds de solidarité de l’Union européenne) ? Allez-vous soutenir les propriétaires dans leur nécessaire effort de repeuplement de leurs forêts à l’heure des bouleversements climatiques ?
M. le président. Il faut conclure.
M. Jean-Marc Todeschini. Enfin, quel rôle entendez-vous faire jouer à l’ONF, dont l’expérience et l’expertise sont indispensables, au moment même où votre gouvernement semble vouloir le démanteler ?
M. le président. Mon cher collègue, vous avez dépassé votre temps de parole de quarante secondes.
La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Le Gouvernement n’a absolument pas la volonté de démanteler l’ONF, bien au contraire, je l’ai dit publiquement. L’ONF doit être au cœur du dispositif forestier de notre pays. Il en a les moyens, aussi bien par sa connaissance et son histoire que par ses agents.
Avant de répondre à votre question, monsieur le sénateur, cher Jean-Marc Todeschini, j’ai une pensée pour Philippe Leroy, ancien sénateur de votre département, acteur incontournable pour tout ce qui concerne la forêt, qui s’était beaucoup investi dans cette filière.
Vous l’avez dit, les scolytes sont un drame absolu. Ils ravagent les forêts françaises. Aujourd’hui, ce sont 7 000 hectares qui sont touchés. Demain, ce sera peut-être plus. Vous l’avez dit également, s’il y avait un hiver très froid, les choses pourraient se réguler. Toutefois, on le sait bien, le réchauffement climatique complique singulièrement la situation.
Sur les autres essences, notamment feuillues, nous n’avons pour l’instant qu’un aperçu, qu’il convient de consolider, de l’impact de la sécheresse. D’ailleurs, selon un récent rapport du GIEC, la forêt française, bijou absolu permettant de capter sans fin du carbone, est constituée d’essences qui ne sont peut-être pas totalement adaptées à la lutte contre le réchauffement climatique.
C’est la raison pour laquelle j’ai réuni, voilà quelques semaines, le Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB), ce qui a permis de mettre en place des mesures exceptionnelles, que vous avez rappelées : 16 millions d’euros ont été immédiatement octroyés. Parallèlement, j’ai demandé à ce que nous mettions en œuvre, pour le mois de mars, un plan stratégique pour la forêt et le bois, qui doit venir du terrain. Je me suis donc tourné vers les communes forestières et les propriétaires privés, par le biais du Centre national de la propriété forestière (CNPF). Je réunirai de nouveau le CSFB au mois de mars pour faire le bilan.
La crise des scolytes doit nous interroger sur les conséquences du changement climatique. C’est l’une des raisons pour lesquelles le Président de la République a réuni jeudi dernier le Conseil de défense écologique, qui s’est notamment penché sur le problème de la forêt. La France présentera un plan stratégique de défense de nos forêts, lesquelles constituent un bien précieux pour le captage du carbone. Elles doivent répondre aux enjeux du réchauffement climatique. Surtout, nous devons prendre en compte la maladie que vous avez évoquée et la difficulté des propriétaires forestiers.
prise en charge des mineurs en situation de handicap
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la question n° 972, transmise à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sylvie Vermeillet. Les directives nationales visent à une scolarisation en milieu ordinaire d’au moins 80 % des mineurs avec troubles du comportement. Il s’agit de sortir les mineurs des établissements relevant de l’agence régionale de santé (ARS) pour un hébergement avec une scolarisation en établissement classique.
L’ARS a souhaité que les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) signent une convention pour mettre en œuvre le dispositif d’interventions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques (ITEP). Celui-ci permet aux directeurs des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques de sortir les mineurs de leur structure pour qu’ils restent à domicile avec intervention d’un service d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad).
La MDPH du Jura a refusé de signer cette convention. En effet, la mise en œuvre d’une telle disposition aura des conséquences financières majeures pour les conseils départementaux. Ces directives vont dans le bon sens, puisqu’elles facilitent l’intégration des enfants handicapés, et les collectivités s’organiseront en conséquence. Toutefois, les conseils départementaux s’inquiètent de l’augmentation des dépenses obligatoires liées à l’application de ces mesures.
Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous me dire si l’État a prévu des compensations financières pour les conseils départementaux ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, je souhaite tout d’abord excuser Mme Sophie Cluzel, qui ne peut pas être là ce matin. Je me contenterai de lire la réponse qu’elle m’a transmise.
Il n’y a pas de report de charges sur les collectivités dans le cadre du fonctionnement en dispositif ITEP (Ditep).
Permettez-moi de redire que nous devons garantir aux personnes en situation de handicap une participation pleine et entière à l’exercice de leur citoyenneté.
Pour répondre à cette exigence, si légitime, les politiques publiques du handicap ont pris une orientation résolument inclusive, dans la continuité des avancées portées par la loi du 11 février 2005, la grande loi sur le handicap voulue par le président Chirac.
D’une manière générale, la mise en œuvre d’une politique inclusive repose sur deux principes fondamentaux : d’une part, l’appui sur les ressources du milieu ordinaire, que ce soit l’école, le logement, l’emploi ou encore la santé ; d’autre part, l’appui sur l’évolution des pratiques d’accompagnement mises en œuvre par les opérateurs médico-sociaux, dont l’expertise, importante et tout à fait nécessaire, doit permettre de rendre possible le choix des personnes, selon des solutions adaptées. Ce dernier point n’inclut nullement la disparition des moyens médico-sociaux existants. Il vise à les déployer de manière différenciée au plus près des besoins des personnes et selon une capacité d’intervention graduée.
Le fonctionnement en Ditep s’inscrit complètement dans cette orientation.
Ce dispositif favorise une meilleure prise en charge des besoins des jeunes vers le milieu ordinaire. Il s’adresse à un public présentant des difficultés psychologiques, mais dont les capacités cognitives sont préservées, et vise à faciliter les passages entre les modalités d’accompagnement proposées par les ITEP et les Sessad, sans devoir repasser par les MDPH – cela fait beaucoup d’acronymes… Cette souplesse répond donc à l’obligation, qui nous incombe, de simplifier la vie des personnes handicapées et de prévenir les ruptures de parcours scolaires.
En Bourgogne-Franche-Comté, une convention DITEP régionale a été signée en 2018 par l’ensemble des partenaires signataires obligatoires de la convention, à l’exception de la MDPH du Jura et de la MDPH de la Côte-d’Or, et ce malgré le travail partenarial mené depuis 2018 avec les MDPH, l’ARS, les services académiques, les organismes de protection sociale et les gestionnaires d’ITEP et Sessad.
Un comité stratégique du parcours handicap assure le suivi de la mise en œuvre de la convention et élargira le périmètre de celle-ci aux conseils départementaux, à la protection judiciaire de la jeunesse et à la pédopsychiatrie. Aussi, je ne peux qu’inviter la MDPH du Jura à rejoindre ce dispositif conventionnel, dont la réussite est très largement saluée.
Telle est, madame la sénatrice, la réponse que je pouvais vous apporter au nom de la secrétaire d’État.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour la réplique.
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le ministre, je ne suis pas sûre que votre réponse suffise à convaincre l’assemblée départementale du Jura, mais je vous remercie d’avoir essayé.
Le conseil départemental du Jura m’a fait part des nouvelles charges induites par cette mesure. La liste des charges transférées ou imposées aux conseils départementaux sans compensation suffisante est lourde. Sans contester le bien-fondé de la mesure de scolarisation des mineurs en situation de handicap en milieu ordinaire, il convient au minimum d’évaluer et de compenser les nouvelles charges induites pour les conseils départementaux.
intentions du groupe bridgestone pour le site de béthune
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 945, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ma question porte sur le devenir du site de fabrication de pneumatiques Bridgestone situé à Béthune, dans le Pas-de-Calais.
Depuis un an, l’attitude du groupe japonais laisse craindre le pire. A-t-il l’intention de fermer le site de Béthune, qui emploie encore plus de 1 000 salariés ?
Dès le début des années 2000, le groupe a développé ses activités en Europe de l’Est, dans des usines largement financées par l’Union européenne. Il continue à y consacrer l’essentiel de ses investissements. Dans le même temps, il met en concurrence ses sites d’Europe de l’Ouest. Aujourd’hui, c’est celui de Béthune qui est malheureusement visé par cette logique. Accusé d’être le moins rentable du groupe, il est privé des investissements nécessaires à sa modernisation.
Dans un contexte où le marché est en crise, comme en atteste l’annonce de la fermeture de l’usine Michelin de La Roche-sur-Yon, la direction de Bridgestone a décidé de ramener le « ticket », c’est-à-dire l’objectif de production, de 18 000 pneus par jour en 2018 à 9 000 à la fin de l’année 2019. Une centaine d’emplois intérimaires est en passe d’être supprimée.
Je sais que le Gouvernement n’est pas sans rien faire. Même le Président de la République a échangé sur ce sujet avec le Premier ministre japonais au printemps dernier. Plus récemment, plusieurs réunions à haut niveau se sont tenues, à Bercy, avec M. Paolo Ferrari, président européen du groupe. Mais rien ne transpire de ces échanges. Ce silence contribue à installer une psychose anxiogène chez les salariés et les élus du territoire. Le sort de Goodyear à Amiens est dans toutes les mémoires.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur la situation difficile de l’usine de Béthune du groupe Bridgestone.
Comme vous le rappelez, ce dossier a été particulièrement suivi par le Gouvernement, qui avait salué l’accord collectif de performance trouvé fin avril-début mai, grâce d’ailleurs à l’action de ses services et aux nombreux contacts qui ont été pris, y compris avec l’actionnaire japonais.
Aux termes de cet accord, l’actionnaire s’engageait à investir massivement sur le site et à préserver les quelque 1 000 emplois du site. Cet accord a été soumis à un référendum des salariés. Il a malheureusement été rejeté. Il est particulièrement regrettable que des informations parfois erronées aient été relayées au moment de la présentation de cet accord de performance collective, alors même qu’une issue positive aurait permis la réalisation d’investissements nécessaires sur le site, l’assurance d’une charge correcte de l’usine jusqu’en 2021 et une garantie de l’emploi associée.
Un accord aurait été aussi utile pour démontrer à la direction japonaise la volonté de toutes les parties prenantes d’aller de l’avant. Comme vous pouvez l’imaginer, nous avons maintenu le contact avec l’actionnaire Bridgestone. J’ai moi-même saisi M. Ferrari, que vous avez évoqué.
Sans cet accord, nous sommes dans une conjoncture délicate. Le marché du pneumatique en France et en Europe est particulièrement difficile : les Chinois détenaient 5 % du marché voilà dix ans ; ils en détiennent 30 % aujourd’hui, avec des prix drastiquement inférieurs à ceux des productions européennes. Malheureusement, ce sont les consommateurs qui structurent le marché et font le choix d’utiliser des pneus chinois.
Les échanges se poursuivent entre la direction et mes équipes, en liaison avec la région Hauts-de-France. À ce stade, aucun des éléments transmis par les actionnaires ne permet d’affirmer que le groupe Bridgestone souhaite fermer l’usine de Béthune.
En tout état de cause, nous sommes mobilisés aux côtés des salariés et des élus du territoire pour donner à l’entreprise un avenir. J’appelle donc chacun à prendre ses responsabilités pour que le site renoue avec un climat social apaisé permettant de trouver une issue avec l’actionnaire japonais.