Mme la présidente. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. le président de la commission.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Je remercie les représentants des groupes qui ont apporté leur soutien à cette proposition de loi, laquelle, vous vous en souvenez, mes chers collègues, est issue d’un travail mené par la commission des lois, sous la houlette de Marc-Philippe Daubresse, pour évaluer les mesures prises pour la surveillance des terroristes.
Je m’adresse maintenant aux représentants des groupes qui ne voteront pas cette proposition de loi. Je comprends leur point de vue. À dire vrai, je comprends moins bien celui de nos collègues du groupe socialiste. En effet, si nous n’adoptons pas ce texte, les instruments aux mains de l’État pour surveiller les terroristes sortis de prison resteront au nombre de deux :…
M. Jean-Pierre Sueur. Les Micas !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. … d’une part, les mesures prises dans le cadre de la loi Collomb pour la surveillance des personnes radicalisées – ce sont des mesures administratives sans contrôle du juge ; d’autre part, les mesures prises dans le cadre de la loi relative au renseignement. Je rappelle que ce texte a été adopté en 2015, sur l’initiative d’un gouvernement socialiste.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous l’avons rappelé !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. J’en étais le rapporteur. Il permet à l’État de mettre en œuvre des mesures très restrictives en matière d’exercice des libertés et très intrusives en matière de vie privée.
M. Jean-Pierre Sueur. Oui, et nous l’avons voté !
Mme Éliane Assassi. Nous, nous ne l’avons pas voté ! Nous sommes cohérents !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Mes chers collègues, si vous ne votez pas la proposition de loi qui nous est aujourd’hui soumise, c’est que vous préférez des mesures administratives à des mesures contrôlées par le juge judiciaire. Je comprends que vous les préfériez, puisque c’est le gouvernement que vous souteniez qui les avait proposées, et vous avez bien évidemment contribué à leur adoption par votre vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Arnaud de Belenet applaudit également.)
M. Jean-Pierre Sueur. Ces mesures s’appliquent, et nous en sommes fiers !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je n’avais pas l’intention d’intervenir en explication de vote, mais j’y suis invité…
Le groupe socialiste a voté la loi relative au renseignement. Ce texte, qui a par ailleurs créé la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, laquelle comptait dans son collège une éminente représentante du Sénat en la personne de Catherine Troendlé, a fait ses preuves.
Comme je l’ai souligné voilà deux jours lors de l’examen de ce texte, monsieur le président de la commission des lois, nous considérons que, par rapport aux mesures qui existent déjà, les nouvelles dispositions prévues risquent de provoquer une sorte d’empilement et une dispersion des responsabilités. Je ne suis pas le seul à le dire : dans son avis, le Conseil d’État a demandé une clarification et une évaluation des mesures déjà prises. D’ailleurs, le garde des sceaux a repris une partie de cet avis dans son discours.
Face aux risques que représente le terrorisme, ce qui importe, ce sont les moyens pour suivre les personnes représentant un danger. Je rappelle que les mesures prévues par cette proposition de loi ne concernent que les sortants de prison condamnés pour terrorisme ; or ils ne sont malheureusement pas les seuls à présenter un risque.
Par ailleurs, nous sommes attachés à la proportionnalité entre le risque que représentent ces personnes et les mesures qui peuvent leur être appliquées. Avec le texte que vous nous invitez à voter, compte tenu de l’empilement des textes et de la confusion des responsabilités, cette proportionnalité n’est pas respectée. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes à l’issue de leur peine.
(La proposition de loi est adoptée.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Bravo !
Mme la présidente. Mes chers collègues – je vous remercie tous de vos belles paroles –, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Loi de finances rectificative pour 2020
Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2020 (texte de la commission n° 658, rapport n° 657).
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous rappelle que le port du masque est obligatoire dans l’ensemble des salles de réunion et des circulations du Sénat. Il vous est donc demandé de bien vouloir en porter un dans l’hémicycle.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre – j’ai l’impression que nous nous voyons souvent en ce moment, tout comme un certain nombre de collègues, que je salue et qui étaient présents ici ce week-end –, nous voici réunis cet après-midi pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) relative au troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 (PLFR 3).
Le Sénat vient d’examiner au pas de course ce troisième collectif budgétaire : le texte qui nous a été transmis, passé de 19 à 73 articles à l’Assemblée nationale, a été examiné en commission des finances le mercredi 15 juillet et en séance du jeudi 16 au dimanche 19 juillet dans la nuit. Nous avons cependant fait un travail long, sérieux et, même si nous avons parfois été un peu rapides, nous avons eu des débats les plus approfondis possible tout au long de ces trois jours.
J’avais dit au début de l’examen de ce troisième PLFR qu’il n’était pas une surprise, compte tenu de la dégradation de nos comptes avec un recul du PIB de 11 %, ce qui nécessitait une amplification des mesures de soutien. En clair, la crise est là, et le rôle du Parlement, en cette fin juillet, est d’être au rendez-vous pour sauver notre économie.
Indéniablement, nous avions un principal point de désaccord, monsieur le ministre. Malgré la réussite de cette CMP, il demeure : c’est non pas ce que vous présentiez dans ce PLFR qui nous gênait, mais ce qui ne s’y trouvait pas, à savoir les mesures de relance. Je considère que le plan de soutien du Gouvernement dans ce PLFR aurait dû être amplifié sans attendre la mise en œuvre d’un plan de relance à la rentrée – à l’automne, nous a-t-on dit ; puis, finalement, à la fin de l’année dans le projet de loi de finances… –, et ce afin de conforter la reprise. Je pensais, et je pense toujours, que les ménages et les entreprises ont besoin dès à présent de visibilité pour prendre leurs décisions en matière d’investissement et de consommation.
Pour autant, au-delà de ce sujet – nous avons pris date sur la relance – et dans le même esprit que celui qui nous a guidés lors du vote des PLFR 1 et 2, le Sénat a, en conscience et responsabilité, voté, dès la première lecture, les mesures de soutien du Gouvernement et le renforcement des dispositifs qui ont démontré leur utilité : prêts garantis par l’État, fonds de solidarité, mais aussi compensation des pertes des collectivités territoriales. Certes, nous souhaitions des améliorations de tel ou tel dispositif, mais, sur le fond, nous étions d’accord. Laurent Saint-Martin et moi-même avons ainsi travaillé dans un esprit constructif et nous avons permis l’élaboration d’un texte adopté en commission mixte paritaire mardi dernier.
Ce texte est évidemment un compromis. Comme dans tout compromis, nous pouvons regretter l’absence de telle ou telle mesure ou bien que l’on ne soit pas parvenu à aller plus loin sur tel ou tel sujet. Mais il me revient maintenant de vous présenter les nombreux points d’accord auxquels nous sommes parvenus et ayant permis de maintenir dans le texte final de nombreux et importants apports du Sénat.
Des solutions ont été trouvées pour deux des principales réserves du Sénat sur le texte du Gouvernement.
Premièrement, le texte de la CMP améliore la compensation des pertes de recettes des collectivités territoriales grâce aux apports du Sénat.
Tout d’abord, s’agissant des départements, est conservée la clause « de retour à meilleure fortune » – on peut la qualifier ainsi – aux termes de laquelle les départements ne seront tenus de rembourser les avances perçues qu’à compter de l’année suivant le retour d’un produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) au moins équivalent à celui de l’année 2019. Demander aux départements de procéder à de tels remboursements sans avoir retrouvé un niveau de DMTO suffisant était évidemment une aberration. Nous sommes donc parvenus à une solution satisfaisante concernant les ressources des départements.
Ensuite, il est désormais établi que l’enveloppe de 1 milliard d’euros attribuée au titre de la DSIL (dotation de soutien à l’investissement local) pourra également servir, notamment dans les territoires ruraux, à financer des projets en principe couverts par la DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux). C’était une demande forte du Sénat.
Par ailleurs, une compensation, certes imparfaite – Roger Karoutchi nous en parlera sans doute –, a été prévue pour les pertes de recettes d’Île-de-France Mobilités et, conformément au souhait de Christine Lavarde, des EPT de la métropole du Grand Paris.
Concernant Île-de-France Mobilités, la commission mixte paritaire, je m’en réjouis, a retenu la modification introduite par le Sénat des critères de calcul de la compensation octroyée, en prévoyant de tenir compte des hausses de taux intervenues entre 2017 et 2019 pour le financement du passe Navigo unique. Cela devrait permettre d’augmenter significativement la compensation d’Île-de-France Mobilités. Il est toutefois fort regrettable que l’accord n’ait pas permis de renforcer davantage l’acompte versé en 2020 par l’État, au risque que les transports publics parisiens se voient privés des investissements pourtant indispensables.
Personne ne peut dire dans cette assemblée que les Franciliens voyagent dans de bonnes conditions et que le matériel ne doit pas être renouvelé. Si l’absence de compensation ou l’insuffisance de compensation par l’État devait entraîner l’arrêt des commandes, cela aurait bien sûr des conséquences pour les Franciliens, qui continueraient de voyager dans de mauvaises conditions, mais également pour l’emploi, car les commandes de matériels sont source d’emplois, y compris dans nos régions.
Deuxièmement, afin de renforcer le soutien aux entreprises les plus fragilisées – c’était important pour le Sénat –, le dispositif de remises de dettes partielles prévu à l’article 18 a été étendu à l’ensemble des entreprises de moins de 250 salariés qui auraient perdu plus de 50 % de leur chiffre d’affaires. Je rappelle que, avant son examen au Sénat, cette possibilité était réservée aux entreprises de moins de 50 salariés. Cette avancée significative, sur proposition du Sénat, permet de couvrir toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité.
La CMP a également conservé, bien évidemment, les importantes hausses de crédits votées par le Sénat, sur l’initiative du Gouvernement. Je pense aux crédits supplémentaires pour le renouvellement du parc automobile de la police et de la gendarmerie nationales, à hauteur de 60 millions d’euros – sujet cher à notre rapporteur spécial Philippe Dominati. Je pense également à l’augmentation des moyens des Crous, pour 50 millions d’euros, notamment pour financer la diminution du prix du ticket restaurant des étudiants boursiers. Je pense enfin à l’amélioration des modalités de l’apprentissage ou encore des moyens de l’Afitf (Agence de financement des infrastructures de transport de France) ou de l’investissement industriel. Tous ces dispositifs votés par le Sénat ont été retenus en CMP.
Concernant la prime à l’embauche, nous nous félicitons que des crédits aient été prévus à cet effet. Le Sénat avait voté l’enveloppe que j’avais proposée, qui était un peu plus importante. Le texte de la CMP reprend les montants du Gouvernement, qui ne sont pas si éloignés. Certes, le dispositif qui doit être institué par voie réglementaire pourrait différer de celui que nous avions imaginé au Sénat, mais j’espère, monsieur le ministre, que nos échanges n’auront pas été vains et que vous explorerez certaines des pistes évoquées ensemble. J’estime essentiel de soutenir plus spécifiquement les PME dans leurs recrutements dès lors qu’il s’agit de jeunes qui entrent sur le marché de l’emploi.
Le texte de la CMP contient d’autres dispositifs introduits sur l’initiative du Sénat.
À l’article 1er, les occupants du domaine public des établissements publics de santé ont été inclus dans l’annulation partielle des redevances domaniales, avec compensation par l’État.
À l’article 2 A, le crédit d’impôt pour un premier abonnement à un journal a été amélioré avec la suppression du plafond, contre un taux ramené à 30 %.
À l’article 2 ter, les dispositions de la proposition de loi de notre collègue sénatrice Dominique Vérien ont été reprises, telles qu’elles ont été votées par l’Assemblée nationale et le Sénat, sur l’élargissement du champ d’application du label de la Fondation du patrimoine, notamment pour couvrir les centres-bourgs.
À l’article 4, le délai dont disposeront les travailleurs indépendants pour demander le déblocage exceptionnel de l’épargne retraite a été étendu au 31 décembre 2020.
À l’article 4 nonies, l’exonération temporaire de 100 000 euros de droits de mutation à titre gratuit applicable aux donations a été étendue.
Je pense également à la hausse de l’enveloppe du plan France très haut débit, sujet essentiel, le confinement ayant fait apparaître des besoins pour le télétravail et le téléenseignement.
La programmation pluriannuelle de l’énergie a également été prise en compte. Le crédit d’impôt pour l’investissement en Corse a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2023.
Enfin, l’aide exceptionnelle aux entreprises pour le recrutement d’apprentis a été étendue, en retenant en particulier qu’elle s’applique également pour les recrutements en master, comme l’avait souhaité le Sénat. La conférence des présidents d’université avait appelé notre attention sur cette disposition.
Pour conclure, j’aimerais dire que je suis satisfait – même si on n’est jamais totalement satisfait en ce bas monde – du travail réalisé avec mon homologue de l’Assemblée nationale et de l’écoute dont il a fait preuve lors de l’élaboration d’un texte commun. Encore une fois, ce texte est le fruit d’un compromis, que d’aucuns pourront juger très insuffisant sur certains aspects.
Je resterai, comme le président Larcher, qui l’a écrit au Premier ministre – j’ai reçu la copie de son courrier ce matin –, très attentif à la situation d’Île-de-France Mobilités. Le Gouvernement s’est engagé à trouver une solution cet automne ; j’espère même que, d’ici à cet automne, des rencontres permettront d’affiner les chiffres. En tout cas, soyez assuré, monsieur le ministre, de la vigilance du Sénat sur cette question.
En outre, comme nous aurons l’occasion d’en reparler dans le cadre du débat sur l’orientation des finances publiques, j’attends désormais votre plan de relance, indispensable pour notre économie. Espérons qu’il n’arrivera pas trop tard ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous faire part de la satisfaction qui est la mienne d’avoir vu la commission mixte paritaire aboutir à un accord pour la troisième fois cette année sur un projet de loi de finances rectificative. Cela témoigne de la volonté des parlementaires, de celle du Gouvernement également, de trouver un compromis lorsqu’il s’agit de répondre à une crise, d’assurer la survie de notre économie, de garantir à nos compatriotes un revenu le plus protégé possible et de leur offrir l’accompagnement nécessaire dans la situation que nous vivons.
M. le rapporteur a évoqué à l’instant les concessions qu’il a parfois fallu faire pour parvenir à ce compromis. Il a ainsi listé les sujets qui mériteraient à ses yeux et à ceux de la majorité sénatoriale d’être approfondis ou retravaillés dans les prochaines semaines. Pour ma part, je soulignerai les cinq points qui conduisent le Gouvernement à se montrer satisfait de ce compromis.
Premier point de satisfaction : le PLFR 3 autorise le Gouvernement à renforcer des mesures qui fonctionnent. Je pense notamment au financement du chômage partiel ou du fonds de solidarité. Je pense aussi à tous les dispositifs que nous avons mis en place et qui permettront d’amplifier les efforts en direction du secteur industriel ou de garantir l’accompagnement de nos compatriotes les plus fragilisés.
Deuxième point : le PLFR 3 prévoit les outils nécessaires au financement des plans qui ont été annoncés pour différents secteurs d’activité stratégiques nécessitant un accompagnement spécifique et pour lesquels il nous fallait dès à présent disposer des autorisations de crédits pour intervenir. Le débat parlementaire a en outre permis de prévoir des financements particuliers pour certains secteurs, notamment les festivals ou encore la presse, que M. le rapporteur vient d’évoquer.
Troisième point : ce texte est celui des trois PLFR qui apporte des solutions aux collectivités territoriales. Je ne reviens pas sur le débat concernant Île-de-France Mobilités. Nous savons que nous aurons l’occasion d’en reparler d’ici à l’automne et de trouver des solutions dans le cadre du projet de loi de finances ou dans d’autres dispositifs liés à la relance, afin que le fonctionnement des transports collectifs en Île-de-France puisse être garanti et que les investissements puissent évidemment être réalisés.
Ce projet de loi de finances rectificative permet de soutenir l’investissement à hauteur de 1 milliard d’euros supplémentaire. Surtout, il permet de garantir aux collectivités un niveau de recettes fiscales et domaniales grâce à un dispositif inédit, qui n’a jamais été mis en place, ni même peut-être pensé, afin de répondre à leurs difficultés Il garantit une recette minimale en matière fiscale et domaniale au moins égale à la moyenne des recettes de la période 2017-2019, un traitement particulier étant prévu pour les outre-mer afin de prendre en compte leurs spécificités, notamment le droit d’octroi ou la taxe spéciale sur la consommation.
Nous avons aussi abouti, à l’issue d’une discussion avec l’ADF (Assemblée des départements de France), à un dispositif de soutien en faveur des départements, qui s’inscrit aussi dans le cadre des discussions plus larges que nous pouvons avoir avec ces collectivités.
Quatrième point : les mesures en faveur de l’emploi des jeunes sont pour nous un autre motif de satisfaction. M. le rapporteur l’a dit, il y avait une volonté partagée par la majorité à l’Assemblée nationale, celle du Sénat et le Gouvernement, mais aussi sur toutes les travées, de mettre en place un dispositif de soutien à l’emploi des jeunes. Les mesures de soutien à l’embauche d’apprentis ont ainsi été étendues, sur l’initiative du Gouvernement, aux contrats de professionnalisation. Votre assemblée a par ailleurs voté des crédits pour financer des primes à l’embauche des plus jeunes de nos concitoyens. Ce dispositif figure dans le texte sous une forme un peu différente, afin de tenir les engagements pris par le Président de la République, que le Premier ministre a détaillés ce matin lors d’un déplacement sur le terrain.
Toujours pour les jeunes, ce projet de loi de finances rectificative permet de financer un certain nombre de dispositifs sociaux, qu’il s’agisse de l’accès à des repas de qualité à moindre prix ou de bourses, de la même manière qu’il permet de financer des dispositifs d’accompagnement social de l’ensemble des Français fragilisés par la crise.
Enfin, cinquième point : ce texte est l’occasion pour le Gouvernement de tenir un engagement, celui de transformer en exonérations un certain nombre de reports de cotisations que les services, notamment des Urssaf, ont accordé au cours des derniers mois. Le dispositif qui a été adopté permet ainsi d’exonérer l’ensemble des TPE ayant fait l’objet d’une décision de fermeture administrative, ainsi que, pour quatre mois, les TPE et les PME des secteurs les plus touchés – on pense immédiatement aux cafés, aux hôtels ou aux restaurants, mais pas seulement : le sport, la culture, l’événementiel sont concernés.
Nous avions prévu un dispositif d’exonération partielle et au cas par cas pour les entreprises de moins de 50 salariés ; vous avez fait le choix, mesdames, messieurs les sénateurs, retenu en commission mixte paritaire, et le Gouvernement s’en félicite, d’étendre cette possibilité aux entreprises de moins de 250 salariés, de manière à couvrir un spectre plus large et régler, peut-être, un certain nombre de questions sectorielles.
Nous sommes heureux que la commission mixte paritaire ait été conclusive, ce qui nous permet de gagner quelques jours pour l’entrée en vigueur du texte.
Pour terminer, je tiens à remercier l’ensemble des sénateurs pour leur participation au débat qui nous a occupés ce week-end. Je remercie particulièrement M. le rapporteur pour son travail habituel, mais aussi pour le travail particulier qu’il a accompli afin d’aboutir à un texte en commission mixte paritaire.
Au total, 2 400 amendements auront été déposés sur ce projet de loi de finances rectificative à l’Assemblée nationale et au Sénat. Plus de 200 d’entre eux ont été adoptés et ont permis d’enrichir le texte initial du Gouvernement. C’est là une illustration de ce que je disais au début de mon propos : quand il y a péril et qu’il est urgent d’agir, chacun sait faire un pas vers l’autre. Certes, il reste encore du travail, des échéances. J’ai entendu l’appel concernant le plan de relance. J’ai envie de répondre par une pirouette en disant que, la relance, c’est dès maintenant,…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. C’est en effet une pirouette !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. … grâce au financement des plans sectoriels, aux 460 milliards d’euros mobilisés dans les trois projets de loi de finances rectificative.
Nous présenterons d’ici à la fin du mois d’août un plan de relance, dont le financement est d’ores et déjà assuré par certaines dispositions figurant dans le PLFR 3. Je pense notamment à l’amendement que vous avez accepté de voter prévoyant de débloquer 500 millions d’euros pour financer l’appel à projets pour les industries du futur. Je pense au fonds de participation que nous pouvons encore mobiliser, y compris dans le cadre du plan de relance, 20 milliards d’euros ayant été votés dans le PLFR 2.
L’ensemble des dispositions nécessaires au financement du plan de relance devront évidemment être complétées dans le PLF pour 2021 et, si nécessaire, dans le PLFR de fin de gestion.
Je conclus en vous remerciant de nouveau, mesdames, messieurs les sénateurs, de votre travail et de l’esprit de concorde qui a régné durant ce PLFR 3. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – MM. Marc Laménie et Jean-Claude Requier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme beaucoup, je me réjouis de l’accord auquel est parvenue la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020. J’observe que c’est la deuxième fois d’affilée que nous parvenons à une CMP conclusive, trois mois jour pour jour après le deuxième PLFR, qui rehaussait alors les moyens des dispositifs d’urgence.
Cette seconde CMP conclusive traduit sans doute l’esprit de responsabilité du Parlement et confirme la capacité de dialogue et d’écoute des deux rapporteurs généraux, Albéric de Montgolfier et Laurent Saint-Martin, que je tiens à saluer pour le travail qu’ils ont accompli. Elle augure aussi – en tout cas nous l’espérons – de belles perspectives pour les séquences budgétaires à venir. Qui sait ? Puisse la volonté de dialogue du Premier ministre se traduire dans les actes !
Nos motifs de satisfaction sont à la mesure des apports du Sénat qui ont été retenus dans le texte final.
Notre assemblée a permis des améliorations particulièrement nettes en matière de compensations des pertes de recettes des collectivités territoriales. Dans un contexte récessif inédit, mêlé d’incertitudes toujours plus nombreuses, ce sujet nous sensibilisait sur toutes nos travées.
L’introduction au Sénat de la clause dite « de retour à meilleure fortune » offrira ainsi une protection précieuse aux départements concernant leurs recettes de DMTO, en leur garantissant qu’ils n’auront à les rembourser que lorsqu’ils auront retrouvé un niveau de droits de mutation équivalent à celui d’avant la crise. C’est une bonne chose.
De la même façon, la possibilité offerte de financer des projets couverts par la DETR avec l’enveloppe de 1 milliard d’euros ouverte au titre de la DSIL est une avancée bienvenue. Notre collègue Bernard Delcros en avait émis le souhait en ouverture de la discussion générale. C’est là un beau message adressé à l’échelon départemental, qui, tout au long de la crise sanitaire, a su répondre avec agilité aux besoins exprimés sur le terrain par nos concitoyens.
Les membres du groupe Union Centriste se félicitent également de l’inscription dans ce troisième collectif budgétaire des dispositions de la proposition de loi de notre collègue Dominique Vérien, votée à l’unanimité au Sénat, concernant l’élargissement du champ d’application du label de la Fondation du patrimoine. L’extension de ce label aux propriétaires dans des communes allant jusqu’à 20 000 habitants, contre 2 000 habitants jusqu’à présent, permettra de participer à la relance, les bénéficiaires pouvant investir leurs économies d’impôts dans des travaux. L’État en aura forcément un retour grâce à l’impôt sur les sociétés et la TVA qu’il percevra.
Concernant Île-de-France Mobilités, l’accord trouvé en CMP n’est certes pas allé jusqu’à renforcer l’acompte versé par l’État. On peut le regretter, mais il est vrai que nous partions de zéro dans le PLFR initial. L’Assemblée nationale a su étendre le bénéfice du prélèvement sur recettes à l’établissement public francilien. La CMP a par ailleurs conservé la modification introduite par le Sénat des paramètres de calcul de la compensation octroyée, laquelle tiendra compte des augmentations de taux intervenues entre 2017 et 2019 pour le financement du passe Navigo.
La question d’Île-de-France Mobilités doit faire l’objet de nouveaux rendez-vous. Le Gouvernement s’y est, je crois, engagé, le rapporteur l’a rappelé il y a quelques instants. Nous serons bien sûr très attentifs au respect de ce point.
L’investissement en matière de transports du quotidien et leur modernisation ne doivent pas faire les frais de la crise sanitaire. Un tel paradoxe serait tout à fait malvenu, compte tenu des enjeux de la mobilité en Île-de-France. Nous serons bien sûr attentifs à la suite qui sera apportée aux demandes de la présidente de la région et d’Île-de-France Mobilités.
Nous regrettons, monsieur le ministre, que n’ait pas prospéré à l’issue de la CMP le remboursement anticipé de la TVA acquittée par les collectivités locales sur leurs dépenses d’équipement au titre du FCTVA. Une telle mesure nous semblait vertueuse dans le but évident de relancer l’investissement. Elle aurait immédiatement rendu de la trésorerie aux collectivités et leur aurait donné les moyens d’investir.
L’essentiel de nos désaccords a toutefois davantage porté sur des questions de calendrier que sur des sujets de fond. C’est la raison pour laquelle nous sommes confiants alors que se profilent déjà la présentation du projet de loi de finances pour 2021 et la mise en œuvre du plan de relance. Celui-ci se trouve d’ailleurs déjà esquissé dans ce troisième PLFR et l’adoption d’un ambitieux dispositif d’aide à l’embauche des jeunes, qui seront à la rentrée les premiers à pâtir d’un marché du travail devenu malheureusement exsangue sous l’effet de la pandémie.
Le compromis trouvé sur ce texte a coïncidé avec l’accord sur le plan de relance européen, dont nous nous félicitons, accord obtenu quelques heures seulement avant la réunion de la CMP. L’expérience du confinement aura peut-être ceci de positif qu’elle accélérera la solidarité et le rapprochement entre les peuples européens. Souhaitons-le en tout cas.
La façon dont nous allons relever les défis auxquels nous confronte le covid-19, en particulier d’un point de vue budgétaire, déterminera le devenir de notre pays, comme celui de nos principaux partenaires. Nous l’avons dit, la pandémie que nous vivons contient les ferments d’un changement de monde, en particulier en matière de transition écologique. Malgré les drames, certains de ces ferments comportent de réelles opportunités, exigeantes, mais bénéfiques pour peu que l’on sache en tirer partie et faire les bons choix au bon moment.
Vous l’aurez compris, notre regard est globalement très positif sur le travail effectué, même si nous mesurons le chemin qu’il reste à parcourir. La quasi-totalité du groupe Union Centriste approuvera donc les conclusions de la CMP. (MM. Julien Bargeton et Marc Laménie applaudissent.)