Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je partage, bien sûr, la volonté de Michel Canevet de rendre le dispositif des sociétés à capital-risque éligible au PEA-PME. Lorsque son amendement avait été déposé initialement, on l’avait invité à le retravailler : cela a été fait.
C’est pourquoi la commission émet un avis favorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Il nous semble que le dispositif proposé créerait une inégalité de traitement entre les sociétés à capital-risque et les autres sociétés par actions.
Je pressens que cet amendement sera adopté : si tel était le cas, il faudrait continuer d’en examiner le dispositif dans le cadre de la navette parlementaire.
À ce stade, cependant, le Gouvernement a émis un avis défavorable.
Mme le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous venons d’examiner un certain nombre d’amendements – plusieurs ont été retirés – relatifs, notamment, à la réduction de crédits. Nous avons même discuté d’une proposition relative aux holdings animatrices ; je dois admettre que j’ai découvert quelque chose…
On vient de nous présenter un amendement sur les sociétés à capital-risque, et d’autres sont encore à venir. J’ai l’impression que tout le monde se penche sur l’épargne des Français !
M. Michel Canevet. Elle est importante !
M. Pascal Savoldelli. L’inflation est au plus bas. Avec vous, il faut changer non pas le système, mais les Français ! Le taux actuel du livret d’épargne populaire à la Caisse d’épargne est de 0,75 % !
Les Français ont peur de l’avenir immédiat et à moyen terme. Ce n’est pas en proposant coup sur coup des amendements relatifs à des réductions de crédits ou au capital-risque que nous allons régler les choses. Les Français ont envie de décider ce qu’ils font de leur argent !
Nous pensons, dans la droite ligne de notre intervention lors de la discussion générale, que pour obtenir l’adhésion des Français au sujet de leur épargne, il faut leur proposer un grand projet d’investissement, c’est-à-dire leur annoncer qu’ils pourront placer leur argent dans un grand emprunt et les informer du retour sur investissement.
Voilà un moyen d’obtenir assurément de l’argent pour les TPE et les PME, car si l’on décide de faire de grands projets, il faudra en passer par des savoir-faire et par le tissu économique ! Tel est l’avis de notre groupe.
Nous ne prendrons plus la parole sur les autres amendements qui concernent ce sujet. Mais nous tenons à dire que nous sommes favorables à une véritable ambition et à un changement de cap du Gouvernement, via la présentation aux Français d’un grand plan d’emprunt, non pas sur une seule année mais bien pour les dix ou vingt ans à venir ! Cela vaudrait mieux que de grappiller, ici ou là, les participations des uns et des autres…
Mme le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Je ne comprends pas, monsieur Savoldelli, la différence entre un grand emprunt et de la dette… Nous pouvons jouer sur les mots, mais il s’agit exactement de la même chose !
Lorsque l’État réalise un grand emprunt, il émet de la dette, certes vis-à-vis des Français ; si tant est d’ailleurs qu’ils le souhaitent, car rien ne les y oblige ! Vous savez qu’il existe un marché secondaire de la dette…
Encore une fois, on peut jouer sur les mots. Il n’en reste pas moins qu’il existe un sujet de mobilisation de l’épargne, et que celui-ci est majeur si nous voulons connaître, demain, une reprise de la consommation et de l’investissement. Pour cela, il faut faire transiter l’épargne des Français dans les bons véhicules, là où on en a besoin, à savoir les capitaux et les fonds propres de nos PME.
Mme le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je voudrais, moi aussi, rassurer Pascal Savoldelli. De l’ambition, il y en a ! À ce titre, le Gouvernement a très largement fait part de son souhait de développer l’épargne des salariés, c’est-à-dire l’investissement des salariés dans les actions des sociétés de façon à ce qu’ils participent aux fruits de l’expansion de leur entreprise.
J’ai moi-même déposé un certain nombre d’amendements permettant d’améliorer ce genre de dispositif – j’espère d’ailleurs que mes initiatives seront suivies par le groupe CRCE.
L’orientation de l’épargne des particuliers vers les entreprises, afin de créer des emplois, est un enjeu essentiel.
Pourquoi, d’ailleurs, crée-t-on des emplois ? Pour que les gens aient un travail grâce auquel ils peuvent vivre décemment, et pour que la sécurité sociale, au lieu de financer des allocations chômage, ait des recettes pour protéger la santé de nos concitoyens ! Telle est la réalité ! (Exclamations sur des travées du groupe CRCE.)
Il faut arrêter de fustiger les entreprises et admettre que les mesures prises vont dans le bon sens, car elles permettent le développement économique de notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous n’avons rien contre le fait d’orienter l’épargne des Français vers les PME françaises !
M. Pascal Savoldelli. Bien entendu, je viens de le dire !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est même positif. (Ah, tout de même ! sur des travées du groupe Les Républicains.) Néanmoins, ne croyez pas que la seule façon de mobiliser l’épargne des Français consiste à leur promettre un avantage fiscal : ce n’est pas ainsi qu’une Nation peut relever les défis auxquels elle doit faire face !
Par, ailleurs, une bonne partie des épargnants n’a pas une confiance extrême dans l’avenir des trois quarts des PME françaises. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe RDPI.)
Il y a du doute dans l’air ! Placer de l’argent dans une entreprise dont on ne sait même pas si elle survivra, cela ne peut se concevoir que dans un contexte d’euphorie collective ! Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Il existe d’autres façons d’attirer l’épargne des Français vers les entreprises, notamment les PME. C’est tout le débat autour des logiques dites « de grands travaux », au sens technologique du terme.
En l’absence de grands projets collectifs, au travers desquels la puissance publique apparaît comme un garant de l’argent placé, l’épargne des Français ne s’orientera pas massivement vers le productif – je veux parler du productif utile ! Les transitions écologiques, dont on parle souvent ici, nécessiteront de fantastiques investissements dans de nombreux domaines !
Vous dites que c’est de l’emprunt… Ce débat sur l’emprunt mérite d’avoir lieu, car il faut faire la distinction entre l’emprunt sain et l’emprunt malsain !
L’emprunt sain consiste à investir dans des secteurs porteurs d’avenir, et permet soit d’économiser, soit de créer de la richesse supplémentaire. Je suis favorable à ce que l’on oriente l’épargne des Français vers ces grands projets, et même à ce qu’il y ait un fonds dédié : on aura ainsi un effet de vérité et cela évitera que le tonneau des Danaïdes de Bercy ne décide de tout !
Ce fonds dédié pourrait être cogéré avec les régions et faire l’objet de débats avec les partenaires sociaux autour de grands plans. Nous verrons, à cet égard, ce que M. Bayrou nous proposera… (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)
Mme le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Je voudrais abonder dans le sens de Mme Lienemann. L’enjeu est en effet que cette épargne soit utile.
Il existe des mécanismes qui rendent l’épargne utile, comme le financement du logement social, par exemple. Nous pourrions donc orienter l’épargne vers des investissements socialement utiles, et ne pas laisser les choses se faire au petit bonheur la chance. Pardonnez-moi d’insister, mais les écologistes sont là pour le rappeler : encore une fois, il conviendrait d’orienter cette épargne vers des investissements vertueux, vers de la production utile.
Il est vrai que 80 % des Français ont constitué de l’épargne pendant la crise. Mais il ne faut pas oublier que la dette des 20 % de Français les moins riches s’est aggravée. Je souhaiterais que l’on tienne compte de cette épargne négative et que le Gouvernement prenne toute la mesure des aides à déployer en faveur des personnes les plus précaires.
Mme le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.
M. Vincent Segouin. Permettez-moi de prendre un exemple simple : à partir du mois de janvier, au premier trimestre, nous verrons de nombreuses liquidations d’hôtels et de restaurants. Or nous voulons, dans le même temps, que l’épargne des Français soit réinvestie.
Les exploitants n’ont rien à se reprocher dans la mesure où ils ont été, en raison des mesures de confinement, contraints de fermer leur établissement et d’assécher leur épargne.
Encore une fois, ils n’ont commis aucune faute de gestion ! Ils ne disposent tout simplement plus de ressources, et seront placés en liquidation et en redressement judiciaires, faute d’avoir pu bénéficier de cette épargne réinvestie. Ils seront démunis et rachetés par des capitaux étrangers. Et vous refusez d’orienter l’épargne vers ces établissements, car vous prétendez que ce n’est pas vertueux ! Comment peut-on dire une chose pareille ?
Mme le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je rejoins une partie de vos propos, monsieur Segouin – ce n’est pas habituel ! –, et nous devons réfléchir à ce problème ensemble.
Alors que le taux d’inflation est actuellement de 0,3 à 0,4 %, pour les produits frais, qui sont nécessaires tant à nos concitoyens qu’aux restaurateurs, ce taux atteint 7,6 % ! Nous devons traiter ce sujet si nous voulons que les gens s’en sortent maintenant, mais aussi plus tard.
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 quinquies.
L’amendement n° I-2 rectifié ter, présenté par Mme Lavarde, MM. Longuet, J.B. Blanc, Charon et Cambon, Mme Noël, M. Mouiller, Mme Deroche, M. Cuypers, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mandelli, Mme Deromedi, M. de Legge, Mmes M. Mercier et Chauvin, MM. Pellevat, Sautarel et Savary, Mme Garriaud-Maylam, MM. Saury et Brisson, Mme Gruny, MM. Piednoir, E. Blanc et Retailleau, Mme Malet, MM. Genet, Le Gleut, Favreau et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, MM. Regnard et B. Fournier, Mme Dumas, MM. Meurant et Rapin, Mme Di Folco, M. Savin, Mme Berthet, MM. Sol, Rietmann et Perrin, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, M. Bonne, Mme Primas, M. Guené, Mmes Boulay-Espéronnier et de Cidrac et MM. Gremillet et Segouin, est ainsi libellé :
Après l’article 3 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 221’30 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, les parents ou les grands-parents, personnes physiques majeurs domiciliés fiscalement en France, peuvent ouvrir un plan d’épargne en actions au nom de leur enfant ou de leur petit-enfant mineur domicilié en France, à condition que ce plan soit bloqué jusqu’à la majorité du titulaire du plan. » ;
2° À la deuxième phrase du dernier alinéa, le mot : « majeure » est supprimé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Madame le président, avec votre autorisation, je présenterai en même temps l’amendement n° I-2 rectifié ter et les amendements en discussion commune nos I-3 rectifié bis et I-82 rectifié bis, qui participent de la même philosophie et s’inscrivent dans le débat que nous avons en ce moment même.
Mme le président. J’appelle donc les amendements nos I-3 rectifié bis et I-82 rectifié bis faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-3 rectifié bis, présenté par Mme Lavarde, MM. Longuet, E. Blanc, Charon et Cambon, Mme Noël, M. Mouiller, Mme Deroche, M. Cuypers, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mandelli, Mme Deromedi, M. de Legge, Mmes M. Mercier et Chauvin, MM. Pellevat, Sautarel et Savary, Mme Garriaud-Maylam, MM. Saury et Brisson, Mme Gruny, MM. Piednoir et J.B. Blanc, Mme Malet, MM. Genet, Le Gleut, Retailleau, Favreau et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, MM. Regnard et B. Fournier, Mme Dumas, MM. Meurant et Savin, Mme Berthet, MM. Sol, Rietmann et Perrin, Mme Raimond-Pavero, M. Bonne, Mme Primas, M. Guené, Mme Boulay-Espéronnier, M. Bonhomme, Mme Di Folco et M. Rapin, est ainsi libellé :
Après l’article 3 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 221-32-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « contribuables » est remplacé par les mots : « personnes physiques majeures » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, les parents ou les grands-parents, personnes physiques majeurs domiciliés fiscalement en France, peuvent ouvrir un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, au nom de leur enfant ou de leur petit-enfant mineur domicilié en France, à condition que ce plan soit bloqué jusqu’à la majorité du titulaire du plan. » ;
3° Au deuxième alinéa, les mots : « contribuable ou » sont remplacés par les mots : « personne physique ou chaque enfant ou petit-enfant mineur ou » ;
4° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigé : « Toutefois et jusqu’à la fin de son rattachement, cette limite est fixée à 20 000 € pour une personne physique rattachée, dans les conditions prévues au 3 de l’article 6 du code général des impôts, au foyer fiscal d’un contribuable. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° I-82 rectifié bis, présenté par Mme Lavarde, MM. Longuet, J.B. Blanc, Charon et Cambon, Mme Noël, M. Mouiller, Mme Deroche, M. Cuypers, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mandelli, Mme Deromedi, M. de Legge, Mmes M. Mercier et Chauvin, MM. Pellevat, Sautarel et Savary, Mme Garriaud-Maylam, MM. Saury et Brisson, Mme Gruny, MM. Piednoir et E. Blanc, Mme Malet, MM. Genet, Le Gleut, Favreau et D. Laurent, Mme Estrosi Sassone, MM. Regnard et B. Fournier, Mme Dumas, MM. Meurant et Savin, Mme Berthet, MM. Sol, Rietmann, Perrin et Retailleau, Mme Procaccia, M. Rapin, Mme Raimond-Pavero, M. Bonne, Mmes Primas et Di Folco, M. Guené, Mme Boulay-Espéronnier et M. Bonhomme, est ainsi libellé :
Après l’article 3 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 221-32-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « contribuables » est remplacé par les mots : « personnes physiques majeures » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « Chaque contribuable ou chacun des époux ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité soumis à imposition commune » sont remplacés par les mots : « Une même personne » ;
3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le titulaire d’un plan effectue des versements en numéraire dans une limite de 225 000 € depuis l’ouverture du plan. Toutefois et jusqu’à la fin de son rattachement, cette limite est fixée à 20 000 € pour une personne physique majeure rattachée, dans les conditions prévues au 3 de l’article 6 du code général des impôts, au foyer fiscal d’un contribuable.
« Lorsque le titulaire d’un plan mentionné au premier alinéa est également titulaire d’un plan mentionné au premier alinéa de l’article L. 221-30, l’ensemble des versements en numéraire effectués sur ces deux plans depuis leur ouverture ne peut excéder la limite de 225 000 € ou 20 000 € pour une personne physique majeure rattachée au foyer fiscal d’un contribuable. »
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Vous avez la parole pour présenter ces trois amendements, ma chère collègue.
Mme Christine Lavarde. Nous dressons tous le même constat : une majorité de Français ont accumulé de l’épargne, qui se trouve aujourd’hui sur leurs comptes courants. Il s’agit de la flécher pour la diriger vers le tissu économique. C’est d’ailleurs ce que le Gouvernement cherche à faire depuis déjà deux ans et la promulgation de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte ». Ces amendements visent à compléter ces dispositions.
Ainsi, l’amendement n° I-2 rectifié ter a pour objet de permettre l’ouverture d’un plan d’épargne en actions (PEA) à la naissance d’un enfant, à l’instar de ce qui existe déjà pour le livret A et pour les contrats d’assurance vie. Cela étant, avec de tels produits financiers, on n’envoie pas nécessairement des liquidités vers l’économie réelle – pour autant que cette notion ait une quelconque signification –, mais on peut abonder des fonds en euros. Or, en autorisant l’ouverture d’un PEA à la naissance d’un enfant, de l’argent sera placé pendant au moins dix-huit ans dans l’économie réelle.
L’amendement n° I-3 rectifié bis tend à proposer cette même autorisation pour le PEA-PME, dispositif d’épargne créé par la loi Pacte.
L’objet de l’amendement n° I-82 rectifié bis est beaucoup moins ambitieux puisqu’il s’agit de créer un PEA-PME-Jeunes, sur le modèle du PEA-Jeunes créé par la loi Pacte. Cette appellation me semble d’ailleurs un peu erronée, dans la mesure où, par un tel dispositif, on autorise l’ouverture d’un PEA-PME dès l’âge de 18 ans pour des majeurs rattachés fiscalement au foyer de leurs parents. Certes, et c’est un objectif louable, on fait alors de l’éducation à l’économie (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) en permettant à de jeunes actifs de prendre connaissance de ce qu’est notre tissu économique et en les incitant à investir dans des entreprises de petite taille.
Ce serait un premier pas, même si j’espère que nous voterons plutôt l’amendement n° I-2 rectifié ter ou l’amendement n° I-3 rectifié bis : ce serait un réel « plus » pour notre économie.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je le dis d’emblée, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° I-82 rectifié bis et demande le retrait des amendements nos I-2 rectifié ter et I-3 rectifié bis.
Je le rappelle à mon tour, dans le cadre de la loi Pacte, nous avons réfléchi à l’ouverture possible du PEA pour les mineurs. Néanmoins, le fait de réserver l’ouverture d’un PEA aux adultes s’explique par la volonté d’éviter que des parents, en ouvrant un tel contrat au nom de leurs enfants non majeurs, ne contournent la règle de plafonnement des versements. Je rappelle d’ailleurs que le parallélisme avec les contrats d’assurance vie ne vaut pas, puisqu’aucun mécanisme de plafonnement n’est prévu pour ce type de contrat.
La mesure prévue à l’amendement n° I-3 rectifié bis se heurte au raisonnement que je viens d’exposer : il s’agit là encore d’éviter aux parents de contourner la règle de plafonnement des versements. Qui plus est, le PEA-PME est un produit à risque, et l’on peut supposer que les enfants non majeurs manqueraient de connaissances suffisantes en la matière ou de discernement.
Une telle réserve ne vaut pas pour l’amendement n° I-82 rectifié bis, puisque la mesure s’adresse à de jeunes majeurs dépendant du foyer familial, pour lesquels le plafond de versement est de 20 000 euros.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le rapporteur général a indiqué que la loi Pacte avait permis un élargissement des possibilités de financement, notamment pour ce qui concerne le PEA-PME. Cela nous paraît suffisant à ce stade. Je rappelle que l’enveloppe fiscale est déjà substantielle et que l’ouverture de tels produits financiers au nom des enfants se traduirait par une ouverture d’enveloppes par enfant ou par petit-enfant.
Mme le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Ce débat m’amuse beaucoup ! (Sourires.)
Si je résume, 100 milliards d’euros auraient été mis de côté à la faveur de la pandémie et du confinement : des économies faites au premier chef dans les foyers fiscaux du dernier décile, c’est-à-dire ceux dont les revenus sont les plus élevés, ce qui est logique. Et l’on cherche, de façon tout aussi logique, à faire ressortir ces économies pour les placer.
Dans le même temps, le Gouvernement nous propose de baisser la taxe d’habitation pour les 20 % les plus riches. En d’autres termes, on va encore conforter cette épargne dont on ne sait quoi faire. C’est fabuleux… On pourrait tout de même retarder la mise en place de cette mesure, qui n’a rien d’urgent, d’un an, voire de deux ans !
Enlever de l’argent des recettes de l’État pour le laisser à la disposition de particuliers, puis, parce que l’on ne sait pas comment le récupérer, créer des mécanismes invraisemblables pour essayer de le réinjecter dans l’économie, voilà qui me paraît assez fou ! (Très bien ! sur les travées du groupe CRCE. – Mme Sophie Taillé-Polian applaudit.)
Faisons en sorte que ce soit l’État qui utilise cet argent ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. Madame Lavarde, les amendements nos I-2 rectifié ter et I-3 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Mme Christine Lavarde. Selon vous, monsieur le ministre, une enveloppe fiscale très importante a été accordée à l’issue de la loi Pacte. Or les données dont je dispose font apparaître que, globalement, la collecte sur le PEA va plutôt en diminuant et que le PEA-PME n’a pas l’air d’avoir trouvé l’envol que vous annoncez : seulement 90 000 contrats ont été signés en deux ans. Cela ne fonctionne pas si bien !
Cela étant dit, je fais confiance au rapporteur général. Il est vrai que la question du plafonnement se pose, et nous n’allons pas ouvrir un débat ce soir pour décider s’il faut déplafonner les versements sur ce type de livret d’épargne.
Je retire donc les amendements nos I-2 rectifié ter et I-3 rectifié bis, madame la présidente. Je me contenterai de l’amendement n° I-82 rectifié bis, dont l’adoption confortera ceux qui croient en notre économie et pensent que l’on peut investir dans les PME et oser prendre un risque, même à l’âge de 18 ans.
Mme le président. Les amendements nos I-2 rectifié ter et I-3 rectifié bis sont retirés.
La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.
M. Vincent Segouin. Je suis tout à fait favorable à l’amendement n° I-82 rectifié bis. On le sait, pour obtenir la meilleure rentabilité sur ce type de placements, il faut des versements réguliers et sur le long terme. Par conséquent, commencer à investir dans un PEA-PME quand on est jeune me paraît une bonne idée.
En outre, il faut rompre avec la culture qui consiste à investir dans la dette. Les Français privilégient le fonds en euros dans leurs contrats d’assurance vie, alors que la dette, ce n’est pas très porteur. Pendant ce temps, les étrangers qui investissent dans le capital de nos entreprises dégagent des plus-values nettement supérieures, Fabien Gay l’a rappelé précédemment.
Il est regrettable de ne pas proposer à nos enfants une éducation à ce système. Il ne faut pas appréhender ce sujet sous l’angle du plafonnement, de la déduction fiscale ou de la donation, qui peut être un outil pour défiscaliser, d’autant que les contrats d’assurance vie ne prévoient pas de plafonnement.
Mme le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je ne suis pas d’accord avec Vincent Segouin et il n’est pas question, cette fois, que je prolonge son propos.
Nous ne cessons de parler d’épargne. Depuis le début de la crise, l’épargne a crû de 50 milliards d’euros, pour atteindre 100 milliards d’euros. On se demande donc, très logiquement, ce qu’il faut faire.
On constate également que 70 % de ce surcroît d’épargne, soit 32 milliards d’euros, ont bénéficié à 20 % des ménages les plus aisés. Les 10 % les plus riches en ont même bénéficié de plus de la moitié : 54 % des 32 milliards d’euros de surcroît d’épargne.
Il faut booster les Français, disons-nous, pour qu’ils entrent dans le capital des entreprises et cessent d’épargner à l’aveugle.
D’après 60 millions de consommateurs, qui n’est pas un journal du parti communiste (Sourires), le montant des frais non justifiés des plans d’épargne retraite (PER) – arbitrage, rente, gestion – s’élève à 5 %, ce qui représente 2,7 milliards d’euros. Ce ne sont pas les Français qu’il faut changer ! Avant d’épargner, ceux-ci se penchent bien évidemment sur les conditions de l’épargne et regardent où est leur intérêt.
À écouter nos débats, je me demande si c’est un rêve ou un cauchemar ! J’entends Christine Lavarde affirmer qu’il faut éduquer à la prise de risque, au capital…
Voilà qui doit vous rendre heureux, monsieur Capus : vous avez toute la droite avec vous ! Elle est en train de fabriquer pour nos enfants – pour ce qui me concerne, ce seront mes petits-enfants – des écoles qui formeront et éduqueront à la holding animatrice ! (Mme Christine Lavarde s’exclame. – Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
Au début des années 1980, je me suis battu aux côtés de la gauche pour que soit créée une filière du brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur en accueils collectifs de mineurs (BAFA) et du brevet d’aptitude aux fonctions de directeur en accueils collectifs de mineurs (BAFD), parce que des milliers de jeunes en étaient à l’époque exclus… Et voilà que je me retrouve, en 2020, dans cette situation de crise sanitaire, économique et sociale, à entendre de telles propositions d’amendements. Franchement, bravo ! (Sourires.)