Mme Valérie Boyer. Nous sommes toujours dans le cadre de l’expérimentation de l’article 1er, qui vise à élargir les compétences des policiers municipaux.
Aujourd’hui, la police municipale ne peut pas constater le squat de locaux qui n’appartiennent pas à la commune.
Le présent amendement est tout simple : il vise à permettre à la police municipale de constater les délits de squat sur le territoire de la commune.
L’intérêt de cet amendement est multiple. Nous savons que, en la matière, la police nationale est souvent débordée. En outre, nous sommes toujours contraints par le délai de flagrance de 48 heures. Au reste, les squats constituent un véritable fléau à certains endroits.
L’intervention de la police municipale sur le territoire communal permettrait véritablement de constater les délits d’occupation dans les 48 heures et de faire avancer toutes les affaires qui traînent et qui empoisonnent la vie de nos communes et de nos concitoyens, parfois de manière dramatique.
J’espère donc, mes chers collègues, que vous voterez mon amendement.
Mme le président. L’amendement n° 354, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 20 et 21
Remplacer les mots :
une personne publique
par les mots :
la commune, à un de ses établissements publics ou à l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre autorisé à mettre en œuvre l’expérimentation en application du I
La parole est à M. le ministre.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, la commission a fait le choix d’une vision extensive des occupations illicites de terrain.
Fort de mon expérience d’élu local, je répète que nombre de nos collègues sont confrontés à des occupations illicites, par des gens du voyage ou des squatteurs, et se trouvent largement démunis, les procédures étant extrêmement lourdes et compliquées.
Les policiers municipaux doivent pouvoir constater les occupations sur les terrains publics, à savoir les terrains de la commune et de l’intercommunalité à laquelle elle appartient, mais aussi sur les terrains appartenant, par exemple, à des établissements publics comme Voies navigables de France (VNF) ou à la SNCF. En effet, au quotidien, les maires peuvent parfaitement identifier 90 % des terrains publics des communes.
Mme Boyer voudrait aller plus loin, son amendement visant l’ensemble des terrains squattés, y compris ceux qui appartiennent à des personnes privées. Cette mesure est évidemment pertinente sur le fond, mais elle nécessiterait des actes d’enquête pour identifier le propriétaire du local privé en question. Nous nous trouverions alors en contradiction avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui empêche les policiers municipaux d’effectuer des actes d’investigation. Si je comprends la préoccupation qui sous-tend l’amendement, je ne peux donc pas y être favorable.
Monsieur le ministre, votre amendement n° 354 vise les terrains appartenant à la commune ou à l’établissement de coopération intercommunale à laquelle elle appartient. Je veux dire à l’ancien maire de Tourcoing qu’une telle rédaction ne règle pas tous les problèmes d’occupation illicite de terrains publics ! La commission souhaite que la mesure puisse concerner tous les terrains publics.
Elle émet un avis défavorable sur l’amendement n° 211, sur l’amendement n° 33 rectifié de Mme Boyer, compte tenu du risque d’inconstitutionnalité que j’ai évoqué et, en l’état, sur l’amendement n° 354 du Gouvernement – pour ce dernier, l’avis pourrait évoluer si son dispositif allait un peu plus loin.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. La lutte contre les squats est évidemment un sujet très important dans toutes les communes de France. Il faut donner davantage de moyens aux policiers municipaux dans cette lutte dans le cadre de l’expérimentation. En effet, ces policiers sont sans doute ceux qui connaissent le mieux la commune et qui sont le plus présents au moment où les difficultés sont constatées.
Je mets de côté les occupations illicites par les gens du voyage ou par les membres de la communauté rom, puisque, à partir du mois d’octobre, une amende forfaitaire délictuelle de 3 500 euros pourra notamment être prononcée en cas d’installation. Cette amende sera bien plus efficace que les saisies et les plaintes auprès des procureurs de la République auxquelles on recourt aujourd’hui. Il me semble qu’elle révolutionnera en partie les occupations illicites, qui empoisonnent la vie de nombreuses communes, singulièrement rurales.
Une fois que nous avons décidé que les polices municipales devaient pouvoir constater les squats, trois degrés d’intervention sont envisageables.
À cet égard, la position du Gouvernement, qui considère que les policiers municipaux doivent pouvoir constater les occupations illicites de locaux appartenant à la commune, à l’intercommunalité ou aux syndicats dont elle fait partie, constitue déjà une avancée.
Pourquoi ne visons-nous pas tout le domaine public ? Parce que nous pensons, monsieur le rapporteur, qu’aller au service de l’urbanisme pour vérifier si tel ou tel terrain appartient à l’État, à la région ou au syndicat mixte des transports, lequel peut d’ailleurs être une personne privée, est déjà un acte d’enquête.
Le droit n’est pas simple, et rien ne serait pire, pour un maire, qu’une procédure invalidée parce que les policiers municipaux auraient procédé à des actes d’enquête, ayant considéré à tort que le site concerné appartenait au domaine public au sens de la commission des lois, même si je ne peux que souscrire au bon sens qui vous caractérise.
Si le dispositif était adopté comme tel, il faudra veiller, en CMP, à ce qu’il soit bien solide juridiquement. Il ne faudrait pas que les policiers municipaux qui ont consulté les documents d’urbanisme en dehors des heures d’ouverture du service d’urbanisme – le soir, tôt le matin ou le week-end –, puissent se voir reprocher cet acte d’enquête pour les raisons que vous avez évoquées, madame Boyer.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement maintient son amendement, qui distingue les locaux et terrains qui sont la propriété directe de la commune ou dont celle-ci est « actionnaire » – je pense aux syndicats – et ceux qui relèvent du public non communal. J’espère que je me fais bien comprendre.
Madame Boyer, on peut être d’accord avec vous, mais il n’est pas toujours évident de savoir à qui appartient un local. Comme l’a très bien dit M. le rapporteur, cela nécessite parfois de longues semaines, voire de longs mois d’enquête.
Au reste, l’urbanisme peut parfois être particulier dans les territoires ultramarins, en Corse, mais aussi sur certains territoires de la République. Il n’est pas toujours évident de connaître le propriétaire d’un site. J’ai eu à connaître personnellement d’affaires où la personne qui se disait victime de squat n’était pas le véritable propriétaire du terrain, pour des raisons de succession, de divorce ou du fait d’autres problèmes qui ne relèvent pas de la police municipale.
Il faut évidemment lutter très fortement contre les squats. La police nationale et la gendarmerie doivent être au rendez-vous, à la demande des procureurs de la République le cas échéant. La loi Wargon permettra d’améliorer considérablement la situation, mais les policiers municipaux n’ont pas les moyens d’enquête judiciaire leur permettant de savoir si telle ou telle personne dispose d’un titre de propriété.
Je pense que le vote de votre amendement mettrait plutôt les policiers municipaux et les maires en difficulté, indépendamment du risque constitutionnel évoqué par M. le rapporteur.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Je remercie M. le ministre de ses explications.
Je vais maintenir la position de la commission. En effet, pour avoir passé de nombreuses années à m’occuper d’aménagement et d’urbanisme, je ne vois pas en quoi il faudrait une enquête pour savoir que, dans une commune, tel terrain appartient à VNF et tel autre à la SNCF. La plupart des communes ont élaboré un plan local d’urbanisme, et celui-ci est public.
Cela étant, nous en rediscuterons en CMP.
Pour ce qui concerne les terrains privés, cette possibilité paraît complètement impossible.
Mme le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je ne saurais partager votre avis, à la fois pour des raisons pratiques et compte tenu de l’expérience qui a été la mienne en tant que maire.
D’abord, il existe des applications. Aujourd’hui, les cadastres sont tous disponibles sur internet et sont donc consultables 24 heures sur 24. Par conséquent, il n’est pas très compliqué d’éditer un document cadastral faisant état de la propriété.
Ensuite, demander à une personne de présenter au maire ou à la police municipale un acte de propriété ne relève pas d’une enquête : c’est une simple vérification.
Enfin, je ne vois pas pourquoi la police municipale ne pourrait pas constater, à la demande d’une personne qui produirait, par exemple, une copie du cadastre et un acte de propriété, qu’existe un squat, quitte à ce qu’il y ait une enquête ensuite.
Il est extrêmement rare que l’on ait des difficultés à retrouver le propriétaire d’un terrain. En revanche, les personnes privées victimes de squat sont très nombreuses. Elles sont en mesure de produire leurs papiers. Au reste, je rappelle que le délai de 48 heures nous oblige à trouver des solutions pour aider nos concitoyens à sortir de l’enfer que sont les squats.
Comment les Français peuvent-ils comprendre que l’on ne permette pas à la police municipale aujourd’hui de constater l’existence d’un squat ? Il s’agit non pas d’effectuer une enquête, mais de dresser un simple constat. Au demeurant, il n’existe pas aujourd’hui d’autre moyen d’engager la procédure d’expulsion.
N’infligeons pas une double peine à nos concitoyens dont les propriétés sont squattées, qui sont dans des situations absolument dramatiques. Je pense que la simplicité et la transparence nous obligent à permettre à la police municipale, là où elle existe, de constater l’existence d’un squat dans le délai de flagrance de 48 heures. C’est l’enquête qui dira ensuite si la preuve de la propriété est difficile à établir, et non l’inverse. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. L’amendement n° 186, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
Il est instauré un moratoire sur l’usage des armes de catégorie B et C mentionnées aux articles R. 511-12 à R. 511-13 du code de la sécurité intérieure pour lesquelles les policiers municipaux sont susceptibles d’être autorisés à en faire usage.
Ce moratoire s’applique pour une durée de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.
Au terme du moratoire, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation générale sur l’opportunité de doter la police municipale d’armes de la catégorie B et C et ses conséquences sur la relation entre la police et la population.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Selon un rapport de la Cour des comptes d’octobre 2020, 77 % des policiers municipaux disposent d’armes et plus de la moitié d’entre eux – 57 % exactement – sont dotés d’une arme à feu.
Alors que le délitement de la confiance entre les citoyens et les forces de sécurité se poursuit à chaque bavure policière et à chaque absence de sanction des infractions commises par ces agents, et alors que l’image de la police se dégrade de manière exponentielle depuis les manifestations des gilets jaunes, nos polices municipales, faisant fi de ces constatations, sont de plus en plus armées.
Cela ne va aucunement dans le sens de de la restauration de la confiance nécessaire afin que l’action des forces de sécurité se déroule dans les meilleures conditions possible et que celle-ci soit respectée par tous.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires affirme son opposition au virage sécuritaire caractérisé par une police municipale d’intervention armée et offensive, présente sur la majorité du territoire.
Le maintien de l’ordre devrait être considéré comme une prérogative régalienne de l’État, quand la police municipale devrait assurer un rôle de police de proximité, une police du quotidien.
Le présent amendement de repli du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires tend ainsi à prévoir un moratoire sur le désarmement de la police municipale et une étude d’impact sur la relation entre police municipale et citoyens.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. La commission est évidemment défavorable à cet amendement.
Il faut faire confiance au maire ! Le désarmement est une décision qui lui appartient. Un moratoire imposé d’en haut et de Paris ne se justifie pas.
Faisons confiance aux collectivités locales.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 323 rectifié, présenté par MM. Richard, Mohamed Soilihi, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Remplacer les mots :
Sans préjudice de l’autorité hiérarchique exercée par le maire, dans
par le mot :
Pour
La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Madame la présidente, il commence à se faire tard, mais je demande, à M. le rapporteur et à M. le ministre en particulier, un peu d’attention sur cet amendement qui porte sur une subtilité.
M. Didier Marie. Les autres peuvent donc se dispenser d’écouter ? (Rires sur les travées du groupe SER.)
M. Alain Richard. Les relevés d’infraction qui sont prévus plus tôt à l’article 1er se font sous l’autorité hiérarchique du maire. Le maire est donc légalement en capacité de donner des instructions de service aux policiers municipaux, leur demandant de se concentrer sur tel ou tel délit ou de travailler dans tel ou tel quartier.
Il s’agit ici d’un autre pouvoir : celui d’adresser le procès-verbal – en le contrôlant – au procureur. Ce pouvoir est exercé par le chef de police municipale, raison pour laquelle l’expérimentation est subordonnée à l’existence de celui-ci.
En droit, écrire « sans préjudice de l’autorité hiérarchique exercée par le maire » signifie que l’autorité hiérarchique du maire continue à s’appliquer dans cette matière et donc qu’on lui donne le pouvoir de faire obstacle à la transmission du PV. Cela ne me paraît pas heureux.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, j’estime qu’il serait préférable que cette mention disparaisse de l’alinéa. Le seul rôle que doit pouvoir avoir le chef de police lors de la transmission du procès-verbal est de le relire, de le compléter ou de corriger un élément de fait. Le maire ne doit quant à lui pas pouvoir intervenir sur le contenu de ce PV.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Je ne partage pas l’explication de texte que vient de faire M. Richard.
« Sans préjudice de l’autorité hiérarchique exercée par le maire » signifie que le maire continue à avoir une autorité hiérarchique sur le directeur et sur le chef de service de police municipale.
Cela étant, il est sous le contrôle de l’autorité judiciaire pour les actes qu’il effectue en conséquence.
Je maintiens donc l’avis défavorable de la commission, qui a été défendu ici par plusieurs de mes collègues.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 366, présenté par MM. Daubresse et L. Hervé, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Remplacer la mention :
IV
par la mention :
V
La parole est à M. le rapporteur.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)
PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard
vice-présidente
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 122 est présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 242 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités du contrôle par l’Inspection générale de l’administration, de l’action des agents de police municipale, exerçant les compétences de police judiciaire mentionnées au présent article.
…. – Les actes définis au présent article sont dirigés par le procureur de la République sous la surveillance du procureur général et de la chambre d’instruction.
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 122.
Mme Esther Benbassa. L’article 1er, comme cela a déjà été souligné, vise à octroyer des compétences de police judiciaire à des policiers municipaux, dans le cadre d’une expérimentation d’une durée de trois ans. Le transfert s’effectue après une habilitation du procureur général.
Pour certains actes, le directeur de la police municipale pourra agir directement après autorisation préalable du procureur de la République. Les agents de police municipale seraient également autorisés à établir des procès-verbaux lorsque cela ne nécessite pas de leur part un acte d’enquête, et ce pour une liste de contraventions définies.
Il apparaît que le texte ne prévoit aucun mécanisme de contrôle des polices municipales agissant comme officier de police judiciaire.
En conséquence, cet amendement tend à proposer un double mécanisme de contrôle de l’action des agents de police municipale : d’une part, un contrôle par l’inspection générale de l’administration, qui sera défini par décret pris en Conseil d’État selon des modalités assimilables à celles qui sont mises en place pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale ; d’autre part, un contrôle par la voie judiciaire, selon les modalités prévues par le code de procédure pénale prévoyant que les actes des agents de police municipale agissant comme officier de police judiciaire soient placés sous contrôle du procureur de la République.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 242.
Mme Cécile Cukierman. Il s’agit de permettre le contrôle des agents de police municipale dans les prérogatives de police judiciaire qui leur sont dévolues afin de garantir la constitutionnalité de l’ensemble du dispositif.
Les nouvelles missions dévolues à la police municipale posent directement la question du lien entre les policiers municipaux, dans leurs fonctions de police judiciaire, et les administrations judiciaires qui en assument le contrôle.
Certes, le transfert de compétence s’effectue après l’habilitation du chef de service par le procureur général. Pour autant, cette seule garantie ne nous semble pas suffisante.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons d’adopter un dispositif, préconisé par le Conseil national des barreaux, instaurant un double mécanisme de contrôle des agents de police municipale, à la fois par l’inspection générale de l’administration, dont le contrôle sera défini par décret pris en Conseil d’État selon des modalités assimilables à celles qui sont mises en place pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale, et par un contrôle judiciaire, selon les modalités prévues par le code de procédure pénale prévoyant que les actes des agents de police municipale agissant comme officier de police judiciaire soient placés sous contrôle du procureur de la République.
Ces garanties nous semblent indispensables pour placer l’action de ces policiers municipaux dans le cadre de la mission judiciaire constitutionnellement définie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Mme Benbassa et Mme Cukierman proposent d’indiquer que les actes réalisés dans le cadre de l’expérimentation sont dirigés par le procureur de la République, sous la surveillance du procureur général et de la chambre d’instruction. Cette partie de leurs amendements est déjà satisfaite par la rédaction actuelle de l’article 1er.
Elles proposent également de renvoyer à un décret le soin de définir les modalités du contrôle de l’action des agents de police municipale par l’inspection générale de l’administration. Or ces modalités sont déjà définies à l’article L. 513-1 du code de la sécurité intérieure.
Par ailleurs, l’article 6 ter de la proposition de loi assouplit ces modalités de contrôle afin de les rendre plus facilement réalisables.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 122 et 242.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 102 rectifié, présenté par MM. Le Rudulier, Husson et Meurant, Mmes Demas, Bellurot et Drexler, MM. Babary, Tabarot et del Picchia, Mme Dumont, M. de Nicolaÿ, Mme Gruny, MM. Boré, Brisson, Favreau et Regnard, Mmes Raimond-Pavero, Deroche, Lopez, Deromedi, V. Boyer, M. Mercier et Gosselin, M. Bonne, Mmes Belrhiti et Thomas et MM. Genet et Bascher, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après l’article L. 234-3 du code de la route, il est inséré un article L. 234-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 234-3-…. – À titre expérimental, dans dix départements et pour une durée de six mois à compter de l’entrée en vigueur des mesures d’application prévues au présent article, et par dérogation aux dispositions de l’article L. 234-3 du présent code, le directeur de police municipale ou le chef de service de police municipale agissant sur réquisition ou sur autorisation préalable du procureur de la République territorialement compétent précisant les lieux et les dates de cette réquisition ou autorisation, peut soumettre à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré et à des épreuves de dépistage de l’usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants l’auteur présumé d’une infraction punie par le présent code de la peine complémentaire de suspension du permis de conduire ou le conducteur impliqué dans un accident de la circulation mortel ou ayant occasionné un dommage corporel ou matériel. »
La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.
M. Stéphane Le Rudulier. Cet amendement vise à renforcer la lutte contre l’alcoolémie et l’usage des stupéfiants sur la route. Ces deux problématiques majeures sont génératrices d’accidents plus ou moins graves, parfois mortels.
Nous souhaitons permettre, à titre expérimental, aux directeurs de police municipale ou aux chefs de service de la police municipale de procéder, sur réquisition du procureur de la République ou avec son autorisation préalable, à des dépistages soit du taux d’alcoolémie soit de l’usage de stupéfiants d’un conducteur présumé en infraction au code de la route ou impliqué dans un accident mortel ou ayant causé des dommages corporels ou matériels.
Monsieur le ministre, renforcer la lutte contre l’insécurité routière était l’une des préoccupations du Livre blanc de la sécurité intérieure que vous aviez présenté en novembre dernier. L’adoption de cet amendement permettrait d’élargir le champ de cette préconisation aux forces de police municipale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Je comprends et partage l’intention de M. Le Rudulier, mais il propose une expérimentation dans l’expérimentation.
Il s’agit d’autoriser les directeurs et chefs de service de la police municipale dans dix départements et pour une durée de six mois à soumettre à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique l’auteur présumé d’une infraction grave.
Comme je l’ai déjà dit à Mme Boyer, c’est un acte d’enquête. À ce titre, le Conseil constitutionnel le censurerait comme il a censuré, voilà quelques années, la possibilité pour les policiers municipaux, au motif qu’ils sont sous l’autorité du maire.
Par ailleurs, les auteurs de cet amendement ne précisent pas la finalité de ces contrôles – les agents de police municipale n’étant pas compétents pour constater les infractions en question – ni les modalités de choix des dix départements concernés.
En outre, les policiers municipaux peuvent déjà procéder à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique, sous l’ordre et la responsabilité d’un officier de police judiciaire. J’entends bien qu’il s’agit d’être beaucoup plus pragmatique et d’aller directement à la compétence des policiers municipaux, mais le dispositif proposé se heurte à une inconstitutionnalité.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Nous en revenons à l’amendement n° 332, dont le vote a été précédemment réservé et qui, entre-temps, a été rectifié par le Gouvernement.
Je suis donc saisie d’un amendement n° 332 rectifié, présenté par le Gouvernement, ainsi libellé :
I. - Alinéa 10
Compléter cet alinéa par les mots :
ou contacter l’officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent en vue de procéder à la saisie du véhicule sous son ordre et son autorité.
II. - Alinéa 11
Rétablir le IV dans la rédaction suivante :
IV. – Les agents de police municipale et les gardes champêtres peuvent également, pour les infractions mentionnées aux 1° et 5° du V du présent article commises sur la voie publique, procéder à la saisie des objets ayant servi à la commission des infractions ou qui en sont le produit et pour lesquelles la peine de confiscation de l’objet ou du produit est prévue. La saisie est constatée par procès-verbal.
Pour l’infraction mentionnée au 1° du même V, les objets saisis sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés, en présence de la personne, qu’elle en soit la propriétaire ou qu’elle en ait la libre disposition. Le directeur de police municipale ou le chef de service dûment habilité contacte l’officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent en vue de lui confier les saisies ainsi réalisées.
Pour l’infraction mentionnée au 5° dudit V, les produits saisis sont immédiatement détruits, en présence de la personne, qu’elle en soit la propriétaire ou qu’elle en ait la libre disposition.
La parole est à M. le ministre.