Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d’abord à remercier le groupe CRCE d’avoir demandé l’inscription de ce débat à l’ordre du jour de nos travaux.
Comme l’écrivait Jean Giraudoux en 1928 dans son ouvrage Le Sport, « il y a des épidémies de tout ordre ; le goût du sport est une épidémie de santé ».
La crise liée à la covid-19 rythme nos vies depuis plus d’un an maintenant. Pour tenter de contenir la propagation du virus, des mesures drastiques ont été mises en œuvre. Elles ont eu des conséquences dramatiques pour nombre d’acteurs économiques, culturels ou associatifs sur l’ensemble de notre territoire. Le monde sportif a ainsi été lourdement touché.
On ne compte plus le nombre d’événements annulés, reportés ou restreints au strict minimum, les championnats stoppés, qui s’ajoutent à la fermeture des lieux de rassemblement : les salles de sport, les stades, les gymnases, les piscines.
Si rien n’est fait rapidement, les difficultés pourraient perdurer bien après la réouverture des infrastructures accueillant du public.
Nombreuses sont les associations sportives qui font face à une évaporation du nombre de leurs licenciés et à des situations financières compliquées engendrées par le manque d’événements. Leurs adhérents, notamment les plus jeunes, les ont financées par une adhésion ou l’acquisition d’une licence, mais sans qu’aucune compétition soit organisée.
Aujourd’hui, sans aucune assurance de reprise des championnats, tous ces amateurs sont dans l’expectative ; ils ne s’acquitteront pas forcément d’une nouvelle adhésion à leur club de sport. Déjà mises en difficulté par le manque de bénévoles, les associations sportives redoutent aujourd’hui des défections d’adhérents en grand nombre.
Comme un problème ne vient jamais seul, l’absence de manifestations, source de recettes, et de compétitions auront aussi pour effet de faire baisser les ressources provenant des sponsors, qui peuvent représenter une part importante de la trésorerie des clubs amateurs.
Les associations sportives redoutent également une chute importante du nombre de licenciés, ce qui aurait pour conséquence de mettre à mal bon nombre de championnats, notamment pour les sports d’équipe. La crainte existe aussi que les adhérents demandent un remboursement de leur cotisation.
Au vu de l’ensemble de ces difficultés, le risque n’est pas nul qu’un grand nombre de ces structures ne puissent y faire face et disparaissent.
Par le lien social que leur tissu facilite, par les valeurs qui y sont transmises et les effets bénéfiques que la pratique a sur la santé des adhérents, les associations sportives sont indispensables au vivre ensemble sur tout le territoire national.
Pour qu’un retour des championnats amateurs soit possible, au-delà de l’amélioration sanitaire attendue, il faut être en mesure d’agir sur le coût de l’adhésion annuelle des licenciés. Plusieurs pistes sont à l’étude. Parmi elles, on peut citer le travail autour du dispositif Pass’Sport, qui pourrait apporter une aide à la prise en charge des licences sportives de 1,8 million de jeunes, à hauteur de 50 à 80 euros ; cela va évidemment dans le bon sens.
S’assurer que la pratique du sport soit accessible à tous est d’autant plus primordial que bon nombre de jeunes basculent dans la précarité du fait de la crise.
D’autres actions doivent certainement être envisagées. Dans cette perspective, et toujours afin de limiter le coût des licences et de favoriser la trésorerie des associations, pourrait-on réfléchir à un crédit d’impôt sur les frais d’adhésion ou à une déduction fiscale supplémentaire pour les dons aux associations ?
Par ailleurs, une part du coût de la licence sportive couvre les frais d’assurance. Or, depuis l’arrêt des championnats, il n’y a plus de risque d’accident sur les terrains de sport. Dès lors, une nouvelle proposition peut être faite : les assureurs ne pourraient-ils pas être mis à contribution, en supprimant leur appel à cotisations, pour favoriser la reprise des licences sportives amateur ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Madame la ministre, depuis un an, la pratique sportive est entravée. Les différents règlements et protocoles qui se sont succédé au fil des confinements et des couvre-feux ont créé beaucoup d’incompréhensions. Il est même arrivé que les parcs et les plages soient interdits d’accès, ce qui a découragé la pratique sportive libre et de plein air. Tout cela malmène considérablement les responsables d’associations, les bénévoles, les familles et les enfants qui pratiquent une activité physique et sportive.
C’est encore plus vrai aujourd’hui, alors que débute dans seize départements un troisième confinement, même si l’on a pu reprendre l’activité physique et sportive à l’intérieur dans les établissements scolaires, dont beaucoup avaient vécu des situations tout à fait ubuesques. Tant mieux, mais cela ajoute de la confusion à la confusion – c’est malheureusement une constante dans la gestion de la crise par ce gouvernement –, d’autant qu’en sens inverse, il y a quelques semaines à peine, l’interdiction de la pratique d’activités en salle avait été annoncée sans préavis, ce qui a par exemple affecté la danse.
En dépit des efforts financiers des clubs pour se conformer à la réglementation sanitaire, de leur réactivité pour adapter la pratique aux nouvelles règles encadrant les lieux et les publics autorisés, et de leur capacité à démontrer leur sérieux dans la lutte contre la propagation du virus dans le milieu du sport amateur, le risque est grand aujourd’hui de voir de plus en plus de personnes s’éloigner du sport.
Déjà plus de 30 % des licenciés semblent se détourner de leurs clubs. C’est pourquoi il y a aujourd’hui unanimité pour réclamer le droit de pratiquer son sport favori.
Jason Lorcher, ancien hockeyeur de haut niveau à Rouen, a ainsi lancé une pétition, voilà quelques jours. Les « sportifs en détresse » qu’il a rassemblés sont aujourd’hui plus de 30 000 à témoigner des méfaits de l’interruption de l’activité sportive : amateurs, enfants, jeunes ou adultes, bénévoles ou dirigeants de clubs, tous expriment leur besoin vital de renouer avec la pratique sportive.
Du point de vue de la santé, chacun sait ici combien l’activité sportive est importante pour la prévention, y compris maintenant, face au covid-19. La rupture de la pratique risque aussi de créer de nouvelles problématiques de cohésion sociale. De l’avis des professionnels de santé, les conséquences de cette interruption peuvent en effet être graves sur le bien-être, mais également sur l’équilibre psychologique ou psychique de la personne. De plus, dans cette période particulièrement anxiogène, qui expose au repli sur soi, on manque cruellement du partage qui se noue autour du sport, ce qui exacerbe les inégalités sociales et isole les pratiquants les plus en difficulté.
Cette rupture risque aussi, à terme, d’avoir des conséquences sur le sport de haut niveau, en asséchant le vivier dans lequel l’élite sportive puise ses ressources. Nous avons tous plaisir à regarder de grandes compétitions internationales, de beaux matchs de sport professionnel, mais ceux-ci prennent sens parce qu’ils s’appuient sur un sport amateur et populaire : ils le font rayonner, mais la réciproque est tout aussi vraie.
Comment comprendre, dès lors, qu’aujourd’hui même, il y a quelques heures, les compétitions départementales et régionales de football aient été stoppées par la Fédération française de football, alors même que débutent les éliminatoires de la Coupe du monde de 2022 ?
Tout cela suscite des questions sur le modèle sportif qui perdurera après cette crise ; elles ont été posées par Jérémy Bacchi.
Nous sommes pour notre part convaincus que le sport est un véritable outil d’éducation, d’inclusion, d’épanouissement et de solidarité. Il est de ce fait encore plus utile en ce moment même que d’ordinaire.
Il faut donc créer les conditions de la reprise de la pratique sportive, bien évidemment dans le respect des règles sanitaires, et soutenir les clubs comme les collectivités, dont l’implication en la matière n’est plus à démontrer.
Le Pass’Sport est un outil qui peut contribuer à lever les obstacles financiers pour tous ceux qui, dans le contexte de crise sociale actuelle, auront des difficultés à payer leur licence. Nombre de collectivités auront à cœur d’y participer.
N’oublions pas cependant qu’elles aussi sont lourdement affectées, financièrement, par la crise sanitaire et toutes ses conséquences ! Il faut le prendre en compte. Il faut que les financements de l’État soient au rendez-vous si nous voulons que le Pass’Sport suscite véritablement la reprise de licences par le plus grand nombre.
La situation que nous connaissons doit être l’occasion de revoir en profondeur le financement de notre modèle sportif et de porter un plan ambitieux en matière de sport.
Je salue à mon tour l’ensemble des propositions qui ont été émises sur toutes les travées de notre assemblée à l’occasion de ce débat. Vous avez là, madame la ministre, des propositions à la fois précises, solides et concrètes qui peuvent permettre de redonner un nouveau souffle au mouvement sportif dans notre pays, ou de le relancer, puisque l’on parle beaucoup du plan de relance en ce moment. Nous sommes heureux d’avoir pu contribuer ce soir à ce débat. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. Madame la ministre, le sport est un enjeu de société. Il représente aussi un enjeu économique. On lui consacre 0,14 % du budget de l’État et il représente 1,7 % du PIB de la France. Le sport est encore un enjeu populaire : on compte 10 millions de licenciés dans les différentes fédérations sportives ; deux Français sur trois pratiquent toutes les semaines une activité sportive régulière.
Eu égard à ces éléments, pendant longtemps, on a opposé dans notre pays le sport d’élite, professionnel, au sport amateur, sport de masse. Aujourd’hui, nous serons tous d’accord ici pour reconnaître qu’il est plus important de mettre en avant les schémas de complémentarité que les oppositions.
Dans ma bonne ville de Castres, au temps où cela était possible, 10 000 personnes se réunissaient tous les quinze jours pour assister à un match de rugby, soit un quart de la population de la ville. Aucun autre événement ou mouvement social populaire ne peut rassembler autant de personnes aussi régulièrement : voilà la magie des sports !
Du reste, madame la ministre, je profite de cette occasion pour vous interpeller directement en tant que président de l’amicale parlementaire de rugby et vous rappeler combien il est important que vous continuiez à aider les clubs professionnels du Top 14, dont le modèle économique repose sur les hospitalités et les spectateurs, avec toutes les conséquences que l’on imagine. Ces clubs ont besoin de l’aide de l’État pour faire face au huis clos qui leur est imposé !
Au-delà, j’estime essentielle la capacité de notre pays à organiser de grands événements sportifs. Tous les ans, on a le Tour de France. En 2023, nous accueillerons la Coupe du monde de rugby, pour laquelle 310 000 billets ont été vendus en quelques heures, ce qui montre toute l’attente qu’il peut y avoir en la matière. Enfin, on prépare les jeux Olympiques de 2024, eux aussi essentiels à bien des égards.
La réussite sportive, dans ses différentes manifestations, dépend aussi de la capacité de fonctionner du socle sur lequel elle repose, c’est-à-dire le sport amateur. De ce point de vue, la pandémie à laquelle nous devons faire face risque d’avoir à terme des effets dévastateurs, comme cela a déjà été rappelé. Les enjeux du sport en matière de santé publique sont particulièrement forts et importants.
J’ai rencontré ces dernières semaines de nombreux maires de mon département. Ils m’ont fait part de leurs plus profondes inquiétudes au regard du fait que certains jeunes qui avaient une pratique sportive sombrent aujourd’hui dans certaines addictions : l’alcool, le tabac, la drogue peut-être pour certains d’entre eux ! Il y a lieu d’être particulièrement vigilant.
Il faut donc se donner la possibilité d’une reprise de l’activité sportive qui soit la plus massive et la plus rapide possible.
J’ai consulté bien des élus, notamment des maires et des adjoints chargés des sports, parmi lesquels je citerai ceux de Gaillac, de Mazamet et de Saint-Sulpice-la-Pointe. Il ressort de ces entretiens un élément fondamental, madame la ministre : il faut donner aux acteurs locaux la capacité d’adapter un certain nombre de règles nationales, de manière à favoriser la reprise la plus rapide possible de l’activité sportive ! Il faut leur apporter des éléments de souplesse, de sorte que des protocoles spécifiques puissent être expérimentés dans nos collectivités, nos départements et nos territoires. C’est un enjeu majeur.
Je terminerai mon propos par une citation de Jean Giraudoux : « Il y a des épidémies de tout ordre ; le goût du sport est une épidémie de santé. » Puisse cette épidémie de santé durer le plus longtemps possible ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cyril Pellevat. Madame la ministre, le monde sportif souffre depuis près d’un an. À ce jour, il n’a aucune perspective de reprise ; seuls les clubs professionnels sont pleinement autorisés à pratiquer avec contact et à prendre part à des compétitions à huis clos. Ce n’est pas idéal, mais c’est adapté et proportionné à la situation sanitaire.
En revanche, le sport amateur, la grande majorité des clubs semi-professionnels et les salles de sport restent sur la touche. Les clubs semi-professionnels et amateurs sont tous soumis au même régime, qu’ils prennent ou non part à des compétitions nationales ou continentales. D’après les consignes qu’ils ont reçues de la part de la direction des sports, seuls les clubs comptant plus de 70 % de sportifs professionnels peuvent s’entraîner sans distanciation et prendre part à des compétitions. Ce critère n’est absolument pas adapté à la réalité du monde sportif et met de côté un grand nombre de clubs qui évoluent dans des compétitions de haut niveau.
Madame la ministre, je vous ai envoyé un courrier pour vous alerter de la situation dans laquelle se trouvent ces clubs qui rassemblent à la fois des sportifs de haut niveau, qui sont autorisés à s’entraîner avec contact, et des sportifs amateurs, qui ne peuvent s’entraîner que sans contact et en dehors du couvre-feu. En raison de ce critère de 70 %, la plupart de ces clubs ne peuvent pas prendre part à des compétitions ni s’entraîner de façon adaptée pour celles-ci.
Je vous ai alors proposé de fixer différemment les critères, en autorisant les compétitions et les entraînements sans distanciation uniquement pour les clubs évoluant à l’échelle nationale ou européenne. Ceux qui ne prennent part qu’à des compétitions départementales ou régionales n’y seraient pas autorisés.
Dans votre courrier de réponse, vous m’avez indiqué que permettre la reprise des entraînements avec contact pour l’ensemble du sport amateur n’était pas adapté à la situation sanitaire. Il ne s’agit absolument pas de permettre une reprise pour tous, cette demande concerne les seuls clubs prenant part à des compétitions de haut niveau et ayant de ce fait des budgets importants que les aides actuelles ne peuvent compenser.
Cette règle des 70 % a des conséquences désastreuses pour les clubs. La majorité des fédérations ont dû annuler les championnats de France et plusieurs devront rompre les engagements qu’ils avaient pris dans le cadre des championnats européens. Plusieurs clubs voient leurs membres les quitter pour d’autres, situés dans des pays étrangers où les compétitions amateurs ou semi-professionnelles sont autorisées, tels que la Suisse, l’Italie, la Finlande, l’Espagne ou encore l’Allemagne.
Malheureusement, il est déjà trop tard pour rattraper cette situation. Il faut donc maintenant tout miser sur la saison prochaine. Les clubs sont conscients de la situation sanitaire et leurs revendications sont proportionnées à celle-ci.
D’une part, ils souhaitent une reprise des sports collectifs avec contact avant l’été, en priorité pour les jeunes. Cela leur permettra de sécuriser leurs inscriptions pour la rentrée de septembre prochain.
D’autre part, si d’ici à l’été la situation sanitaire n’est pas suffisamment stabilisée pour permettre une reprise du sport pour tous, les clubs souhaitent que le sport sans distanciation et les compétitions soient possibles uniquement pour ceux d’entre eux qui évoluent dans des compétitions nationales et européennes, pour les jeunes comme pour les adultes.
Si par malheur l’épidémie venait à se prolonger jusqu’à la prochaine saison, madame la ministre, il est absolument indispensable que vous ne reconduisiez pas cette règle absurde de 70 % de professionnels au sein des clubs, sans quoi nombre d’entre eux ne se relèveront pas. Vous engagez-vous de ce fait à ne pas laisser le sport collectif à l’abandon et à étudier leurs propositions raisonnables et sensées ?
Enfin, j’en viens à la situation des salles de sport. Déjà fermées durant le premier confinement, elles le sont de nouveau depuis le mois d’octobre dernier. Elles sont aidées au titre du fonds de solidarité, mais celles qui enregistrent moins d’un million d’euros de chiffres d’affaires par mois ne sont pas éligibles à l’indemnisation de leurs charges fixes. Cela changera au début du mois d’avril prochain, mais seuls les mois de janvier, février et mars seront indemnisés de façon rétroactive, alors que les charges sont supportées depuis de nombreux mois. Plus de 300 salles ont déjà déposé le bilan et il a fallu plus d’un an pour que leurs alertes soient entendues. Quel gâchis !
Le sport participe pourtant à la lutte contre la pandémie, puisque les personnes en bonne santé et pratiquant une activité physique régulière ont moins de chances de souffrir d’une forme grave de la covid-19.
La plupart des études prouvent en outre que, si le sport sans masque en milieu fermé favorise la propagation du virus, une pratique sportive en intérieur avec masque, distanciation et aération présente très peu de risques. Si l’interdiction d’ouverture peut se comprendre dans les départements confinés ou en surveillance, elle est loin d’être proportionnée dans ceux où les taux d’incidence sont bas.
Le Gouvernement a commencé à territorialiser les mesures de lutte contre l’épidémie, mais il faut aller plus loin et faire de même pour l’ouverture des salles de sport. Des critères supplémentaires peuvent être fixés, tels qu’une surface suffisante pour pratiquer la distanciation et des moyens d’aérer la salle.
Interdire à toutes les salles d’ouvrir sur tout le territoire n’est pas proportionné. Aussi, madame la ministre, comptez-vous défendre la réouverture des salles de sport dans les départements où le virus circule peu ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Ventalon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Ventalon. En écoutant vos propos, mes chers collègues, qui font écho aux témoignages des licenciés que j’ai rencontrés, évoquant les risques qui pèsent sur leurs fédérations et leurs clubs, une évidence apparaît : le rôle du sport dans nos sociétés. Cela nous oblige à mesurer la portée civilisationnelle du terme de « culture physique ».
En m’entretenant notamment avec les professionnels des salles de sport de l’Ardèche, au-delà du désarroi, j’ai perçu un sentiment d’incompréhension et de gâchis.
Plutôt que l’interdiction brutale, l’État aurait dû et pu instaurer avec eux un protocole adapté à la crise. En effet, non seulement aucun cluster n’est apparu dans ces établissements, mais des mécanismes d’identification à l’entrée permettent de tracer l’heure d’arrivée des adhérents et d’identifier les personnes croisées.
Plus généralement, les gérants et les responsables associatifs qui assurent le fonctionnement des équipements sportifs connaissent mieux que quiconque les gestes et les déplacements qui y sont pratiqués. Hélas, ils n’ont pas été consultés, alors qu’ils auraient pu être des auxiliaires précieux pour éliminer le virus sans détruire le sport.
Il faudra s’en souvenir demain. Il faudra aller chercher des solutions innovantes.
Je veux en prendre un exemple relatif aux masques, qui sont indispensables dans l’attente de l’immunité collective, mais peu compatibles avec l’exercice physique. Devons-nous pour autant continuer à renoncer totalement à nos activités sportives, avec les conséquences que chacun a déplorées ici ? Non !
Concentrons plutôt nos efforts sur la diffusion de masques adaptés à un large éventail de disciplines, notamment les sports collectifs. Une entreprise ardéchoise, Chamatex, développe justement de tels masques, qui n’entravent pas la respiration et permettent une mobilité impensable avec les modèles basiques. Soutenons-la ! Encourageons ainsi partout le génie du pragmatisme, ce French flair qui sifflera la fin de cet interminable arrêt de jeu.
Au-delà de cette épidémie dont nous finirons par venir à bout, le temps est déjà venu de réfléchir aux crises de demain. Je pense à notre future capacité à passer, en cas de nouvelle alerte épidémique et dans un délai minimal, à une organisation adaptée à nos pratiques sportives, individuelles ou collectives.
Les orateurs précédents l’ont souligné : faute d’anticipation, nous découvrons brutalement les conséquences de la privation de sport sur la population.
Il faut donc, madame la ministre, que vos services travaillent dès à présent sur un modus operandi qui serait directement efficient en cas de nouvelle crise. Il permettrait aux associatifs, aux professionnels, aux élus et aux sportifs de basculer immédiatement dans un fonctionnement de crise, avec des règles du jeu connues, puisque déjà définies en amont.
Les acteurs du secteur, comme le collectif événementiel sportif Outdoor, très actif dans mon département, proposent des expérimentations encadrées pour sauver des événements sportifs grand public en plein air. Accompagnons-les !
En 2020, nous avons été surpris et désemparés. Aujourd’hui, nous devons prévenir un futur épisode pandémique avec l’état d’esprit des athlètes de haut niveau, c’est-à-dire en nous jurant d’être prêts le jour de l’épreuve.
Pour paraphraser une devise célèbre, je dirais que nous devons passer à ce format adapté plus vite, avec des niveaux de maintien de la pratique plus hauts, et que nous en sortirons plus forts.
Madame la ministre, à vous qui avez en votre temps prononcé le serment olympique, il appartient de prendre ce soir devant nous ce nouvel engagement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Jérémy Bacchi et Claude Kern applaudissent également.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures quinze.)
Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie tout d’abord le groupe CRCE d’avoir proposé l’inscription de ce débat thématique autour du sport à l’ordre du jour de vos travaux.
Comme certains d’entre vous l’ont souligné, je pense que ce débat témoigne de votre motivation à traiter de ce sujet prochainement, peut-être au sein de cette assemblée. J’espère qu’il préfigure l’examen de la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France que l’Assemblée nationale a discutée et adoptée la semaine dernière.
Pourquoi cette proposition de loi est-elle importante ? Permettez-moi de faire le lien entre ce texte et les propos que vous avez tenus de ce soir, mesdames, messieurs les sénateurs.
D’abord, ce texte se place au cœur d’une actualité dominée par la crise sanitaire et des préoccupations des associations sportives et des collectivités, soucieuses de l’état et de l’avenir de ce monde associatif sportif, qui est tellement important pour la cohésion sociale, pour la santé physique et psychologique des Françaises et des Français, mais aussi, tout simplement, pour le vivre ensemble, ce vivre ensemble qui nous manque tant aujourd’hui.
Il est essentiel que ce texte ouvre de nouveaux champs d’action au monde associatif pour que celui-ci vienne en appui à des politiques publiques dépassant le seul cadre du sport en France, notamment à l’échelon local : auprès des personnes handicapées, à l’école… Il importe de créer davantage de liens entre le monde associatif sportif et le monde économique afin de promouvoir l’attractivité des territoires. Dans le cadre du volet sport-santé, les associations sportives peuvent devenir de véritables outils pour sensibiliser nos concitoyens à cette thématique.
Il s’agit également, comme vous le demandez, d’ouvrir des perspectives de reprise pour la pratique sportive populaire et accessible à tous. Pour ce faire, nous devons parvenir à structurer différemment le monde associatif, qui joue un rôle majeur.
Vous avez cité le nombre d’emplois que le sport génère et le nombre de personnes impliquées en France, je ne reprendrai pas ces chiffres que nous connaissons tous. Le monde du sport est important pour notre économie. Nous savons aussi combien il est déterminant pour les enfants et les adolescents, car il leur permet d’exprimer une passion, un engagement personnel, voire de définir un projet de vie. Il faut donc que les collectivités et l’ensemble des responsables publics soient aux côtés de ces jeunes qui mettent le sport au cœur de leur existence.
Le titre Ier de cette proposition de loi a pour objet d’ouvrir davantage le champ d’intervention du monde associatif pour lui permettre de se structurer, d’aller chercher de nouveaux publics, d’être plus en lien avec des politiques locales – communes, agglomérations, régions – ou nationales.
Le titre II traite du renouveau du monde sportif. Lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, une réforme était déjà en cours, engagée par Laura Flessel, dont l’ambition était de nouer une relation différente avec le mouvement sportif. Il s’agissait également de porter une attention particulière à ce qui se passait en matière sportive sur nos territoires et dans nos collectivités, en associant différemment le monde économique à la politique du sport afin de trouver de nouveaux financements.
Le Sénat a voté la création d’un groupement d’intérêt public, l’Agence nationale du sport, permettant d’instaurer une gouvernance partagée. Cette agence met en effet autour de la table l’ensemble les acteurs – collectivités, mouvements sportifs, État, entreprises – pour traiter sérieusement de la politique du sport, promouvoir des cofinancements et faire prévaloir l’utilité du sport pour la société.
En contrepartie d’un nouveau contrat passé entre l’État et le monde sportif, qui confère à ce dernier une autonomie accrue, nous attendons du mouvement sportif qu’il témoigne d’une responsabilité plus grande, qu’il se restructure, se repense et se renouvelle. Voilà pourquoi le titre II aborde la question de la parité dans les instances sportives – je sais que pour certaines et pour certains d’entre vous cela compte beaucoup. Il y est également question d’un lien plus fort entre l’instance fédérale, les clubs et les adhérents au travers des modalités de vote au sein des instances dirigeantes des fédérations. Il pose également la question de la limitation du nombre de mandats pour les présidents de fédération afin de promouvoir le renouvellement des générations et la mixité. Il s’agit d’apporter au monde associatif des perspectives nouvelles de développement.
Enfin, le titre III traite du modèle économique que vous avez évoqué à plusieurs reprises ce soir. Comment protéger le modèle économique du sport en France ?
Vous l’avez souligné dans certaines de vos interventions, le Gouvernement assume tout à fait l’idée que le sport ne se résume pas à la pratique amateur. Certes, le sport amateur constitue la base de la pratique sportive en France, mais tout cela conduit au sport professionnel, c’est-à-dire à des carrières et à des métiers. C’est un aspect fondamental que nous souhaitons affirmer et protéger, de la même manière que le monde amateur et son modèle économique doivent être structurés pour mieux être préservés.
Je suis donc ravie que nous puissions ce soir, en préambule des discussions qui auront lieu dans cet hémicycle sur la future loi Sport, aborder tous ces sujets ensemble.
J’appelle également votre attention sur une autre échéance, à savoir l’article 25 du projet de loi confortant le respect des principes de la République. Le ministère des sports, en accord avec le mouvement sportif, a prévu d’y inscrire cette relation nouvelle et importante qui lie l’État aux fédérations sportives. Il faut aller encore plus loin et affirmer une relation renouvelée entre le monde fédéral, le sport amateur et le sport professionnel.
Les contrats de délégation qui figurent à l’article 25 sont un point important, car c’est dans ce cadre qu’il sera question des thématiques que vous avez évoquées, qu’il s’agisse de la performance sociale du sport et de toutes les externalités positives du sport. Tout cela pourra se trouver inscrit dans les contrats de délégation, non pas pour contrôler davantage les fédérations ou les contraindre, mais au contraire pour valoriser ce qu’elles font déjà bien, avec engagement et passion. Je pense en particulier à la participation aux valeurs de la République, à la protection des publics, ainsi qu’à la protection de l’éthique et de l’intégrité du sport.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je me suis autorisée à faire un peu de publicité autour de ces deux textes, car ils sont d’une importance majeure dans la gestion de cette crise. J’aimerais vous expliquer maintenant comment a été gérée cette période, qui a été très compliquée pour moi en tant que ministre des sports.
Le sport se situe, en effet, dans la zone dangereuse : on le pratique sans masque, en intérieur, où le virus se répand beaucoup plus facilement qu’en extérieur, dans une pratique collective. Nous sommes donc confrontés à un phénomène de groupe, que l’on soit spectateur, pratiquant d’un sport collectif ou d’un sport de contact. Certes, les manières de pratiquer le sport sont diverses et variées, mais il me revient de défendre de la même manière tous les sports, ainsi que l’écosystème associatif et fédéral afin de maintenir, durant cette période très compliquée, un minimum d’activité.
Dans le cadre de cette nouvelle gouvernance, le secteur économique du sport, qu’il s’agisse des salles de sport privées ou des magasins de sport, se tourne vers nous pour que nous défendions sa cause. Nous le faisons avec grand plaisir, car nous sommes tous dans le même bateau, si vous me permettez l’expression.
Nous sommes aussi tous embarqués dans la même aventure, qui nous mènera aux deux grands événements qui scanderont le rayonnement du sport et de notre pays à l’international : la Coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux Olympiques et Paralympiques en 2024. Malgré la crise que nous traversons aujourd’hui, il importe que nous soyons à la hauteur de cette responsabilité que nous avons prise en postulant et en gagnant ces candidatures.
C’est pourquoi il m’a paru dans un premier temps essentiel de préserver la pratique sportive de ceux qui en ont fait leur métier. Nous avons nous aussi été pris par surprise par ce virus. Au mois de mars 2020, quand il s’est agi de préserver la santé des sportifs et des professionnels du sport, il nous a semblé indispensable de leur demander de cesser leur pratique pour les mettre à l’abri, pour les protéger jusqu’au moment où nous en saurions davantage sur cette épidémie. Ensuite, dès le mois de septembre dernier, nous avons fait le choix de les placer au rang de public prioritaire. Nous l’assumons, car il s’agit, je le répète, de personnes pour qui la pratique du sport constitue le métier : elles doivent donc pouvoir exercer leur métier comme tous ceux qui sont aujourd’hui autorisés à travailler.
Nous avons donc décidé qu’il leur serait possible de continuer à pratiquer leur sport. Ce n’est pas facile, car ils doivent subir des tests tous les deux jours et sont contraints à faire davantage attention à la circulation du virus que le reste de la population. En effet, ce qui est en jeu, c’est leur corps, qui est leur outil de travail !
Nous devons accompagner les sportifs, les clubs professionnels et les ligues professionnelles dans la mise en place de tous ces protocoles. Nous travaillons au quotidien avec le monde professionnel pour qu’il maintienne l’activité de ces sportifs afin que ceux-ci n’aillent pas, comme vous l’avez souligné, à l’étranger. Nous voulons aussi qu’ils restent motivés en vue des grandes échéances qui auront lieu en France ou à l’international ; je pense aux jeux Olympiques qui auront lieu dans quelques mois et à ceux qui se tiendront à Paris en 2024.
L’autre aspect essentiel était d’aider les organisateurs d’événements sportifs. Nous les avons accompagnés pour qu’ils puissent nous proposer des protocoles et avons validé un certain nombre d’exceptions dans le cadre des déplacements – je pense à l’ouverture et à la fermeture des frontières. Il importe également d’assurer l’équité des compétitions sportives internationales. C’est donc un public auquel nous avons évidemment fait très attention et que nous soutenons au quotidien.
Pour autant, le sport professionnel n’est pas notre seul public prioritaire, puisque nous sommes également très attachés au sport-santé. Comme vous l’avez rappelé, le sport est bon pour la santé : c’est d’autant plus évident à l’heure actuelle.
Bien avant la crise, le Président de la République a pris l’engagement de valoriser le sport-santé par la création de 500 maisons sport-santé en France, d’ici à la fin de son mandat. Il s’agissait de repérer, de financer et d’accompagner les territoires déjà engagés en ce sens, afin d’aider à faire de sortir de terre de telles structures. Nous y sommes presque, puisque leur nombre s’élève aujourd’hui à 300 sur l’ensemble du territoire. Nous venons d’annoncer la deuxième vague de labellisation et nous avons débloqué une ligne financière de 3,5 millions d’euros pour accompagner les territoires qui financent le sport-santé, thème sur lequel Olivier Véran et moi-même souhaitons mettre l’accent.
C’est pourquoi, lorsque c’est possible, nous préservons au maximum la pratique sportive pour les enfants, dans le cadre scolaire ou dans le cadre associatif. C’est pourquoi nous faisons en sorte, là encore lorsque c’est possible, que la pratique sportive puisse reprendre pour les adultes. C’est le cas aujourd’hui puisque toutes les associations sont autorisées à fonctionner. La seule restriction concerne le sport à l’intérieur.
Comme vous l’avez rappelé, nous comptons beaucoup sur le masque dit sportif. En réalité, il s’agit d’un masque de deuxième génération que tout le monde pourra utiliser. Je pense notamment aux métiers du bâtiment ou aux métiers où l’on parle beaucoup. C’est un masque qui protégera aussi efficacement que les anciens masques contre le virus tout en permettant une respiration plus facile. Nous misons sur ce masque pour que les adultes ou les enfants puissent reprendre le sport en intérieur.
Dans le cadre de l’éducation physique et sportive, ou EPS, lorsque les enfants demeurent dans le même groupe, dans la même classe, il est déjà possible de reprendre une activité sportive. L’arrêt de la pratique pour les enfants depuis le 15 janvier dernier était un élément d’inquiétude pour le Gouvernement.
Si la pratique libre est envisageable pour les adultes, qui peuvent courir et faire leur jogging seuls, elle est plus difficile pour les enfants, qui ont besoin de l’encadrement des éducateurs sportifs et des bénévoles des associations. Ces derniers, qui font de la pédagogie autour de la crise sanitaire, sont les relais du Gouvernement pour faire respecter le protocole. Au travers des enfants, ils font aussi passer des messages aux adultes et aux parents.
La reprise se dessine avec un échéancier bien précis. Les enfants, dans le cadre associatif et périscolaire de l’exercice d’une pratique sportive à l’intérieur, sont maintenant le public prioritaire. Aujourd’hui, les adultes et les enfants sont autorisés à pratiquer un sport, mais uniquement à l’extérieur. Nous incitons d’ailleurs toutes les associations indoor à se rapprocher de celles qui pratiquent en extérieur. Nous demandons également aux collectivités de mettre à disposition des associations leurs équipements sportifs d’extérieur, les cours d’école et leurs espaces publics municipaux afin qu’elles puissent déployer à l’extérieur leur savoir-faire.
Je ne vous cache pas que le fait d’avoir repoussé d’une heure le couvre-feu est une source de motivation supplémentaire par rapport à cet espace de liberté qu’est le sport – c’est ainsi que vous l’avez qualifié et nous en sommes d’accord. Tout cela nous incite à privilégier la pratique sportive jusqu’à dix-neuf heures, après le travail ou l’école.
Nous solliciterons les collectivités et nous leur demanderons, grâce à la mise en place d’une aide financière via une ligne spécifiquement dédiée à l’Agence nationale du sport, d’ouvrir dès maintenant les équipements d’été, par exemple les piscines. J’ai besoin que vous passiez ce message aux collectivités avec lesquelles vous êtes en lien. Le Gouvernement soutiendra le fonctionnement de ces équipements sportifs d’extérieur pour permettre des ouvertures en avance de phase.
Nous voulons découvrir dès à présent des terrains de tennis ou des piscines pour offrir un maximum d’espace à ces associations, qui déploient déjà, depuis le début de la semaine, des activités à l’extérieur pour leurs adhérents.
Nous sommes conscients que la crise est difficile dans le champ sportif comme elle l’est dans d’autres secteurs d’activité. C’est pourquoi le Gouvernement a débloqué un certain nombre d’aides. Vous en avez cité quelques-unes, je les rappelle toutefois.
Depuis le début de la crise, toutes les associations ont pu profiter des mêmes aides que les entreprises. À partir du moment où elles avaient des salariés, elles ont pu bénéficier du fonds de solidarité de la direction générale des finances publiques, la DGFiP, à hauteur de 10 000 euros par mois, et du chômage partiel.
Les associations qui n’ont pas d’employés et qui ne fonctionnent que grâce au bénévolat ont, plus spécifiquement, eu accès à deux enveloppes de 15 millions d’euros – une l’année dernière et une cette année – via le budget de l’Agence nationale du sport : 8 000 associations sportives ont bénéficié de ce fonds d’urgence. Cela peut paraître peu, comparé aux 380 000 associations sportives en France, mais il faut savoir que l’État, en temps normal, n’accorde de subventions qu’à 20 000 associations.
À l’heure actuelle, en effet, l’État n’est pas le principal financeur des associations : il finance l’emploi, il finance en partie les équipements sportifs dans les territoires, il finance partiellement les associations. Quoi qu’il en soit, 8 000 associations, ce n’est pas rien par rapport aux 20 000 associations financées habituellement. Je crois donc que nous avons rempli notre part du contrat !
Nous avons souhaité trouver un équilibre entre l’aide apportée au secteur amateur et l’aide apportée au secteur professionnel. Nous y sommes parvenus, puisque nous avons débloqué 107 millions d’euros pour compenser la perte de billetterie due au huis clos. Une deuxième vague d’aide est aujourd’hui en discussion avec Bercy ; elle sera débloquée prochainement pour soutenir les clubs.
Ce sont des aides considérables, puisque certains clubs ont pu toucher jusqu’à 5 millions d’euros de compensations. Tous les sports qui accueillent habituellement du public ont été concernés, qu’il s’agisse du football, du rugby, du handball, du basket, du volley ou du hockey sur glace : ils ont été aidés à la hauteur de leurs besoins et des pertes qu’a entraînées ce huis clos. Nous continuerons de les aider.
Comme dans tous les autres secteurs d’activité, nous n’avons pas pu aller jusqu’à un remboursement de 100 % des pertes. La compensation a été plafonnée, à l’instar de ce qui a été prévu pour les magasins et les restaurants. En tout état de cause, le secteur du sport n’a pas été traité différemment des autres. Au contraire, il a bénéficié, d’une part, des aides de droit public et, d’autre part, de l’aide spécifique du ministère des sports.
Le plan de relance prévoit des aides supplémentaires, à hauteur de 50 millions d’euros, en faveur de la rénovation des équipements sportifs – il revient aux collectivités de soumettre ces projets aux préfets de région. Un autre budget spécifique de 30 millions d’euros sera consacré aux équipements situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV).
Nous aiderons également, grâce au Pass’Sport, les Françaises et des Français les plus en difficulté financièrement à prendre des licences à la rentrée. Nous sommes très attachés à ce dispositif.
Vous m’avez interrogé sur le public bénéficiaire. Il concerne les enfants âgés de 6 à 16 ans, voire à 20 ans pour les jeunes en situation de handicap. Cette mesure concernera environ 2 millions de Français. Encore une fois, cette aide de 100 millions d’euros viendra compléter les mesures déjà mises en place par les collectivités pour faciliter les adhésions à un club sportif.
Le cofinancement existait bien avant la crise. Il a été structuré différemment par la nouvelle gouvernance du sport afin d’être au plus près des besoins des citoyens et des territoires. À l’heure actuelle, y compris dans la gestion de cette crise, nous voulons travailler main dans la main avec les collectivités.
Les associations et leur survie ne concernent pas que l’État, elles concernent également les villes et l’ensemble des citoyens. Le Gouvernement répondra présent pour soutenir le sport amateur et les structures associatives.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je compte sur vous et sur votre engagement en faveur du sport et des associations sportives. Il importe que nous puissions travailler ensemble sur les thématiques relatives au mouvement sportif soulevées dans le cadre de cette proposition de loi. Il reste encore des modifications à apporter, ainsi que des concertations à mener avec le monde fédéral et le monde professionnel.
Tout comme vous, je suis très attachée à la régulation du modèle économique du sport. Je suis également très attachée à la solidarité entre le sport amateur et le sport professionnel. Ayant été moi-même sportive de haut niveau, je connais le parcours et le circuit que suit tout sportif qui « naît » dans une association. Cette dernière l’aide à devenir quelqu’un, à trouver sa place dans la société. J’en suis d’autant plus consciente que je ne suis pas Française d’origine. Le sport m’a permis de trouver ma place en France, il m’a enseigné ce qu’étaient la République et ses valeurs, et m’a permis d’y adhérer. Je ne méconnais donc pas le rôle du sport de ce point de vue.
Le sport ouvre vers des métiers, vers une carrière de sportif, il permet de s’exprimer professionnellement peut-être plus tôt que dans d’autres secteurs. Il faut encourager les talents et la pratique sportive. Il faut surtout soutenir cette dernière dans les moments de difficulté, c’est ce que nous faisons en collaboration, encore une fois, avec les territoires, les mouvements sportifs et toutes les entreprises, qui sont aussi convaincues que le sport est essentiel au bien-être physique et psychologique des Français.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie encore de la tenue de ce débat. J’espère avoir prochainement l’occasion de discuter de nouveau de sport avec vous ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)