Mme Monique Lubin. Nous avions déposé le même amendement, mais nous n’avions pas vu venir l’article 40 de la Constitution !
Nous estimons effectivement que, quand on est bénéficiaire du RSA, on est déjà dans des dispositifs de minima sociaux depuis un moment : avant le RSA, on a bénéficié de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et, encore avant, on a été au chômage. Quand on arrive au RSA, on est déjà éloigné de l’emploi depuis un moment et on est déjà en grande difficulté. Cette règle d’ancienneté ne nous paraît donc pas opportune et, si ce dispositif devait exister, il devrait, selon nous, s’appliquer immédiatement, dès lors que quelqu’un est bénéficiaire du RSA.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Nous avons eu cette discussion en commission ; à mon sens, cet amendement vient améliorer le texte.
Je partage les propos de René-Paul Savary s’agissant de la « segmentation », même si ce mot n’est peut-être pas le plus approprié. En tout état de cause, si une segmentation était nécessaire, la durée dans le RSA ne me semblerait pas être le critère pertinent.
Par ailleurs, une expérimentation me semble devoir être contingentée. Nous voterons cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme je le disais en discussion générale, en élargissant le dispositif aux bénéficiaires du RSA sans condition de durée, à la différence de « territoires zéro chômeur de longue durée », vous lui ôtez sa spécificité et vous supprimez l’intérêt de l’évaluation en favorisant l’effet d’aubaine qui pourrait en résulter.
Vous souhaitez inclure les personnes dès leur entrée dans le RSA, c’est-à-dire celles qui sont les plus proches de l’employabilité, mais les entreprises trieront elles-mêmes et choisiront, de fait, les bénéficiaires les plus proches de l’employabilité.
Surtout, en 2020, le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté de 9 %. Que recouvre ce chiffre ? D’abord, les personnes qui n’ont pas pu sortir du RSA, parce que l’activité s’est en partie effondrée. Il a été prouvé que ces personnes seraient sorties du RSA en temps normal. Cette expérimentation n’a donc aucun intérêt pour elles, qui ont été bloquées dans le RSA en raison de la conjoncture économique. Les entreprises les emploieront.
Ces 9 % d’augmentation incluent aussi les nouveaux entrants dans le RSA. Les concernant, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous : les nouveaux publics, les indépendants, par exemple, ne sont pas toujours passés par une période longue de chômage et d’ASS. C’est faux. Une grande partie d’entre eux pourront rebondir si l’activité repart.
Enfin, l’augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA s’explique aussi par le fait que beaucoup d’entre eux trouvent, certes, un emploi, mais un emploi précaire. Or quand l’activité s’effondre, que les contrats à durée déterminée et les temps partiels contraints ne sont plus accessibles, en effet, ceux qui y avaient accès auparavant se retrouvent bloqués dans le RSA.
Élargir le dispositif prévu dans cette proposition de loi, en disant aux entreprises de prendre les plus employables, c’est-à-dire les publics nouveaux que je viens d’évoquer, provoquerait un effet d’aubaine allant à l’encontre de la bonne évaluation d’un dispositif spécifique.
Notez que je me contente ici d’apporter un éclairage sur un mécanisme que je ne trouve pas pertinent par ailleurs.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour explication de vote.
M. Laurent Burgoa. Nous n’allons pas reprendre la discussion que nous avons eue en commission des affaires sociales ; à mon sens, il faut louer l’initiative de cette proposition de loi, qui vient du terrain.
Si c’est pour ne pas aller dans le sens des initiatives de terrain, alors, madame, il ne faut pas siéger au Sénat ! Il faut siéger à l’Assemblée nationale, où l’on voit que nos collègues sont complètement déconnectés de la réalité. Vous pourrez ainsi débattre sur des idées.
À mon sens, la proposition de notre collègue Claude Malhuret correspond à une pratique de son département de l’Allier. C’est une initiative qui est bonne à prendre, pourquoi ne pas l’appliquer ? Nous verrons ensuite.
La proposition de René-Paul Savary consiste à ouvrir le dispositif à tous les bénéficiaires du RSA. Il s’agit d’une expérimentation, allons-y et arrêtons de débattre pour ne rien dire !
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Je prends la parole pour soutenir cet amendement et indiquer qu’il tend à améliorer l’objet de l’expérimentation, que, d’une façon générale, nous soutenons.
Je voudrais aussi réagir à l’intervention de notre collègue de la commission affaires sociales, qui nous explique que le plus important, c’est l’efficacité de l’évaluation. Écoutez, pour moi, le plus important, c’est l’efficacité de l’expérimentation, qui permet à des gens de retrouver du boulot ! C’est là le point essentiel.
On nous indique que, grâce à cet élargissement, des personnes peut-être moins éloignées de l’emploi pourraient retrouver du travail. Mais je suis très heureux de cela ! On a le sentiment d’une déconnexion complète et je suis vraiment atterré par ce type de propos.
M. Laurent Burgoa. Très bien !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Tout d’abord, madame la ministre, je vous remercie de votre avis de sagesse ; il signifie que cette proposition de loi, contrairement à ce que vous avez affirmé dans la discussion générale, constitue une réponse adaptée à certains publics qui rencontrent des difficultés.
M. René-Paul Savary. Je voudrais dire ensuite à Mme Poncet Monge que ce n’est pas l’entreprise qui va « trier » les bénéficiaires du RSA. C’est le travailleur social qui, pour ces publics, est en lien avec le collaborateur de Pôle emploi, qui va proposer des personnes susceptibles d’être accompagnées pour travailler dans l’entreprise. C’est ainsi.
Il ne s’agit donc pas d’offrir un effet d’aubaine à l’entreprise, mais de donner un choix aux personnes concernées, une possibilité de s’en sortir. C’est pour cela qu’il me semble important d’ouvrir le dispositif à tous les bénéficiaires susceptibles de trouver une sortie au travers de cette expérimentation.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Je souscris également à cet amendement, même si j’ai moi-même déposé des amendements qui ne sont pas tous repris par notre collègue rapporteur Daniel Chasseing, et je soutiendrai cette expérimentation.
Ma chère collègue, vous avez évoqué les indépendants, qui, selon vous, rebondiront de toute façon. Vous allez voir ce qui se passera quand on enlèvera la perfusion de l’État ; cela va être très compliqué et je ne sais pas comment ils rebondiront.
Tout le monde rencontrera des difficultés à un moment ou un autre ; élargir le dispositif aux publics qui sont peut-être les moins éloignés ne veut pas dire que les plus éloignés n’auront pas leur place.
En revanche, je défends l’entreprise, que je connais bien. Pour elle, il n’est pas facile de recevoir des publics très éloignés de l’emploi et ce n’est pas non plus son rôle. (Mme Cathy Apourceau-Poly proteste.) Dans un secteur marchand, il faut faire du résultat. Si une entreprise passe énormément de temps à accompagner les salariés, elle ne pourra pas en consacrer à d’autres tâches.
L’expérimentation visant à essayer de remettre les gens au travail, c’est vraiment l’essentiel. À ce titre, son élargissement me semble normal, c’est pourquoi je soutiens la proposition de notre collègue René-Paul Savary.
Je dirais, enfin, à Mme Poncet Monge que nous avons la possibilité de faire des stages en entreprise. C’est très intéressant, quand on arrive au Sénat. (Protestations sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
Mme Laurence Cohen. C’est inadmissible !
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. J’ai bien compris les propos de Mme Poncet Monge et il me semble que ces réactions sont très discourtoises. On a le droit d’avoir un avis différent du vôtre ! Mme Poncet Monge a un avis complètement opposé au vôtre, comme moi, d’ailleurs, qui suis également complètement opposée à ce que vous proposez. Pour autant, on n’a pas le droit de faire preuve de mépris à l’égard d’une collègue qui, elle, peut dire ce qu’elle pense.
J’ai apprécié l’intervention de M. Savary, qui est resté courtois, les autres interventions m’ont semblé discourtoises à l’égard de notre collègue. On peut ne pas être d’accord, mais on doit rester correct les uns vis-à-vis des autres ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER, GEST et RDSE.)
M. le président. L’amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Jacquemet, Doineau, Berthet, Puissat, Demas et Billon, M. Lefèvre, Mme Paoli-Gagin, M. Hingray, Mmes Gruny, de La Provôté, Gosselin et Guidez, M. Longeot, Mme Sollogoub, M. Courtial, Mme Vérien, MM. Moga et Chauvet, Mme F. Gerbaud, M. Saury, Mme Gatel, M. Kern, Mmes N. Goulet et Herzog, MM. Levi, Delahaye, Louault, S. Demilly, Folliot, Cadic, P. Martin, Canevet et Delcros, Mmes Vermeillet et Loisier, M. Lafon, Mmes Létard et Morin-Desailly et MM. Laugier, Le Nay et Prince, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
an,
insérer les mots :
ayant signé le contrat d’engagements réciproques prévu à l’article L. 262-35 du code de l’action sociale et des familles,
La parole est à Mme Annick Jacquemet.
Mme Annick Jacquemet. Dans la rédaction proposée dans le texte de la commission, peuvent bénéficier de cette expérimentation les personnes volontaires bénéficiaires du revenu de solidarité active privées d’emploi depuis un an ou moins et domiciliées dans les départements participant à l’expérimentation.
Le présent amendement vise à apporter une précision et à imposer un nouveau critère pour pouvoir y prétendre : avoir obligatoirement signé en amont un contrat d’engagements réciproques (CER). L’établissement de ce contrat permet l’énumération des engagements réciproques des parties en termes d’insertion professionnelle et formalise la mise en œuvre du projet d’insertion.
Comme pour le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE), le CER consacre des droits et obligations qui lient bénéficiaires et collectivités. Il précise, notamment, les actes positifs et répétés de recherche d’emploi que le bénéficiaire s’engage à accomplir. Il permet donc d’être sûr de la bonne foi et de la motivation des personnes volontaires pour cette expérimentation.
Au niveau national, le taux de contractualisation atteint seulement 52 %, un chiffre bien trop faible, alors même qu’il s’agit d’une obligation.
Lors de l’examen des amendements de séance en commission des affaires sociales, le 14 avril, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, avec une justification qui peut évidemment sembler recevable : cette obligation figure déjà dans la loi.
S’assurer que ceux qui auront l’opportunité d’entrer dans ce dispositif ont souscrit à leurs obligations me semble toutefois relever du bon sens. Tel est l’objet de cet amendement. Comme disait Talleyrand, « si cela va sans le dire, cela ira encore mieux en le disant ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Chasseing, rapporteur. Cet amendement vise à faire de la signature d’un contrat d’engagements réciproques (CER) une condition nécessaire pour bénéficier du dispositif.
Cette proposition nous semble un peu problématique, car elle exclut les bénéficiaires du RSA suivis par Pôle emploi, dont il arrive pourtant, comme c’est le cas dans l’Allier, qu’ils représentent la majorité des allocataires.
Le CER ne concerne que les bénéficiaires du RSA qui sont orientés vers un organisme autre que Pôle emploi. En effet, les allocataires orientés vers Pôle emploi élaborent, pour leur part, un projet personnalisé d’accès à l’emploi.
Par ailleurs, si l’on ne peut que déplorer le faible taux de contractualisation, la conclusion d’un CER est déjà obligatoire pour les personnes concernées.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, mais Mme Annick Jacquemet indique que le taux de contractualisation est faible dans son département – 52 % – comme dans d’autres. Je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Cette condition relative à la signature d’un contrat d’engagements réciproques est déjà prévue dans le code de l’action sociale et des familles. L’anomalie qui reste à corriger, c’est le faible taux de signature. Y remédier est d’ailleurs un des objectifs fixés tant dans la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté que dans la contractualisation avec les départements.
On ne saurait imputer cette charge à l’allocataire du RSA, qui n’est pas toujours responsable de cette situation ; sa motivation n’a parfois rien à voir là-dedans.
Cette obligation est en tout cas satisfaite par le code de l’action sociale et des familles. Il me paraît superfétatoire d’y ajouter une clause.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je tiens à dire que des expérimentations sur le RSA se font sur tous les territoires, mais qu’évidemment elles diffèrent selon la couleur des conseils départementaux. Dans la métropole de Lyon, nous expérimentons le RSA pour les moins de 25 ans. Je vous renvoie à l’analyse que j’ai développée ce matin : ce n’est pas une réflexion hors sol.
Quant à l’expérience professionnelle, mes chers collègues, je vous souhaite d’en avoir une aussi longue que la mienne…
Dans un contrat, il y a deux parties. Le premier contrat d’engagements est signé avec le conseil général ou la métropole. Alors que le premier entretien d’accompagnement a lieu en moyenne, au niveau national, soixante-dix-huit jours après la signature, je pose la question : qui ne tient pas ses engagements ? Qui ne respecte pas les droits et devoirs afférents au contrat ? Il faut commencer par s’interroger sur ce chiffre – 52 % – et résoudre le problème qu’il révèle !
Pour ce qui est du contrat d’engagement avec l’entreprise, j’espère que des amendements seront adoptés pour formaliser l’engagement que prend l’entreprise.
Voilà ce que je voulais souligner, au-delà du fait, déjà relevé par Mme la ministre, que cet amendement est satisfait – vous voyez, mes chers collègues, que j’ai appris le vocabulaire du Sénat ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. René-Paul Savary l’a bien expliqué : les bénéficiaires du RSA sont, si je puis dire – l’expression n’est pas très jolie – « classés » dans diverses catégories. Lorsqu’un demandeur est orienté vers Pôle emploi, c’est que les travailleurs sociaux qui gèrent son dossier savent qu’il est en mesure de reprendre immédiatement un emploi ; ceux qui sont orientés vers les travailleurs sociaux sont ceux pour lesquels on a décelé un certain nombre d’« inconvénients » les empêchant d’entrer immédiatement dans l’emploi et justifiant qu’ils bénéficient d’un accompagnement social.
Cela étant posé, pour ceux qui prennent un emploi, signer un contrat de travail, c’est un engagement. Je ne vois donc pas en quoi y ajouter la signature d’un contrat d’engagements réciproques améliorerait les choses. Le contrat de travail, c’est un engagement !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Monique Lubin. Cette clause me semble superfétatoire, sans compter qu’elle est teintée de sous-entendus : s’agissant des bénéficiaires du RSA, il en faudrait toujours plus en matière d’engagements… C’est à mon avis complètement inutile.
M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour explication de vote.
Mme Annick Jacquemet. J’entends bien, madame la ministre, que mon amendement est satisfait. Sur le terrain et en pratique, on se rend compte néanmoins que tel n’est pas du tout le cas : 52 % en moyenne – et je n’ai pas inventé ce chiffre –, cela signifie que certains départements sont en dessous. D’autres sont au-dessus, c’est vrai ; reste que l’application sur le terrain de ce dispositif me paraît largement insuffisante.
Madame Lubin, vous dites qu’un contrat de travail sera signé avec l’entreprise ; certes, mais les CER, eux, doivent être signés en amont, dès que la personne bénéficiaire du RSA entre dans ce processus d’insertion.
Même s’il est satisfait, je maintiens mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Je soutiendrai cet amendement.
Il a été déposé par quelqu’un qui, voilà six mois, était encore première vice-présidente du conseil départemental du Doubs chargée de l’action sociale et qui a pu, à ce titre, constater les défaillances existant sur le terrain.
J’ai bien entendu ce que vous dites, mais un contrat engage les deux parties. Et le dispositif proposé par le biais de cet amendement a le grand intérêt d’engager la partie qui doit accompagner le bénéficiaire du RSA à tout mettre en œuvre pour l’aider. Quant au bénéficiaire du RSA, il doit également tâcher d’honorer sa part du contrat. Ces deux engagements sont très complémentaires.
L’idée, ici, est vraiment d’accompagner le bénéficiaire du RSA. Je reprends ce que vous disiez : si des défaillances sont à déplorer, c’est parce qu’on prend les gens trop tard ; ils finissent par tomber dans des dérives et ont du mal à se réinsérer. Il faut que nous les y aidions et, de ce point de vue, ces contrats sont importants.
Je voterai donc cet amendement, car le contrat d’engagements réciproques concerne les deux parties : celui qui doit essayer de s’en sortir et celui qui a le devoir de l’accompagner. Retrouver une activité professionnelle, quand on le peut, c’est le meilleur remède à tous les maux de notre société.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Chacun ici sait – on le sait en tout cas lorsqu’on a siégé dans un conseil départemental – que l’accompagnement et le contrôle existent déjà. Tous les mois ou tous les deux mois, selon les pratiques, les comités locaux d’insertion se réunissent avec les acteurs représentant les associations, les entreprises, les élus.
Et les bénéficiaires qui ne remplissent pas leurs devoirs sont rappelés à l’ordre par des mesures éducatives, voire par des sanctions financières. Je ne vois donc pas en quoi cet amendement apporte quoi que ce soit de nouveau.
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote.
Mme Nadège Havet. Il y a encore six mois, j’étais à Pôle emploi en tant qu’employée. Quand nous recevons des personnes bénéficiaires du RSA, nous signons avec elles un PPAE, c’est-à-dire un projet d’accompagnement.
Il existe aussi un accompagnement dit global ; dans le cadre de ce dispositif, des travailleurs sociaux aident les personnes bénéficiaires du RSA à préparer leur retour à l’emploi.
Un certain nombre de choses sont déjà actées dans les entretiens de Pôle emploi, via les PPAE que je viens d’évoquer notamment. Y ajouter encore quelque chose, cela me semble trop. Ne peut-on pas plutôt travailler sur le contenu du projet d’accompagnement signé avec Pôle emploi et avec le travailleur social ?
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. J’entends ce que nous a dit Annick Jacquemet – elle nous l’avait dit hier en commission. Le taux de contractualisation est effectivement insuffisant ; vous êtes alertée sur ce problème, madame la ministre, et il doit être réglé – tel est le sens de cet amendement.
Mais je ne vois pas l’intérêt de réintroduire dans les textes des dispositions qui y figurent déjà : nous sommes là pour légiférer vraiment. Quand quelque chose ne fonctionne pas, on a beau le répéter quinze fois dans la loi, le résultat reste le même.
Je maintiens donc l’avis défavorable émis par la commission ; en revanche, que vos remarques soient prises en compte me semble important.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Cet amendement est le fruit d’une réflexion intéressante. Nous sommes tous interpellés sur cette question : pourquoi les contrats d’engagements réciproques, qui devraient théoriquement être signés partout, ne le sont-ils pas ? On se dit que certains ne font pas leur boulot, et en tout cas que quelque chose cloche.
Mais les choses sont bien plus compliquées que cela ; il faut beaucoup d’humilité dans l’approche de ce problème.
Votre amendement vient un petit peu tôt, ma chère collègue : nous vous proposerons tout à l’heure de créer, avec l’avis favorable de M. le rapporteur, un dispositif de tutorat au sein de l’entreprise.
M. Philippe Mouiller. Oui !
M. René-Paul Savary. La personne choisie, une personne bien ciblée, travaillera en collaboration avec le travailleur social du département et avec le conseiller de Pôle emploi qui suit le bénéficiaire, puisqu’il s’agit d’allocataires automatiquement inscrits à Pôle emploi, par définition proches de l’employabilité.
L’inscription à Pôle emploi fait d’ailleurs partie des obligations qui peuvent être inscrites dans le contrat – il s’agit alors d’un engagement d’insertion professionnelle –, comme peut l’être un engagement aux soins en vue de recouvrer la santé quand la personne est très éloignée de l’emploi – ce qui est en jeu, alors, c’est plutôt l’insertion sociale.
Si l’on tient compte de la création du tutorat, je ne vois pas de valeur ajoutée dans le maintien du contrat d’engagements réciproques. Je m’associe à mes collègues : retirez votre amendement plutôt que de vous exposer au risque d’un vote négatif alors que nous partageons la même philosophie.
Mme Annick Jacquemet. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 14 rectifié est retiré.
M. René-Paul Savary. Merci !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 12, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Supprimer les mots :
d’une durée d’un an ou à durée indéterminée
2° Remplacer les mots :
une période maximale de douze mois
par les mots :
la durée de ce contrat
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Dans le texte qui nous est proposé, il est prévu que le bénéficiaire du RSA qui trouve un emploi soit éligible au dispositif de l’alinéa 3 si le contrat de travail est d’une durée minimale d’un an ou est un CDI.
Nous trouvons cette disposition tout à fait contre-productive : précisément, lorsqu’on est durablement éloigné de l’emploi, a fortiori si s’applique ce que vous avez prévu, donc s’il faut être au RSA depuis au minimum un an pour être éligible, lorsqu’on est, donc, fort durablement privé d’emploi, si je puis dire, il paraît difficile que le retour à l’emploi se fasse immédiatement via un CDD d’un an, sans parler d’un CDI. Il faut souvent y aller plutôt par petites touches et commencer par des contrats plus courts.
Le texte dans son état actuel ne nous convient pas.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Cuypers et Savin, Mme Deseyne, M. Lefèvre, Mme Delmont-Koropoulis, M. Rapin, Mme M. Mercier, MM. Bascher et Bonne, Mmes Dumont et Lassarade, MM. D. Laurent, Burgoa et Calvet, Mmes Garriaud-Maylam, Thomas, Chauvin, Micouleau et Demas, M. Bouloux, Mme Deromedi, MM. Cardoux, Panunzi, Bacci, Sautarel et Pointereau, Mme Drexler, MM. Laménie et Babary, Mme Muller-Bronn et MM. Bonhomme et B. Fournier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
douze mois
par les mots :
six mois
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Il s’agit d’autoriser, pour les bénéficiaires de l’expérimentation créée par l’article 1er, le cumul des revenus professionnels avec le RSA pendant une période maximale de six mois, au lieu de douze.
L’expérience du terrain révèle, chez beaucoup de personnes qui touchent de petits salaires dans les entreprises, une incompréhension eu égard à toutes les aides auxquelles elles n’ont pas droit parce qu’elles sont salariées. Pour ce qui est de donner aux bénéficiaires du RSA la possibilité de percevoir des revenus supplémentaires pendant un certain temps, bien entendu, nous sommes d’accord. Mais je demande à limiter la durée de la période pendant laquelle ce cumul est possible.
J’étais député quand Martin Hirsch a créé le RSA ; je lui avais recommandé, à l’époque, de travailler plutôt en additionnant toutes les aides que peuvent recevoir les personnes sans emploi et en comparant avec ce que touchent les salariés qui perçoivent de faibles salaires.
Il arrive que la différence soit si minime qu’il vaudrait mieux que ces derniers restent chez eux, non pas bien sûr du point de vue de la dignité humaine, mais d’un point de vue financier. J’ai reçu beaucoup de courriers en ce sens : « Si je pars malgré tout travailler, me dit-on, c’est parce que j’en ai besoin à titre personnel et pour des raisons de reconnaissance sociale, mais je perds de l’argent en y allant »…
M. le président. Le sous-amendement n° 15, présenté par M. Malhuret, est ainsi libellé :
Amendement n° 6, alinéa 5
Remplacer le mot :
six
par le mot :
neuf
La parole est à M. Claude Malhuret.
M. Claude Malhuret. Je comprends très bien les arguments qui viennent d’être exposés. La proposition de loi initiale permettait de sécuriser la reprise d’activité en accompagnant pendant un an les bénéficiaires du RSA qui retournent à l’emploi. L’amendement n° 6 rectifié bis vise à réduire cette période à six mois seulement, la période actuellement prévue par le droit commun étant de trois mois.
Je comprends l’argument ; si j’ai présenté cette proposition de loi sous la forme d’une expérimentation, c’est bien d’ailleurs parce qu’aucun d’entre nous n’est détenteur de la vérité, que seule l’expérimentation pourra nous révéler.
Je vous propose donc, madame Gruny, un compromis entre votre position et la mienne, pour porter la période de cumul à neuf mois plutôt que douze.