M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Saury, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 251, présenté par Mme Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mmes Lepage et Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 57, après la première phrase
Insérer quatre phrases ainsi rédigées :
L’action humanitaire est partie intégrante de l’effort de solidarité de la France, tant à l’échelle internationale qu’à l’échelle nationale. Elle vise à secourir les populations vulnérables et est au service du traitement durable des crises. La France veille à assurer la continuité ou la concomitance entre les phases d’urgence, de reconstruction et de développement. Elle soutient une action humanitaire fondée sur les principes d’indépendance, de neutralité et d’impartialité, destinée à répondre aux besoins des populations.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à réaffirmer l’importance de la conception d’une stratégie pour les zones de conflit afin d’assurer une cohérence entre les phases d’urgence, de reconstruction et de développement.
Une telle réaffirmation nous paraît nécessaire compte tenu des observations de la Cour des comptes sur la stratégie 3D – défense, diplomatie, développement – de la France au Sahel. En effet, la Cour des comptes souligne que, si les dépenses françaises ont plus que doublé entre 2012 et 2018, passant de 580 millions à 1,35 milliard d’euros, la majorité de ces sommes concernent des dépenses militaires.
L’aide publique au développement n’a pas suivi la même progression. Les complémentarités entre les actions militaires et civiles d’aide à la stabilisation et au développement doivent être recherchées et se traduire dans l’organisation de la réponse française, notamment avec une coopération interministérielle renforcée.
L’alinéa 57 doit aussi réaffirmer des principes guidant l’action humanitaire et la gestion de crises, en cohérence avec notre défense du principe de non-discrimination de l’aide. Ce n’est pas inutile au regard de la multiplication des « zones grises » où se mêlent populations et combattants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Saury, rapporteur. Les dispositions prévues par le présent amendement sont déjà présentes pour partie dans l’article 1er A et à l’alinéa 59 de l’annexe.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Nous estimons que l’amendement de Mme Carlotti est déjà satisfait par l’alinéa 58, qui prévoit que la France promeut une approche globale des fragilités et des crises pour mieux coordonner tous les acteurs du développement et de l’humanitaire, et, surtout, par l’alinéa 59, consacré à l’aide humanitaire, dans lequel on retrouve notamment les principes guidant l’action humanitaire et la gestion de crises, et par le rappel que l’action humanitaire de la France représente un pilier de notre politique étrangère et de développement, comme je l’ai indiqué dans mon propos introductif.
Je veux d’ailleurs, à cet égard, redire devant votre assemblée l’importance de notre engagement humanitaire.
Au début de ce quinquennat, les actions humanitaires représentaient 139 millions d’euros. Elles seront passées, en 2022, à 500 millions d’euros. Ces actes forts et concrets répondent aux préoccupations des différents pays concernés. Il est souhaitable de le rappeler.
J’y insiste, je considère que l’on retrouve l’essentiel de la cohérence générale et des principes évoqués dans l’amendement de Mme Carlotti aux alinéas 58 et 59, raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 9 rectifié est présenté par Mme Doineau, MM. Le Nay, Longeot, de Belenet et Kern, Mme Dindar, M. Hingray, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Levi, Mme Gatel, MM. Folliot, Cigolotti et Chauvet, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Billon, M. P. Martin, Mme Jacquemet et M. Delcros.
L’amendement n° 199 rectifié est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 252 est présenté par Mmes Lepage et Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mme Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 57, avant-dernière phrase
Remplacer les mots :
reconnaît le lien étroit entre sécurité et développement
par les mots :
rappelle le lien entre paix, justice et institutions efficaces
La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié.
Mme Élisabeth Doineau. Les termes retenus dans le cadre de partenariat global semblent faire un pas de côté par rapport à l’intitulé de l’objectif de développement durable (ODD) 16, dont l’objectif est de « promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et inclusives aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous ».
Il paraît important de faire figurer dans le texte la notion de « paix », laquelle est structurante dans l’Agenda 2030, qui s’organise autour de la planète, des populations, de la prospérité, de la paix et des partenariats.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 199 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. La modification proposée s’inspire de l’Agenda 2030, mis en œuvre par les Nations unies, dont la France est partie prenante et dont l’un des objectifs est de « promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et inclusives aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous ».
Il est important d’insister sur le fait que la notion de paix est structurante dans l’Agenda 2030 et qu’elle englobe de manière efficace les notions de sécurité et de développement, en cohérence avec les textes internationaux dont se réclame par ailleurs le cadre de partenariat global.
L’adoption de cet amendement permettrait ainsi d’échapper à de possibles dérives sécuritaires de l’aide publique au développement. Par exemple, le fonds fiduciaire d’urgence de l’Union européenne pour l’Afrique, dont le financement est assuré à partir du Fonds européen de développement, fait l’objet de nombreuses polémiques pour avoir probablement financé des milices en Libye ou au Soudan, comme les Rapid Support Forces, sous prétexte de gestion des flux migratoires.
L’aide publique au développement ne devrait pas être détournée pour des objectifs étrangers au développement. Elle devrait être entièrement dévolue au soutien des populations.
Notre devoir envers celles-ci est de faire en sorte qu’elles vivent en paix et non pas seulement en sécurité, notion qui, au-delà d’une possible ambiguïté, ne couvre tout simplement pas les exigences de la paix. Nous proposons d’être plus ambitieux envers les populations que nous soutenons et d’orienter les politiques publiques vers un effort de paix, de justice et de construction d’institutions protectrices.
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° 252.
Mme Claudine Lepage. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Saury, rapporteur. Mettre l’accent sur la justice ne porte pas atteinte à l’approche fondée sur la sécurité et le développement, par ailleurs présente à d’autres endroits du projet de loi.
Par conséquent, nous émettons un avis favorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le Gouvernement n’a pas d’objection à opposer à ces amendements, qui ont pour objet de reprendre la définition de l’ODD 16, relatif à la paix, la justice et aux institutions efficaces, que j’ai eu l’occasion de citer à plusieurs reprises depuis le début des débats. Ils renvoient à la nécessaire prise en compte du lien entre sécurité et développement.
On le sait, le développement contribue à la création d’un environnement propice à la sécurité et au renforcement de l’État de droit et, inversement, les gains en matière de sécurité assoient les conditions d’un développement durable en faveur des populations. Grâce à la reconnaissance de ce lien entre sécurité et développement, la France peut engager le processus de réforme des systèmes de sécurité, dont le but est de renforcer la sécurité des populations et de permettre la mise en œuvre de la politique de développement – j’ai eu l’occasion de m’exprimer à plusieurs reprises sur ce sujet depuis le début de notre discussion.
Je suis favorable à ces amendements, qui tendent à reprendre ces orientations.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 rectifié, 199 rectifié et 252.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 6 rectifié est présenté par Mme Doineau, MM. Le Nay, Longeot, Détraigne, de Belenet et Kern, Mme Dindar, M. Hingray, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Levi, Mmes Gatel et Perrot, MM. Folliot, Cigolotti et Chauvet, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Billon, M. P. Martin, Mme Jacquemet et M. Delcros.
L’amendement n° 198 rectifié est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 254 est présenté par Mmes Lepage et Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mme Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 59, deuxième phrase
Après le mot :
femmes
insérer les mots :
et les filles
La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié.
Mme Élisabeth Doineau. Comme je l’ai dit, les filles sont encore plus vulnérables que les femmes en général.
À titre d’exemple, sur les 258 millions d’enfants et d’adolescents qui n’avaient pas accès à l’école en 2018, près de 130 millions sont des filles âgées de 6 ans à 17 ans, dont 75 % d’adolescentes.
Par ailleurs, au moins 200 millions de filles et de femmes en vie aujourd’hui ont subi des mutilations génitales dans trente pays, et 12 millions de filles sont mariées de force chaque année.
Aussi, j’estime qu’il ne faut pas oublier de mentionner les filles à la deuxième phrase de l’alinéa 59.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 198 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vais essayer de citer d’autres chiffres. Malheureusement, sur ce sujet, nous n’avons que l’embarras du choix…
Partout dans le monde, les filles demeurent un public particulièrement vulnérable, dont la situation spécifique doit absolument être prise en compte dans le cadre d’une diplomatie féministe cohérente. Nous ne pouvons pas défendre efficacement les droits des femmes dans le projet de loi sans y mentionner explicitement les filles, afin de prendre en compte les discriminations spécifiques dont elles sont victimes.
Comme l’a dit ma collègue, 130 millions de filles n’ont pas accès à la scolarité. Surtout, près de 11 millions de filles ne sont pas retournées à l’école du fait de la pandémie.
La déscolarisation signifie aussi la perte d’accès à un repas par jour et une exposition plus grande aux violences sexuelles et sexistes. Ainsi, près de 12 millions de filles sont mariées de force chaque année, et même une fille sur trois dans certains pays. On prédit que 10 millions de filles supplémentaires seront exposées au mariage forcé en conséquence de la crise du covid-19 et du fait de la déscolarisation.
Alors que 200 millions de femmes ont subi des mutilations génitales, il existe toujours des pays où la mutilation génitale féminine est quasiment la règle, avec plus de neuf filles sur dix ayant subi une excision dans certains pays.
La situation actuelle est particulièrement dramatique, car l’on estime que la pandémie pourrait entraîner, au cours des dix prochaines années, 2 millions de cas de mutilations génitales féminines qui auraient été évitées en temps normal.
La protection des filles est donc un enjeu fondamental de la diplomatie féministe, que nous devons réaffirmer dans ce contexte préoccupant. Leur situation particulière doit être mentionnée dans le projet de loi. À cet égard, l’ajout du mot « fille » auquel tend cet amendement constitue une précision indispensable pour orienter une mobilisation forte des politiques publiques de développement à leur profit.
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° 254.
Mme Claudine Lepage. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Saury, rapporteur. Bien évidemment, nous sommes favorables à la protection des filles dans le champ de l’action humanitaire française.
La commission a émis un avis favorable sur les trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié, 198 rectifié et 254.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 4 rectifié est présenté par Mme Doineau, MM. Le Nay, Longeot, Détraigne, de Belenet et Kern, Mme Dindar, M. Hingray, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Levi, Mmes Gatel et Perrot, MM. Folliot, Cigolotti et Chauvet, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Billon, M. P. Martin, Mme Jacquemet et M. Delcros.
L’amendement n° 196 rectifié est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 253 est présenté par Mmes Lepage et Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mme Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 59, troisième phrase
Après le mot :
santé
insérer les mots :
, à l’éducation
La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
Mme Élisabeth Doineau. L’éducation est un droit et un besoin fondamental pour les enfants vivant dans des situations de crise, en particulier en situation de pandémie, comme l’a très bien dit ma collègue à l’instant.
Non seulement l’éducation permet d’assurer un avenir à ces enfants, mais elle contribue à préserver autant que possible leur enfance. Elle agit comme un facteur de protection : le maintien à l’école ou même la préservation d’une éducation informelle permettent, par exemple, d’éviter le travail des enfants ou le mariage des filles.
L’éducation est donc un droit et un besoin fondamental, autant qu’un levier pour préserver les enfants dans les crises.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 196 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. La crise du covid rend d’autant plus importantes l’ensemble des précisions que nous voulons apporter à ce texte pour renforcer les droits des enfants et des personnes vulnérables.
Cette année, selon l’ONU, au moins un tiers des élèves dans le monde n’ont pas pu aller à l’école.
L’infographie réalisée pour le Sénat par la délégation aux droits des femmes indique, quant à elle, que la pandémie devrait effacer les progrès réalisés dans le monde concernant l’éducation des filles au cours des vingt dernières années au moins.
Rattraper ce recul nécessitera des efforts colossaux et une solidarité internationale forte, à laquelle la France devra participer grâce à un cadrage législatif clair et précis.
L’école est un moteur de droit. Nous ne pouvons pas oublier l’importance de l’éducation pour l’émancipation collective et individuelle, la construction et la reconstruction de soi et, enfin, le développement dans tous les pays du monde.
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° 253.
Mme Claudine Lepage. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Saury, rapporteur. Il nous semble pertinent de rappeler que l’action humanitaire française s’efforce aussi d’assurer l’éducation des enfants en temps de crise.
Par conséquent, nous sommes favorables à ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 rectifié, 196 rectifié et 253.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 140 amendements au cours de cette journée ; il en reste 194.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
4
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 12 mai 2021 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures trente :
Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement ;
Suite du projet de loi de programmation, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales (texte de la commission n° 533, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 12 mai 2021, à zéro heure vingt.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER