Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Tabarot, rapporteur. La commission, considérant cet amendement comme satisfait, notamment par l’article 30 ter, en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué. Cet amendement est effectivement satisfait. J’ai eu l’occasion de revenir sur la stratégie relative au fret, au transport fluvial et à différents éléments du report modal.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.
Mme le président. Monsieur Cozic, l’amendement n° 1508 est-il maintenu ?
M. Thierry Cozic. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 1508 est retiré.
Je mets aux voix l’article 30 ter, modifié.
(L’article 30 ter est adopté.)
Mme le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Dans la suite de la discussion du texte de la commission, nous allons maintenant examiner les dispositions du titre V, appelé par priorité.
TITRE V (Priorité)
SE NOURRIR
Chapitre Ier (priorité)
Soutenir une alimentation saine et durable pour tous peu émettrice de gaz à effet de serre
Article 59 (priorité)
I. – L’article L. 230-5-6 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Art. L. 230-5-6. – I. – À titre expérimental, au plus tard six mois après la promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, pour une durée de deux ans, les gestionnaires, publics ou privés, des services de restauration collective scolaire sont tenus de proposer, au moins une fois par semaine, un menu végétarien. Ce menu peut être composé de protéines animales ou végétales et respecte, lorsqu’elles s’appliquent, les règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas prévues à l’article L. 230-5. Dans le cadre de cette expérimentation, les gestionnaires veillent à privilégier des approvisionnements en produits agricoles et en denrées alimentaires répondant à des exigences en matière de qualité ou de préservation de l’environnement.
« L’expérimentation fait l’objet d’une évaluation, notamment de son impact sur le gaspillage alimentaire, sur les taux de fréquentation et sur le coût des repas, dont les résultats sont transmis au Parlement au plus tard six mois avant son terme.
« II. – Sous réserve de respecter des conditions fixées par voie réglementaire garantissant l’équilibre nutritionnel des repas servis, le respect d’un approvisionnement en produits agricoles et en denrées alimentaires répondant à des exigences en matière de qualité ou de préservation de l’environnement et le respect d’exigences adaptées aux besoins des usagers, notamment à l’âge des enfants pour la restauration scolaire, à titre expérimental, les collectivités territoriales volontaires proposent quotidiennement le choix d’un menu végétarien dans les services de restauration collective dont elles ont la charge.
« Cette expérimentation débute à la date de publication de la loi n° … du … précitée, pour une durée de deux ans, et fait l’objet d’une évaluation, notamment sur son application territoriale, sur son impact sur le climat, sur l’évolution de l’approvisionnement des établissements concernés en produits de qualité bénéficiant de signes ou mentions prévus à l’article L. 230-5-1 du présent code, sur le gaspillage alimentaire, sur les taux de fréquentation, sur le coût des repas et sur la qualité nutritionnelle des repas servis. Les collectivités volontaires font connaître au représentant de l’État dans le département leur engagement dans l’expérimentation afin d’en faciliter l’évaluation. Le bilan de cette évaluation est présenté par le Gouvernement au Parlement et rendu public au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation.
« L’évaluation porte également sur les modalités d’application à la restauration scolaire à menu unique et prend en compte les avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail liés à la qualité nutritionnelle des repas végétariens et l’évaluation citée au présent II pour recommander une généralisation de cette expérimentation.
« III. – Au plus tard le 1er janvier 2023, dès lors qu’ils proposent habituellement un choix multiple de menus, les gestionnaires, publics et privés, des services de restauration collective de l’État, de ses établissements publics et des entreprises publiques nationales sont tenus de proposer quotidiennement le choix d’un menu végétarien.
« IV. – Une concertation entre les collectivités territoriales, leurs groupements et le représentant de l’État dans la région est organisée pendant la durée de l’expérimentation afin de veiller à sa mise en œuvre. À l’occasion de cette concertation, les outils d’aide mentionnés à l’article L. 230-5-6-1 font l’objet d’une communication. »
II. – Après l’article L. 230-5-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 230-5-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 230-5-6-1. – Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, pour les personnes morales de droit public et les entreprises privées chargées de la restauration collective publique faisant partie des collectivités territoriales volontaires participant à l’expérimentation prévue au II de l’article L. 230-5-6 du présent code, le Gouvernement propose des outils d’aide à la décision, à la structuration des filières d’approvisionnement sur leur territoire, à la formulation des marchés publics et à la formation des personnels concernés, nécessaires à la proposition quotidienne d’un menu végétarien. Les opérateurs de restauration collective mentionnés aux I et IV de l’article L. 230-5-1 mettent en œuvre l’ensemble des moyens nécessaires pour garantir la qualité et l’équilibre nutritionnel des repas et l’atteinte des objectifs prévus au présent chapitre, y compris par la formation de leur personnel. Ces formations concernent notamment la diversification des protéines dans les menus, la lutte contre le gaspillage alimentaire, les approvisionnements durables et de qualité et la substitution du plastique. »
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons ce soir le débat sur le volet du projet de loi intitulé « Se nourrir ». Avant d’examiner les nombreux amendements qui s’y rapportent, je souhaite exprimer la position de la commission des affaires économiques et du Sénat sur ce projet de loi et sur les mesures concernant l’agriculture.
Tout d’abord, nous souhaitons porter sur le monde agricole, trop souvent vilipendé dans le débat public, un regard attentif, sans alimenter les soupçons selon lesquels les agriculteurs seraient responsables de tous les maux environnementaux. Nous voulons également adresser un message à nos concitoyens, qui doivent comprendre que, au-delà des effets d’annonce, il est stratégique de se donner les moyens opérationnels, dans le cadre de ce projet de loi, de faire baisser concrètement les émissions de gaz à effet de serre liées à l’alimentation.
L’examen de la commission des affaires économiques et les propositions qui en découlent se sont fondés sur trois axes.
Le premier consiste à soutenir notre modèle alimentaire pour mieux maîtriser l’empreinte carbone de la France et assurer à nos concitoyens une alimentation réellement saine et durable.
Le deuxième axe a pour objet d’accompagner l’évolution des pratiques et d’éviter de tomber dans un catastrophisme qui ne serait pas de bon conseil ; ne l’oublions pas, notre modèle alimentaire est toujours considéré comme le plus durable au monde, donc continuons de le faire évoluer, avec les gestionnaires des cantines et les agriculteurs, en accompagnant techniquement ces derniers et en préservant leurs revenus, afin qu’ils soient plus résilients.
Le troisième axe, enfin, consiste à réduire l’empreinte carbone, en confortant notre souveraineté alimentaire, c’est-à-dire en privilégiant les produits de nos régions. Nous devons en effet lutter contre notre dépendance de plus en plus grande aux produits importés – plus de 50 % des fruits et légumes proposés dans la restauration collective –, dont le bilan carbone est catastrophique et dont les normes ne sont sous pas toujours compatibles avec une alimentation saine et durable.
Fixer dans la loi des objectifs contraignants et inatteignables – je le rappelle, la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Égalim) fixe un objectif de 50 % de produits durables de qualité, dont 20 % issus de l’agriculture biologique, et ces proportions n’atteignent respectivement que 15 % et 7,5 % – met nos agriculteurs en grande difficulté et favorise in fine les importations, ce qui dégrade notre empreinte environnementale et réduit notre capacité à atteindre les objectifs de la stratégie bas-carbone.
C’est bien par la souveraineté alimentaire que nous maîtriserons mieux le bilan carbone de notre alimentation et c’est grâce à elle que nous assurerons une alimentation plus saine et plus durable à nos concitoyens. Il est donc essentiel de préserver l’amont agricole, que nous devons accompagner dans ses changements de pratiques, afin qu’il puisse répondre aux exigences de la loi.
Telle est la logique avec laquelle la commission des affaires économiques a examiné l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. Répondre à l’urgence climatique exige que nous intégrions cet enjeu dans tous les aspects de notre quotidien.
Le volet « Se nourrir » du projet de loi, dont nous abordons ce soir l’étude, nous amène à nous pencher sur notre alimentation, en engageant une transformation de nos habitudes vers un modèle plus responsable. Notre façon de nous alimenter constitue en effet un levier non négligeable de lutte contre le réchauffement climatique.
Au sein de ce volet, l’article 59, relatif au menu végétarien dans la restauration collective, revêt une importance particulière. En effet, on estime à 30 % la réduction des émissions de gaz à effet de serre susceptible de résulter du remplacement d’un menu non végétarien par un menu végétarien. Aussi, je regrette que la commission soit revenue en partie sur cet article et qu’elle ait privilégié une prolongation de deux ans de l’expérimentation introduite par la loi Égalim, au détriment de sa généralisation.
Il s’agit, selon moi, d’une régression par rapport à la proposition initiale, qui était pourtant équilibrée. L’objectif est avant tout de garantir aux élèves un accès à une liberté de choix et à une alimentation saine, plus locale et moins consommatrice de ressources. Cela doit bien évidemment se faire dans le respect des capacités des opérateurs.
À cet égard, le retour d’expérience dont on dispose à propos de l’introduction des menus végétariens dans les cantines démontre que ces menus sont plutôt bien entrés dans les habitudes et que la plupart des réserves à ce sujet ont été surmontées. L’expérimentation a démontré qu’il est possible de permettre à chacun de manger, quand il le souhaite, de la viande, et de la viande de qualité, mais également qu’il est possible de diversifier ses apports de protéines, sans pour autant stigmatiser la consommation de viande.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Patricia Schillinger. Ce modèle est et sera, j’en suis sûre, plus respectueux de notre planète et de notre agriculture, puisqu’il encourage une consommation plus locale et permet de renforcer notre souveraineté alimentaire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, sur l’article.
M. Jean-Claude Tissot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 59 de ce projet de loi prévoit l’instauration, à titre expérimental, d’un repas végétarien au moins une fois par semaine dans les services de restauration collective scolaire.
Avant même que nous ne débattions plus concrètement de cet article, je souhaite souligner deux points forts, qui font écho aux nombreux débats et aux fausses polémiques relatifs aux menus végétariens. Les opposants à cette expérimentation mettent souvent en avant l’impossibilité de mettre en place ces repas dans les services de restauration collective ou encore la ferme opposition des éleveurs.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Ce n’est pas notre cas !
M. Jean-Claude Tissot. En premier lieu – je pense que nous pouvons tous en faire l’expérience, chacun dans notre territoire –, de nombreuses collectivités ont déjà instauré des menus végétariens, selon des rythmes qui varient, au sein de leurs structures de restauration collective. Simplement – c’est du bon sens et non du dogmatisme, comme on peut parfois l’entendre –, il a bien entendu fallu un temps d’adaptation ; mais rien n’est insurmontable.
En deuxième lieu, cessons d’entretenir cette opposition stérile entre les éleveurs et l’instauration d’un seul repas végétarien hebdomadaire. Les éleveurs et les producteurs de viande, dont je fais partie, ont bien conscience de la nécessité de changer, au moins modestement, notre production et notre consommation.
Aussi, mes chers collègues, examinons sereinement cet article et sortons de ce faux débat sur les repas végétariens.
M. le président. L’amendement n° 231 rectifié, présenté par MM. de Legge, B. Fournier, Chaize et Cardoux, Mme Demas, MM. Vogel, Lefèvre et Brisson, Mme Di Folco, M. Sautarel, Mme Deromedi, MM. Hugonet, de Nicolaÿ, Panunzi et Cadec, Mmes Thomas et Gosselin, MM. Saury et E. Blanc, Mmes Eustache-Brinio et Chain-Larché, M. Burgoa, Mmes Garriaud-Maylam et Chauvin, M. Reichardt, Mme Joseph, M. Chatillon, Mmes Puissat, Drexler, Lassarade et Canayer, M. Bascher, Mme Bourrat, MM. Grand, Cuypers, Savary, Paul et Longuet, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Chevrollier, J.M. Boyer, Le Rudulier, Charon, Babary et Bouloux, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Nous sommes un certain nombre à vouloir ouvrir le débat avec cet amendement, car nous nous posons une question : est-ce vraiment le rôle du Sénat, du Parlement de manière générale, de définir les menus de nos cantines municipales ?
D’ici quelques jours, nous allons entamer l’examen du projet de loi dit « 3D » ou « 4D » – je ne sais plus combien il y a de « D » –, au cours duquel nous ne manquerons pas, les uns et les autres, de plaider pour plus de différenciation, de décentralisation et de liberté municipale.
Pourtant, en ce moment, nous sommes tout simplement en train de rendre obligatoire ce qui est facultatif. À un moment, il faudra bien assurer un minimum de cohérence entre les messages que nous voulons envoyer.
En outre, nous nous inscrivons dans une démarche qui vise à limiter les émissions de gaz à effet de serre. Donc si les menus végétariens sont une réponse à l’objectif que nous nous sommes fixé, il faut alors les rendre obligatoires partout et tous les jours, mais, dans ce cas, il va falloir que l’on m’explique en quoi les menus végétariens contribuent à la diminution des émissions de gaz à effet de serre. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cet amendement a pour objet de supprimer toute obligation relative aux menus végétariens en restauration collective.
Une telle disposition reviendrait, mon cher collègue, sur les investissements réalisés par près de 94 % des communes depuis 2019 pour mettre en place ce menu végétarien hebdomadaire, dans le cadre de l’expérimentation précitée. Elle reviendrait donc sur la position équilibrée proposée par la commission, à savoir une prolongation de cette expérimentation.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Je profiterai de cet amendement pour exprimer la position du Gouvernement sur ce sujet.
Cette position est très claire ; elle repose sur deux maîtres mots : le choix et la qualité.
Le choix, tout d’abord, parce que le pouvoir exécutif n’a pas à s’immiscer dans le régime alimentaire choisi par nos concitoyens ; ce n’est pas à moi, en tant que ministre de l’alimentation, d’« imposer » – j’emploie ce terme à dessein – un régime alimentaire à quiconque. Certes, le Gouvernement, dans le cadre du plan national nutrition-santé, exprime des recommandations – je pense notamment au fameux arrêté de 2011 relatif à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire – sur les quantités hebdomadaires à respecter pour les différents aliments. Ensuite, ces recommandations sont – cela relève, pour le coup, de la responsabilité du pouvoir exécutif – mises en œuvre dans les cantines scolaires et nous devons également nous assurer que ces recommandations sont bien respectées, notamment pour ce que l’on donne à manger à nos enfants.
Toutefois, au-delà de ces recommandations et de ces contrôles sur les cantines, il n’est nullement question que le pouvoir exécutif s’immisce dans le régime alimentaire des uns et des autres, en imposant quoi que ce soit.
Premier maître mot, donc : le choix ; l’article 59 et toutes les discussions que nous avons eues jusqu’à présent visent à accorder cette liberté.
Le deuxième maître mot, sur lequel je veux insister, est la qualité.
Quel est notre plus grand combat aujourd’hui ? C’est celui de la qualité, notamment celle de la viande qui est distribuée dans les cantines scolaires. Songez donc, mesdames, messieurs les sénateurs, que plus de 60 % de la viande consommée dans nos cantines est importée. Or, d’un point de vue nutritionnel, on pourra dire ce que l’on veut, mais un poulet ukrainien ou brésilien ne représente absolument pas les mêmes apports qu’un poulet français. Absolument pas !
Ce combat de la qualité, je le mène, en tant que ministre de l’agriculture et de l’alimentation, depuis le premier jour. Nous devons renforcer la qualité des produits. Nous en discuterons plus tard, dans la soirée, à propos des objectifs de qualité de la nutrition, définis dans la loi Égalim et que le projet de loi Climat renforce.
Mes deux maîtres mots sont donc le choix et la qualité.
J’ajouterai un troisième élément, pour faire écho à ce que vous avez dit, madame la rapporteure pour avis, sur les bilans environnementaux : faire le choix de la qualité de notre viande, c’est évidemment favoriser la production locale, dans nos territoires et, ainsi, avoir un meilleur bilan environnemental par rapport à de la viande importée, à tous points de vue.
Néanmoins, c’est exactement la même chose avec les protéines dites « végétales ». Notre système est ainsi organisé, depuis de plus de cinquante ans, que nous – la France, mais également l’Europe – dépendons des protéines végétales sud-américaines ; nous importons du soja brésilien pour la consommation de notre bétail ou pour la consommation humaine. Il nous faut absolument sortir de cette dépendance, parce qu’importer des protéines végétales engendre de la déforestation et dégrade la biodiversité.
C’est pour cela que j’en ai fait un combat fort du Gouvernement, en utilisant notamment le plan de relance, au travers duquel nous investissons 120 millions d’euros dans la production de protéines végétales destinées à la nutrition animale ou humaine ; c’est la stratégie Protéines, que je défends avec beaucoup de détermination à l’échelon européen.
Voilà ce que je voulais dire en guise d’introduction.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. Je remercie M. le ministre d’avoir pris le temps de répondre longuement.
Madame la rapporteure pour avis, en revanche, votre réponse ne me convainc pas du tout. Je n’affirme pas qu’il faut empêcher les 94 % de communes qui proposent des menus végétariens de le faire ! Je dis simplement qu’il faut laisser la liberté.
Néanmoins, compte tenu du sort qui risque d’être réservé à cet amendement, je le retire. Je suis désolé, monsieur le président, je voulais vous aider à limiter la durée de nos débats ; si mon amendement avait été adopté, nous aurions gagné beaucoup de temps… (Sourires.)
M. le président. Merci de votre sollicitude, mon cher collègue !
L’amendement n° 231 rectifié est retiré.
L’amendement n° 723 rectifié, présenté par Mmes Préville, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 230-5-6 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de respecter les conditions fixées par voie réglementaire garantissant l’équilibre nutritionnel des repas servis et le respect d’exigences adaptées aux besoins des usagers, à compter du 1er janvier 2024, les collèges et lycées dont les personnes morales de droit public ou privé ont la charge et servant plus de 100 couverts par jour sont tenus de proposer une option sans viande ni poisson à chaque repas, composée en majorité de protéines végétales. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Mon intervention ira totalement à rebours de ce qui vient d’être proposé.
La loi relative aux libertés et responsabilités locales de 2004 a bien conduit à une redistribution de certaines compétences entre l’État et différents échelons territoriaux. Il y a en particulier eu un transfert du personnel d’entretien et de restauration des collèges aux départements et des lycées aux régions.
En revanche, l’équipe pédagogique et administrative des collèges et des lycées continue de dépendre du ministère de l’éducation nationale ; il y a donc une bigouvernance, puisque certains agents relèvent des collectivités et d’autres du ministère de l’éducation nationale.
Le fonctionnement du service de restauration dépend de la bonne collaboration entre l’équipe de cuisine, dont le chef de cuisine, qui dépend du département ou de la région, et le gestionnaire de l’établissement lui-même, qui se trouve sous l’autorité du proviseur, lequel dépend du ministère de l’éducation nationale. Ainsi, concrètement, si les collectivités attribuent bien le budget de restauration collective aux gestionnaires, ce sont ces derniers qui sont ensuite chargés des dépenses et de la facturation des achats de biens et de services de tout l’établissement, avec une autonomie dans les choix budgétaires, dans le cadre de cette enveloppe.
C’est pourquoi la composition et la qualité des menus peuvent différer, sur le terrain, entre deux établissements scolaires pourtant voisins. Cela signifie que les départements et les régions qui seraient volontaires pour participer à cette expérimentation ne pourraient pas demander aux gestionnaires des établissements de leur territoire la mise en place de cette option quotidienne. Les menus proposés dans les collèges et les lycées dépendent davantage de la responsabilité de l’État que de celle des collectivités.
Ainsi, au nom de l’exemplarité de l’État dans la transition écologique, il faut permettre aux collégiens et aux lycéens d’avoir le choix, dès lors que plusieurs plats sont proposés.
Par ailleurs, la demande de repas végétariens de la part des adolescents et des jeunes est immense. Il serait donc surprenant que ces derniers ne soient pas concernés par la possibilité de bénéficier d’une option végétarienne quotidienne, alors qu’ils sont les premiers usagers à se mobiliser en ce sens.
Après l’expérimentation issue de la loi Égalim et les initiatives fructueuses de certains établissements visant à aller plus loin, c’est dans le secteur scolaire qu’il existe le plus de recul et d’accompagnement possible sur la mise en place de repas végétariens. Ce secteur doit donc maintenir son avance en proposant une alternative végétarienne quotidienne dans ses cantines, dans lesquelles plusieurs choix sont d’ailleurs déjà régulièrement proposés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Sur la question de savoir s’il faut aller plus loin qu’un repas végétarien par semaine en restauration scolaire, je pense que nous allons avoir le débat.
Quant à la question de savoir s’il faut l’imposer en s’appuyant sur des arguments nutritionnels, l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), s’estime incapable, dans son avis de 2020, de trancher la question de la qualité nutritionnelle de plus d’un menu végétarien par semaine pour les enfants et les adolescents. Elle a donc lancé une étude, qui devrait être achevée à l’automne prochain sur la question. Tant que cet avis n’est pas rendu, je considère que les parlementaires ne disposent pas des données nécessaires pour justifier une obligation en la matière.
J’ajoute que, si des collectivités veulent expérimenter la mesure dans leurs cantines, rien ne les en empêche ; elles sont libres de le faire. En outre, une expérimentation sera proposée dans un autre article du projet de loi, qui permet de disposer des données évaluatives sur le sujet.
Enfin, pour éclairer les débats, je signale que l’amendement que nous examinons supprime la possibilité d’un choix de menus végétariens quotidiens dans les restaurants collectifs du personnel des collectivités territoriales volontaires ainsi que la possibilité d’un menu végétarien quotidien dans les cantines de l’État.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Du point de vue environnemental, une option végétarienne quotidienne choisie par 25 % des usagers, dans les collèges et lycées, représenterait, chaque année, une économie de 0,2 million de tonnes d’équivalent CO2, soit 200 000 allers-retours Paris-New York.
J’ajoute qu’il y a, dans notre société, un problème d’inégalité concernant nos enfants et nos adolescents, lié à un manque de fruits et légumes et à la viande de mauvaise qualité. Ce dont nous manquons, c’est de viande de qualité et de fruits et légumes. Il n’y a pas, en France, de sous-consommation de viande ; c’est plutôt le contraire. Ainsi, du point de vue de la santé, une telle mesure serait très vertueuse pour les adolescents qui manquent de légumes et de fruits.
Enfin, du point de vue des cantines, cela dégagerait des marges de manœuvre budgétaires pour, vous l’avez dit, monsieur le ministre, acheter de la viande bio et locale.