M. le président. La parole est à M. Serge Babary, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Babary. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.
Monsieur le ministre, partout dans le monde, l’activité repart et les économies se relancent après la crise sanitaire. En France, nous assistons à un rebond technique : après l’effondrement de 8 % du PIB, sa progression devrait atteindre 6 % cette année.
Si une lecture partielle de la situation pourrait nous conduire à un excès d’optimisme, toute comparaison montre à quel point notre économie ressort de la crise plus dégradée que celles de nos voisins.
Nos parts de marché à l’exportation régressent. « Ces chiffres sont mauvais », déclariez-vous en février dernier. En effet, pour l’année 2020, les chiffres publiés par la direction générale des douanes et droits indirects traduisent une inquiétante dégradation : le déficit commercial de la France, qui était déjà de 57,9 milliards d’euros en 2019, atteint désormais 65,2 milliards d’euros.
Les exportations françaises de biens et services se sont contractées plus fortement que dans les autres pays de la zone euro : –19,3 % pour notre pays, contre –13,2 % pour la zone euro.
Le déficit commercial de la France s’est aggravé, pour atteindre 3,6 % du PIB, alors que les soldes de l’Espagne et de l’Italie s’amélioraient. Quant à l’Allemagne, elle maintient un excédent de 5,5 % de son PIB.
La part de la France dans les exportations de la zone euro est à son plus bas niveau depuis vingt ans, et les chiffres de 2021 continuent à se dégrader. Plus grave encore, cette détérioration concerne la quasi-totalité des catégories de produits, y compris, désormais, le secteur agroalimentaire.
Quelle conclusion tirer de ces résultats désastreux ?
La compétitivité de nos entreprises s’est dégradée, la fiscalité française est plus que jamais désavantageuse par rapport aux autres pays, et notre industrie poursuit son érosion.
Monsieur le ministre, le déclassement français est-il donc inéluctable ? Personne ne peut s’y résoudre. C’est pourquoi nous attendons des actions fortes de votre part ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.
M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l’attractivité. Monsieur le sénateur Babary, il est exact que le déficit commercial extérieur de la France s’est dégradé en 2020 par rapport à 2019. La crise de la covid et le fait que celle-ci a particulièrement affecté des secteurs forts à l’international pour la France, tels que l’aéronautique, expliquent cette dégradation en 2020.
Le Gouvernement est totalement mobilisé pour redresser le commerce extérieur français, structurellement déficitaire depuis des années. Notre stratégie repose sur quatre axes.
Le premier est la compétitivité. Pardonnez-moi, monsieur le sénateur, car je sais que vous connaissez bien ces sujets, mais je ne peux vous laisser affirmer que la compétitivité des entreprises françaises se dégrade : au contraire, elle s’améliore, notamment grâce aux décisions fiscales qui ont été prises par le Gouvernement depuis 2017.
M. Laurent Duplomb. Oh !
M. Franck Riester, ministre délégué. La baisse de la fiscalité sur le capital, la baisse de l’impôt sur les sociétés, la baisse des impôts de production, le rapprochement des négociations au sein des entreprises du terrain, la simplification de la relation des entreprises avec l’administration, le paquet mis sur la formation professionnelle et sur l’innovation permettent à la France, en 2020, pour la deuxième année consécutive, d’être le pays le plus attractif en matière d’investissements étrangers sur son sol. Nous aurons l’occasion d’y revenir lundi dans le cadre de Choose France, un grand événement visant à conforter l’attractivité de la France.
Le deuxième axe est la stratégie industrielle. Celle-ci doit être encore plus forte qu’elle ne l’a été au cours des années précédentes. C’est tout l’objectif du plan France Relance, qui mise sur les secteurs industriels d’avenir.
Le troisième axe est de promouvoir une politique commerciale européenne moins naïve. Nous devons nous doter d’outils nous permettant de mieux protéger nos entreprises. Cette démarche est au cœur des initiatives françaises visant à infléchir la politique commerciale européenne. D’ici à la présidence française, nous entendons démontrer, au travers des outils juridiques auxquels nous travaillons, que les choses changent en Europe.
Enfin, le quatrième axe est l’accompagnement des entreprises, notamment des PME, à l’avenir desquelles je sais que vous êtes particulièrement attaché, monsieur le sénateur. Celles-ci doivent être mieux accompagnées à l’international. C’est pourquoi cet objectif est au cœur du volet export du plan de relance, que j’ai l’honneur de porter depuis maintenant plus de six mois au sein du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
affectation prioritaire des fonctionnaires ultramarins dans leurs territoires
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
Mme Lana Tetuanui. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ‘ia ora na !
Ma question s’adresse à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Madame la ministre, depuis ma première mandature, soit depuis 2015, je suis continuellement interpellée par des fonctionnaires titulaires polynésiens qui émettent le vœu de rentrer servir dans leur territoire d’origine après plusieurs années d’affectation en métropole, loin de leur famille.
Convient-il rappeler que la Polynésie française se situe à 18 000 kilomètres de l’Hexagone et que toute visite de nos fonctionnaires à leur famille suppose de traverser deux océans, et ce à un coût prohibitif ?
Si des évolutions sont certes intervenues, vous conviendrez qu’il est tout à fait normal, pour un enfant du pays, d’émettre le vœu de travailler dans la collectivité dont il est originaire, dès lors qu’il y a une vacance d’emploi correspondant à son grade dans son administration déconcentrée en Polynésie.
Or force est de constater que, malgré la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires et la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer, dite ÉROM, instituant le caractère prioritaire – je pèse mes mots – du retour en outre-mer en vertu du critère du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM), certains ministères techniques ignorent ce principe et privilégient l’affectation des fonctionnaires expatriés, au détriment de nos enfants ultramarins qui ont fait l’effort de passer les concours à l’échelon national puis de s’expatrier en métropole sans les avantages fournis uniquement dans le sens Paris-Papeete.
De tels agissements de la bureaucratie parisienne nous laissent pantois en Polynésie et méritent d’être ouvertement dénoncés.
Que comptez-vous faire, madame la ministre, pour que les fonctionnaires ultramarins soient définitivement considérés comme prioritaires quant à leurs vœux de mutation à destination de leur territoire d’origine ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Madame la sénatrice Tetuanui, comme vous le savez, depuis le début du quinquennat, le Gouvernement est entièrement mobilisé pour faire en sorte que la fonction publique soit plus représentative de l’ensemble des bassins de vie dont nous avons la responsabilité. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
C’est dans cet esprit que nous nous sommes engagés à faciliter, quand ils le souhaitent, le retour des fonctionnaires originaires des outre-mer dans leur territoire.
Je tiens à rappeler un principe fondamental : comme tout fonctionnaire ultramarin pour son territoire, les fonctionnaires d’origine polynésienne sont bien prioritaires pour accéder aux emplois de la fonction publique en Polynésie.
À cette fin, le critère du centre des intérêts matériels et moraux, le CIMM, que vous mentionnez, comme priorité légale d’affectation permettant le retour de nos fonctionnaires dans leur territoire d’origine, est particulièrement important. En tant que ministre de la fonction publique, je m’attache à promouvoir ce dispositif avec force auprès de nos agents publics.
Comme le prévoit la loi de 2019, je vous remettrai, dans les tout prochains jours, un rapport sur ce sujet. Nous y dressons un bilan des dispositifs mis en place depuis 2017. Celui-ci montre que cette priorité légale récente constitue une véritable accélération des possibilités de mutation pour les agents qui les sollicitent.
En effet, depuis 2017, les demandes effectuées au titre du centre des intérêts matériels et moraux aboutissent dans 28 % des cas à une affectation, soit un taux deux fois supérieur à celui des affectations attribuées au titre des autres priorités telles que la situation de handicap ou le rapprochement familial. Autrement dit, le centre des intérêts matériels et moraux est bien, dans l’application dans notre droit, la priorité des priorités.
En Polynésie spécifiquement, il apparaît que certains agents qui souhaitent revenir ne recourent pas suffisamment à ce dispositif. Je m’attache donc, avec les employeurs publics, à faire en sorte que ces agents aient bien accès à toute l’information, car, comme vous le savez, quelque 1 800 postes d’emploi sont actuellement ouverts dans les collectivités et départements d’outre-mer sur la plateforme Place de l’emploi public.
Soyez assurée, madame la sénatrice, que je continuerai d’œuvrer, avec l’ensemble de mes collègues du Gouvernement, à cet enjeu crucial qu’est l’affectation de nos agents publics dans les outre-mer.
allocation aux adultes handicapés (ii)
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La semaine dernière, au terme d’une séance surréaliste et d’un passage en force du Gouvernement, l’Assemblée nationale a refusé de supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans la base de calcul de l’allocation aux adultes handicapés, dite AAH. En ayant recours au vote bloqué, vous avez empêché la tenue d’un débat légitime sur notre système de solidarité. Vous avez exprimé une nouvelle fois votre peu de considération à l’égard du Parlement, mais, surtout, à l’égard de tous ceux qui, depuis longtemps, se battent pour l’autonomie financière des personnes handicapées.
En effet, le mécanisme actuel de calcul de l’AAH est injuste. Le bénéficiaire qui est en couple se voit privé de son allocation, dès lors que les revenus communs excèdent un plafond de ressources. Il se retrouve en situation d’extrême dépendance pour les dépenses quotidiennes. Je pense aux femmes handicapées, dont les revenus sont généralement plus faibles que ceux de leur conjoint. Je pense aux personnes qui font le choix de ne pas se mettre en couple pour ne pas perdre leur allocation. Je pense à ceux qui n’ont parfois d’autre choix que de se séparer pour retrouver leur indépendance financière.
Le Sénat, le 9 mars dernier, s’est prononcé en faveur de cette mesure de justice sociale, répondant au succès d’une initiative citoyenne sur la plateforme e-pétitions, voulue par le président Gérard Larcher pour établir un contact direct avec nos concitoyens.
Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : allez-vous revenir sur votre position moralement regrettable, en acceptant enfin de supprimer les revenus du conjoint dans le calcul de l’AAH ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice Gruny, je me demande bien ce qui a pu se produire entre le mois d’octobre 2018 et aujourd’hui, pour que votre groupe politique balaie d’un revers de main ses principes… (Exclamations ironiques sur des travées du groupe CRCE.)
Permettez-moi de vous rappeler que, en 2018, dans ce même hémicycle, votre groupe affirmait, à propos de la déconjugalisation de l’AAH, que « la volonté de nier la situation familiale du bénéficiaire pour individualiser l’allocation participe de cette vision individualiste de l’homme et de la société qui tend vers un éclatement du lien social et une déconstruction de la famille ». Vous vous opposiez massivement, par principe, au nom des valeurs qui font la colonne vertébrale politique de votre groupe, à la déconjugalisation de l’AAH et à ses effets. Vous vous refusiez à considérer la société comme une simple addition d’individus autonomes aux intérêts propres. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Où sont donc passés ces principes de solidarité nationale et familiale, madame la sénatrice ? Considérez-vous à présent le couple comme une zone de violence permanente où les personnes en situation de handicap seraient systématiquement soumises ou sous emprise ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Parlons également de responsabilité budgétaire ! Vous vous érigez en permanence en garants du bon usage des deniers publics et vous passez votre temps à nous donner des leçons de gestion. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Pourtant, vous êtes prêts à ouvrir la voie à un revenu universel sans condition de ressources et à élargir par conséquent ce principe au RSA, sur le budget des départements !
Pour rappel, le coût de la déconjugalisation du RSA est chiffré à 9 milliards d’euros. Si nous l’ajoutons à celui de la déconjugalisation de l’AAH, je serais très curieuse de connaître votre stratégie budgétaire. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Allons-nous financer des hausses d’allocations avec les impôts des Français ? Eh bien, non ! La réforme que nous portons, c’est zéro perdant et 110 euros de plus pour 120 000 personnes en couple. Elle n’est faite d’aucune promesse vaine, car nous pourrons l’appliquer dès le 1er janvier 2022, en toute équité et justice sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour la réplique.
Mme Pascale Gruny. Concernant l’aspect budgétaire, quand on est dans le « quoi qu’il en coûte », je pense que, pour les personnes en situation de handicap, on ne fait pas dans le détail ! (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.)
Au sujet de la position de mon groupe en 2018, vous le savez, certaines personnes handicapées perdront une partie de leur allocation si l’on ne sépare pas les revenus du conjoint. Nous voulions une étude d’impact sur cette mesure. Ses résultats nous ont conduits à revoir notre position.
Un texte est prêt à être examiné, et nous sommes à votre disposition. Il sera l’occasion de revenir sur le sujet, et vous verrez que, grâce aux collègues issus de l’ensemble des travées, il finira par passer. Nous ne faisons pas, nous, de politique politicienne (Rires sur les travées du groupe RDPI.) sur les personnes en situation de handicap ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
réforme de l’assurance chômage
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Monsieur le Premier ministre, madame la ministre du travail, le 9 juin dernier, je vous interrogeais sur la réforme du chômage et ses effets dévastateurs pour les plus précaires. À cette occasion, le Gouvernement affirmait qu’aucun demandeur d’emploi ne serait pénalisé par cette réforme et qu’elle se justifiait par une situation économique favorable et un marché du travail en très nette reprise.
Hier, le Conseil d’État a infirmé ces propos. Saisie par les syndicats, la juge des référés a suspendu le mode de calcul proposé par le Gouvernement et qui devait entrer en vigueur le 1er juillet prochain. La juge pointe les incertitudes économiques qui ne permettent pas la mise en place de ces nouvelles règles. Cette réforme rend moins favorable l’indemnisation du chômage des salariés qui alternent contrats courts et inactivité.
Ce nouveau contretemps pour votre réforme arrive après l’échec des négociations avec les partenaires sociaux en 2018. Malgré cet échec, vous aviez pris un décret, en juillet 2019, qui redéfinissait le régime d’assurance chômage. En novembre 2020, le Conseil d’État l’a annulé partiellement.
Vous avez pris un nouveau décret, le 30 mars 2021, qui amendait le mode de calcul. Cela a donné lieu à une nouvelle saisine par les syndicats et à une nouvelle suspension par le Conseil d’État. Quand pensez-vous abandonner ce bras de fer qui dure depuis trois ans ?
Je rappelle que, d’après l’étude d’impact menée par l’Unédic, 1 150 000 personnes constateraient une baisse moyenne de 17 % de leur allocation, dont 345 000 jeunes qui peinent à trouver un emploi stable.
Cette réforme est injuste et accentue les inégalités. Elle prévoit de faire des économies sur les chômeurs, en particulier sur les plus précaires. Nous vous le demandons à nouveau, monsieur le Premier ministre : abrogez une bonne fois pour toutes cette réforme injuste ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.
Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, je vous remercie de me donner une nouvelle fois l’occasion de le dire : aucun demandeur d’emploi ne verra son allocation baisser dans le cadre de la réforme. Le montant global des allocations est maintenu, et seuls les demandeurs d’emploi qui gagnent plus en étant au chômage qu’en travaillant pourront avoir, demain, une allocation plus basse, qu’au demeurant ils toucheront plus longtemps.
Je vous invite à relire la décision du Conseil d’État. Elle ne remet absolument pas en cause la réforme de l’assurance chômage. Le Conseil d’État ne retient aucun des arguments de fond soulevés par les organisations syndicales. Il nous dit que ce n’est pas le bon moment pour modifier le mode de calcul de l’allocation chômage, car, selon son analyse, la conjoncture économique serait trop incertaine.
Pour ma part, je constate que l’économie repart et que les embauches sont très dynamiques. Je pense, madame la sénatrice, que vous entendez comme moi des chefs d’entreprise qui font état de difficultés de recrutement. C’est donc maintenant qu’il faut faire évoluer les comportements sur le marché du travail et qu’il faut lutter contre la précarité.
De plus, je précise, puisque tout le monde ne semble pas l’avoir compris, que le bonus-malus entrera en vigueur dès le 1er juillet prochain pour les entreprises. Nous travaillons donc à rassurer davantage les acteurs, tant sur la situation économique que sur la dynamique de l’emploi.
Nous préciserons, dans les prochains jours, les modalités d’une mise en œuvre rapide de la réforme de l’assurance chômage. Dans l’immédiat, nous allons publier un décret pour prolonger les règles actuelles de calcul de l’allocation chômage, afin que les demandeurs d’emploi continuent d’être indemnisés après le 1er juillet.
L’ambition du Gouvernement reste inchangée : accompagner la reprise de notre économie en répondant aux besoins de recrutement des entreprises et lutter contre la précarité, notamment grâce à une mise en œuvre rapide de la réforme de l’assurance chômage. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour la réplique.
Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, nous n’entendons pas les mêmes échos… Vous refusez de reconnaître l’injustice de votre réforme, pointée par le Conseil d’État.
soutien à la filière bois
M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sabine Drexler. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
La filière bois française est dans une situation critique. Le plan de relance américain, une forte demande chinoise, et bientôt russe, dopent la demande de bois à l’échelle mondiale, avec pour effet une flambée des prix sans précédent, qui n’est pas sans conséquences pour notre pays.
Des grumes et des sciages de chênes et de résineux sont trop massivement exportés, ce qui met en péril nos ressources nationales. Les prix s’envolent, car les traders étrangers ont des moyens financiers bien supérieurs à ceux des acheteurs français.
Les professionnels de la construction bois, les charpentiers et les menuisiers de nos territoires ne peuvent plus honorer leurs commandes. Des chantiers se trouvent à l’arrêt, d’autres ne pourront démarrer comme prévu.
Face à ce phénomène, il est essentiel de trouver rapidement des leviers d’action, même si nous savons que la situation est complexe et que les marges de manœuvre sont limitées, eu égard à la réglementation européenne.
La semaine dernière, dans le cadre des débats sur la loi Climat, un amendement visant à restaurer la carte professionnelle d’exploitant forestier a été adopté par le Sénat. Nous espérons que cette mesure sera maintenue lors des débats à l’Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour rétablir cette situation devenue critique et pour protéger les entreprises françaises qui dépendent de ce secteur ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Drexler, vous l’avez dit, la situation est complexe. Un certain nombre de règles, notamment communautaires, mais pas seulement, s’imposent à nous et encadrent la manière dont nous pouvons répondre aux problématiques de la filière bois.
Il y a deux difficultés, dont l’une, conjoncturelle, est liée non seulement à une reprise économique très rapide partout dans le monde, mais aussi à des comportements spéculatifs. Pour faire face aux difficultés d’approvisionnement et à l’augmentation du coût des matières premières, en particulier du bois, nous travaillons avec le comité de filière depuis le mois d’avril dernier. Il s’agit à la fois d’appeler les grands donneurs d’ordres à éviter les surstocks et d’inciter les acheteurs publics à ne pas appliquer de pénalités sur les marchés qui seraient retardés par des problèmes d’approvisionnement. C’est ce que fera l’État, et nous avons invité les collectivités qui le souhaiteraient, dans le respect de la libre administration, à le faire aussi.
Par ailleurs, nous sommes convaincus que la réponse ne doit pas seulement être conjoncturelle, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans le cadre que vous avez évoqué. Elle doit aussi être de plus long terme, ce qui exige de développer des outils très transversaux. À ce titre, vous avez évoqué les dispositions de la loi Climat qui prospéreront au cours du débat parlementaire.
Dans le cadre du plan de relance et des politiques qu’il mène, le Gouvernement a la volonté de décarboner l’économie, en particulier le secteur de la construction, et de faire la promotion de la filière bois, ce qui nécessite de structurer celle-ci. Plus précisément, dans le cadre du plan de relance, une enveloppe globale de 200 millions d’euros est consacrée à la création d’un Fonds forêt non seulement pour accompagner les propriétaires en matière de diversification et de renouvellement des parcelles, mais aussi pour accompagner la filière en matière de plantations et de graines, ou encore pour améliorer la connaissance cartographique de la forêt.
Nous irons plus loin, puisque très prochainement deux appels à manifestation d’intérêt seront ouverts : le premier portera sur la construction bois carbone et le second sur le développement des produits bois et des systèmes de construction. L’objectif est de permettre à la filière bois française de s’adapter aux réglementations environnementales en matière de construction de bâtiments neufs et de renforcer cette chaîne de valeur de la filière forêt. C’est un travail de longue haleine.
Les réponses conjoncturelles que j’ai évoquées prendront effet immédiatement, aussi compliquées soient-elles parfois à mettre en œuvre, du fait des questions réglementaires que vous avez mentionnées. Nous devons travailler les uns et les autres à structurer la filière forêt et la filière bois plus avant dans le temps.
M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour la réplique.
Mme Sabine Drexler. En ce qui concerne la forêt publique, des mesures ont été prises pour garantir l’approvisionnement de la filière française, notamment par le biais de contrats d’approvisionnement ou de ventes labellisées de chênes. Cependant, plus de 60 % des stocks de bois privés français sont vendus à des professionnels pour être exportés.
Il est capital de trouver les outils qui permettront de réguler cet approvisionnement. La France doit peser de tout son poids au niveau européen pour que des mesures de préservation de nos ressources naturelles soient mises en place, afin d’échapper à la prédation de nos ressources forestières et à ses conséquences économiques et sociales, qui pourraient bien se révéler dramatiques. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
financement des locaux de la gendarmerie nationale par les communes
M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Annick Jacquemet. Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur et concerne le financement des locaux de la gendarmerie par les communes. Certaines communes du département du Doubs nous ont interpellés mon collègue Jean-François Longeot et moi-même à ce sujet. Reste que le problème se pose aussi dans de nombreux autres départements.
La construction des gendarmeries est assurée par des organismes dédiés comme Idéha ou Soderec, qui refacturent ensuite un loyer aux communes, loyer que l’État leur rembourse en contrepartie de la jouissance des locaux.
Au début, l’opération est équilibrée, en grande partie, sinon totalement. Au fil du temps, néanmoins, ces deux loyers n’évoluent pas de la même manière. Le premier s’adosse à un indice BT01 du bâtiment, qui augmente, et le second à l’évaluation du service France Domaine, qui déprécie les immeubles et, donc, diminue les loyers de l’État au fil des années. En résumé, l’un monte quand l’autre descend.
Très rapidement, une différence apparaît entre le loyer demandé par les organismes constructeurs et le loyer versé par l’État aux communes. Le manque à gagner constaté, par exemple, dans quatre communes du département du Doubs, Bavans, Bethoncourt, Étupes et Hérimoncourt, s’échelonne de 50 000 à 183 000 euros par an, ce qui représente pour l’une de ces communes une perte de plus de 1 million d’euros sur dix ans.
Monsieur le ministre, avez-vous connaissance de cette situation ? Si oui, comment comptez-vous mettre fin à cet effet ciseaux préjudiciable aux finances des collectivités ? Pourquoi l’État ne payerait-il pas directement le loyer des gendarmeries aux promoteurs plutôt que de conserver la commune comme intermédiaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)