Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Je vous remercie de vos propos, monsieur le sénateur. Votre constat est exact : si nous avons réussi à surmonter cette crise sanitaire dans l’Hexagone et dans les outre-mer, notre vigilance doit évidemment rester totale face au risque de résurgence de l’épidémie, qui se matérialise déjà par endroits.
La concomitance et l’intensité des vagues épidémiques en outre-mer ont justifié l’adoption de mesures de freinage fortes et précoces. Leur maintien dans la durée est parfois nécessaire, y compris là où la circulation virale baisse, pour éviter une résurgence. Cette stratégie est exigeante, difficile, au long cours. Elle doit être expliquée à la population, mais elle est efficace, nous en sommes convaincus, et les analyses menées par Santé publique France le confirment.
Aujourd’hui, cette situation sanitaire contrastée et fortement évolutive oblige les équipes sanitaires à rester vigilantes et réactives, comme elles le sont depuis le début de la crise.
Elles pourront évidemment compter jusqu’au bout sur le soutien du Gouvernement, même s’il n’y a malheureusement pas de recette miracle. Il faut continuer à mobiliser la solidarité nationale, à envoyer des renforts tant que cela est nécessaire et à maintenir en tension des dispositifs qui ont fait leurs preuves, si besoin au moyen d’actions de communication.
À Mayotte, les enjeux sont clairs : si les indicateurs épidémiologiques sont en diminution depuis plusieurs semaines, le territoire demeure particulièrement fragile et vulnérable, la principale raison étant la faible couverture vaccinale. En effet, seuls 44 % de la population globale à Mayotte disposent d’au moins une dose de vaccin.
C’est d’ailleurs sur ce point que je souhaite insister en conclusion, comme vous l’avez fait, monsieur le sénateur. Avec Olivier Véran et l’ensemble des équipes sanitaires du ministère, dans l’Hexagone comme dans les territoires ultramarins, je ne cesse de le répéter : faites-vous vacciner ! Nous ne pouvons nous satisfaire de chiffres aussi bas.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle.
M. Pierre Médevielle. Monsieur le secrétaire d’État, l’heure est grave dans la plupart des territoires d’outre-mer.
Les chiffres sont alarmants, du fait notamment de la contagiosité accrue du variant delta. Les hôpitaux doivent faire face à un afflux massif de malades : les services de réanimation sont saturés, les urgences débordées…
En Nouvelle-Calédonie, où la vaccination a pourtant démarré en janvier, 32 % seulement de la population disposent d’un schéma vaccinal complet.
Sur ce faible taux se greffent les modes de vie communautaires océaniens et les multiples comorbidités qui frappent les Calédoniens, offrant un terrain propice au désastre sanitaire en cours.
La barre des 100 morts a été franchie la semaine dernière.
La situation sanitaire est aussi sombre en Guyane, où le taux d’incidence grimpe en flèche, alors qu’une large partie de la population reste, elle aussi, rétive, voire hostile au vaccin.
Les chiffres le démontrent : moins de 25 % des Guyanais sont totalement vaccinés. En conséquence, l’épidémie ne faiblit pas, et le nombre de décès atteint des niveaux inédits.
Est-il acceptable de voir des soignants « anti-vaccins » manifester devant un hôpital ?
Monsieur le secrétaire d’État, cette épidémie est devenue, dans les outre-mer, une épidémie des « non-vaccinés ». Face à ce drame, il y a urgence à agir, et la solution, nous le savons tous maintenant, c’est la vaccination.
Aussi, envisagez-vous de rendre obligatoire la vaccination dans les territoires ultramarins les plus touchés ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, je le disais tout à l’heure, Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer, s’y trouve actuellement, notamment, mais pas seulement, pour faire le point sur ce contexte sanitaire extrêmement tendu. Ce territoire avait pourtant, jusqu’en septembre dernier, été protégé du virus, grâce aux mesures de contrôle mises en place à l’époque pour limiter les déplacements.
Aujourd’hui, la situation est radicalement différente : le variant delta s’est diffusé de façon assez fulgurante sur tout le territoire en à peine quelques semaines.
Il y a toutefois quelques motifs d’espoir. Nous observons ces derniers jours une diminution du taux d’incidence, même si nous interprétons les données avec prudence, car la situation hospitalière se caractérise toujours par une forte tension. Nous espérons toutefois qu’un plateau a été atteint. Pour traverser cette période difficile, 291 professionnels de santé ont été envoyés sur place depuis l’Hexagone. Plusieurs tonnes de matériel et de produits de santé ont également été envoyées. La coopération entre la Nouvelle-Calédonie, autonome sur le plan sanitaire, et le gouvernement français est intense, et, à mon sens, exemplaire.
Vous parliez aussi d’obligation vaccinale, monsieur le sénateur. Il me semble que le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a voté, pour la population générale, une obligation vaccinale, dont les modalités de mise en œuvre mériteraient peut-être d’être précisées afin de s’assurer que l’ensemble de la population y a effectivement accès.
Quant à la Guyane, j’aurai probablement l’occasion d’y revenir tout à l’heure, mais elle est actuellement en pleine quatrième vague épidémique, avec une forte tension hospitalière et une situation particulièrement fragile qui nécessitera probablement des mesures supplémentaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour la réplique.
M. Pierre Médevielle. Il est vrai que le Gouvernement a fait des efforts importants en envoyant du matériel dans les endroits où l’épidémie a flambé, notamment en Nouvelle-Calédonie.
Nous ne voulons pas revoir ce que nous avons vu dans certains pays européens, lors des premières et deuxièmes vagues, quand les systèmes de réanimation étaient saturés.
La vaccination semble avoir été bien acceptée par la population en Nouvelle-Calédonie, avec la double échéance du 31 octobre et du 31 décembre. J’y vois un signe encourageant pour élargir ce processus à d’autres territoires.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Monsieur le secrétaire d’État, la vaccination de l’ensemble des personnes éligibles, et non des seules personnes réputées fragiles, est aujourd’hui le moyen le plus efficace pour freiner, et peut-être un jour arrêter l’épidémie.
Elle réduit considérablement les risques de formes graves de la covid-19 et, plus important encore, le nombre de décès. Les études scientifiques l’ont montré. La « vie réelle » l’a montré également : les territoires les plus vaccinés sont aujourd’hui ceux où l’épidémie est la moins virulente et les décès les moins nombreux.
La vaccination est efficace, ouverte à tous, prise en charge à 100 %. Mais alors que notre pays a la chance de disposer de vaccins, force est de constater que la couverture vaccinale du territoire est très hétérogène, les territoires ultramarins étant loin derrière la moyenne nationale.
Guadeloupe, Saint-Martin, Martinique, Guyane : dans aucun de ces territoires, le taux de personnes avec au moins une dose ne dépasse 35 %, selon les chiffres de Santé publique France. La Guyane serait même le département le moins vacciné de France. C’est d’autant plus inquiétant que les outre-mer ont des prévalences de diabète, d’obésité et d’autres comorbidités avérées à la covid-19 bien supérieures à l’Hexagone.
Pire, alors que les Antilles et la Guyane ont connu une quatrième vague particulièrement sévère et meurtrière, aucun sursaut vaccinal ne semble survenir.
Nous cherchons tous à comprendre les raisons de cette réticence vaccinale, et la mission présidée par Bernard Jomier y consacre ses travaux en ce moment. Sont évoqués, tour à tour, la défiance envers le gouvernement central, la sensibilité à toute une série de fake news, le traumatisme consécutif au scandale du chlordécone, voire certaines influences religieuses.
Ma question est donc simple, monsieur le secrétaire d’État : quelle analyse faites-vous de cette réticence vaccinale ? Surtout, alors que la faible couverture vaccinale fait courir un danger immédiat, mais surtout futur face à de nouvelles vagues, en particulier si des variants présentant un risque d’échappement vaccinal devaient apparaître, quelles sont les actions concrètes que le Gouvernement et les autorités sanitaires sur place envisagent pour combattre ces réticences, « aller vers » et convaincre la population de la sécurité et de la nécessité de la vaccination ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, pour être très précis, deux territoires dépassent les 35 % de couverture vaccinale : Mayotte et La Réunion, avec respectivement 44 % et 57 %. On constate en effet une disparité entre, d’une part, les Antilles-Guyane, et, d’autre part, les territoires de l’Océan indien, qui ont davantage recours à la vaccination, même si les marges de progrès sont encore réelles.
Je ne vais pas reprendre toute votre démonstration, complète et brillante, sur l’utilité et la nécessité du vaccin. Au-delà des défiances et des croyances, que vous avez parfaitement identifiées, le décalage s’explique aussi par le fait que certaines populations sont isolées géographiquement, socialement et dans le rapport qu’elles entretiennent avec les institutions. Les dispositifs « d’aller vers » jouent donc selon nous un rôle absolument crucial dans le succès de la campagne de vaccination.
Des initiatives sont prises dans les territoires ultramarins pour aller auprès des populations les plus éloignées et les plus fragiles.
À La Réunion, par exemple, en lien avec les communes, les centres commerciaux et la Croix-Rouge, l’agence régionale de santé organise des opérations de « vaccinobus » dans les différentes communes de l’île. Des opérations de vaccination éphémères sont également organisées dans des maisons de quartier ou des salles des fêtes.
À Mayotte, les lieux de vaccination changent chaque semaine, et ce en étroite collaboration avec les communes.
En Guadeloupe, des équipes mobiles sont déployées et une campagne progressive d’appels téléphoniques est en cours pour proposer, en priorité aux plus de 75 ans, des rendez-vous de vaccination, avec, si besoin, une organisation et une prise en charge des déplacements vers les centres.
En Guyane, des dispositifs spéciaux sont lancés, notamment une opération de vaccination au centre spatial de Kourou pour cibler les employés sur leur lieu de travail. On sait que cela facilite souvent la vaccination.
Enfin, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, de nombreuses opérations de vaccination éphémères ont été lancées, notamment dans certains atolls reculés.
Il faut rester ingénieux, souple et inventif pour essayer d’élargir au maximum cette couverture vaccinale, dont vous avez relevé qu’elle était encore largement insuffisante dans certains territoires.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le secrétaire d’État, si j’avance le chiffre de 95 % des Guadeloupéens et de 92 % des Martiniquais, je n’évoque malheureusement pas les taux de vaccination contre le covid-19 de la population antillaise, mais le taux de contamination de celle-ci au chlordécone.
Pendant deux décennies, la France a continué à autoriser un produit dont la toxicité était avérée. Elle a laissé les cultivateurs de bananes s’empoisonner et tout empoisonner autour d’eux, et ce pour plusieurs siècles, car nous sommes incapables de décontaminer les sols et les réserves d’eau.
Trente ans plus tard, le rôle de l’État dans ce scandale sanitaire hors norme, étayé en 2019 par une commission d’enquête parlementaire, n’est reconnu que du bout des lèvres. La reconnaissance du lien de causalité entre le chlordécone et le cancer de la prostate n’est toujours pas établie par les autorités françaises. Les victimes n’ont jamais été indemnisées et votre quatrième plan chlordécone, présenté en mars, ignore largement ces enjeux.
Quel rapport avec le sujet qui nous occupe, me demanderez-vous ? Je le crois pourtant évident. Si la Guadeloupe et la Martinique sont, et de très loin, les deux départements qui connaissent le plus faible taux de vaccination – à peine 35 % de la population a reçu au moins une dose, soit un taux beaucoup plus faible que tous les autres territoires d’outre-mer –, c’est bien sûr tout sauf un hasard, même si l’on peut évoquer d’autres raisons. La confiance envers la puissance publique, les autorités sanitaires, et même la science, est largement entamée, pour ne pas dire rompue.
La vaccination est pourtant la seule option pour sortir de cette situation sanitaire, aggravée en outre-mer par un sous-investissement chronique dans l’hôpital public.
Ma question est simple, monsieur le secrétaire d’État : pour rebâtir la confiance et favoriser la vaccination en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et au-delà, le Gouvernement va-t-il enfin reconnaître les torts de la France dans le scandale du chlordécone et indemniser les victimes en conséquence ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur Gontard, vous avez raison de rappeler la responsabilité collective qui pèse sur nous pour rétablir la confiance éprouvée des habitants de ces territoires sur les questions de santé publique. Cette responsabilité m’oblige aussi à énoncer quelques vérités en réponse à votre interrogation.
Je le redis, l’affaire du chlordécone est un scandale que trop peu de Français connaissent à ce stade. Il n’en demeure pas moins que le Gouvernement agit afin d’apporter des réponses, conformément à l’engagement du Président de la République pris lors de son déplacement aux Antilles fin 2018.
Le Gouvernement est mobilisé pour que, face à cette pollution, l’État prenne sa part de responsabilité et avance sur le chemin de la réparation et des projets. Il a adopté, en février dernier, un nouveau plan stratégique dont vous connaissez les contours. En tant que parlementaire, vous êtes évidemment libre de le critiquer, mais il offre, je le crois, des solutions aux publics les plus touchés en concrétisant des promesses de longue date qui n’avaient jamais été tenues. Je pense par exemple à la reconnaissance du cancer de la prostate potentiellement causé par le chlordécone comme maladie professionnelle.
Je veux rappeler aussi que la gestion de la crise du covid, c’est tout le contraire du scandale du chlordécone. Il est de notre responsabilité collective de le dire. Loin des silences coupables, nous avons multiplié, dès le premier jour, les signaux d’alerte et les campagnes d’information. Jamais l’État n’a été aussi présent au quotidien pour accompagner les soignants et, plus largement, l’ensemble des Français touchés par le covid.
Rétablir la confiance, c’est déjà tirer les leçons des erreurs passées, et tout faire pour ne pas les reproduire. Je le répète, la gestion de la crise du covid n’a rien à voir avec celle du chlordécone. En l’occurrence, tout est dit, et toutes les publications scientifiques rigoureuses vont dans le même sens.
Unissons donc nos efforts pour en finir avec cette épidémie, en rétablissant la confiance auprès de nos compatriotes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le secrétaire d’État, « depuis deux semaines, il n’y a aucun lit disponible au centre hospitalier de l’Ouest guyanais, en pédiatrie, à la maternité […], aucun lit en service de médecine polyvalent, […] et surtout aucun lit en réanimation ».
Ce cri de détresse de Crépin Kezza, chef des urgences de ce centre, montre le décalage entre la métropole et nos collectivités d’outre-mer. Si les disparités sont importantes, nous souhaitons néanmoins interroger le Gouvernement sur ce décalage. Décalage dans le temps, décalage dans l’intensité, la vague d’épidémie qui frappe quasiment l’ensemble de nos collectivités d’outre-mer depuis l’été est un véritable choc et nous ne pouvons que soutenir nos concitoyennes et concitoyens ultramarins.
La Nouvelle-Calédonie, jusqu’à présent covid free, accuse plus de 100 morts en un mois sur ses 280 000 habitants. En Guadeloupe, où la situation s’améliore, ce taux demeure supérieur au seuil d’alerte.
Nous nous entendons tous pour dire que la campagne vaccinale permet de renverser ces tendances dramatiques. Mais cela ne suffit pas. Le manque de lits, le tri des patients, les personnels épuisés sont le résultat de sous-investissements chroniques. À Mayotte, on compte 300 lits au CHU alors qu’il en faut 900 en temps normal pour couvrir les besoins. En Guyane, on décompte 55 généralistes pour 100 000 habitants, alors que la moyenne nationale est de 104.
Ces déserts médicaux sont dénoncés chaque année, mais aucun véritable plan de rattrapage n’a été mis en place pour y remédier. Ces mêmes populations, qui souffrent là d’habitat insalubre, ici de coupures d’eau quotidiennes, ont une histoire bien à elles, qui alimente une crainte face aux injonctions du pouvoir éloigné d’elles, à Paris.
Ma question est simple, je vous l’accorde, monsieur le secrétaire d’État, mais elle est très vaste : comment, à travers les moyens mis en œuvre dans la campagne vaccinale, mais également dans le cadre d’un plan de plus long terme, le Gouvernement compte-t-il agir enfin, afin que l’inacceptable ne se reproduise plus ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Je ne sais si votre question est simple, madame la présidente Assassi ; elle est vaste, assurément, et sans doute considérerez-vous comme incomplets les éléments de réponse que je vais tâcher de vous donner. Aux difficultés réelles et connues que vous avez énumérées, le Gouvernement essaie d’apporter - et apporte - des réponses. Il le fait notamment, j’y reviendrai, à travers le Ségur de la santé, qui s’attaque à un certain nombre de problèmes structurels que vous soulevez.
La Guyane disposait initialement de 20 lits de réanimation. Nous avons porté à 48 le nombre de lits de réanimation armés et nous pourrions monter à 61 si la situation le nécessitait. Le Ségur a permis de rattraper, en de nombreux endroits, un retard accumulé, vous le savez, depuis de très nombreuses années. (Mme Éliane Assassi le conteste.) Il permet également de mieux préparer ces territoires aux nouveaux enjeux en matière sanitaire, de soutenir les professionnels de santé, engagés bien au-delà de la seule situation liée à la covid.
Le temps m’étant compté, je m’en tiendrai à quelques faits marquants : 53 000, c’est le nombre de personnels qui ont déjà été revalorisés, en cumulé, en Guadeloupe, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion et en Guyane ; 1,57 milliard d’euros, c’est le montant du plan pour relancer les investissements en santé dans ces mêmes territoires.
Derrière ces montants parfois peu parlants, il y a des actions très concrètes, qui concernent nos concitoyens et les professionnels de santé. Je citerai par exemple en Guadeloupe un projet d’investissement médico-social de plusieurs millions d’euros pour rénover les bâtiments ; en Martinique, le développement d’une plateforme numérique en mode SaaS, Software as a Service, qui va permettre aux patients d’accéder à une information rapide au sujet des soins non programmés ; enfin, en Guyane – et vous comprendrez que j’y sois particulièrement sensible –, le renforcement d’une filière de périnatalité pour traiter ce qui est, là-bas, un important problème de santé publique.
Tels étaient les quelques exemples que je souhaitais évoquer, certains de très court terme en réponse à l’épidémie de covid, d’autres de plus long terme, liés au Ségur de la santé. Ce dernier permet de rattraper des retards accusés depuis trop longtemps par ces territoires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à associer mon collègue Gérard Poadja, sénateur de la Nouvelle-Calédonie, à ma question.
Il y a à peine un an, la Nouvelle-Calédonie tenait une deuxième consultation sur son autodétermination. Après une mobilisation historique, le « non » l’emporte, conduisant les indépendantistes à solliciter une troisième consultation, dont la date a été fixée par le Gouvernement au 12 décembre prochain.
Toutefois, dans un contexte sanitaire inquiétant, des voix – majoritairement indépendantistes – se sont élevées pour envisager le report d’un tel référendum, par crainte d’une forte abstention.
Face à un taux d’incidence élevé, à un taux de vaccination de 42 % insuffisant, et à des capacités d’accueil hospitalières en surchauffe, et après le décès de 160 de nos compatriotes calédoniens, le Gouvernement et le haut-commissaire ont acté la prolongation du confinement pour deux semaines.
Monsieur le secrétaire d’État, malgré les renforts de près de 300 soignants volontaires de la réserve sanitaire, et alors que le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, est actuellement sur place pour faire le point sur l’évolution de la pandémie, craignez-vous que les conditions sanitaires ne permettent pas la tenue de ce troisième référendum ? Quel dialogue envisagez-vous avec l’ensemble des parties prenantes à cet égard ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur Longeot, je ne reviendrai pas sur les éléments de contexte précédemment développés sur la situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie. Soyez assuré néanmoins, je vous le répète, que cette situation fait l’objet d’un suivi attentif de la part du Gouvernement.
S’agissant du potentiel impact de l’épidémie sur la tenue du référendum prévu en décembre prochain, je vous apporterai une réponse coordonnée avec le ministre des outre-mer, qui vient d’atterrir, vous le savez, ce mardi même en Nouvelle-Calédonie. En plus des questions relatives à la crise sanitaire, à son évolution et à ses conséquences économiques, il y abordera la question du référendum.
Je rappelle qu’aux termes de l’accord de Nouméa, la date de la consultation est fixée par l’État. À ce jour, les préparatifs se poursuivent. Nous devons être prêts pour le 12 décembre, date arrêtée en juin après des discussions approfondies avec toutes les composantes politiques calédoniennes.
Organiser des scrutins de manière sereine dans de telles circonstances est possible. De nombreux pays l’ont fait : les États-Unis, l’Allemagne, le Portugal, Israël, etc. Notre rôle consiste à s’assurer que la campagne, d’une part, et le scrutin, d’autre part, puissent se tenir de manière sereine et sincère. C’est exactement ce à quoi œuvre le ministre, avec l’ensemble des acteurs locaux. Il aura très certainement l’occasion d’en parler très prochainement avec l’ensemble des élus de l’île, dont M. Poadja.
Voilà quelques éléments de réponse, en attendant le résultat des échanges que le ministre aura sur place.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour la réplique.
M. Jean-François Longeot. Je suis heureux d’entendre que c’est l’État qui fixe la date de la consultation et que celle-ci reste fixée au 12 décembre. Je me réjouis que vous puissiez tenir le cap et que tout soit mis en place pour que cette troisième consultation se déroule à la date indiquée, dans les meilleures conditions possible.
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. Saint-Pierre-et-Miquelon est le seul territoire ultramarin exclu de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire depuis le 21 septembre. Saint-Pierre-et-Miquelon, c’est 31 cas de covid identifiés depuis le début de la crise – 31 cas guéris –, mais c’est aussi 90 % de la population vaccinée en première dose – un taux sinon satisfaisant, du moins exemplaire –, et 88 % de la population vaccinée en seconde dose. Peut-être d’ailleurs Saint-Pierre-et-Miquelon aurait-il pu servir de modèle, à bien des égards, s’agissant de la territorialisation des mesures appliquées aux territoires ultramarins, voire hexagonaux.
Depuis le 4 octobre ont été mises en place de nouvelles conditions de circulation, de et vers les outre-mer depuis l’Hexagone. Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de vous adresser deux demandes de précisions concernant spécifiquement Saint-Pierre-et-Miquelon.
Voici la première : quand vous revenez de Paris en passant par Montréal en transit international, vous devez fournir un test PCR, même si votre parcours vaccinal est complet.
Sauf erreur de ma part, Saint-Pierre-et-Miquelon est le seul territoire ultramarin dans cette situation.
Pour l’expliquer, le représentant de l’État avance comme argument que la réglementation canadienne impose ce test PCR. Pour autant, quand vous partez de Saint-Pierre-et-Miquelon, en transit via Montréal pour vous rendre à Paris, ce test n’est pas requis. Pourquoi cette exigence s’impose-t-elle aux personnes présentant pourtant un parcours vaccinal complet ?
Ma deuxième demande de précisions porte sur le déremboursement des tests PCR prévu d’ici au 15 octobre. Comment justifier auprès d’une population presque intégralement vaccinée que les tests PCR ne seront pas remboursés, alors qu’ils sont imposés par la puissance publique ? Il ne s’agit pas de tests de confort, si tant est que le Gouvernement entende les maintenir.
J’ai une autre inquiétude. Le préfet a suggéré que les tests antigéniques, également valables quarante-huit heures avant le départ depuis Paris, ne seraient pas conseillés par rapport aux règles sanitaires en vigueur au Canada. Si ces tests ne sont pas valables, alors il faut les sortir du décret d’application.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Nous comprenons les incompréhensions qu’ont pu éprouver nos concitoyens ces derniers mois, face à des règles qui ont dû évoluer pour s’adapter à des réalités nouvelles, au risque que le quotidien de certains s’en trouve complexifié.
Vous m’interrogez sur les conditions d’entrée sur le territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon. Je vous renvoie au communiqué de presse publié hier par la préfecture à ce sujet. La réglementation prévoit que les personnes vaccinées en provenance de l’Hexagone et à destination de Saint-Pierre-et-Miquelon n’ont plus à réaliser de test. Cette règle s’applique pour les vols directs, qui toutefois ne fonctionnent que pendant la saison estivale. Pour les voyageurs en provenance de l’Hexagone et qui passent en transit par le Canada, la réglementation canadienne prévoit bien un test. Le communiqué de presse précise qu’il doit s’agir d’un test PCR, compte tenu du fait que le Canada n’accepte pas les tests antigéniques.
J’invite évidemment toutes celles et tous ceux qui se rendent à Saint-Pierre à se fier entièrement aux informations contenues dans ce communiqué de presse en date du 4 octobre. Si des informations différentes ont pu être diffusées ailleurs, soyez assuré que les équipes concernées font le maximum pour mettre tout cela en cohérence.
Sur la question de la gratuité des tests, je tiens là aussi à clarifier les choses : pour les personnes vaccinées qui seraient toutefois invitées à réaliser un test PCR, celui-ci sera bien pris en charge par l’assurance maladie. Pour les personnes non vaccinées, ce test sera en revanche considéré comme un test de confort réalisé en vue d’un voyage ; il restera donc à la charge des intéressés.
S’agissant des tests antigéniques, je crois que vous n’avez pas obtenu de réponse de la part de votre caisse locale. Nous avons fait remonter ce point et la réponse devrait vous arriver très prochainement.
Sur tous ces points, je salue votre vigilance. Elle nous invite à apporter la plus grande clarté aux informations que nous communiquons à nos concitoyens afin d’éviter toute confusion.