Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled. (M. Daniel Chasseing applaudit.)
M. Dany Wattebled. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, Pierre de Coubertin a écrit : « Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour triompher, et la difficulté pour la vaincre. » Fondateur des jeux Olympiques modernes, il a été le premier à œuvrer pour démocratiser le sport en France.
L’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 est une formidable occasion de renouveler cette volonté, et de placer le sport au centre de la vie des Français.
Forger l’esprit d’équipe, donner le meilleur de soi-même, former à la loyauté et au fair-play : le sport véhicule des valeurs très fortes, et il favorise l’insertion sociale et l’épanouissement personnel. C’est une école de la vie et un élément essentiel pour souder les liens entre nos concitoyens.
Au-delà de ses valeurs intrinsèques, le sport a de nombreuses vertus. L’activité physique adaptée est un levier essentiel de santé publique, agissant à la fois sur la prévention et sur la guérison. Une pratique sportive quotidienne de trente minutes est le meilleur remède au diabète lié à la sédentarité. Pour les femmes en rémission d’un cancer du sein, la pratique sportive fait baisser de 40 % à 30 % le risque de récidive. Les récents rapports de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de la Haute Autorité de santé (HAS) indiquent que le sport est la première thérapie en cas de dépression légère.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui comporte un article important pour étendre les prescriptions d’activité physique adaptée aux personnes atteintes d’une maladie chronique. Je pense que nous devons ouvrir ce dispositif au plus grand nombre possible de personnes dont l’état de santé nécessiterait la pratique d’une activité physique. Je proposerai donc plusieurs amendements pour inclure dans le dispositif les personnes atteintes de troubles mentaux et les seniors en situation de dépendance, afin de limiter l’aggravation de leur perte d’autonomie.
Pour donner une réelle portée au sport-santé, il appartient désormais au Gouvernement de généraliser la prise en charge des séances par l’assurance maladie. Certaines villes et certaines mutuelles le font déjà.
Si le sport améliore l’état de santé général, il favorise aussi l’apprentissage, la concentration et la mémorisation. Le développement du sport à l’école est une priorité nationale. Nous devons, autant que possible, faciliter les liens entre les associations sportives locales et les établissements scolaires, et définir une stratégie nationale du sport à l’école et à l’université. La commission a adopté un amendement pour prévoir un temps minimal de pratique sportive quotidienne dans les écoles primaires. C’est un premier pas, mais nous devons être plus ambitieux. Jean-Pierre Decool et moi-même avions déposé des amendements pour étendre la pratique sportive quotidienne aux collèges, lycées et universités. Ces amendements ont été déclarés irrecevables, c’est regrettable.
Pour encourager l’éducation sportive, nous souhaitons mettre en place à chaque rentrée scolaire une journée de découverte des sports, en partenariat avec les associations et les élus locaux. Cette journée, inspirée du modèle allemand, pourrait avoir lieu dans le cadre de la journée nationale du sport scolaire, qu’il faudrait étendre aux universités.
Enfin, je défendrai un amendement qui me paraît essentiel pour développer le sport en entreprise. La proposition de loi prévoit l’installation de douches et de vestiaires dans les bureaux qui seront construits à l’avenir. Nous devons avant tout favoriser les liens entre les entreprises et le tissu local d’associations et de clubs sportifs. Dans cet objectif, je propose la mise en place d’un ticket sport, sur le modèle du ticket restaurant, pour permettre aux salariés de financer tout ou partie d’un abonnement à une pratique sportive. Actuellement, seulement 7 % des entreprises mettent à disposition de leurs salariés une offre sportive.
La sédentarité est une bombe à retardement. Les professionnels de santé sont de plus en plus nombreux à nous alerter : un adulte sur deux ne pratique aucune activité physique, et les enfants passent de plus en plus de temps devant leurs écrans. Nous devons inviter le sport dans le quotidien des Français et atteindre l’objectif de trente minutes d’activité quotidienne.
À mon sens, le sport-santé, le sport scolaire et le sport en entreprise sont les trois priorités pour démocratiser le sport en France. Je défendrai des amendements pour concrétiser cette volonté et renforcer la portée de cette proposition de loi. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quatre années : il aura fallu attendre exactement une olympiade pour voir enfin arriver ce texte au Parlement. Celui-ci avait pourtant été promis dès le début de ce quinquennat. Il vise à promouvoir la pratique du sport dans notre pays, donnant ainsi l’élan nécessaire à une nation qui, justement, doit accueillir les jeux Olympiques et Paralympiques en 2024. C’est bien tard, et bien décevant.
Sur la forme, à l’image d’un gruppetto lors d’une étape du Tour de France, ce texte est hors délai, et il faudra compter sur l’indulgence des commissaires de course que nous sommes pour un éventuel rattrapage.
M. François Bonhomme. Une voiture-balai…
M. Stéphane Piednoir. Sur le fond, cette proposition de loi comportait une succession de gestes sportifs mal maîtrisés, voire d’infractions aux règles sportives applicables sur tous les terrains de jeu. Je salue donc le travail considérable de notre rapporteur Michel Savin et de la commission, qui a permis d’enrichir ce texte.
Celui-ci commence par une chandelle inappropriée, en vantant dans l’article 1er bis les bienfaits de l’activité physique adaptée, sans jamais proposer de financement généralisé. Nous sommes pourtant nombreux à plaider en ce sens, mais l’article 40 de la Constitution nous empêche de le formaliser dans cet hémicycle. Le rapport du Gouvernement introduit en commission nous éclairera sans doute utilement sur le sujet.
Cela continue, avec une mêlée ouverte inorganisée dans l’article 1er ter et son chapelet de bons sentiments venant alourdir un code du sport qui mériterait tellement mieux. Dans ce même article, nous ne sommes pas loin d’un grossier passage en force, avec l’introduction surprenante de l’identité de genre : ces considérations inutiles ont judicieusement été supprimées en commission.
M. Jean-Raymond Hugonet. Très bien !
M. François Bonhomme. Bravo !
M. Stéphane Piednoir. Plusieurs hors-jeux ont été identifiés par de nouvelles obligations faites aux collectivités locales, évidemment sans compensation financière.
M. Olivier Paccaud. Carton rouge !
M. Stéphane Piednoir. J’en veux pour preuve les contraintes liées à la construction de nouveaux équipements sportifs ou à l’élaboration de plans sportifs locaux. Les intentions sont louables, mais leur concrétisation nécessite un geste budgétaire de la part de l’État.
Il y avait aussi un refus de jeu manifeste, caractérisé par l’absence totale de considérations sur l’enseignement supérieur. Pourtant, après une scolarité bien encadrée par des horaires et des programmes nationaux, beaucoup d’étudiants cessent toute activité physique à l’entrée dans le supérieur, à un moment où cela constitue pourtant un élément essentiel pour leur équilibre. J’ai proposé et fait adopter en commission plusieurs amendements visant à mettre à disposition des étudiants les équipements sportifs situés dans environnement proche. D’autres dispositifs plus ambitieux, comme celui réservant une demi-journée à la pratique du sport, mériteraient d’être examinés, même s’ils touchent à l’autonomie des universités.
Puis, il y a ce jeu dangereux, qui consiste à masquer la réalité des choses et à ne surtout pas aborder les sujets délicats. Pourtant, les discussions sur le projet de loi confortant le respect des principes de la République ont mis en lumière l’entrisme de certaines idéologies dans nos clubs de sport ainsi que dans nos établissements scolaires et universitaires. Nous le savons : le sport est un vecteur privilégié, et désormais bien identifié, pour atteindre et formater notre jeunesse. Notre responsabilité est de ne pas céder, et d’exiger la neutralité de chacun lors des compétitions sportives. Au nom du groupe Les Républicains, je vous proposerai un amendement en ce sens.
Enfin, j’hésite entre le retour en zone et la passe en avant en ce qui concerne les dispositions liées à la gouvernance des fédérations sportives, dans un contexte particulier, lié à une crise sanitaire qui les a grandement fragilisées.
Je suis extrêmement réservé, à titre personnel, sur l’imposition de quotas de toutes sortes dans notre société, et je considère que les nouvelles exigences de parité sont excessives et ne prennent pas assez en compte le mouvement engagé dans la très grande majorité des fédérations.
M. Olivier Paccaud. Tout à fait !
M. Stéphane Piednoir. Malgré tout, le Sénat s’est emparé sérieusement de ce texte, et je ne doute pas que nous poursuivrons en séance le travail de qualité engagé en commission. Espérons que le Gouvernement y sera attentif ne pratiquera pas un plaquage haut de mauvais aloi ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus. (Mme Monique de Marco applaudit.)
M. Thomas Dossus. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le texte du quinquennat qui a pour ambition de réformer le monde du sport. Après une si longue attente, nous aurions aimé obtenir un texte ambitieux et transversal qui redynamise la pratique de l’activité physique et permette l’avènement d’une société sportive ouverte et accessible à toutes et tous : en un mot, un texte permettant de démocratiser le sport en France. Nous en avons un besoin urgent, comme le montre bien la situation des clubs d’élite comme des clubs amateurs, après les deux années que nous avons traversées.
Mais, à la lecture de cette proposition de loi, nous sommes relativement déçus. Comme beaucoup de textes de cette fin de mandat, celle-ci contient un catalogue de mesures, souvent utiles, certes, voire nécessaires. Mais la vision d’ensemble, le nouveau souffle pour une France sportive ne sont pas au rendez-vous.
Il faut reconnaître que ce texte comporte des mesures qui, si elles ne sont pas révolutionnaires, méritent globalement d’être saluées. Je pense ainsi à l’ouverture de l’accès aux équipements sportifs des collèges et lycées pour les clubs, les étudiants et les associations, ou encore à l’établissement de plans sportifs locaux, qui permettront un meilleur accès à la pratique sportive en la démultipliant sur nos territoires. Je pense également aux mesures concernant l’honorabilité des instances dirigeantes des fédérations, au non-cumul des mandats dans le temps pour les présidents de fédérations, et à l’instauration d’une plus grande parité, même si ces deux dernières mesures ont été largement amoindries par notre commission. Saluons, enfin, la régulation du sport professionnel, avec la lutte conte la dérive des paris sportifs.
Ce texte va donc dans le bon sens, mais il est souvent limité, et notre commission en a malheureusement encore restreint la portée.
N’y figurent plus, de ce fait, les référents-sports des établissements sociaux et médico-sociaux et des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). La mesure sur le non-cumul des mandats dans le temps a aussi été supprimée, tout comme l’exigence d’atteindre la parité intégrale d’ici à dix-huit mois. Exit, enfin, l’attribution de droits de diffusion aux chaînes en clair.
Si tout n’est pas à jeter dans l’apport du Sénat jusqu’ici, force est de constater que sa contribution aux mesures phares du texte ne va clairement pas dans le bon sens. Nous avons déjà entendu ces arguments, lorsque nous débattions de parité en politique : « Pas trop vite, les institutions ne sont pas prêtes, nous allons décourager des vocations… »
Nous examinons donc un texte limité, et encore amoindri par le débat parlementaire. Disons-le clairement : nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux énoncés par l’intitulé de cette proposition de loi.
Pourtant, des enjeux, il y en a, car parler du sport, c’est aussi parler de la société que nous voulons voir advenir, de la manière dont on se comporte avec les autres, des valeurs que l’on partage, de sa santé, de la manière dont on se déplace, dont on vit… Parler du sport, c’est aussi parler de l’environnement dans lequel on le pratique, du partage de l’espace public et des équipements. Parler du sport, c’est enfin parler de celles et de ceux qui le font vivre, de leurs conditions de travail, de bénévolat et de la place de l’éducation dans ce processus.
Mais de tout cela, nous ne parlerons pas aujourd’hui. Pas un mot pour répondre à la colère des professeurs d’éducation physique et sportive (EPS), qui appellent à une revalorisation de leur statut et à une autre approche du sport à l’école. Surtout, un grand vide, voire un grand déni, sur la pratique sportive de demain dans un monde qui s’achemine à grande vitesse vers un climat où la température moyenne aura augmenté de deux, trois, voire quatre degrés, si nous restons sur la trajectoire actuelle de l’inaction gouvernementale.
Cela peut vous sembler une lubie d’écologistes, mais tout cela nous concerne toutes et tous. On ne pratique pas le sport de la même manière quand il fait 20 degrés ou 45 degrés. Comment organiser des matchs de football en extérieur quand il fait 40 degrés à l’ombre et que la pratique sportive est déconseillée au-dessus de 32 degrés ? Non, nous ne défendons pas la solution qatarie, qui consiste à climatiser les stades… Comment assurer l’avenir des sports d’hiver face à la fonte des glaciers et à l’absence de neige à des altitudes de plus en plus hautes ? Comment pérenniser la pratique du sport en intérieur alors que la majorité de nos gymnases ont été construits avant les années 1990 et sont des passoires thermiques ?
Il n’y a là rien d’anecdotique, et beaucoup de sportifs du quotidien, tout comme des sportifs de haut niveau, nous appellent à la mobilisation générale sur ces sujets. Nous proposerons toute une série d’amendements afin que la réduction des impacts environnementaux et la résilience face aux dérèglements climatiques soient inscrites au cœur de nos politiques sportives.
Parce qu’il n’y a pas de démocratisation sans inclusion, nous proposerons également le rétablissement du texte de l’Assemblée nationale pour toutes les mesures allant dans le sens de l’égalité, de l’inclusivité et de l’émancipation par le sport.
Nous proposerons un certain nombre d’amendements afin que les mesures répressives à l’encontre des supporters soient justes, proportionnées et correspondent aux travaux récents des différents acteurs.
Bref, émancipation, égalité et avenir soutenable : voilà les axes de travail que nous proposerons durant nos débats. Quant à notre vote final, il dépendra du sort qui sera réservé à nos amendements, ainsi que de l’ambition que nous aurons peut-être réussi à insuffler à ce texte. (Mme Monique de Marco applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sabine Van Heghe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Sabine Van Heghe. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l’examen de la proposition de loi qui nous rassemble aujourd’hui, la déception prédomine : il ne s’agit malheureusement pas d’un grand texte, susceptible de régler les problèmes profonds affectant le monde du sport, en particulier du fait de la crise sanitaire.
Après l’intervention de mon ami Jean-Jacques Lozach, je souhaite évoquer quelques enjeux de ce texte qui me préoccupent tout particulièrement.
Tout d’abord, il est question, à l’article 5, de parité au sein des fédérations agréées. Les femmes sont absentes ou extrêmement sous-représentées dans ces instances, et nombre de fédérations se plaignent des nouvelles dispositions, rigides et peu adaptées aux réalités. C’est toujours le même discours qu’on nous ressort, lorsque l’on veut s’opposer à la parité, en politique, dans les entreprises et maintenant dans le sport ! Je ne puis donc que regretter la réécriture faite en commission par notre rapporteur, qui atténue la mise en place de ce rééquilibrage par l’instauration de délais, concourant à un affaiblissement de la nécessaire obligation de parité.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain présentera donc un amendement à cet article 5, fixant des objectifs de parité ambitieux, nécessaires pour les fédérations, et applicables dès le prochain renouvellement des instances.
En termes de parité, un autre mauvais signal est la suppression en commission de l’article 5 bis A, qui prévoyait l’obligation de parité au sein du bureau du Comité national olympique et sportif français. Nous présenterons donc un amendement visant à rétablir cette obligation.
Le sujet des supporters m’est aussi très cher, puisqu’il est bien connu que les supporters du Pas-de-Calais – et en particulier ceux du Racing Club de Lens – sont parmi les plus fervents, les plus fidèles et sympathiques… Ces supporters, qui ont des droits, ont aussi des devoirs.
M. Stéphane Piednoir. Bravo !
Mme Sabine Van Heghe. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’est attaché à ce que la balance entre droits et devoirs des supporters soit équilibrée. Plusieurs amendements ont été déposés en ce sens. Ils visent à l’ouverture du capital des clubs aux supporters, au resserrement des motifs d’interdiction administrative de stade dès lors qu’une personne constitue une menace grave pour l’ordre public, ou à l’extension aux comportements homophobes de la définition du délit réprimé d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Ils tendent également à instaurer une peine d’amende pour l’introduction, la détention ou l’utilisation par les supporters, sans l’autorisation des clubs, de pyrotechnie dans les stades.
Je note d’autres apports du Sénat concernant les supporters, comme l’introduction dans le texte de la possibilité d’utiliser des scanners corporels lors des manifestations sportives, même si nous trouvons que ce dispositif mériterait d’être mieux encadré.
Je salue une autre initiative du Sénat, la communication par la préfecture des photographies des personnes interdites de stade, dans le but de renforcer le contrôle à l’entrée des enceintes sportives, en espérant que cette disposition améliore réellement les contrôles qui sont à l’heure actuelle particulièrement chaotiques.
Nous serons très attentifs au sort de nos différents amendements, qui conditionnera notre position finale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cyril Pellevat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il est désormais établi depuis longtemps que la sédentarité tue : deux millions de personnes par an, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ! Un Français sur deux déclare pratiquer un sport, mais cela reste largement insuffisant, et la France se classe seulement à la dix-septième position au niveau européen en matière de pratique sportive.
Le sport est une question qui touche à la santé publique, à l’éducation, à la citoyenneté. Il participe à la cohésion sociale et au rayonnement de la France, et je tiens à saluer nos athlètes qui participeront aux prochains jeux Olympiques. Le sport irrigue toute la société. Pourtant, nos politiques publiques peinent encore à refléter cette réalité. Le constat est unanime : il faut faire mieux.
C’est probablement ce qui a conduit le Président de la République à dire en 2017 qu’il voulait tout mettre en œuvre pour que la France soit une vraie nation sportive : noble cause ! Malheureusement, il ne s’est souvenu de son souhait que quatre ans plus tard, les jeux Olympiques de 2024 approchant à grands pas, et une pandémie étant entre-temps venue largement fragiliser l’écosystème du sport français.
Nous examinons aujourd’hui une proposition de loi visant à démocratiser le sport, déposée par les députés de la majorité. Cette proposition s’inscrirait dans la continuité de la politique sportive de l’exécutif – mais y en a-t-il eu une ? Force est de constater que le plan de relance pour le sport n’est pas à la hauteur des attentes du monde sportif. Et nous attendons toujours de voir cette grande loi sur le sport et la société qui a été promise à de multiples reprises…
Ne nous voilons pas la face : ce texte manque clairement d’ambition. L’ensemble des mesures qu’il comporte, et celles relatives au sport prises dans d’autres textes, ne permettront même pas de revenir au niveau d’avant la crise, tant celle-ci a eu d’impact sur le monde sportif. Les témoignages de sportifs et d’associations que nous voyons sur nos territoires sont nombreux. Sans l’action de la commission de la culture du Sénat et de son rapporteur, Michel Savin, dont je salue les travaux, les questions relatives à l’EPS ou à l’engagement sportif à l’université n’auraient même pas été abordées.
Rien non plus pour favoriser l’engagement associatif, souvent vieillissant, qui est pourtant la colonne vertébrale de notre modèle sportif. Rien pour soutenir les clubs face aux difficultés financières que la crise leur a causées. Rien sur la reconversion des sportifs. Rien sur le financement par l’assurance maladie de l’APA.
Notons en outre que, du fait de l’examen tardif de la proposition de loi, une grande partie des dispositions en matière de gouvernance des fédérations n’auront pas d’effet avant les jeux Olympiques de 2024.
Certes, je me réjouis évidemment des avancées prévues dans le texte. Je pense en particulier aux dispositions concernant l’accès aux équipements sportifs, l’honorabilité des encadrants, la lutte contre les manipulations des compétitions et contre le streaming illégal ou encore la possibilité pour les sociétés sportives de prendre la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif. C’est ce qui motivera mon vote favorable.
Mais je ne puis que regretter que notre seule occasion en cinq ans d’enfin nous saisir des enjeux que le sport représente ait débouché sur une loi aussi peu ambitieuse. Comment peut-on demander à nos sportifs olympiques de « faire beaucoup plus en 2024 » en termes de médailles quand les moyens mis en œuvre pour remettre le sport au cœur de nos politiques publiques sont aussi faibles ? Comment peut-on affirmer que leur réussite a été permise grâce à l’EPS quand – nous le savons – les moyens accordés à cette discipline diminuent sans cesse ?
On ne peut pas se targuer de démocratiser le sport en France en laissant les associations et les clubs à l’abandon face à la perte d’un tiers de leurs licenciés, en leur retirant les contrats aidés et en ne prévoyant rien pour leur faciliter la recherche de financements.
Ce texte aurait dû être l’occasion de réinventer, sinon de renforcer notre modèle. Il aurait pu être l’occasion d’innover, par exemple en prévoyant la possibilité pour les fédérations dépourvues de ligue professionnelle de créer des ligues semi-professionnelles. Une telle mesure permettrait aux clubs amateurs évoluant à haut niveau de bénéficier d’une reconnaissance et de diversifier leurs financements.
Mais, si l’on fait abstraction de ces quelques avancées, le texte ramasse à peine les pots cassés. Il ne nous reste plus qu’à espérer que l’importance du soutien à apporter au sport afin de le populariser en France soit comprise sous le prochain quinquennat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Belrhiti. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons est le seul texte relatif au sport de tout le quinquennat.
À l’approche des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 à Paris, on ne peut que regretter un tel manque d’ambition et l’absence de loi Sport et société pendant cinq ans. C’est assez décevant quand on sait que l’actuel Premier ministre a présidé l’Agence nationale du sport. En tant qu’ancienne sportive de haut niveau et double championne du monde de karaté, je le déplore.
L’Assemblée nationale s’est saisie du sujet sans attendre un hypothétique projet de loi.
La commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat a adopté le texte après l’avoir enrichi avec soixante-sept amendements, afin de corriger les lacunes dont il souffrait. Le texte adopté est un compromis pour rassurer et conforter le mouvement sportif.
L’un des apports principaux de la proposition de loi est le développement du sport-santé. C’est une bonne nouvelle, à l’heure où nous avons pris conscience que l’activité physique renforce notre immunité et notre bien-être.
L’instauration d’une pratique sportive quotidienne dans les écoles primaires pour lutter contre la sédentarité et la promotion des activités physiques et sportives dans la formation des enseignants au sein des Inspé sont d’excellentes avancées à mettre au crédit de la commission.
Inscrire au titre des missions d’intérêt général et d’utilité sociale l’offre d’activités physiques et sportives des établissements sociaux et médico-sociaux conforte la dynamique à l’œuvre depuis quelques années. À titre personnel, j’aurais souhaité que l’on puisse ouvrir la prescription d’activité physique adaptée à un public plus large, comprenant les patients atteints de pathologies physiques, mais aussi psychologiques.
Je félicite la commission d’avoir formalisé un socle juridique commun des maisons sport-santé.
Les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs du soutien au sport, dont la démocratisation ne doit pas s’effectuer via de nouvelles contraintes qui pèseraient principalement sur ces dernières. L’État doit y prendre une plus grande part.
La commission s’est attachée à protéger les collectivités en conditionnant à sa faisabilité financière l’obligation d’aménager un accès indépendant aux équipements sportifs des établissements scolaires en cas de rénovation.
Nous le savons tous, les fédérations sportives connaissent des situations difficiles depuis le début de la crise sanitaire. Il n’est pas envisageable de leur imposer de nouvelles dispositions contraignantes. La commission a eu raison de garantir leur bon fonctionnement en permettant une mise en œuvre par étapes de la parité dans leurs instances.
Je termine en évoquant le modèle économique sportif. La possibilité de création d’une société commerciale par les ligues professionnelles pour gérer et négocier les droits audiovisuels est un progrès notable, dû à l’initiative du rapporteur Michel Savin.
Chers collègues, vous l’aurez compris, je suis favorable aux modifications introduites par la commission. Le groupe Les Républicains souhaite que nos débats améliorent cette version pour aboutir à un texte permettant de renforcer le monde sportif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi répond à un véritable besoin.
Alors même que la France peut s’honorer de compter un si grand nombre de licenciés, des menaces sont apparues et se sont développées avec la crise sanitaire. La pandémie a révélé l’urgence d’avoir une activité physique pour se maintenir en bonne santé. Certains publics ont été éloignés de la pratique d’une activité sportive régulière alors que le sport joue un rôle important.
Le sport ne doit pas devenir un loisir ou une activité d’initiés, ce qui peut être une pente fatale. Cela rend d’autant plus nécessaire le texte dont nous débattons.
Le sport participe d’un grand nombre de principes et d’exigences : cohésion sociale, goût de l’effort, loyauté, dépassement de soi, etc. Dans ses différents rôles, je voudrais souligner un aspect traité dans le texte. « Le sport, c’est la santé » ne peut plus être qu’un simple adage. Ce doit être une véritable option, appelée à se développer et que le législateur commence à consolider.
Le sport peut en effet être considéré comme une thérapie, évidemment sur le plan physique, mais aussi, et peut-être surtout, sur le plan psychique. Il contribue à l’estime de soi et à la reconstruction personnelle. Thérapie du corps, c’est aussi un soin de l’âme. Il est donc appelé à devenir un véritable traitement. C’est cette perspective qu’il faut encourager et accompagner. Mais cela suppose la prise en compte de différents paramètres.
Nous saluons l’élargissement par l’Assemblée nationale du droit de prescription de l’activité physique adaptée à tout médecin, ainsi que celui du champ des bénéficiaires. La prescription d’une activité physique régulière aux personnes atteintes de maladie chronique et présentant des facteurs de risque constitue une évolution positive. Elle permet à une nécessité, la santé, et à une passion, le sport, de se rencontrer, dans une fructueuse complémentarité.
Cependant, nous déplorons l’absence de prise en charge par l’assurance maladie. C’est une évolution nécessaire si l’on veut reconnaître le sport comme un véritable traitement. Le volet financier doit donc être abordé sans peur et sans pudeur. Je n’oublie pas – le problème se pose dans mon département – la faiblesse des prescriptions de sport-santé par les médecins. Est-ce le fait d’un manque d’information ou une contrainte de la part de l’assurance maladie ?
Mais, en réalité, la question n’est pas tant celle du financement que celle de l’efficacité des aides et des soutiens. C’est plutôt un problème de déploiement. La complainte du manque de moyens est trop facile.
Il est anormal que les publics visés ne soient pas touchés par des interventions quand ils sont censés être les premiers concernés. Il est également anormal que le sport-santé devienne une tentation lucrative ne profitant qu’à certains organismes, et non pas au grand public.
Il y a évidemment un problème de communication, mais surtout une difficulté à atteindre les bénéficiaires. Il y a donc tout un travail de clarté et de transparence à poursuivre si nous voulons que le sport-santé se développe efficacement.
Quid de la plateforme en ligne recensant les offres d’APS et d’APA ?
On constate également une carence dans la formation des cadres techniques dans les clubs pour qu’ils puissent intervenir dans le sport-santé, mais également de grosses inégalités entre les fédérations, dont les moyens sont différents.
Madame la ministre, comment les pouvoirs publics agiront-ils pour que les moyens engagés atteignent réellement leur cible ?
Enfin, dans ce grand effort, il faut également s’interroger sur l’apport des collectivités locales, qui seront sollicitées et mises à contribution. Cela ne pourra qu’entraîner des charges financières supplémentaires. La crainte exprimée dans le rapport de la commission de la culture est celle d’une inégalité entre les collectivités locales.
Les maisons sport-santé voient leur existence formalisée par la loi, ce qui est également une avancée. Mais, sur ce plan, il faut encore envisager des implications financières pour les collectivités locales.
Madame la ministre, il faut tout faire pour que les collectivités locales ne soient pas étranglées financièrement ni victimes d’une bonne idée dont elles risquent de pâtir. Il faut également faire la différence dans la distribution des moyens entre le sport adapté, le handisport et le sport-santé. En effet, dans beaucoup de départements, cela reste malheureusement une enveloppe globale et peu lisible. Ne serait-ce pas le moment de dresser un bilan d’étape sur cette stratégie nationale sport-santé, qui ne doit pas rester qu’une ambition ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)