M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, l’intervention de professionnels de santé à domicile est un enjeu majeur, dont vous avez dessiné les contours. Elle est essentielle pour les personnes en perte d’autonomie et pour prévenir la dépendance, sujet dont on sait l’importance pour l’avenir de notre société.
C’est pourquoi le Gouvernement a demandé à l’assurance maladie de conclure un nouvel accord avec les médecins libéraux. L’avenant n° 9, signé l’été dernier par les syndicats de médecins de ville, prévoit le doublement de la rémunération des visites à domicile effectuées par les médecins traitants, passant de 35 euros à 70 euros pour le suivi des personnes âgées de plus de 80 ans souffrant d’une affection de longue durée (ALD). Il s’agit là d’un investissement de près de 150 millions d’euros dans la visite à domicile.
Je souhaite saluer, à cette occasion, l’engagement des médecins pour répondre à la demande de soins urgents de nos concitoyens.
Organiser cette réponse, tel est l’objectif du service d’accès aux soins (SAS) proposé dans le cadre du pacte de refondation des urgences et réaffirmé lors du Ségur de la santé. Il s’agit de répondre à la demande de soins urgents de la population, partout, à toute heure, grâce à une chaîne de soins qui soit lisible et coordonnée entre les acteurs de santé de l’hôpital et de la ville – vous savez, en effet, que la question des urgences va bien au-delà des seules urgences.
Les médecins libéraux de SOS Médecins ont toute leur place au sein du SAS et bénéficieront pleinement des financements prévus par l’avenant n° 9.
Je rappelle qu’à la fin du mois de décembre dernier, un arrêté a revalorisé de 20 % les astreintes effectuées par les médecins dans le cadre de la permanence des soins.
En outre, dans la perspective des travaux de la future convention médicale, la CNAM a proposé à SOS Médecins d’établir un « groupe contact » pour identifier les enjeux liés à cette nouvelle convention, qui pourront concerner SOS Médecins et la visite à domicile.
Enfin, le ministre Olivier Véran a demandé aux agences régionales de santé de soutenir les associations de médecins qui organisent la réponse médicale non programmée à domicile. Plus de 5 millions d’euros ont ainsi été débloqués à cet effet.
Nous sommes donc mobilisés pour répondre aux attentes du secteur sur l’ensemble de ces problématiques.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. À ce jour, cette mobilisation reste encore insuffisante. SOS Médecins est débordé et contraint de limiter le nombre d’appels.
Le système tourne en rond, la visite à domicile est véritablement en danger et il est indispensable de lui redonner sa juste place dans le parcours de soins des patients.
effacement administratif des enfants défunts
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 1911, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles.
M. Yves Détraigne. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interpeller au sujet de la disparition administrative de l’enfant défunt et du statut administratif de ses parents.
En effet, en France, lorsqu’un enfant décède, l’administration le supprime des formulaires administratifs, pour lesquels seuls comptent les enfants à charge, que ce soit pour les caisses d’allocations familiales, pour la sécurité sociale ou pour les impôts, et cela, même si son nom reste visible avec la mention « décédé » sur les écrans des agents.
Cet effacement est inapproprié, voire irrespectueux, pour de nombreux parents, qui souhaitent que l’administration laisse le nom de leur enfant décédé visible sur les dossiers administratifs et rétablisse leur composition familiale.
Il suffirait pour cela de créer une ligne administrative pour faire figurer les nom et prénom de l’enfant tout en spécifiant « non à charge » ou « décédé ». Une place pour l’enfant défunt serait ainsi conservée, et le parent d’un enfant unique décédé serait reconnu comme ayant été un parent.
Alors que la loi n° 2021-1576 du 6 décembre 2021 a accordé aux parents d’un enfant né sans vie le droit de lui donner un nom, ce souhait d’autres pères et mères, eux aussi touchés par le deuil, de ne plus effacer les enfants décédés sur les dossiers administratifs paraît légitime.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, entendez-vous œuvrer contre l’absence de trace administrative de l’enfant défunt et celle de statut administratif de ses parents ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, je suis personnellement très investi sur ce sujet, en tant que secrétaire d’État à l’enfance et aux familles et pour avoir pris part aux discussions avec les organisations syndicales et, surtout, avec les associations de parents, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de votre collègue député Bricout visant à instaurer un congé de deuil parental – l’expression est impropre.
À l’occasion de mes rencontres avec les associations de parents, j’ai pu comprendre ce qui relève en réalité de l’évidence, à savoir que l’on reste parent même après la mort de son enfant. C’est une évidence, et pourtant jamais je n’avais entendu personne la formuler de manière aussi éclatante.
C’est la raison pour laquelle nous avons pris un certain nombre de dispositions pour accompagner les familles endeuillées par le décès d’un enfant, parmi lesquelles l’allongement de ce « congé de deuil » pour lequel il faudrait trouver un autre nom, la création d’une allocation forfaitaire pour toutes les familles, d’un montant de 2 000 euros, qui met fin aux disparités territoriales en fonction des politiques des caisses d’allocations familiales, un meilleur accompagnement psychologique non seulement des parents, mais aussi des fratries, trop souvent oubliées dans ces situations, ou encore la mise en place d’un « parcours décès » visant à améliorer l’accompagnement des familles dans l’ensemble de leurs démarches par les travailleurs sociaux.
L’enjeu se situe également au niveau des entreprises, car les employeurs et les salariés doivent être davantage sensibilisés à ce genre de situations, afin de pouvoir accompagner leurs collègues concernés.
Dans le cadre des discussions que nous avons eues, les familles endeuillées nous ont fait part d’insuffisances dans la prise en compte de leur situation, notamment d’une certaine complexité dans le parcours administratif, par la demande répétée de mêmes informations et de toute sorte de détails dont on ne perçoit pas la violence quand on ne vit pas soi-même ce type de situation.
Monsieur le président, je risque de dépasser le temps de parole sur ce sujet important et je vous prie par avance de m’en excuser.
Avec Amélie de Montchalin, nous avons missionné en mars dernier la direction interministérielle de la transformation publique pour travailler sur les parcours administratifs des parents endeuillés, avec pour objectif d’identifier des points de simplification et d’amélioration. Un plan d’action nous a été présenté en juin 2021. Il appartient désormais aux acteurs concernés – les CAF, mais aussi les services des impôts et l’ensemble des administrations – de le mettre en œuvre.
Un premier point d’étape a été réalisé en octobre dernier, au cours duquel la question la disparation administrative a été évoquée. Les échanges font apparaître la nécessité de pouvoir s’adapter aux situations particulières,…
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, je vais devoir vous interrompre.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je conclus en vous disant que la mention « décédé » sera intégrée dans les choix d’options lors de l’élaboration des formulaires administratifs.
Je me tiens à votre disposition pour poursuivre cet échange, si vous le souhaitez, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour la réplique.
M. Yves Détraigne. Je ne prendrai que quelques secondes pour remercier M. le secrétaire d’État des avancées qui sont en cours.
ajustements du forfait de participation aux urgences du patient
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, auteure de la question n° 2053, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Véronique Guillotin. Monsieur le secrétaire d’État, cette question intervient à la suite d’une proposition de l’Association des maires ruraux de France, au sujet du forfait de participation aux urgences du patient. Mis en place depuis le 1er janvier 2022, celui-ci prévoit l’acquittement d’une somme forfaitaire de 19,61 euros pour chaque passage aux urgences sans hospitalisation.
Quelques exonérations sont possibles, notamment pour les femmes enceintes, pour les bénéficiaires de pension d’invalidité ou encore pour les nourrissons. D’autres patients peuvent se voir attribuer le montant minoré de 8,49 euros, comme les personnes souffrant d’une affection de longue durée.
Lors du vote du forfait patient urgences (FPU), à la fin de 2020, je vous avais fait part de mes réticences. En effet, faute de mesures complémentaires et sans un accès aux soins performant en amont des urgences, ce forfait ne remplira pas son rôle de désengorgement des urgences.
Ces montants sont certes intégralement remboursés par les complémentaires santé, mais 5 % de la population n’en possèdent pas.
Cette difficulté s’ajoute dans de nombreux cas à celle de la désertification médicale, qui touche malheureusement de nombreux Français.
Comme le souligne très justement l’Association des maires ruraux de France, les urgences sont pour nombre de nos concitoyens le seul recours en l’absence d’un médecin généraliste déclaré. Or, selon l’assurance maladie, plus de 5 millions de Français n’ont pas de médecin traitant et ce chiffre a plutôt tendance à s’aggraver qu’à s’améliorer.
Des mesures ont été engagées par le Gouvernement pour y remédier, que j’ai majoritairement soutenues parce qu’elles étaient nécessaires. Cependant, à l’instar de l’augmentation du numerus clausus, elles mettront du temps à porter leurs fruits.
Ce nouveau forfait ne doit pas être perçu comme une double peine pour ceux qui éprouvent déjà des difficultés à se faire soigner et qui n’ont pas ou plus de médecin traitant référent, faute de praticien de proximité.
Ma question est simple : le ministère envisage-t-il de réexaminer ces critères d’exclusion du forfait de participation aux urgences et d’exonérer de cette contribution les patients qui ne trouvent pas de médecin traitant ? Ce ne serait, selon moi, qu’une mesure de bon sens et de justice.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice Véronique Guillotin, je vous remercie de m’offrir l’occasion de m’exprimer de nouveau sur cette question. Nous partageons votre préoccupation, et c’est pourquoi nous veillons à garantir l’accès aux soins pour tous sur l’ensemble du territoire.
Permettez-moi de rappeler que les assurés acquittaient déjà une participation au titre de leur passage aux urgences. Le forfait patient urgences n’augmente pas les restes à charge des patients, notamment ceux résidant dans les communes rurales. Ce nouveau dispositif simplifie néanmoins les modalités de calcul, en prévoyant, non plus un ticket modérateur proportionnel à l’intensité de la prise en charge, mais une participation forfaitaire.
Cette forfaitisation offre une meilleure protection des usagers nécessitant des soins complexes – leur participation pouvait atteindre auparavant un montant de 60 euros.
Le forfait patient urgences est pris en charge par les complémentaires santé : la question des restes à charge est donc davantage liée à l’accès aux mutuelles. Comme vous le savez, seuls 4 % des assurés n’en disposent pas.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour faciliter le recours à ces organismes, notamment à la complémentaire santé solidaire, destinée aux assurés les plus précaires, comme en témoignent les mesures adoptées par le Sénat dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
La qualité et la sécurité du parcours de soins des patients ne sont pas altérées par la mise en place du forfait patient urgences : l’accès aux urgences est toujours possible pour les patients qui ne disposent pas de leur carte Vitale ou de leur pièce d’identité, de même que pour ceux ayant des difficultés à consulter un médecin en ville.
Bien sûr, il nous faut continuer à agir pour un meilleur accès aux soins de tous les patients : c’est là une priorité constante du Gouvernement.
En tout état de cause, durant ces quatre dernières années nous avons essayé de résoudre ensemble les difficultés structurelles que vous évoquez : nous avons ainsi encouragé le développement de l’exercice coordonné de la médecine, grâce à la mise en œuvre des communautés professionnelles territoriales de santé, et nous avons favorisé la création de postes d’assistants médicaux, le déploiement de 400 médecins généralistes dans les territoires prioritaires ainsi que la mise en place du service d’accès aux soins. Nous continuerons à déployer l’ensemble de ces mesures.
impact du parc éolien des quatre seigneurs sur les riverains et les élevages
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, auteure de la question n° 2014, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le parc éolien des Quatre Seigneurs, situé sur le territoire des communes de Nozay, Puceul, Abbaretz et Saffré, au nord de la Loire-Atlantique.
Depuis plusieurs années, des éleveurs ont signalé des problèmes de santé touchant leurs animaux : plusieurs d’entre eux sont morts, tandis que d’autres souffrent de mammites, engendrant des baisses très nettes de la production de lait.
De plus, certains riverains du site ont fait état de troubles de santé tels que des maux de tête ou des troubles du sommeil.
Prenant acte de ces difficultés, le ministre de la transition écologique et le ministre de l’agriculture ont demandé à l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) de réaliser une enquête. Selon les conclusions de celle-ci, publiées le mois dernier, un lien entre l’implantation des éoliennes et les difficultés rencontrées par les éleveurs apparaît hautement improbable, voire exclu.
Pourtant, l’Anses ne conteste pas les difficultés et les troubles de santé, bien réels, constatés sur le territoire.
De quelle manière envisagez-vous d’approfondir les recherches, monsieur le secrétaire d’État ?
L’Anses suggère la création d’un observatoire recensant toutes les perturbations liées à la présence d’éoliennes à proximité des élevages. Pensez-vous suivre cette recommandation de l’Agence ? Sinon, quel dispositif comptez-vous mettre en place ?
Sur place, les éleveurs et les riverains du site, de même que les maires et les élus locaux, attendent des réponses. Plus largement, nous avons tous besoin de comprendre ce qui se passe sur ce site, car cette situation alimente les inquiétudes et les doutes suscités par le développement du parc éolien français. Je vous remercie par avance de vos réponses, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, je souhaite en préambule revenir sur l’ensemble des conclusions – récentes ou plus anciennes – établies au sujet du parc éolien des Quatre Seigneurs et des troubles touchant les bovins rapportés par deux éleveurs.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail avait été saisie par le Gouvernement en mai 2019 ; elle a rendu son avis le 16 décembre dernier, concluant que les troubles rencontrés ne sont très probablement pas liés à la présence des éoliennes.
Les conséquences de l’implantation de parcs éoliens sur la santé humaine ont fait l’objet de plusieurs expertises. La dernière porte plus particulièrement sur le bruit émis par ces dispositifs.
Dans un avis rendu en 2017, l’Anses précisait que les données disponibles ne mettaient pas en évidence d’arguments scientifiques suffisants en faveur de l’existence d’effets sanitaires qui seraient liés à l’exposition aux infrasons et aux basses fréquences émis lors du fonctionnement des éoliennes.
Par ailleurs, dans son rapport de 2017, l’Académie nationale de médecine indiquait que les nuisances sanitaires des éoliennes terrestres semblent avant tout d’ordre visuel et, à un moindre degré, sonore.
Sachez par ailleurs qu’une étude épidémiologique est en cours, madame la sénatrice : il s’agit du projet de recherche sur les impacts du bruit éolien sur l’humain, dit RIBEolH, mené par l’université Gustave-Eiffel, qui a pour objectif d’étudier les effets sur la santé du bruit émis par les éoliennes. Une étude psycho-acoustique et physiologique sera menée afin de comprendre les mécanismes auditifs qui sont associés à la gêne due aux infrasons.
Les résultats de cette étude, attendus pour 2025, devraient apporter des éléments scientifiques complémentaires au sujet des effets de l’éolien sur la santé humaine. Nous disposerons ainsi de données complètes et vérifiées.
dysfonctionnements dans la nièvre à la suite du transfert du centre de réception et de régulation des appels 15 en côte-d’or
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 2050, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Patrice Joly. Monsieur le secrétaire d’État, depuis le 2 octobre 2018, le projet régional de santé arrêté par l’ARS de Bourgogne-Franche-Comté a confié au CHU de Dijon la régulation médicale des appels au centre 15, afin de « garantir à la fois la qualité de la régulation des appels d’urgence et un renfort à distance des équipes médicales d’urgence nivernaises par les équipes du CHU de Dijon ».
Trois ans plus tard, nous disposons du recul nécessaire pour évoquer les nombreux dysfonctionnements résultant de ce transfert, dont les Nivernais sont malheureusement victimes.
Les personnels et les élus, que j’ai consultés, sont unanimes.
Tout d’abord, ils nous ont tous fait part des grandes difficultés rencontrées par les Nivernais pour joindre le centre 15 de Dijon, très engorgé, parfois injoignable et n’offrant régulièrement aucun accès à un médecin urgentiste régulateur.
De plus, ils ont constaté que les délais d’intervention se sont allongés en raison d’imprécisions dans les informations transmises du fait d’une méconnaissance du territoire – erreurs dans les adresses communiquées, méconnaissance des hôpitaux de proximité pouvant accueillir les victimes, incohérences dans les données médicales fournies.
Ces retards sont susceptibles d’entraîner des pertes de chance et, pour certains, constituent d’ores et déjà la cause d’un certain nombre de décès qui auraient pu être évités.
Les situations au cours desquelles les pompiers se retrouvent totalement seuls face aux victimes se multiplient : ils doivent alors prodiguer des soins en l’absence de médecins urgentistes, qu’ils attendent en vain, ou composer entre les instructions parfois contradictoires du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de la Nièvre et du centre 15.
Enfin, on observe également des difficultés de régulation entre les ambulances privées et les pompiers, difficultés qui compromettent encore la rapidité des interventions et entraînent une plus forte mobilisation des pompiers.
Vous l’aurez compris, cette situation participe d’un sentiment d’abandon et d’insécurité de la population nivernaise, qui se sent une nouvelle fois isolée et fragilisée sur le plan de la santé. De plus, les pompiers volontaires sont démotivés.
Monsieur le secrétaire d’État, quelle analyse faites-vous de ces difficultés ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, le regroupement de la régulation médicale des appels au centre 15 de la Nièvre et de la Côte-d’Or visait à répondre au constat récurrent de dysfonctionnements graves – je pense que nous pourrons nous rejoindre sur ce point.
Il a été réalisé dans la concertation avec l’ensemble des acteurs de l’urgence sur le terrain et grâce à l’engagement remarquable des équipes du CHU de Dijon. La réussite de ce travail partenarial a d’ailleurs été saluée au mois d’octobre 2020 par le président du conseil d’administration du SDIS de la Nièvre lui-même, ainsi que par le président de l’association départementale des transports sanitaires urgents de la Nièvre.
Loin de concourir, comme vous l’avez indiqué, à un « abandon » de la population nivernaise, cette nouvelle organisation place directement les équipes du CHU de Dijon au service des Nivernais. Elle garantit la plus stricte égalité de la qualité de la régulation médicale des appels d’urgence – que ces appels proviennent du cœur du Morvan ou du centre-ville de Dijon.
J’ajoute que le centre 15 du CHU de Dijon fait partie des vingt-deux sites pilotes nationaux qui ont été retenus pour déployer le service d’accès aux soins : les habitants de la Nièvre bénéficieront ainsi de la primeur de ce nouveau service.
Enfin, le projet régional de santé arrêté par l’agence régionale de santé prévoit une évaluation externe et approfondie de ce regroupement, portant sur toutes les dimensions de la transformation. Engagée depuis la fin de l’année dernière, cette évaluation associe un nombre important d’acteurs de terrain – je crois que vous y êtes vous-même associé, monsieur le sénateur, ou, qu’en tout cas, vous avez été invité à participer à ces travaux.
Je ne peux que vous encourager à y prendre part et à poursuivre le dialogue avec l’agence régionale de santé afin d’évaluer cette réorganisation sur des bases techniques, précises et objectives : nous souhaitons tous améliorer la qualité du service rendu aux Nivernais, quelle que soit leur localisation.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Je participerai prochainement à cette évaluation. Vos propos, monsieur le secrétaire d’État, laissent à penser qu’en théorie les choses fonctionnent bien. Mais ce qui se passe dans la Nièvre ne correspond pas à la situation du pays imaginaire que vous avez décrite.
situation préoccupante du groupe hospitalier du sud de l’oise
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, auteure de la question n° 2058, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la situation préoccupante du groupe hospitalier public du sud de l’Oise (GHPSO).
La population de ce bassin de vie voit depuis très longtemps l’état de son groupement hospitalier se dégrader, et cette dégradation s’est encore accélérée depuis le début de la crise sanitaire.
La désertification de la médecine de ville et la fusion des sites hospitaliers de Senlis et de Creil, imposée par les autorités sanitaires, ont créé les conditions d’un basculement sans retour lorsque l’épidémie est apparue.
La diminution du nombre de lits d’hôpitaux, les transferts de compétences incompréhensibles, les fermetures de services par souci d’économie de façade, comme pour la maternité, ou par manque de personnel, comme pour le service de cardiologie ainsi que l’envoi du personnel d’un site à l’autre – et donc d’une ville à l’autre : Creil et Senlis sont deux villes distantes d’une dizaine de kilomètres ! – en fonction des urgences ont entraîné la fuite des personnels épuisés par leurs conditions de travail et ont plongé les habitants de ce bassin de vie dans une grande précarité sanitaire – une précarité supplémentaire dont ils n’avaient pas besoin !
Durant l’été 2021, le service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) a été suspendu – de manière temporaire heureusement – en raison du manque de ressources médicales. Durant les fêtes de fin d’année, le service des urgences de Senlis a été fermé à son tour.
La fusion des maternités devait permettre de créer une « super maternité » à l’échelle de l’agglomération. Or le nombre d’accouchements a chuté de 30 %, puisque les femmes se déplacent désormais vers le nord de l’Oise et choisissent des cliniques privées, ou se rendent directement en Île-de-France.
Un plan de relance a été annoncé récemment, de même que le recrutement d’un nouveau directeur – l’intérim étant assuré par le directeur de l’hôpital de Beauvais.
Tel est le contexte dans lequel s’inscrivent mes questions.
Monsieur le secrétaire d’État, quelle sera la feuille de route de la nouvelle équipe ? Sera-t-elle en mesure de mener l’exécution des travaux du dernier étage de l’hôpital ? Quand le nouveau matériel promis aux équipes arrivera-t-il ?
La ville de Creil est devenue délégataire de service public de l’État en matière de dépistage et de vaccination. La totalité des frais engagés depuis le début de l’épidémie de covid-19 lui sera-t-elle remboursée ?
Le moratoire sur la dette de l’hôpital attendu de longue date sera-t-il mis en place ?
Enfin, envisagez-vous la réouverture de la maternité de Creil ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, votre question dense et précise appelle une réponse de même teneur !
La feuille de route adressée au nouveau directeur par intérim porte notamment sur deux chapitres : d’une part, la situation aux urgences, et, d’autre part, la rédaction du projet stratégique et médical.
Permettez-moi de rappeler que l’ARS est intervenue spécifiquement sur le service d’accueil des urgences : une délégation de personnes-ressources expertes a travaillé dès le mois de novembre 2021 avec les équipes de l’établissement pour proposer une organisation sécurisée des urgences et du SMUR de Creil.
L’ARS conduit d’ailleurs une réflexion sur l’organisation globale du GHPSO ; elle mettra à la disposition du directeur par intérim les moyens et l’expertise nécessaires pour poursuivre la réflexion sur les restructurations indispensables à court et moyen terme.
Le projet médico-soignant constitue l’outil pour parvenir à ces objectifs. Il devra formaliser les filières intrahospitalières de prise en charge des patients en aval des urgences, ainsi qu’entre les sites de Creil et de Senlis. Par ailleurs, il devra consolider le schéma directeur des investissements pour engager la modernisation tant attendue des établissements, notamment des derniers étages du site de Creil.
Les premiers travaux préfigurateurs ont été menés : ils doivent être poursuivis par les instances pour finaliser le projet. Il convient de ne pas perdre de vue que le projet architectural doit être au service du projet médical et non le contraire. Je rappelle d’ailleurs qu’une aide de 35 millions d’euros, au titre des investissements structurants, a été prévue pour ce projet.
Il sera également nécessaire de porter une attention particulière à la filière gériatrique du territoire, eu égard aux caractéristiques de la population, que vous connaissez bien.
Il conviendra en outre de constituer le dossier de présentation du projet au dispositif du Ségur de la santé, au titre du soutien aux investissements prioritaires – la clé de voûte de la nouvelle gouvernance du GHPSO.
En lien avec les acteurs locaux, celle-ci devra notamment consolider les coopérations avec les centres hospitaliers du territoire et rechercher des partenariats indispensables avec les professionnels de santé de ville pour faciliter et développer l’ensemble des parcours de soins.
Concernant les surcoûts, l’établissement a indiqué que la compensation couvrait les charges engagées.
Enfin, un éventuel moratoire sur la dette n’est pas du ressort de l’ARS ou de l’établissement : ce dernier est contraint de rembourser ses prêts, sous peine d’être fiché à la Banque de France et d’être déclaré interdit bancaire.
Tels sont les premiers éléments de réponse que je souhaitais porter à votre connaissance, madame la sénatrice.
responsabilité pénale des communes ou intercommunalités et soins médicaux