Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, dans le cadre d’un contrôle global, l’office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF) a constaté que des marchandises du trafic de marché étaient importées en Suisse en franchise de redevances, alors qu’elles ne répondaient pas aux dispositions des accords frontaliers. Une directive plus précise devait alors garantir, à partir du 1er janvier 2021, que le trafic de marché dans la zone frontière se déroule conformément à la loi.
Cette nouvelle directive a suscité beaucoup de réactions. Après différents entretiens avec le canton de Bâle-Ville et sur le fondement d’un avis de droit de l’université de Bâle, l’OFDF a examiné une nouvelle fois ses bases juridiques de manière approfondie.
Pour les importations depuis l’Allemagne, la tolérance appliquée jusqu’à présent pour les quantités supplémentaires et les marchandises non couvertes par l’accord ne sera plus accordée en raison de l’absence de base juridique.
En ce qui concerne les importations depuis la France, les livraisons de légumes effectuées par les producteurs de la zone frontière en franchise de redevances aux gros consommateurs, tels que les restaurants, hôtels et établissements de soins, restent possibles, dans le cadre des quantités allouées à la vente sur les marchés.
Les livraisons aux revendeurs ne seront plus admises que sous paiement de droits de douane réduits, conformément à l’annexe 4 de l’accord frontalier. Les légumes importés pour la vente sur le marché depuis la zone frontière de dix kilomètres pourront toutefois continuer à être admis en exemption de taxe et en procédure simplifiée, dans les limites prévues par les accords.
La nouvelle directive est une mise en conformité avec les bases légales, qui n’ont pas été modifiées. Cette directive adaptée a fait l’objet de discussions, à de nombreuses reprises, avec les représentants du canton de Bâle-Ville. Des séances d’information sont prévues à Bâle à l’automne 2022, au cours desquelles les nouvelles réglementations seront explicitées.
Les autorités françaises mettent tout en œuvre pour garantir aux producteurs agricoles de la zone frontalière un accès équitable au marché suisse.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.
M. Christian Klinger. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État.
Je note que les producteurs locaux ont été en partie écoutés. Néanmoins, les quantités que vous mentionniez sont relativement faibles. Il faudrait continuer à échanger avec la Confédération helvétique sur ce sujet, afin que nous puissions défendre nos producteurs locaux, fâcheusement pénalisés par cette nouvelle directive.
Il ne faudrait pas que le poids administratif et les lourdeurs du dédouanement soient plus lourds que le poids de la cagette qui va être livrée à nos confrères suisses…
accroissement du nombre de sociétés fantômes et de la fraude documentaire
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, auteur de la question n° 108, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jérôme Bascher. Depuis le 1er janvier 2022, il est possible de créer de manière totalement dématérialisée une entreprise. Si l’initiative est tout à fait louable, car elle facilite grandement les démarches, un problème nouveau, signalé par les greffiers des tribunaux de commerce, se pose : la multiplication des faux documents et l’impossibilité dorénavant pour ces mêmes greffiers de vérifier l’authenticité des pièces.
Le corollaire, bien entendu, est l’existence de fraudes. Il ne s’agit pas, en effet, d’effectuer une fraude documentaire pour le plaisir… Elles proviennent de personnes soumises à une interdiction de création d’entreprise ; à ce titre, elles sont répertoriées par le fichier national des interdits de gérer, lequel a été mis en place il y a de nombreuses années, bien avant l’actuel gouvernement.
On observe des escroqueries, notamment aux aides d’État, mais également des entreprises fantômes. De même, on constate des fraudes quant au capital social. En effet, les entreprises doivent déclarer à leur création quels sont les fonds à leur disposition sur un compte bancaire ; elles disposent à cette fin d’un vrai-faux papier fourni par leur banque… Le problème est que l’on ne peut pas vérifier son exactitude.
Il existe également le cas classique du changement de siège social. Pourquoi pose-t-il problème ? Parce que les services de l’État, partout sur le territoire, ne contrôlent pas socialement et fiscalement les entreprises de la même façon. Aussi, lorsqu’un contrôle fiscal vous vise dans votre département, vous changez le siège social de votre société : peut-être celle-ci sera-t-elle moins scrutée ailleurs… Or les fichiers ne se parlent pas, madame la secrétaire d’État. C’est un sujet majeur.
Je sais que, depuis le décret du 19 juillet 2022 relatif au registre national des entreprises et portant adaptation d’autres registres d’entreprises, il vous est possible de fournir une assistance, afin de procéder à de telles vérifications. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, à l’occasion de chaque demande d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS), les greffiers des tribunaux de commerce réalisent plusieurs contrôles portant sur les informations déclarées et les pièces justificatives produites.
Plusieurs mesures ont été récemment mises en place afin de renforcer la lutte contre la fraude documentaire dans le cadre des créations d’entreprises. Comme vous l’indiquiez, ces dispositions ont été insérées dans le décret n° 2022-1014 du 19 juillet 2022 relatif au registre national des entreprises et portant adaptation d’autres registres d’entreprises.
En premier lieu, le contrôle effectué par les greffiers des tribunaux de commerce en amont de l’immatriculation des entreprises au RCS a été renforcé par deux mesures.
D’une part, une disposition autorise désormais les greffiers à vérifier la validité des pièces d’identité produites à l’appui d’une demande d’immatriculation, en consultant la base Docverif, laquelle répertorie les documents d’identité délivrés par les autorités françaises, ainsi que leur caractère valide ou non. Cette vérification s’opère en conformité avec l’obligation légale formulée au premier alinéa de l’article R. 123-95 du code de commerce. Cette mesure permet de faire obstacle à la création de sociétés au moyen de pièces d’identité falsifiées ou usurpées.
D’autre part, l’article R. 123-84-1 du code de commerce permet aux greffiers de solliciter des justificatifs complémentaires « lorsqu’il existe un doute sur l’authenticité de la pièce produite ou lorsque sa valeur probante est insuffisante ».
En second lieu, le nouveau mécanisme instauré aux articles R. 123-125-1 et R. 123-136-1 du code de commerce permet aux greffiers de radier d’office une entreprise lorsqu’il apparaît que son immatriculation a été réalisée par la production d’une pièce justificative ou d’un acte irrégulier.
Ces dispositions renforcent le contrôle des greffiers postérieurement à l’immatriculation des entreprises et permettent d’anéantir l’existence juridique de sociétés immatriculées à l’aide de faux documents.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour la réplique.
M. Jérôme Bascher. Madame la secrétaire d’État, je connais ces dispositions. Le problème, c’est que les deux tiers des pièces d’identité sont étrangères et qu’elles ne sont pas vérifiées.
Peut-être faudrait-il mieux prendre en compte la réalité, plutôt que de se focaliser sur ce qui a déjà été fait !
M. Philippe Tabarot. Bravo !
financement des frais de scolarité d’élèves issus de centres d’accueil de demandeurs d’asile
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteure de la question n° 104, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté.
Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le financement des frais de scolarité des élèves issus des centres d’accueil de demandeurs d’asile (Cada).
De nombreux Cada ont été ouverts lors de la crise migratoire, en 2016. Les préfets ont été missionnés dans nos territoires pour la création de places d’hébergement supplémentaires.
En Côte-d’Or, un Cada d’une capacité d’accueil de 65 réfugiés a été ouvert à Rouvray, petite commune de 500 habitants, en zone de revitalisation rurale, qui tente de surmonter des difficultés économiques et sociales importantes.
Pour couvrir ces charges supplémentaires, la commune a perçu une aide de l’État de 1 000 euros par réfugié la première année. La demande d’indemnisation présentée en 2020, correspondant à la création de neuf places supplémentaires en 2019, est restée sans réponse.
À ce jour, le financement de la scolarité des enfants de ce Cada repose donc entièrement sur le budget de cette petite commune. La part des dépenses liées aux frais de scolarité de ces élèves depuis la rentrée de 2016 s’élève à plus de 92 000 euros, soit près de 20 000 euros de charges annuelles supplémentaires depuis six ans.
Il s’agit d’une somme colossale pour une petite commune qui n’a pas les ressources nécessaires pour absorber un tel cumul de charges et qui ne peut continuer à assumer cette dépense sans créer de déficit ou sans obérer ses projets d’aménagement.
Avez-vous prévu la mise en place d’une indemnisation annuelle systématique qui permettrait à ces communes accueillant des demandeurs d’asile de faire face aux frais de scolarité induits ? De même, avez-vous prévu une application rétroactive de ces dotations ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, la Cada de Rouvray accueille aujourd’hui exclusivement des familles de demandeurs d’asile, conformément à la demande de la maire de la commune. Les services de l’État ont toujours respecté cet engagement.
Depuis son ouverture, entre 30 et 35 enfants du Cada fréquentent chaque année l’école primaire de la commune. Ces effectifs ont d’ailleurs permis d’ouvrir une classe supplémentaire avec l’affectation d’une enseignante spécialisée dans l’apprentissage du français comme langue étrangère.
Je suis consciente que la charge financière n’est pas négligeable pour les communes concernées. C’est la raison pour laquelle l’État est bien engagé à leurs côtés pour les aider à y faire face. Les charges liées à l’accueil en Cada et à la scolarisation des enfants sont ainsi prises en compte dans la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF). La commune de Rouvray bénéficie d’une attribution importante, supérieure de 61 % à la moyenne de sa strate – 228 euros par habitant contre 142 euros en moyenne.
Par ailleurs, les frais de cantine et des activités périscolaires sont acquittés par les parents, et lorsque ces derniers ne sont pas en mesure de s’en acquitter, ils sont pris en charge par le gestionnaire du Cada, de même que les frais de fournitures scolaires.
En ce qui concerne les frais de sortie scolaire, les parents sont mis à contribution jusqu’à 5 euros. Il n’y a aucuns frais de transport pour les enfants fréquentant l’école primaire de la commune, située en face du Cada. Pour les collégiens et les lycéens, les frais de transport sont pris en charge par la collectivité qui en a la compétence.
Vous pouvez compter sur mon engagement à poursuivre les discussions avec les élus locaux sur la question de l’accueil des réfugiés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour la réplique.
Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de vous pencher en urgence sur ce sujet.
En effet, s’il revient désormais aux communes accueillantes d’assumer les frais de scolarité, cela va poser problème. À tout le moins, il faut arrêter de placer des réfugiés dans des communes en grande difficulté économique et sociale.
situation des communes littorales face à la conversion de logements en résidences secondaires
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 149, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
M. Didier Marie. Monsieur le ministre, de nombreuses communes, situées sur les littoraux ou dans les zones montagneuses, soit dans les zones à fort potentiel touristique, doivent faire face à l’accroissement d’un phénomène démographique et urbanistique : la conversion de nombreux logements en résidences secondaires.
Ce phénomène est particulièrement pénalisant pour les communes concernées, qui subissent une inflation du coût des logements et ainsi un exode de la population locale. Il s’agit notamment de jeunes ménages qui n’ont pas les moyens de s’y installer.
De manière logique, cette fuite des populations affaiblit l’ensemble de la commune, que ce soit par la diminution des effectifs dans les classes, les pénuries de main-d’œuvre ou encore les conséquences économiques sur le commerce local. Les communes se trouvent donc privées de ce dynamisme et ont de grandes difficultés à maintenir des services publics, particulièrement en dehors des périodes touristiques.
L’un des outils de régulation qui reste à leur disposition est l’augmentation de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Toutefois, la loi imposera aux communes, à partir de 2023, d’augmenter dans la même proportion la taxe sur les résidences secondaires et celle sur le foncier bâti. Les foyers modestes, mais propriétaires de leur logement, seraient alors pénalisés par une telle décision et par cette corrélation.
Ainsi, comme l’a récemment proposé un collectif de maires du Val de Saire, la décorrélation entre la taxe d’habitation et la taxe sur le foncier bâti paraît être une solution pertinente pour endiguer le phénomène continu d’augmentation de résidences secondaires et ainsi participer à la revitalisation des communes concernées.
Monsieur le ministre, pouvez-vous m’indiquer la position du Gouvernement sur cette décorrélation, ainsi que les mesures budgétaires que vous comptez entreprendre pour répondre à cet enjeu ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Marie, avec d’autres parlementaires, notamment à l’Assemblée nationale, vous nous alertez sur la situation financière des communes littorales et à fort potentiel touristique, confrontées à une importante conversion de logements en résidences secondaires.
Comme vous le savez, la suppression par étapes de la taxe d’habitation sur les résidences principales s’est accompagnée de la mise en place d’un schéma de compensation à l’euro près et dynamique.
Par ailleurs, les locaux qui ne sont pas affectés à l’habitation principale restent soumis à la taxe d’habitation – c’est le cas des résidences secondaires.
De plus, les communes situées en zones dites « tendues », caractérisées par un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, peuvent, par délibération, majorer d’un pourcentage compris entre 5 % et 60 % la part de la cotisation de taxe d’habitation due au titre de ces locaux leur revenant.
Dans ces conditions, si l’attrition de logements affectés à l’habitation principale peut entraîner des difficultés d’accès au logement dans certaines communes littorales, ses conséquences ne nuisent pas aux ressources fiscales de ces mêmes communes. Celles qui assistent à une forte conversion des résidences principales en résidences secondaires sur leur territoire peuvent même, si elles relèvent d’une zone tendue, bénéficier d’un surplus de recettes fiscales résultant de la taxe d’habitation et de son éventuelle majoration.
Par ailleurs, conscient des difficultés d’accès au logement dans les communes faisant face à une tension immobilière, le Gouvernement travaille à une révision des critères de définition des zones tendues, pour y répondre rapidement et de façon ciblée, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.
M. Didier Marie. Monsieur le ministre, vous ne m’avez pas répondu sur la décorrélation.
Ces communes, déjà fortement fragilisées par les conséquences de la crise sanitaire sur la fréquentation touristique, rencontrent aujourd’hui des difficultés financières majeures dans un contexte de crise de l’énergie et d’explosion de l’inflation.
La résolution de ce problème contribuerait au maintien de leur dynamisme et de leurs recettes fiscales. J’invite le Gouvernement à y réfléchir de nouveau.
coût exorbitant de l’électricité pour les entreprises
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Tabarot, auteur de la question n° 135, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
M. Philippe Tabarot. Monsieur le ministre, avec un prix de l’électricité sur le marché de gros qui a franchi les 1 000 euros par mégawattheure, les entreprises françaises se retrouvent dans une situation économique inédite d’asphyxie financière.
Face à l’envolée des coûts de l’énergie, de très nombreuses entreprises, dont certaines sont aujourd’hui contraintes de réduire leur activité, et des milliers d’emplois sont en péril.
Dans le secteur des entreprises intermédiaires, par exemple, le coût actuel de l’énergie aboutirait à une augmentation des charges pouvant aller jusqu’à 1,5 milliard d’euros par an.
À l’heure où la reconquête de souveraineté est impérative, nous ne pouvons nous résoudre à voir des pans entiers de notre industrie fermer.
Les aides mises en place par votre gouvernement sont loin d’être à la hauteur pour les entreprises et les collectivités territoriales. En outre, celles-ci ne peuvent attendre la réforme du marché européen ou l’instauration exceptionnelle d’un hypothétique tarif réglementé d’urgence. Elles ne peuvent non plus se contenter de faire confiance à leurs propres mesures de limitation de la consommation, aussi efficaces soient-elles.
Dès lors, monsieur le ministre, comment comptez-vous leur venir en aide, car la situation devient urgente ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Tabarot, je partage vos inquiétudes, relayées par nombre d’entreprises, notamment industrielles, dans les territoires.
Dès l’année dernière, comme vous le savez, le Gouvernement avait mis en place un certain nombre de mesures pour contrer la hausse prévisible des tarifs de l’énergie.
Toutefois, les prix ayant connu des hausses dénuées de tout sens cet été, nous nous retrouvons aujourd’hui dans une situation particulièrement tendue, malgré les dispositifs déjà déployés – bouclier tarifaire pour les petites entreprises, baisse de la fiscalité sur l’électricité, surplus d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), etc.
Le Gouvernement s’est saisi de cette urgence et travaille d’arrache-pied, à trois niveaux, pour trouver des solutions. À l’échelon européen, un accord a été trouvé pour mettre en place un tarif plafonné des prix de production. Les recettes supplémentaires qui en résulteront pour l’État nous permettront d’aider les entreprises.
Au niveau national, nous adaptons les critères du fonds de soutien aux entreprises, dit Ukraine, pour le rendre plus flexible et plus ambitieux dans ses montants. En outre, Bruno Le Maire, Agnès Pannier-Runacher, Olivia Grégoire et moi-même avons signé hier matin, avec les distributeurs d’énergie, une charte pour leur permettre d’être plus transparents, plus prévisibles et plus à l’écoute de leurs clients, afin de mieux les accompagner dans cette période difficile.
Enfin, à l’échelon local, j’ai mobilisé l’ensemble des commissaires au redressement productif (CRP) et l’ensemble des fonctionnaires territoriaux, pour qu’ils soient au plus près des entreprises, y compris pour les accompagner dans le cadre des négociations avec les fournisseurs d’énergie.
L’essentiel se joue à l’échelon européen. Nous travaillons à faire baisser les prix de l’énergie dès cette fin d’année. Le Conseil européen à venir et les sommets qui vont suivre nous permettront, je l’espère, d’atteindre les résultats escomptés.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour la réplique.
M. Philippe Tabarot. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.
Pour autant, les Français comprennent aujourd’hui avec exaspération à quel point notre souveraineté énergétique a été déconstruite par le couple François Hollande-Emmanuel Macron et à quel point notre héritage patrimonial nucléaire, que l’on pensait insubmersible et gage de notre force, a été bradé sur l’autel d’arrangements politiciens, pour de la rente électorale passée.
Votre majorité a fait, naguère, le choix du renoncement au nucléaire. Les Français payent « cash » aujourd’hui la note de cet affaiblissement. Rien ne vient pallier aujourd’hui, quels que soient vos efforts, le manque d’investissements dans le nucléaire que vous aviez choisi à l’époque.
résiliation unilatérale des contrats d’énergie par les fournisseurs
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, auteur de la question n° 007, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, nous avons été alertés, dès ce printemps, par de nombreux chefs de petites entreprises, qui ont été avisés par leur fournisseur, plusieurs mois avant la date contractuelle, de la résiliation unilatérale de leur contrat de fourniture d’énergie, ainsi que de l’impossibilité, malgré des relances répétées, d’obtenir une offre de la part d’autres fournisseurs.
Le motif invoqué, dans un contexte qui augurait d’une future tension extrême sur le marché de l’énergie, semble être une notation insuffisante, établie par des experts, quant à la santé financière de leur établissement au regard, en particulier, de leur niveau d’endettement.
La renégociation des contrats ou la signature de nouveaux contrats s’appuie en effet sur l’analyse des bilans, à ce stade généralement « covidés » et sous prêts garantis par l’État (PGE). Cette situation a donc un effet pervers pour les entreprises, en affectant notamment leur capacité d’emprunt. S’y ajoute un chiffre d’affaires en baisse compte tenu de la conjoncture économique. On se trouve alors face un faisceau de critères très pénalisants pour ces structures.
De nombreuses communes de Haute-Vienne connaissent le même type de difficultés. Si la continuité d’approvisionnement semble avoir pu être assurée, c’est uniquement au prix de solutions boiteuses.
L’opacité et la complexité des offres tarifaires des différents fournisseurs d’énergie obligent en effet, en dernier recours, à passer par des courtiers en énergie, ce qui entraîne un surcoût pour les clients concernés. Il n’y a donc pas de rupture d’approvisionnement, mais on assiste à une singulière prise en otage des PME et PMI et des collectivités locales.
Dans un contexte économique de plus en plus difficile, les clients attendent des mesures d’urgence pour rétablir l’égalité d’accès à l’énergie.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Redon-Sarrazy, nous faisons face à un choc de l’énergie structurel pour notre économie. Comme je l’ai souligné, le Gouvernement travaille pour en limiter au maximum les effets.
Nous avons nous aussi été alertés sur ces difficultés. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous avons convoqué les distributeurs d’énergie à Bercy, hier matin, et signé la charte que j’ai déjà évoquée.
Les fournisseurs d’énergie qui ont eu ces comportements abusifs ont, au fond, manqué à l’essentiel, à savoir à leur devoir de conseil et d’accompagnement de leurs clients dans une situation extrêmement difficile. Ils ont eu parfois des comportements exagérés, par le biais de convocations, d’envois d’e-mails, de lettres recommandées qui ne laissaient aucun autre choix à leurs clients, entreprises et collectivités territoriales, que de poursuivre leur contrat, en dépit de hausses de prix absolument faramineuses.
La charte que nous avons signée hier comporte 25 engagements très concrets, dont l’anticipation du renouvellement des contrats, pour éviter que des PME ne se retrouvent obligées de signer dans des conditions commerciales dégradées, l’engagement ferme des fournisseurs à fournir une offre à tous leurs clients et l’engagement des fournisseurs à fournir une offre à une date et à une heure convenue à l’avance, pour que l’entreprise puisse faire jouer la concurrence.
Par ailleurs, avec Bruno Le Maire, j’ai proposé aux fournisseurs d’énergie de garantir une partie des contrats, pour éviter que le fournisseur, ne croyant pas en la capacité de l’entreprise à payer sa facture, ne sorte du contrat et ne prive cette entreprise d’un accès au service public essentiel de l’énergie.
Vous le voyez, nous avons pris à cœur les alertes que vous relayez aujourd’hui. La charte signée hier et la garantie du ministère devraient permettre de pacifier les relations entre les distributeurs d’énergie et leurs clients, même si nous demeurons dans un environnement complexe et extrêmement volatil.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour la réplique.
M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, il faut mettre en place une rétroactivité pour permettre à ceux qui ont été obligés de signer l’été dernier de revenir sur les éléments tarifaires. Des hausses de 260 % du prix du gaz ou de 500 % du coût de l’électricité ne sont acceptables ni pour les collectivités ni pour les particuliers ! (Mme Victoire Jasmin approuve.)
Télétravail des travailleurs frontaliers
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteure de la question n° 019, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.