M. le président. La parole est à M. Thierry Meignen, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Thierry Meignen. Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, la réponse que vous avez apportée à M. Temal ne nous satisfait pas.
Je vous rappelle que, à compter du 31 octobre, les contrats d’électricité et de gaz se termineront pour de nombreuses collectivités territoriales. Les nouveaux contrats devront être signés au 1er novembre, c’est-à-dire dans quelques jours, sous peine de coupure totale.
Les régions, départements et villes devront donc acheter l’électricité et le gaz au prix du marché, dans un contexte de flambée des prix de l’énergie. De nombreux élus locaux vous ont alerté sur ce point.
On annonce, chez nous, en Seine-Saint-Denis, des prix tout à fait insupportables : une multiplication par quinze du prix du gaz, par trente-deux du prix de l’électricité ! En Seine-Saint-Denis, comme partout en France, une commune moyenne passerait donc de 2 millions à 15 millions d’euros de dépenses d’énergie.
Comme vous en avez pris l’habitude, lorsqu’il s’agit des collectivités territoriales et des élus locaux, votre réponse n’est pas à la hauteur, monsieur le ministre. Le ministre chargé des comptes publics a proposé une aide de 438 millions d’euros – largement insuffisante. S’il avait ouvertement souhaité afficher son mépris pour les maires, il ne s’y serait pas pris autrement.
Cette aide ne s’appliquera qu’aux communes dont l’épargne brute s’est fortement dégradée ces dernières années. Comme d’habitude, vous avez choisi de sanctionner d’abord les bons élèves, c’est-à-dire les communes qui gèrent correctement l’argent de leurs administrés. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Monsieur le ministre, vous demandez beaucoup d’efforts aux collectivités, aux entreprises, aux Français. Vous avez demandé aux salariés de porter des cols roulés dans les bureaux (Protestations sur les travées du groupe RDPI et au banc du Gouvernement.), vous avez demandé aux écoliers de grelotter dans leurs salles de classe, les Français ont consenti beaucoup d’efforts, ils en consentiront encore, mais ils ne doivent pas être les seuls !
Monsieur le ministre, que répondez-vous aux nombreux maires qui ne savent pas aujourd’hui comment ils feront face à la flambée des prix de l’énergie ? Doivent-ils sacrifier les services à la population pour payer leurs factures de gaz et d’électricité ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Françoise Férat et Catherine Morin-Desailly applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Vous avez utilisé le mot de mépris, je ne l’aurais pas choisi ! Il existe plusieurs manières de mépriser les gens : être dans l’outrance, être dans la caricature (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, GEST, SER et CRCE.) et présenter les choses d’une manière totalement déviée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
Avoir un débat respectueux et fondé sur la réalité, oui, c’est possible ! Voici la réalité : pour la première fois depuis treize ans, la dotation globale de fonctionnement (DGF) a augmenté ! La DGF a été désindexée non pas par l’actuel Gouvernement (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.),…
M. Hussein Bourgi. Et l’inflation ?
M. Christophe Béchu, ministre. … mais d’abord par la majorité du Sénat qui se trouve à ma droite, ensuite par celle qui se trouve à ma gauche ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Revenons à la réalité, c’est nécessaire ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Concernant les tarifs d’électricité, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a présenté les tarifs cibles. Ainsi, leur multiplication par quinze ou par trente est en dehors de toute pratique. Dans ces cas-là, le conseil est de ne pas signer des contrats proposant des tarifs délirants, établis par des opérateurs qui profitent de la situation dans laquelle nous nous trouvons. (Exclamations sur de nombreuses travées. – M. Emmanuel Capus applaudit.)
M. Thierry Meignen. Qu’est-ce qu’on fait alors ?
M. Christophe Béchu, ministre. Faites votre part ! Je ne peux pas croire que vous passiez votre temps, dans vos départements, à relayer de fausses informations ou à alimenter des inquiétudes au lieu d’insister sur les dispositifs qui peuvent exister. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Vives exclamations, puis huées sur les travées des groupes Les Républicains, GEST, SER et CRCE.)
Plusieurs sénateurs du groupe SER. Pardon ?
M. Max Brisson. C’est honteux !
M. Hussein Bourgi. Allez sur le terrain !
M. Vincent Éblé. Venez parmi nous, monsieur le ministre !
M. Christophe Béchu, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, les choses sont très simples : dire au Sénat, en se faisant applaudir, que l’État ne donne pas assez pour les collectivités locales qui sont bien gérées par rapport à l’État qui l’est mal, voilà le succès garanti à tous les coups !(Brouhaha continu à droite et sur certaines travées à gauche. – M. le ministre doit élever la voix pour se faire entendre.)
La réalité, c’est la responsabilité par rapport aux finances publiques – vous ne cessez de l’invoquer ! – et par rapport à un dispositif qui tienne la route au regard des règles européennes. De ce point de vue, enrichissez ce qui vous sera proposé, regardez la robustesse du nouveau filet de sécurité qui a été conçu et prenez conscience de la réalité des hausses de DGF. À ce moment-là, nous pourrons débattre sur le fond et pas sur les postures ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC. – Huées sur des travées des groupes Les Républicains et SER.)
aides à la voiture électrique française
M. le président. La parole est à M. Patrick Chauvet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Patrick Chauvet. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des transports. La voiture électrique est sans conteste la star du Mondial de l’Auto – et pour cause, la vente de véhicules thermiques sera interdite à partir de 2035 !
Si cet objectif se justifie sur le plan environnemental, il fait toutefois peser un risque majeur sur l’industrie automobile française. En l’état actuel des choses, généraliser la voiture électrique revient à dérouler le tapis rouge à la Chine. Les grands constructeurs européens ont consenti des investissements colossaux pour améliorer les performances écologiques des moteurs thermiques. Avec le tout électrique, ces efforts sont passés par pertes et profits.
Nous sommes en train d’offrir une industrie d’excellence à l’Asie. (Mme Sophie Primas applaudit.) Aujourd’hui, la moitié de la chaîne de valeur du véhicule électrique est encore située en Asie. La Chine contrôle 56 % de la production mondiale des batteries. Nous devons d’ailleurs en importer les principaux composants quand nous les fabriquons en France.
En conséquence, nous ne sommes pas compétitifs. Les voitures électriques chinoises coûtent 20 % à 30 % moins cher que les européennes.
Les constructeurs estiment qu’il leur faudra entre cinq et sept ans pour résorber cet écart, car 19 % des voitures électriques vendues en Europe sont d’ores et déjà fabriquées en Chine.
Ce ne sont pas les dispositifs d’aide à l’acquisition d’une voiture électrique qui vont les aider. La location avec option d’achat ne sera pas possible avant 2024. C’est bien pour cela que vous venez d’augmenter la prime à l’achat, qui va passer de 6 000 à 7 000 euros, pour les ménages les plus modestes.
Ainsi, nous allons subventionner massivement les constructeurs chinois. Les États-Unis viennent de réserver leurs incitations fiscales aux seuls véhicules électriques dotés de batteries produites en Amérique. Ne pouvons-nous pas également cibler nos aides sur les constructeurs européens ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Monsieur le sénateur Chauvet, vous avez tout d’abord raison de souligner l’importance du Mondial de l’Auto – le premier depuis quatre ans –, d’autant plus qu’il est entièrement consacré aux véhicules décarbonés, notamment électriques – ce qui n’aurait sans doute pas été imaginable il y a quelques années, comme l’a rappelé Roland Lescure.
Vous avez également raison de nous alerter sur les risques d’atteinte à notre souveraineté et sur la nécessaire protection de notre filière automobile.
Face à ce risque, deux réponses sont possibles : soit nous considérons que le choix de la transition écologique peut être remis en cause, soit nous considérons que nous ne pouvons faire l’économie d’investissements massifs et rapides dans le véhicule électrique. Or personne ne propose de renoncer à la décarbonation, à la transition écologique ou à l’électrification !
Nous devons donc assumer cette transition. Sans être naïfs, non plus qu’excessivement optimistes, nous avons démontré ces dernières années qu’en l’affrontant plutôt qu’en la refusant et en nous réfugiant, si je puis dire, dans le confort du thermique et du statu quo, nous avions engagé une réindustrialisation. Cela a d’ailleurs conduit à souligner que la production avait baissé avant même que ne se pose la question de l’électrification.
Il y a cinq ans, nous n’aurions pas imaginé que la France, ainsi que vous l’avez relevé, commence à produire des batteries et à retrouver, progressivement et rapidement, son indépendance. Le Président de la République a fixé ce cap, qui est aujourd’hui crédible : sur les batteries, nous serons en mesure d’atteindre l’indépendance de production d’ici à 2027.
Nous devons mener la transition électrique en réindustrialisant, en investissant, en soutenant l’achat de véhicules électriques, en incitant notre filière, nos constructeurs et l’ensemble de l’écosystème à produire électrique en France et en Europe.
On ne peut pas renoncer à cet objectif ; en revanche, on peut y faire face en construisant une filière. C’est possible : votre département de la Seine-Maritime en témoigne, avec les transformations en cours des sites de Renault à Cléon et à Dieppe.
Ce qui paraissait improbable il y a quelques années est en cours : nous pourrons relever le défi de l’industrialisation électrique en Europe. Cela nécessitera de réformer nos outils de concurrence et de protection commerciale, d’aller vers la réciprocité et de faire en sorte que les aides que nous devons aux consommateurs et aux constructeurs ne soient pas ciblées vers ceux qui, depuis la Chine, essaient aujourd’hui de gagner notre marché.
Mme Sophie Primas. C’est pourtant bien le cas !
M. le président. La parole est à M. Patrick Chauvet, pour la réplique.
M. Patrick Chauvet. La réponse ne correspondait pas entièrement à la question.
Vous avez toutefois évoqué le droit européen ; il importe en effet de se pencher sur cette question, car, au-delà des discours, ses conséquences sur l’emploi dans la filière automobile seront terribles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
remboursement des prêts garantis par l’état
M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. Monsieur le ministre, crise énergétique, difficultés d’approvisionnement et de recrutement, l’industrie est de plus en plus affectée. La situation de trésorerie continue de se dégrader dans tous les secteurs et ressort très en deçà de sa moyenne de long terme. Ces propos résument le Point sur la conjoncture française à début octobre 2022 publié par la Banque de France.
À ces difficultés s’ajoutent le remboursement des prêts garantis par l’État (PGE) et le paiement des charges sociales qui n’ont pas été réclamées depuis 2021. Bien sûr, ces charges exceptionnelles sont trop lourdes pour les entreprises et les rendent vulnérables.
Nous vous avions déjà alerté, en commission des finances, sur la durée de remboursement des PGE, que nous jugions incompatible avec la marge des entreprises. Vous me répondrez sans doute que celles-ci peuvent la réviser, en passant par la médiation du crédit. C’est vrai, mais cette médiation relève d’une entité adossée à la Banque de France.
Si la réponse est négative, l’entreprise devra entrer dans une procédure collective ; si elle est positive, l’emprunt s’apparentera à une restructuration de la dette et sera donc considéré sur le bilan comme non performant. Cela emportera des conséquences sur la cotation de l’entreprise, quelle que soit sa taille, car celle-ci ne pourra plus souscrire d’emprunts bancaires pour innover ou pour se développer.
Vous comprenez dès lors pourquoi cette option est si peu utilisée et pourquoi bon nombre de chefs d’entreprise réinvestissent leur patrimoine personnel, au risque de tout perdre.
L’entreprise française, toutes tailles confondues, en incluant le CAC 40, emploie six salariés en moyenne. Vous avez entrepris une démarche de réindustrialisation de la France, ne laissons pas tomber ces TPE et ces PME, qui se découragent.
Face à cette situation, envisagez-vous de réviser l’étalement du remboursement du PGE, sans requérir de médiation particulière ? Comptez-vous surseoir temporairement au remboursement des cotisations sociales des années antérieures ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Monsieur le sénateur, merci de votre question, qui m’offre l’occasion de rappeler à quel point les prêts garantis par l’État ont permis, au début de la crise de la covid-19, de sauver notre tissu entrepreneurial. Ainsi, 140 milliards d’euros de prêts ont été consentis ; dans votre seul département de l’Orne, plus de 260 millions d’euros ont été prêtés à plus de 1 700 entreprises.
Vous avez raison de le rappeler, la question de leur remboursement se pose à présent. À ce stade, nous n’avons pas identifié de risque systémique : le taux prévisionnel de défaut concernant ces prêts est estimé à 5 %.
Nous sommes toutefois conscients que, dans la conjoncture actuelle, un certain nombre d’entreprises rencontrent des difficultés pour les rembourser. Ce dispositif a évolué tout au long de la crise et nous avons décidé, en juillet 2021 et en février 2022, qu’il ferait l’objet de facultés d’amortissement.
Les entreprises qui avaient souscrit un prêt inférieur à 50 000 euros peuvent se tourner vers le médiateur du crédit placé auprès de la Banque de France ; celles qui ont emprunté plus de 50 000 euros ont la possibilité de saisir le conseiller départemental de sortie de crise, qui les orientera vers une solution de restructuration de leur dette, que celle-ci relève du PGE ou des Urssaf, ou vers une procédure préventive de conciliation.
Vous nous avez alertés sur la question de la notation. Il est vrai que certaines entreprises sont inquiètes de voir leur note dégradée. Pour autant, les entreprises qui font moins de 750 000 euros de chiffre d’affaires ne reçoivent pas une notation inscrite au fichier bancaire des entreprises (Fiben). Seule la banque concernée sera donc informée d’une éventuelle restructuration.
Concernant les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 000 euros, je rappelle que la dégradation de la note n’est pas systématique, mais fait l’objet d’une analyse au cas par cas par la Banque de France et d’une discussion ouverte.
En conclusion, je rappelle que ces facultés viennent en complément des décisions prises par Mme la Première ministre pour aider de manière conjoncturelle nos TPE et nos PME face à la hausse des prix de l’énergie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour la réplique.
M. Vincent Segouin. Monsieur le ministre, je suis tout d’abord surpris, au vu de vos attributions, que ce soit vous qui répondiez à ma question.
Ensuite, vous prenez en compte le taux de contentieux, mais pas le nombre de radiations des entreprises, qui dépasse de 37 % son niveau de 2019. Aujourd’hui, les entreprises abandonnent.
Nous vous avions prévenu que la durée de remboursement du PGE était trop courte. Vous répondez : « Circulez, il n’y a rien à voir ! » Vous étiez fiers de défendre les entreprises, mais, aujourd’hui, vous les jetez dans le décor. J’en suis navré. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
qualité de l’air et décision du conseil d’état
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Angèle Préville. Encore une condamnation pour inaction : avant-hier, le Conseil d’État a condamné l’État à une astreinte de 20 millions d’euros pour non-respect des seuils de pollution de l’air en dioxyde d’azote dans les grandes agglomérations, Paris, Lyon et Marseille, sur la période du 1er juillet 2021 au 1er juillet 2022.
L’État avait déjà été condamné il y a un an, pour les mêmes raisons, à 10 millions d’euros d’astreinte. Cela sanctionne l’insuffisance des mesures et des moyens mis en œuvre pour ramener les émissions de ce gaz sous le seuil de 40 microgrammes par mètre cube. Les moteurs thermiques, c’est-à-dire le trafic routier, en sont les principaux émetteurs.
Le dioxyde d’azote se dissout dans l’eau pour donner de l’acide nitrique ; c’est d’ailleurs un des procédés de fabrication de ce produit corrosif par excellence. Si vous le respirez, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le dioxyde d’azote va se dissoudre dans l’humidité de votre nez et de vos poumons et de l’acide nitrique dilué va se former sur leurs parois. C’est pourquoi vous ressentirez des picotements et des irritations. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Si vous y êtes exposés régulièrement, des inflammations se produiront, avec, pour conséquence, nombre de pathologies : crises d’asthme, maladies pulmonaires, cancers du poumon. Les plus vulnérables – les enfants et les plus pauvres – sont les plus touchés. Le bilan annuel est de 40 000 décès prématurés.
Dans la nature, le même phénomène de formation d’acide nitrique au contact de l’eau provoque pluies acides, acidification des océans, eutrophisation des eaux douces et constitue un facteur majeur de baisse de la biodiversité.
Or le trafic routier par camion n’a pas diminué, il s’intensifie ; le fret ferroviaire n’est toujours pas revenu au niveau des années 1980, soit 30 % du transport de marchandises, et les mobilités douces ne sont toujours pas suffisamment encouragées.
Monsieur le ministre, selon vous, sommes-nous sur la bonne voie ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Madame la sénatrice, nous avons évidemment pris acte du maintien, par le Conseil d’État, de ces astreintes pour les deux semestres ayant suivi la condamnation d’août 2021.
Je ne doute pas, au vu du degré de précision dans lequel vous êtes entrée, que vous avez lu cette décision du Conseil d’État, lequel pointe un maintien des dépassements de seuil, tout en relevant une amélioration de la situation.
En 2017, ces dépassements concernaient treize agglomérations, ce chiffre est passé à huit en 2020 puis à cinq en 2021. Aujourd’hui, ils se produisent encore dans trois agglomérations : Paris, Lyon et Aix-Marseille.
Le sujet n’est toutefois pas le nombre de villes concernées, mais bien le nombre de décès liés à la pollution de l’air : plus de 40 000. Notre engagement est de le faire baisser. La ligne du Gouvernement, c’est la protection des Français, et cela vaut, d’abord, pour les sujets environnementaux.
Le Conseil d’État nous appelle à amplifier, à renforcer et à rendre plus efficientes les zones à faibles émissions (ZFE). Mardi prochain, je recevrai au ministère, avec Clément Beaune, les présidents des intercommunalités, des métropoles et les maires de toutes les villes de plus de 150 000 habitants, pour faire un point de situation.
Une dizaine d’agglomérations sont déjà passées aux ZFE, d’autres ne l’ont pas fait, certaines d’entre elles rencontrent des difficultés, d’autres en anticipent. De vrais problèmes d’accessibilité sociale se posent, parce que ces dispositifs ne doivent pas empêcher les plus fragiles d’entrer dans les villes.
Nous devons donc aborder la question des compensations, mais aussi celle des moyens ainsi que celle de l’information. Certaines villes mettent en place des dispositifs innovants : Strasbourg teste un passe, d’autres majorent des aides ou des primes à la conversion.
Tous ces sujets seront sur la table, avec un objectif : protéger les Français et améliorer la qualité de l’air, particulièrement en matière de dioxyde d’azote et de particules fines. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation en arménie
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Madame la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, j’associe à ma question les amis de la justice et de la liberté et, en particulier, les membres du groupe d’amitié France-Arménie.
Le 13 septembre, l’Azerbaïdjan a lancé une nouvelle offensive contre l’Arménie. Malgré l’indifférence presque générale qui règne, c’est bien une nouvelle guerre de conquête et d’extermination qui se joue aux portes de l’Europe. Elle s’accompagne d’un premier lot de crimes de guerre, fièrement exhibés sur la toile par les militaires azerbaïdjanais se filmant dans leurs œuvres de viol, de torture et de démembrement.
Cette logique génocidaire, cette arménophobie, ce racisme d’État pratiqués par l’Azerbaïdjan avec le soutien de la Turquie n’ont pas vocation à s’arrêter à ce pays. Ilham Aliev a d’ailleurs déclaré vouloir « chasser ces chiens d’Arméniens ».
Alors, madame la ministre, que comptez-vous faire pour éviter que cette part de l’histoire de l’humanité, que ce pays souverain, la République d’Arménie, ne disparaisse ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Boyer, je vous remercie de cette question qui me permet de revenir sur quelques points évoqués récemment ici même.
Vous le savez, la France est pleinement solidaire de l’Arménie face aux violations de sa souveraineté, pour stabiliser la situation, pour que le pays recouvre son intégrité territoriale et pour accompagner la reprise des négociations.
Cette mobilisation porte ses fruits. Outre la relance de la dynamique au Conseil de sécurité des Nations unies sous présidence française, les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne ont décidé, lundi, le lancement rapide d’une mission européenne d’observation, qui se déploiera le long de la frontière arménienne.
Cela a été rendu possible par l’accord trouvé entre les deux pays sous l’égide du Président de la République, qui y a consacré du temps dans la nuit du 6 au 7 octobre.
Comme le souhaitait l’Arménie, par ailleurs, nous sommes parvenus également à faire accepter une mission d’évaluation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui sera sur place dès vendredi et qui permettra de dresser un constat de la situation et des besoins, notamment humanitaires. Elle visera à relancer le processus de négociation et de délimitation de la frontière.
J’avais évoqué avec vous ces trois sujets, tous les trois ont avancé. Aucun de ces progrès n’aurait été possible sans l’engagement de la France, jusqu’au plus haut niveau de l’État, madame la sénatrice.
Vous le voyez, l’Arménie peut compter sur la France, qui œuvre pour la paix et pour la stabilité dans le Caucase, dans l’intérêt de tous.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.
Mme Valérie Boyer. Comment y croire, madame la ministre ? Comment croire une Europe qui, d’un côté, envoie cette mission civile sur place, mais qui, de l’autre, renforce la coopération avec l’Azerbaïdjan, notamment en matière énergétique ?
Avec Ursula von der Leyen, qui voit en Aliev un partenaire fiable sur lequel on peut compter, Bruxelles est prête à sacrifier la vie des Arméniens sur l’autel de ses intérêts énergétiques. Qu’en est-il vraiment de la France ? La vie des Arméniens vaut-elle moins que celle des Ukrainiens ? Cette tartufferie européenne va plus loin encore, puisque le gaz vendu par l’Azerbaïdjan proviendrait d’une exploitation détenue en partie par une société russe.
L’Arménie est une part de nous-mêmes, une part de notre civilisation, de notre culture, de nos croyances. Notre calendrier prévoit même une journée nationale pour commémorer le génocide de 1915. Les Arméniens ne demandent qu’une chose : le droit de vivre et de disposer d’eux-mêmes.
Ce qui est valable pour la Russie devrait l’être pour l’autocratie azerbaïdjanaise. Il y a d’ailleurs une entente entre ces deux pays. « Poutine veut prendre la géographie. Aliev veut annuler l’Histoire. Le premier conquiert. Le second efface. », écrit justement Sylvain Tesson, ce grand témoin.
Demandons des sanctions contre l’Azerbaïdjan et appliquons-les ! Gelons les avoirs du clan Aliev sans avoir la main qui tremble ou qui triche ; opposons-nous à la diplomatie de la menace, à la caviar connection ; envisageons un soutien militaire, des armes pour l’Arménie ! Ce que nous avons fait pour le Mali, pourquoi ne pas le faire pour l’Arménie ? Enfin, dénonçons cet accord inique sur le gaz.
Refuser ces sanctions, ce serait cautionner l’épuration ethnique des Arméniens, une nouvelle phase du génocide, peut-être la Solution finale pour eux ! Cela reviendrait à clamer à la face du monde que les valeurs dont nous nous réclamons ne sont que des supercheries. Agissons concrètement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER.)
réforme du lycée et enseignement des mathématiques