M. le président. Les amendements nos 1753 et 1795 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 1823.
M. Patrick Kanner. Cet article 1er bis est-il anodin, incolore, inodore, exotique ? Non ! C’est un article terriblement politique.
Sans revenir sur les arguments de fond concernant la retraite par points, on dit que c’est l’amendement de M. Ferracci,…
M. Patrick Kanner. … député du groupe Renaissance et proche du Président de la République. Excusez-moi, monsieur le ministre, je ne crois pas que ce soit l’amendement de M. Ferracci : c’est plutôt celui de M. Macron ! Il faut appeler un chat un chat : c’est un amendement du Président de la République !
Je rappelle, après plusieurs de mes collègues, que cet article n’était pas présent dans le texte initial. Il se retrouve dans le texte transmis par le Gouvernement au Sénat alors que rien n’obligeait le Gouvernement à l’y laisser.
Dans ce dossier, le Président de la République, c’est – chacun choisira l’expression qu’il préfère – le pompier pyromane, l’apprenti sorcier, les deux en même temps…
Mais, monsieur le ministre, pourquoi un tel article à vocation systémique se retrouve-t-il dans un texte qui se veut paramétrique ? J’espère que vous pourrez répondre à cette question, parce qu’à première vue il y a quand même quelque chose qui ne marche pas dans cette manière de faire. L’article 1er bis est presque un crime signé !
Franck Montaugé disait tout à l’heure qu’un train peut en cacher un autre. Concernant la retraite par répartition, j’ai plutôt l’impression qu’un corbillard peut en cacher un autre… Et nous sommes opposés à ce que la retraite par répartition soit un corbillard. C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article.
M. René-Paul Savary, rapporteur. Quelle métaphore !
M. le président. L’amendement n° 1899 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 1996.
Mme Laurence Rossignol. Je vais être relativement rapide, parce que je suis déjà intervenue sur cet article 1er bis et que notre but n’est pas de ralentir les travaux du Sénat… (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Je ne savais pas trop comment vous faire plaisir en ce début de dimanche après-midi, mes chers collègues ! Voilà qui est fait…
M. Max Brisson. C’est réussi !
M. Christian Cambon. Signal bien reçu !
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le ministre, je m’interroge simplement sur un point. Pourquoi, parmi tous les amendements qui ont été adoptés par l’Assemblée nationale, avoir choisi de retenir celui-ci ? Pourquoi cet amendement particulier a-t-il bénéficié d’un sort différent des autres amendements adoptés par l’Assemblée nationale ? Pourquoi avez-vous absolument voulu le garder ?
Je n’imagine pas un seul instant que ce soit pour des raisons d’amitié ou pour faire plaisir au Président de la République. Ce serait indigne de la République et ne correspondrait évidemment pas à votre façon de gouverner le pays…
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg, pour présenter l’amendement n° 2027 rectifié bis.
M. Alain Duffourg. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis, dans la mesure où celui-ci prévoit la convergence des régimes de retraite, dès un an après la promulgation de ce texte…
Cela priverait les régimes autonomes de leur capacité d’action ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le régime des avocats est particulièrement opposé à cette mesure. J’ajoute que la Première ministre a publiquement pris en considération cette revendication de la profession.
M. le président. L’amendement n° 2075 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l’amendement n° 2108.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cinquante-neuf amendements ont été déposés pour supprimer cet article… Pour ne pas être soupçonnée de lantiponner, je dirai simplement que cet amendement identique aux autres a été défendu ! (M. Michel Savin applaudit.)
Mme Laurence Rossignol. Vous êtes donc d’accord avec tout ce qui a été dit ?
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 2263.
Mme Frédérique Espagnac. Défendu.
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 2371 rectifié bis.
Mme Jocelyne Guidez. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° 2493 rectifié ter.
M. Alain Houpert. Défendu.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 2588 rectifié ter.
Mme Pascale Gruny. Si nous voulons que les Français aient confiance, il ne faut pas changer de ligne tous les quatre matins !
Surtout, j’imagine que le rapport qui est ici demandé sur un régime universel par points a déjà été réalisé au moment de la précédente tentative de réforme. Ressusciter cette idée au détour d’un amendement sur ce texte ne peut pas donner confiance aux Français.
Je veux à ce propos attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la situation des artistes-auteurs, dont il ne faudra pas oublier la spécificité si jamais vous vous lancez dans une telle étude…
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3384.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet article 1er bis trouve sa place dans le présent texte, car il préfigure la prochaine étape de la réforme ; cette étape, on la prépare non pas depuis 2019, mais depuis 2017.
De quoi s’agit-il exactement ?
Avec ce texte, on rabote les régimes les plus protecteurs et on aggrave presque tous les paramètres du système de retraite. En contrepartie, pour faire passer la brutalité de la réforme, on rend 3 milliards d’euros sur les 18 milliards mis dans la cagnotte.
Surtout, cette réforme fait l’impasse sur un paramètre : les recettes. Et ce n’est pas un hasard ! Vous savez bien qu’il faudra agir sur ce paramètre, qu’il faudra notamment augmenter les cotisations, mais vous ne voulez surtout pas que cette augmentation bénéficie aux premier et deuxième étages de notre système de retraite. Vous voulez la flécher sur le troisième étage et, là, vous n’invoquerez pas de problème de pouvoir d’achat ou de compétitivité…
Au fond, monsieur le ministre, vous voulez faire exploser un principe qui, lui, est fondamentalement de gauche : de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Quand on offre un certain nombre de points pour un euro cotisé, on fait le contraire : à chacun selon ses moyens, de chacun selon ses besoins ! Bien sûr, vous mettrez en avant quelques mesures d’atténuation : vous serez assez aimable pour attribuer des points gratuitement, mais ce sera dans la même proportion que dans le système actuel, un sixième financé par la solidarité.
Il est donc tout à fait cohérent que cet article ait été inséré dans le texte. Votre idée générale est de bloquer les cotisations pour les régimes de base et complémentaires, puis de demander un abondement par l’employeur, défiscalisé bien sûr.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ensuite, vous direz aux salariés, dont les pensions baisseront du fait de vos réformes, que le troisième étage est la solution. Mais c’est une solution par capitalisation !
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 4403 rectifié.
Mme Michelle Gréaume. « Notre système de retraite par répartition est l’un des fondements de notre système social. C’est un bien précieux et un symbole de notre Nation. Notre objectif est de le préserver. » Ce sont les mots de la Première ministre, Élisabeth Borne.
Cet article 1er bis va dans le sens contraire et confirme nos craintes. Ce que vous poursuivez comme une chimère, c’est la destruction en profondeur de notre système de retraite et sa transformation en un régime universel par points, points qui seraient réévalués chaque année.
Vous remettez sur le tapis un projet dont personne ne veut.
Ce projet renforcerait les inégalités que vous aurez contribué à créer avec le report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite.
Ce projet serait d’autant plus regrettable qu’il procéderait à une réforme, inédite depuis 1945, du système de retraite destinée à transformer pour les décennies à venir un système qui constitue « l’une des composantes majeures du contrat social », selon les mots du Conseil d’État en 2020.
Ce projet obligerait à travailler plus longtemps, avec une pension aléatoire en fonction d’une valeur de point fluctuante.
C’est une gestion individualisée des retraites visant à opposer les professions entre elles. Nous n’en voulons pas !
C’est un jeu de points – cela a été largement démontré en 2019 – dans lequel tous seraient perdants : les femmes, la majorité des 20 millions de salariés du régime général, les professionnels libéraux, les 400 000 agents des régimes spéciaux, les 4,4 millions de fonctionnaires. Tous seraient perdants !
Ce projet nous permettrait, selon vous, de bien vieillir au travail, alors que nous voulons bien vieillir libérés du travail et profiter de ce temps de la vie qui a pris un nom, la retraite.
Nous ne voulons pas de ce rapport, prémices d’une réforme qui, au nom du marché, remettrait en cause le principe de solidarité qui fait la force de la protection sociale en France. (Applaudissements sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour présenter l’amendement n° 4725 rectifié bis.
M. Stéphane Le Rudulier. Défendu.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour présenter l’amendement n° 4729 rectifié ter.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Défendu.
M. le président. Mme la rapporteure générale ayant présenté, au nom de la commission, l’amendement n° 2108, j’en conclus que son avis sur l’ensemble de ces amendements identiques est favorable. (On le confirme au banc des commissions.)
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Au vu du nombre de signataires de ces amendements de suppression, siégeant sur de multiples travées de votre hémicycle, je n’ai guère de doute sur l’espérance de vie de cet article… (Sourires.)
Je veux cependant saisir cette occasion pour apporter un certain nombre de précisions.
Madame Rossignol, le texte que le Gouvernement a transmis au Sénat en application de l’article 47-1 de la Constitution est le texte initial du Gouvernement auquel nous avons ajouté la totalité – ils étaient peu nombreux – des amendements adoptés par l’Assemblée nationale. Il n’y a donc eu aucun tri : tous les amendements adoptés par l’Assemblée nationale ont été intégrés dans le texte que nous vous présentons.
Vous évoquez l’article 2, qui a été supprimé à l’Assemblée nationale, mais je vous rappelle que la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, précisant l’article 47-1 de la Constitution, fait référence au projet initial du Gouvernement modifié des amendements adoptés par la Chambre qui l’a examiné et que le Gouvernement souhaite conserver. Nous avons conservé tous les amendements qui avaient été adoptés.
Je voulais aussi préciser que le projet de système universel de retraite que nous avions présenté en 2019 n’était pas un système par capitalisation – je tiens à le souligner.
Je tiens aussi à souligner qu’un système par points n’implique pas automatiquement la capitalisation. D’ailleurs, dans le projet que nous avions présenté en 2019, une part considérable des cotisations servait à acquérir des points pour chacun des assurés, mais une part importante était aussi consacrée au financement de mécanismes de solidarité qui se traduisaient par l’octroi de points dits « gratuits » – ils n’avaient de fait rien de gratuit, puisqu’ils étaient financés par une part des cotisations.
Il n’y a donc pas d’antagonisme entre un système par points et un système par répartition ; le projet de loi de 2019 l’illustrait clairement.
Pour ce qui concerne les amendements de suppression de cet article, le Gouvernement avait émis à l’Assemblée nationale un avis favorable sur cette demande de rapport, présentée par un certain nombre de députés de la majorité. Pour cette seule raison, je ne peux donner un avis favorable à la suppression de cet article.
Pour autant, voyant la liste des signataires de ces amendements, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, en ce qui me concerne, je parlais de capitalisation pour le troisième étage de la fusée et non pour les deux premiers. L’Agirc-Arrco est d’ailleurs un régime par répartition.
Quand on parle de protection sociale, on utilise souvent l’expression « salaire différé ». Je préfère parler de « prélèvements socialisés » afin de rester dans l’esprit du principe que j’énonçais tout à l’heure : de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins.
Ces prélèvements ouvrent des droits qui sont différés. Si je prends l’exemple du risque maladie, on ne fait pas de lien entre le montant des cotisations et celui des remboursements. On ne s’occupe pas du « rendement », on ne se dit pas : tiens, je vais faire un cancer pour avoir un retour sur investissement !
Pour les retraites, c’est un peu la même chose : nos cotisations payent les pensions d’aujourd’hui et nous ouvrent un droit pour demain. Cela n’empêche pas de faire des réserves sur le long terme.
Le troisième étage, qui fonctionnera certainement par capitalisation, fût-elle collective, doit de ce point de vue s’appuyer sur les deux premiers étages, qui respectent le principe de socialisation dont j’ai parlé.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. On a beaucoup parlé du système à points, mais, quelles que soient les formes qu’il prend, il a d’importants défauts structurels qui fragiliseraient considérablement les Français.
Son effet redistributif est quasiment nul.
La valeur du point est incertaine, puisqu’elle peut varier à tout moment, ni vu ni connu, comme aurait pu dire M. Fillon – Mme Préville a eu raison de rappeler ses propos sur le sujet.
Un tel régime est instable, alors même que nous vivons déjà dans un système où tout ce qui est censé protéger, garantir la sécurité et préparer l’avenir est déstabilisé. Attention à ne pas ébranler davantage le pacte républicain et la société française !
Mais je voudrais surtout insister sur l’incohérence de la position gouvernementale. On nous dit que les conditions du passage vers une retraite à points vont être étudiées, donc qu’on va remettre la réforme sur le tapis dans un an.
Par conséquent, je ne demande pas seulement le retrait de cet article, mais celui de la réforme dans son ensemble : ce n’est pas la peine de continuer si tout est à recommencer dans un an, alors que le pays est déjà à feu et à sang !
Monsieur le ministre, prenez vos responsabilités et rouvrez les négociations avec les organisations syndicales ! Il faut un tel débat politique sur l’avenir à long terme du système de retraite. Nous avons des propositions à faire, mais ne nous faites pas un coup de Jarnac !
Au-delà de l’incohérence, cet article donne le sentiment, dramatique, d’une instabilité chronique de notre système de retraite. Tout cela ne peut que faire perdre confiance à nos concitoyens et fissurer la cohésion nationale.
Je demande donc le retrait de cet article, mais aussi celui de la réforme dans son ensemble. Monsieur le ministre, soyez cohérent ! (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Le Gouvernement continue de nous tromper et de tromper les Français.
Après avoir fait le choix d’un véhicule législatif inadapté à l’examen d’une réforme aussi importante pour les Français – un PLFRSS plutôt qu’un projet de loi ordinaire –, le Gouvernement, sans le dire, introduit par ce nouvel article la mise en œuvre d’un système universel de retraite, via la remise d’un rapport. Or ce système a été rejeté massivement par les Français – rappelez-vous !
Alors oui, il y a tromperie : d’un côté, vous nous dites qu’il faut cette réforme pour préserver notre système par répartition ; de l’autre, insidieusement, vous préparez le terrain pour demain.
Monsieur le ministre, je vous le demande : dites la vérité aux Français ! Ne les trompez pas en affirmant que c’est une réforme de gauche et qu’il n’y aura pas de perdants. Dites vraiment ce qu’il en est et retirez cette réforme ! (Très bien ! sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre réponse. Comme vous n’avez pas pu aller au bout à l’Assemblée nationale, le texte qui est arrivé au Sénat est donc bien le projet initial du Gouvernement, avec les articles et amendements…
M. Fabien Gay. … avec les amendements – soyons précis, en effet – que vous souhaitiez conserver.
M. Fabien Gay. Vous auriez donc pu ne pas intégrer, dans le texte transmis, l’amendement de M. Ferracci adopté à l’Assemblée nationale. Il s’agit bien d’un choix politique de votre part ; il faut l’assumer, monsieur le ministre !
Vous avez donc fait le choix politique de dire que vous souhaitiez revenir, dans un an, devant le Parlement pour un nouveau débat sur le système de retraite. Cet article 1er bis ouvre toutes les possibilités : la répartition, comme aujourd’hui ; un système par points – ce n’est pas la même chose que la capitalisation, vous avez raison de le dire ; mais aussi la capitalisation, qu’elle soit individuelle ou collective.
Au point où nous en sommes, au vu des conditions dans lesquelles nous examinons ce projet de loi particulièrement mal fagoté, et alors que l’ensemble des organisations syndicales et la très grande majorité des Françaises et des Français y sont férocement opposés, sincèrement, il n’y a qu’une solution : le retrait !
Le seul moyen pour que nous ayons un débat serein est que vous retiriez votre texte, que vous repreniez les négociations, comme l’a très bien dit Marie-Noëlle Lienemann, et que vous reveniez, le cas échéant, avec une nouvelle proposition, peut-être la retraite par points comme en 2019.
Retenir cet article montre que vous avez un agenda caché et que vous ne voulez pas du système par répartition. Ce qui transparaît dans cet article, voilà votre véritable ambition !
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. J’interviens sur l’amendement de Mme Préville.
Monsieur le ministre, vous ne m’avez vraiment pas convaincu par vos explications.
Il y a véritablement un problème de cohérence et d’intelligibilité. Nous sommes dans un PLFRSS, censé avoir un caractère d’urgence. Les Français ne peuvent rien y comprendre.
Le manque de cohérence est total : vous revenez au régime de retraite à points universel qui a été rejeté massivement par les Français lors du premier quinquennat Macron, obligeant le Président de la République et son gouvernement d’alors à abandonner leur texte.
De surcroît, le 10 janvier dernier, en présentant une nouvelle réforme des retraites, cette fois-ci paramétrique, la Première ministre a elle-même signé l’arrêt de mort définitif de la retraite par points, mais vous y revenez !
Il n’y a pas lieu d’agiter de nouveau le spectre d’une future mise en œuvre d’un système universel de retraite, qui plus est en « intégrant les paramètres de la réforme prévue par la présente loi ».
Les Français ont clairement exprimé qu’ils ne veulent aucune des deux réformes. Non seulement le Gouvernement ne veut rien entendre et s’entête à ponctionner deux ans de vie des Français, avec la retraite à 64 ans, mais il leur dit en outre que, au lieu d’une réforme, ils vont en avoir deux. C’est de la provocation !
Supprimons cet article ! Supprimons la réforme, et manifestons massivement ce mardi devant tant d’incohérences ! Le rejet est considérable ; la cohésion et l’adhésion seront dans la rue.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. En complément des éléments que j’ai évoqués précédemment, je veux intervenir en explication de vote sur l’amendement n° 1547.
En effet, je souhaite insister sur l’impuissance du pouvoir politique qu’illustrerait le maintien de cette demande de rapport : il traduirait l’idée que cette réforme est inachevée, incomplète, et que le Gouvernement doit, une fois de plus, revoir sa copie prochainement sur le sujet. Au vu de ce qu’ont dit mes collègues, je crois que nous sommes nombreux à partager cette inquiétude…
En réalité, ce n’est pas seulement sur ces travées que nous partageons ce constat, puisqu’il me semble que le Conseil d’État, qui est très critique envers ce projet, y souscrit aussi. Mais ce n’est pas ainsi que vous communiquez depuis maintenant plusieurs mois sur cette réforme, que vous mettez en avant comme la bonne solution, d’une part pour sauvegarder le système de répartition, d’autre part pour renforcer son équité.
Et voilà que l’on remettrait sur les rails la préparation d’un système universel de retraite reposant sur les reculs sociaux déjà opérés par le présent texte, puisqu’il est bien précisé que doivent être intégrés les paramètres de la réforme actuelle.
Si vous souhaitiez réellement prendre davantage en compte les spécificités inhérentes à chaque métier et à chaque parcours, il ne fallait pas supprimer les régimes spéciaux adaptés à la réalité des métiers pour lesquels ils avaient été créés ! Il ne fallait pas, encore une fois, pénaliser les femmes par cette réforme. Il fallait rétablir les critères de pénibilité supprimés en 2017 par le Gouvernement.
Oui, la copie doit être revue, mais alors, allons jusqu’au bout de la cohérence, ne votons pas cette réforme !
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Je dois avouer que je suis très frustré, parce que je ne peux pas demander l’avis du Conseil d’État sur cet article, qui a été introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement et repris par le Gouvernement… (Sourires et applaudissements sur des travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
Malgré le plaisir que nous avons à passer du temps ensemble un dimanche après-midi, je veux de nouveau insister : qu’est-ce que cette réforme a à faire dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale ? Rien !
Outre que cela est incohérent, rouvrir sans cesse le débat montre qu’au fond vous savez vous-même que votre réforme n’est ni faite ni à faire. On en revient chaque fois au fait que votre choix du PLFRSS est une ruse procédurière pour éviter un débat de fond sur le travail et sur les retraites.
Monsieur le ministre, je vous le dis : retirez la réforme !
Bien évidemment, nous voterons la suppression de cet article 1er bis.
Surtout, je vous invite à retourner devant les partenaires sociaux : on ne peut pas imaginer une réforme des retraites à laquelle ils ne soient pas associés de façon réelle et continue.
Si vous voulez une année supplémentaire, retirez la réforme et utilisez cette année pour dialoguer avec les partenaires sociaux. Eux sont toujours prêts à défendre les retraites des salariés ! (Bravo ! et applaudissements sur des travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour explication de vote.
Mme Mélanie Vogel. Pourquoi allons-nous voter pour les amendements de suppression de cet article ?
En 2019, le Gouvernement avait présenté un projet de réforme des retraites visant à instaurer un régime universel, projet assorti d’une étude d’impact.
Cette réforme a été abandonnée. On nous propose aujourd’hui quelque chose de tout à fait différent, dans la précipitation, via un véhicule législatif que nous jugeons inopportun.
Dans le cadre de cette réforme, la majorité et le Gouvernement nous disent avoir besoin d’un rapport pour réfléchir à la réforme qu’ils ont abandonnée voilà deux ans.
Il y a deux possibilités.
Soit vous avouez que l’étude d’impact que vous aviez publiée en janvier 2020 était insincère, incomplète, insatisfaisante, et qu’elle ne permettait pas, au fond, de savoir si le système de retraite universel à points était bon ou non – c’est ce que nous disions à l’époque.
Soit vous reconnaissez que vous disposez de ces informations : j’imagine, je veux croire que le choix de la présente réforme se fondait sur des informations et sur des comparaisons entre les différents systèmes. Il faudra alors avouer que l’objet de cet article est bien, en réalité, de nous préparer à l’étape suivante, de nous faire entendre que cette réforme-ci n’est qu’une première étape avant la mise en place d’un système qui a été rejeté il y a quelques années.
Puisque vous n’êtes pas encore très clairs, ni avec vous-même ni avec les Françaises et les Français, puisque, apparemment, vous avez besoin d’un an pour savoir exactement ce que vous voulez faire ou, en tout cas, ce que vous voulez dire, nous pensons, pour notre part, que la solution la plus simple est de prendre cette année. Nous ne sommes pas pressés ! Revenez l’année prochaine, et nous verrons ce que nous ferons de votre proposition finale. (Mme Raymonde Poncet Monge et M. Yan Chantrel applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. Je voterai, moi aussi, pour les amendements de suppression de l’article 1er bis.
Cet article est hors sujet dans un PLFRSS. Il dispose que, « dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité, les conditions et le calendrier de mise en œuvre d’un système universel de retraite faisant converger les différents régimes et intégrant les paramètres de la réforme prévue par la présente loi ».
Le Président de la République nous demande et demande aux Français de faire preuve de bon sens. Mais le bon sens indique que, si ce rapport était utile, il aurait dû être réalisé avant que vous ne nous présentiez les premiers éléments d’un nouveau système de retraite. Il est donc inutile !
Retirez cette réforme, et retirez cette demande de rapport !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Même si nous allons évidemment nous y opposer, en réalité, cet article est intéressant. Il donne le sens de la pensée au plus haut niveau de la République sur la question des retraites.
Je suis absolument certain que, derrière la réforme qui nous est proposée et qui est l’objet central de ce texte, il y a, à terme, la mise en œuvre d’un régime par capitalisation.
Je veux également évoquer le climat dans lequel nous sommes depuis 2019. Les Français ont alors exprimé ce qu’ils pensaient de la réforme qui leur était proposée. Ils sont toujours sur la même ligne. De ce point de vue, cet amendement met le feu ! On en rajoute !
Les théoriciens du management de l’entreprise évoquent, entre autres techniques, le management par le chaos. Si cette façon de faire n’est pas durable dans le temps, certaines entreprises l’utilisent pour passer un cap, pour changer de paradigme. Typiquement, nous y sommes !
On provoque la population française. Je suis certain qu’elle saura nous dire, mardi prochain, puis dans les jours, les semaines et les mois à venir, qu’elle ne veut ni de la réforme qui nous est proposée dans ce texte ni de ce qui est annoncé par le biais de cet article, où est demandé un rapport sur les régimes par capitalisation, que l’on a plutôt tendance à appeler « régimes systémiques ».
Je m’opposerai fermement à cet article, qui en dit beaucoup sur l’état d’esprit au plus haut niveau de l’État et sur ce que le Président de la République veut faire de la retraite des Français.