M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par la commission.
Articles 1er à 2 ter BA
M. le président. Sur les articles 1er à 2 ter BA, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Article 2 ter B
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er mars 2024.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Cet amendement vise à réparer un oubli de la CMP.
Il s’agit de préciser la date d’entrée en vigueur de l’encadrement des produits non alimentaires, que nous proposons de fixer au 1er mars 2024.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre. Le Gouvernement et le Sénat étaient en désaccord sur ce point.
Cela dit, ce dispositif ayant été voté et approuvé en CMP, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Sur l’article 2 ter, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur cet article ?…
Le vote est réservé.
Article 3
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
ou à l’échéance de la durée d’un mois mentionnée à l’article L. 441-4-1
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Sur les articles 3 bis A et 3 bis B, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Article 3 bis
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. – En cas de situation exceptionnelle, extérieure aux distributeurs et fournisseurs, affectant gravement les chaînes d’approvisionnement dans un ou plusieurs secteurs, l’application des pénalités logistiques prévues par les contrats conclus en application du présent titre entre les distributeurs et le ou les fournisseurs intervenant dans ces secteurs et concernés par ladite situation peut être suspendue par décret en Conseil d’État, pour une durée maximale de six mois renouvelable. » ;
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Il s’agit également d’un amendement de coordination juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Sur les articles 3 ter A à 5, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Article 6
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I. – Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 441-8 est ainsi modifié :
II. – Alinéa 2
Remplacer la référence :
1°
par la référence :
a)
III. – Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
b) Au quatrième alinéa, après les mots : « deux premiers alinéas », sont insérés les mots : « du présent I » ;
IV. – Alinéa 3
Remplacer la référence :
2°
par la référence :
c)
V. – Compléter cet article par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :
2° À l’article L. 954-3-5, après les mots : « premier alinéa », sont insérés les mots : « du I ».
II. – À l’article L. 631-25-1 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « troisième alinéa », sont insérés les mots : « du I ».
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure. Il s’agit encore d’un amendement de coordination juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Sur les articles 7 à 8, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements de la commission, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Amel Gacquerre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 14,5 %, tel est le bond qu’ont réalisé les tarifs des produits alimentaires entre les mois de février 2022 et février 2023 selon l’Insee. Au-delà d’un mois de mars alarmant, c’est la preuve qu’une année noire vient de s’écouler pour les Français.
Cette inflation inédite des prix de l’alimentation frappe en premier lieu les portefeuilles des consommateurs les plus modestes, ce que nous ne pouvons accepter.
Notre action en faveur du pouvoir d’achat ne signifie pas pour autant que nous devons pénaliser les petites et moyennes entreprises, les coopératives agricoles et nos exploitations qui font tout pour que les Français puissent bénéficier de produits de qualité au prix le plus compétitif possible.
Pour ce faire, nous devions corriger le déséquilibre inhérent à la relation fournisseurs-distributeurs, qui demeure très souvent défavorable à nos producteurs. C’est tout le sens de l’initiative présentée par Frédéric Descrozaille.
Remanié grâce au travail de fond effectué par le Sénat et par la commission mixte paritaire, ce texte complète les mesures issues des deux lois Égalim.
Nous pouvons aujourd’hui nous féliciter d’avoir conservé les principales avancées du Sénat dans la rédaction finale.
Je pense tout d’abord à l’ancrage définitif du principe de non-négociabilité des matières premières agricoles et de sa déclinaison pour les produits vendus sous marque de distributeurs. C’était attendu ; nous l’avons fait. Cette disposition était essentielle pour assurer à nos agriculteurs une plus juste rémunération de leur travail.
Nous avons aussi su entendre les demandes de la filière des fruits et légumes frais, que nous avons exclue du dispositif du seuil de revente à perte, ce fameux SRP+10, hérité des lois Égalim, qui instaure une marge obligatoire de 10 %. Il était primordial d’agir vite, car les effets néfastes sur la rémunération de ces exploitations étaient réels.
Enfin, nous avons fait un pas en avant non négligeable concernant l’encadrement de l’arme absolue des distributeurs : les pénalités logistiques. Les dérives et les excès étaient connus. Au moindre retard, quelles qu’en soient les raisons, les distributeurs sanctionnaient lourdement les fournisseurs, ce qui pouvait conduire ces derniers à des situations financières dramatiques.
Le plafonnement du montant des pénalités logistiques et le renforcement de leur encadrement sont de véritables victoires pour l’ensemble de ces industriels et de ces exploitations agricoles qui assurent l’approvisionnement des Français au quotidien.
En sus de ces avancées, je me réjouis de voir que la commission mixte paritaire a su trouver un compromis concernant l’encadrement de la période de négociation commerciale annuelle.
En cas d’échec de ces négociations, l’alternative proposée entre l’interruption des livraisons et l’application du préavis de rupture « classique » constitue un consensus à même de rééquilibrer la relation entre distributeurs et fournisseurs.
Il sera de notre responsabilité de dresser le bilan de cette expérimentation et de prendre la bonne décision quant à sa pérennisation. Je sais la qualité du travail réalisé par le groupe de suivi de la loi Égalim. Je suis donc persuadée que celui-ci sera tout aussi efficace pour étudier la mise en œuvre de cette mesure.
Parce que cette proposition de loi est un texte exigeant, qui met en lumière certaines limites du droit en vigueur, et parce qu’elle est le fruit d’un travail de compromis avec l’ensemble des acteurs politiques, économiques et des mondes agricoles et industriels, la majorité des membres du groupe Union Centriste votera en faveur de son adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Henri Cabanel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà un pas de plus en avant !
Nous avons décidé d’appréhender ce texte de façon positive, en ce qu’il est le reflet de plusieurs dispositions proposées par le Sénat. La CMP a été conclusive, et nous devons nous en réjouir, car le contexte de négociations commerciales tendues, dans une période d’inflation galopante, qui induit des efforts communs, nous impose la raison. Mais les efforts sont-ils communs ?
L’inflation, qui fait la une de tous les médias, nous assène des hausses de prix incroyables : 14 % pour l’alimentation et jusqu’à 30 % pour la viande dans certains endroits. Le trimestre du panier anti-inflation a commencé par un constat mitigé de la part des consommateurs, ceux d’entre eux qui vivent dans la précarité ne pouvant acheter les produits dont les tarifs ont pourtant baissé.
Dans cette guerre des prix, les distributeurs s’achètent une conscience tout autant qu’une image en affichant un objectif bienveillant : faire supporter le moins possible au consommateur les conséquences de l’inflation. Mais qui paye ?
On parle d’un financement grâce à la baisse des marges. C’est oublier que la guerre des prix a toujours été à charge pour les producteurs. Et ce sont les agriculteurs, une fois de plus, qui payent la note et subissent une double peine, pris entre l’inflation des prix des matières premières – emballages, carburant, produits phyto, etc. – et une asphyxie à la vente, avec des prix négociés au plus bas. Personne n’est dupe !
Les médias se polarisent sur cette hausse des prix des produits alimentaires, mais le budget d’un foyer n’est-il pas actuellement plus fortement atteint par d’autres postes, tels que l’énergie ou les loyers ?
Cette situation suscite des problèmes quant au modèle d’agriculture verte déterminé par l’Europe. La France, bon élève, en haut du tableau d’honneur, perd en compétitivité : quand le bio, par exemple, se vend au prix du conventionnel, un énorme problème se pose, qu’il faut résoudre rapidement. Certains agriculteurs se désengagent de ces modes de production qui sont plus onéreux et n’offrent aucun débouché à certains produits. Il faut agir très vite !
C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai déjà souligné dans cet hémicycle, il faut revoir la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, la LME, qui a permis à la grande distribution de mutualiser via la mise en place de centrales d’achats. Cette mesure a renforcé la pression sur les agriculteurs. Nous devons y travailler et tirer, a minima, un bilan objectif après quinze ans d’application.
Dans ce contexte commercial tendu, toute mesure positive pour les agriculteurs doit être encouragée et défendue. Mon groupe salue donc plusieurs avancées.
L’article 1er, tout d’abord, rappelle que les dispositions du code de commerce s’appliquent à toute relation contractuelle dès lors que les produits que celle-ci vise sont commercialisés en France. Il s’agit ici de contrer le phénomène d’évasion juridique consistant à délocaliser la négociation contractuelle, afin de la soumettre à des dispositions juridiques plus favorables et moins protectrices des intérêts des agriculteurs français et du fabriqué en France.
L’article 2 prolonge les dispositions de la loi Égalim 1 sur l’encadrement des promotions et le seuil de revente à perte, déjà prolongées une première fois par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi Asap, en 2020.
Le SRP+10 est prorogé jusqu’en 2025, comme l’avait voté le Sénat en première lecture. L’exclusion de la filière des fruits et légumes du dispositif est maintenue, conformément à plusieurs amendements adoptés par le Sénat, notamment celui de ma collègue Nathalie Delattre.
La CMP a conservé la disposition introduite par le Sénat sur la non-négociabilité des matières premières agricoles des produits vendus sous marques de distributeur. C’est à mon sens un acquis important.
Un grand pas est également franchi avec l’expérimentation de rupture des livraisons en cas d’échec des négociations commerciales annuelles entre un fournisseur et un distributeur. Cette mesure répond clairement à un enjeu d’équilibre entre ces deux parties.
Je salue Mme la rapporteure, Anne-Catherine Loisier, qui a déclaré : « Le Parlement est obligé d’intervenir, non pas par plaisir, mais parce que les acteurs se livrent à une partie de “poker menteur” qui se fait souvent au détriment des consommateurs, des agriculteurs et des PME. » Vous avez bien raison, madame la rapporteure, et nous sommes nombreux à partager ce constat.
Toutefois, ne soyons pas trop naïfs, car cela pourrait se retourner contre les agriculteurs français, la concurrence mondiale étant à l’affût. Dans une économie de marché libérale qui se conjugue à un contexte d’inflation exacerbée, les distributeurs achèteront ailleurs. L’article 1er est donc fondamental pour enrayer ce risque.
Bref, la voie est bonne, mais il faut persévérer, car l’un des problèmes majeurs de notre agriculture est le faible revenu. Alors que se profilent le pacte et la loi d’orientation et d’avenir agricoles, le sujet du prix rémunérateur doit être l’un des enjeux primordiaux de notre réflexion.
Au-delà de l’orientation et de la formation nécessaires, de l’installation et de la question primordiale de la transmission ou de l’adaptation obligatoire au changement climatique, il ne faut pas oublier une question essentielle : pour soixante heures de travail hebdomadaires en moyenne, il faut un revenu à la hauteur ! La logique est implacable : il y va de notre souveraineté alimentaire.
Mon groupe votera bien entendu en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains et au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte est effectivement un rendez-vous supplémentaire s’agissant de la mise en marché des productions agricoles.
Comme nous l’avions dit à plusieurs reprises – je parle sous le contrôle de mes collègues de la commission des affaires économiques –, nous savions que la loi Égalim 1 nécessiterait des modifications. Nous en sommes à la troisième modification, et sans doute la quatrième, voire la cinquième, interviendra-t-elle bientôt, mais n’anticipons pas.
En cet instant, je souhaite remercier Mme la rapporteure, car le travail qu’elle a réalisé permet de résoudre un problème absolument considérable. En effet, dans le cadre des produits des marques de distributeur, les MDD, les lois Égalim 1 et Égalim 2 ne concernaient pas 50 % de la mise en marché des matières agricoles. Pis, si on considère la moyenne sur les dix dernières années, nous avions, avant même la loi, une montée en gamme de 2,3 % à 2,5 % par an, en prenant en compte le couplage volume-prix.
En 2022, nous avons assisté à un arrêt historique de la montée en gamme, puisque nous avons connu une diminution de 1,3 %, toujours en tenant compte du couplage volume-prix.
Je le rappelle, les marques prennent à leur charge la recherche et l’innovation, ainsi que tout ce qui concerne les avancées réalisées dans le pays en matière de sécurité alimentaire. Ce sont, en langage cycliste, des « suceurs de roue » : elles utilisent et généralisent ce qui a été fait, si cela fonctionne.
J’y insiste, monsieur le ministre, grâce au travail mené par le Sénat, qui a été repris par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la matière agricole mise sur le marché sera désormais protégé.
Par ailleurs, le sujet du seuil de revente à perte, le SRP+10, est également très important. L’initiative prise à la demande des producteurs de fruits et légumes pourra apporter un espoir supplémentaire à cette filière ô combien importante pour nos territoires !
J’en viens au secteur des DPH, droguerie, parfumerie, hygiène. Nous avons trouvé le moyen de protéger nos entreprises sur nos territoires. Certaines entreprises, très exposées, pouvaient rapidement perdre leur part de marché, compte tenu des exigences demandées. Là encore, sans faiblesse, le Sénat a maintenu sa position, et j’en remercie Mme la rapporteure.
S’agissant de l’article 3, nous avons trouvé un compromis. Mais les travaux que nous avons menés dans le cadre du groupe de suivi du Sénat en témoignent – je remercie à cet égard toute l’équipe de la commission des affaires économiques –, nous devrons sans doute très rapidement revenir sur le sujet.
Toutefois, ce texte est un compromis, et compte tenu de l’importance du sujet MDD, il paraissait essentiel de protéger l’ensemble des productions agricoles.
Bien évidemment, le groupe Les Républicains votera le texte de la commission mixte paritaire, qui est favorable à l’agriculture.
Pour finir, monsieur le ministre, je souhaite vous alerter sur un point. Alors que nous n’avons pas encore voté définitivement cette proposition de loi, M. le ministre de l’économie et des finances affirme d’ores et déjà qu’il faut entrer dans les box de la renégociation pour le mois de mai.
Or, vous le savez, les chiffres présentés par le Sénat n’ont pas été démentis. Concernant la MPA, la matière première agricole, les prix ont été respectés pour ce qui concerne les marques et seront sanctuarisés par les MDD.
Pourtant, nous le savons tous, monsieur le ministre, pour ce qui concerne la MPI, la matière première industrielle, à peine un tiers est appliqué ! S’agissant des négociations commerciales de 2023, nous savons que la situation se répétera à l’identique.
Méfions-nous donc des déclarations trop rapides, qui pourraient mettre en péril les espoirs des agriculteurs, des consommateurs, des distributeurs, ainsi que des diverses entreprises agricoles dans notre territoire, qui est si riche. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est la troisième fois en cinq ans que nous nous penchons sur un texte visant à réglementer les relations entre agriculteurs, producteurs, transformateurs, industriels, fournisseurs et distributeurs.
Si nous y revenons, c’est non pas par coquetterie, mais par nécessité. Depuis le début, la loi Égalim a eu pour objet une meilleure répartition de la valeur sur toute la chaîne. Or nous constatons, comme c’est souvent le cas, un écart entre la théorie et la pratique.
Par ailleurs, il s’agit de métiers évoluant dans le temps et affectés par des phénomènes extérieurs, tels que le contexte international et l’explosion des coûts de l’énergie, sur lesquels l’Europe doit se pencher lors du prochain Conseil européen, même si nous regrettons d’ores et déjà qu’il ne soit pas prévu de remettre en cause l’indexation du prix de l’électricité sur le gaz.
Je pense également à la hausse des matières premières et à l’inflation générale, qui jouent sur les coûts de production, de transformation et de distribution des acteurs de la filière.
Derrière ces questions se pose celle de notre capacité à rester l’une des premières puissances agricoles et celle de notre souveraineté alimentaire, donc le problème central de notre indépendance.
Si la loi Égalim est un sujet très important pour l’agriculture, elle ne constitue pourtant pas la question essentielle. La vraie difficulté, c’est que, à coups de normes, à force de vouloir laver plus blanc que blanc, on a attaché depuis longtemps un boulet aux agriculteurs français.
Monsieur le ministre, nous attendons donc beaucoup de la future loi agricole et de l’engagement pris par le Président de la République au salon de l’agriculture sur le lancement d’un nouveau plan visant à coordonner l’action de la France avec celle de l’Union européenne, avec l’objectif de ne pas pénaliser les agriculteurs français par rapport à leurs voisins, auxquels s’imposent des normes moindres.
Nous saluons les avancées trouvées en commission mixte paritaire, qui reprennent des apports importants du Sénat. Depuis la loi Égalim 1, nous sommes tous animés par le même objectif : faire en sorte que tout le monde y trouve son compte, du fournisseur au consommateur, en passant par le distributeur.
Nous le savons, l’équilibre n’est pas facile à trouver. L’article 2 relatif à l’expérimentation du seuil de revente à perte a fait couler beaucoup d’encre. Et pour cause ! L’efficacité du dispositif n’a toujours pas été prouvée. La prolongation de l’expérimentation nous permettra, nous l’espérons, d’apporter des précisions.
S’agissant de l’exclusion, sur sa demande, de la filière fruits et légumes, nous pensons que tout le monde ou presque sera d’accord pour l’accorder.
L’autre avancée concerne l’exclusion des grossistes du système des pénalités logistiques.
Nul ne conteste l’utilité des pénalités en cas de non-respect des obligations du contrat, qui permet de s’assurer que le distributeur sera bien livré dans les temps et conformément à ce qu’il a commandé. Cependant, des dérives ont été constatées. Les pénalités logistiques semblent être devenues une façon, pour la grande distribution, de compenser des pertes de marge sur certains produits.
Ces dispositions ont donc été revues dans cette proposition de loi. Elles ont d’ailleurs été portées par plusieurs sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires, l’objectif étant d’éviter que les règles des pénalités logistiques n’aillent à l’encontre de la filière et de ses intérêts.
Pour ce qui concerne l’article 3, il fallait régler le vide juridique existant lorsque fournisseurs et distributeurs ne trouvent pas d’accord et empêcher que, dans certains cas, un fournisseur ne puisse livrer à perte contre sa volonté.
Depuis le début, la loi Égalim n’a pas apporté des résultats à la hauteur des espoirs suscités. C’est pourquoi nous y revenons pour proposer des améliorations. À n’en pas douter, nous y reviendrons encore. Nous en sommes à la saison 3 d’Égalim, et ce n’est sûrement pas la dernière de la série !
Même si nombre d’entre nous croient au marché, nous savons qu’il a besoin de règles, d’un cadre et d’un suivi, afin de nous assurer que, dans le prix final du produit payé par le consommateur, chaque acteur soit rémunéré à sa juste valeur.
Monsieur le ministre, je le répète, nous attendons beaucoup de la future loi agricole. Nous sommes à vos côtés pour travailler sur les futurs pacte et loi d’orientation et d’avenir agricoles, en matière de formation, de transmission des exploitations et d’adaptation au changement climatique.
Le groupe Les Indépendants votera donc en faveur de ce texte issu de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Joël Labbé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, l’inflation alimentaire poursuit sa course, avec pour conséquence des difficultés pour les producteurs, les fournisseurs et, bien sûr, un grand nombre de nos concitoyens. Dans ce contexte, nous nous apprêtons à voter une nouvelle loi pour tenter de rééquilibrer les rapports de force au sein de ces relations commerciales.
Jusqu’à aujourd’hui, ces tentatives – je pense aux lois Égalim 1 et 2 – ont toujours abouti, face à une grande distribution toute-puissante, à un revenu agricole indécent et à des difficultés pour de nombreuses PME agroalimentaires. Si le texte que nous allons voter aujourd’hui comporte quelques avancées, on ne peut que douter de son efficacité, comme de celle des textes qui l’ont précédé.
Certes, de petits pas sont effectués pour corriger les déséquilibres du système. Je pense notamment aux mesures sur les MDD, les pénalités logistiques ou la lutte contre les contournements de la loi via les centrales étrangères.
Toutefois, dans un secteur marqué par une forte opacité et des rapports de force violents, l’incertitude sur l’efficacité des mesures et leurs effets de bord éventuels persiste, comme le montre la question du seuil de revente à perte. En effet, si on peut se satisfaire qu’un compromis ait été trouvé, on ne peut qu’espérer une fois de plus qu’il permette un vrai ruissellement pour les agriculteurs.
Pour le groupe écologiste, il faut des mesures bien plus structurantes pour trouver l’équation garantissant à la fois un revenu à nos agriculteurs et une accessibilité à une alimentation durable et de qualité pour tous.
Pour ce qui concerne la première partie de l’équation, sans régulation des marchés, sans clauses miroirs, sans paiements pour services environnementaux, sans une PAC plus juste, sans une promotion du commerce équitable, nous ne parviendrons pas à rémunérer correctement les producteurs.
Nous nous devons de sortir l’alimentation d’une concurrence mondiale délétère, qui est l’une des principales causes de la faiblesse du revenu agricole.
Je voudrais ici évoquer l’accord avec le Mercosur, une nouvelle fois. En effet, pendant que nous votons ce texte, en nous félicitant d’agir pour les agriculteurs, la filière bovine s’inquiète, dans la presse, d’une possible volte-face de la France s’agissant de son engagement de non-ratification de ce traité. Nous devons refuser ces accords de libre-échange, qui auront, nous le savons déjà, bien plus d’impacts négatifs sur le revenu agricole – sans même évoquer les effets délétères sur l’environnement –, que ce texte n’aura d’impacts positifs.
J’en viens maintenant aux consommateurs. Les mesures visant à mieux rémunérer les producteurs doivent s’accompagner de politiques fortes pour un accès à l’alimentation durable et de qualité pour tous, en particulier dans un contexte d’inflation.
Ici encore, les leviers sont connus. Une partie des mesures a même déjà été votée : je veux parler de la loi Égalim 1, qui comportait des engagements, à savoir 20 % de bio et 50 % de local et de qualité dans la restauration collective. Or ce pan de la loi n’est pas appliqué, et cela dans l’indifférence générale.
On peut rappeler également les divers errements du chèque alimentation durable, qui a été voté dans la loi Climat et résilience, puis reporté, abandonné, puis, récemment, annoncé comme possible au niveau départemental. Encore une fois, il règne un trop grand flou autour d’une mesure susceptible de contribuer à concilier débouché rémunérateur et accès à l’alimentation durable. Nous continuons donc de plaider pour une véritable sécurité sociale de l’alimentation.
Sans grand espoir, nous voterons ce texte, dont nous reconnaissons les avancées. Pour autant, nous savons qu’il nous faudra nous remettre à l’ouvrage dans les mois qui viennent. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi qu’au banc des commissions.)