M. Patrick Kanner. C’est flou !
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour la réplique.
M. Jean-Yves Leconte. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Mais s’il y avait une volonté politique, en particulier sur l’intégration par le travail, vous auriez commencé depuis 2017, ou au moins 2022, à faire ce que vous pouviez faire. Commencez maintenant !
Il n’est nul besoin de modifications législatives pour prendre un certain nombre de mesures, que ce soit sur la liste des métiers en tension ou l’admission exceptionnelle au séjour. Allez-y : montrez-nous que vous avez sur ce sujet une volonté politique, que vous ne vous en tenez pas simplement à des paroles ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
épreuves de médecine annulées
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Antoine Lefèvre. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Monsieur le ministre, le 13 mars dernier, les 10 000 étudiants en sixième année de médecine étaient appelés à passer en centre d’examen des épreuves blanches en prévision du concours d’entrée à l’internat, prévu en juin prochain.
Organisées par le Centre national de gestion, qui dépend de la tutelle de votre ministère, les épreuves ont vite tourné au fiasco : bugs à répétition, impossibilité de valider les réponses, ralentissements, problèmes d’affichage, voire carrément déconnexion en cours d’épreuve.
À tout juste trois mois des véritables épreuves classantes nationales, décisives pour le choix de la spécialité et du lieu d’exercice, ce coup d’essai constituait pourtant une occasion privilégiée pour les étudiants de se situer par rapport au niveau national et de tester les conditions qui les attendent.
En outre, le concours répondait à de nouvelles règles d’organisation, suivant une méthodologie inédite. Les étudiants ne disposaient donc pas d’annales des examens précédents ni de supports pour s’entraîner.
Les réponses du Centre national de gestion sont tout aussi lunaires. Plutôt que d’assumer la responsabilité d’un dysfonctionnement du système informatique, le centre préfère minimiser le problème et invoque une « incompréhension sémantique », suggérant que les épreuves auraient été non pas un véritable concours blanc, mais bien un simple test pour vérifier la performance du logiciel. On croit rêver !
L’Association nationale des étudiants en médecine de France demande que de nouvelles épreuves blanches soient organisées dans les meilleurs délais, sur une plateforme fiable et opérationnelle.
À trois mois des épreuves de classement national, qui détermineront toute la carrière de nos futurs médecins, allez-vous enfin mener une politique ambitieuse d’investissement dans les moyens mis à disposition de nos étudiants ? Pouvez-vous garantir la totale fiabilité du support numérique des épreuves d’ici au mois de juin ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le sénateur Lefèvre, heureusement que cette panne a eu lieu le 13 mars dernier ! Comme vous l’avez dit, il s’agissait d’une épreuve blanche, à l’issue de laquelle les étudiants n’étaient de toute façon pas classés, leurs réponses n’étant pas évaluées. Cette épreuve blanche était bien destinée à tester la nouvelle plateforme informatique, qui répond aux évolutions du deuxième cycle des études médicales.
Cette épreuve a été interrompue. Elle a fonctionné pour 85 % des étudiants. Les autres n’ont pas réussi à valider leurs résultats. Des corrections ont donc été apportées et, le lendemain, 97 % des bugs étaient corrigés. Comme nous n’avions pas atteint les 100 % qui auraient permis de valider la plateforme de test, nous avons préféré reporter le deuxième passage de cette épreuve blanche. Je redis que les étudiants n’auraient de toute façon pas obtenu les résultats de cette épreuve, qui n’aurait pas donné lieu à un classement. Il ne s’agissait que d’un test technique.
La deuxième partie, qui devait se tenir le 15 mars, a été annulée. Bien entendu, le Centre national de gestion s’est attelé à la correction de l’ensemble des difficultés. Une nouvelle épreuve blanche se déroulera à la fin du mois d’avril ou au début du mois de mai, afin que tout fonctionne parfaitement au mois de juin.
Cette épreuve est en effet primordiale pour les étudiants en médecine, puisqu’elle préjuge de leur avenir professionnel et du choix de leur spécialité.
Comme lors de tous les tests, nous avons constaté des difficultés, qui sont corrigées. Un nouveau test aura lieu avant que cette plateforme ne soit totalement opérationnelle en juin.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.
M. Antoine Lefèvre. Nos étudiants en médecine ont connu beaucoup de déconvenues : des confinements à répétition, des enseignements à distance et du stress. Ils méritent davantage de considération.
La France a un besoin urgent de nouveaux médecins, tout le monde le sait, particulièrement ici au Sénat. Nous devons donc tout faire pour mettre toutes les chances de réussite de leur côté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Valérie Létard applaudit également.)
vague de démissions des élus municipaux
M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jacques Le Nay. Ma question s’adresse à Mme la Première ministre. « Ce que les élus ne supportent plus, c’est de servir de défouloir. » Ces mots ont été prononcés par le président de l’association des maires du Morbihan lors de la présentation du nombre de démissions intervenues depuis trois ans.
La situation est inédite dans le département : quatre élus municipaux démissionnent chaque semaine depuis 2020. Le mandat local n’attire plus.
Le Morbihan n’est pas une exception : en Loire-Atlantique, un élu local démissionne chaque jour. Et nous savons que le phénomène est national.
Plusieurs facteurs concourent à ces désengagements. Les élus subissent des violences de toute nature : physiques, verbales, via les réseaux sociaux… Et, trop souvent, les plaintes sont classées sans suite.
Les élus sont résignés et exaspérés. L’empilement des normes et la lourdeur administrative découragent les bonnes volontés. Même les plus motivés ont du mal à concilier leur vie professionnelle avec l’exercice d’un mandat chronophage et mal indemnisé.
Enfin, les compétences propres du maire se sont réduites. Alors que l’urbanisme constitue un ultime élément d’attractivité de la fonction, l’objectif du zéro artificialisation nette complexifie leur mission. C’est un dernier coup de massue sur un engagement déjà mal en point.
Au-delà de cette vague de démissions, la question se pose de la capacité même à maintenir un fonctionnement régulier des collectivités territoriales et à pourvoir aux fonctions d’élu.
Madame la Première ministre, comment comptez-vous redonner des moyens et du sens au mandat de maire et, plus généralement, à celui d’élu local ? Ceux-ci sont les premiers remparts et les garants de notre démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Jacques Le Nay, vous avez raison de souligner que la France a un besoin absolument vital de l’engagement de ses élus locaux. Sans leur action déterminée, il n’y aurait pas de vie communale, départementale, régionale. Les Français le savent.
Ce qui fonde l’engagement des élus locaux, ce n’est certainement pas l’appât du gain ou la gloriole, mais la volonté de se mettre au service des autres. Et ce n’est pas peu dire qu’il est difficile d’être élu local !
Qui se réveille à cinq heures du matin quand la neige est tombée un peu trop fort pendant la nuit et que les routes sont encombrées ? Le maire ! Qui doit intervenir lorsque des conflits de voisinage peuvent dégénérer ? Le maire ! Qui est pris entre les injonctions contradictoires de normes imposées depuis Paris, mais difficiles à appliquer sur le territoire ? Les maires !
La moindre des choses est d’offrir aux élus locaux la protection qu’ils méritent. Dans une France où l’on constate jour après jour la montée de la violence sur les réseaux sociaux, de la violence verbale – parfois jusque dans les hémicycles du Parlement –, voire de la violence physique, il était indispensable d’agir.
En 2019, nous avons donc renforcé le régime de protection des élus, qui s’apparente désormais à la protection fonctionnelle applicable aux agents publics, notamment lorsqu’un élu fait l’objet de poursuites pour des fautes qui sont détachables de ses fonctions ou lorsqu’il est victime de violences ou d’outrages « à l’occasion ou du fait de ses fonctions ».
Cette protection peut également être accordée, à leur demande, aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus qui seraient décédés dans l’exercice ou du fait de leurs fonctions, à raison des faits à l’origine de ce décès.
Le financement de cette mesure n’est pas très lourd. La loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite loi Lecornu, a créé l’obligation de souscrire une garantie qui permet de couvrir aussi le conseil juridique, l’assistance psychologique et les coûts qui résultent de l’obligation pour les communes d’assurer la protection fonctionnelle des membres du conseil municipal. Ce dispositif rend plus effective et moins risquée la mise en œuvre de la protection fonctionnelle par les communes.
À cela il convient d’ajouter la proposition de loi déposée par Nathalie Delattre. Enfin, ma collègue Dominique Faure pourrait aussi vous expliquer que nous allons créer une cellule d’analyse des atteintes aux élus locaux et de lutte contre ces phénomènes au sein du ministère de l’intérieur.
M. le président. Il faut conclure !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Croyez en notre détermination pour avancer en la matière. Et nous avancerons avec vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour la réplique.
M. Jacques Le Nay. Si rien n’est fait, cette situation contribuera à la crise profonde que connaissent nos institutions. Ne l’oublions pas, le maire est le représentant de l’État dans sa commune. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
situation dans le haut-karabagh
M. le président. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Pemezec. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la terre d’Arménie brûle et nous regardons ailleurs. Depuis l’automne 2020, l’Arménie est en état de siège, après l’invasion de l’enclave arménienne de l’Artsakh par l’armée d’Azerbaïdjan, soutenue par la Turquie, qui s’en sert comme avant-garde pour poursuivre et achever l’éradication du peuple arménien entamée en 1915.
Alors que la guerre civile a déjà fait 5 000 morts et 15 000 blessés en trois ans, on assiste aujourd’hui à un véritable blocus orchestré par l’Azerbaïdjan pour empêcher les vivres et les médicaments d’arriver jusque dans l’enclave arménienne.
Les seuls qui aient droit de passage sont les Arméniens qui fuient la guerre, la famine et la misère, mais ils n’ont droit qu’à un aller simple, l’Azerbaïdjan comptant sur le départ des 120 000 Arméniens restants pour établir définitivement son joug sur ce territoire.
Il ne s’agit là que d’une première étape pour rayer de la carte cette terre chrétienne qu’est l’Arménie, la plus ancienne du monde, aujourd’hui encerclée par l’expansion musulmane.
Depuis nos villes des Hauts-de-Seine, qui accueillent une forte communauté d’origine arménienne, nous envoyons des vivres, des médicaments, et aussi des médecins, en partenariat avec l’association Lumière Française. Ainsi, nous essayons de forcer le blocus.
Mais qu’attend le Gouvernement, au-delà des messages d’amitié, pour demander le respect des règles internationales et du droit des peuples ?
L’Arménie, ce petit pays, porte les mêmes valeurs que les nôtres. C’est vrai que l’Arménie, ce n’est pas l’Ukraine, et qu’on n’y trouve ni pétrole ni gaz, contrairement à l’Azerbaïdjan. L’Arménie n’a rien, hormis sa foi et son courage.
Ma question, madame la ministre, est donc la suivante : la France est-elle prête à mobiliser, pour défendre en Arménie un peuple ami qui est en train de mourir, les mêmes moyens diplomatiques, voire militaires, qu’elle a mis en œuvre en Ukraine ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Merci de votre question, monsieur le sénateur Pemezec, qui me permet de rappeler que, depuis le premier jour, c’est-à-dire depuis le 12 décembre, la France dénonce le blocage du corridor de Latchine par l’Azerbaïdjan et ses conséquences économiques et humanitaires.
En effet, depuis cette date, la population ne peut plus circuler librement. Les vivres arrivent de façon parcimonieuse, grâce au Comité international de la Croix-Rouge, que la France aide, monsieur le sénateur, tout comme ses partenaires de l’Union européenne.
Cette situation ne peut plus durer. La libre circulation doit être rétablie sans tarder et l’approvisionnement des populations du Haut-Karabagh doit être mieux assuré, d’abord parce que c’est le droit – la Cour internationale de justice s’est prononcée par référé il y a quelques semaines –, ensuite parce que ce blocage alimente les tensions et éloigne les perspectives d’un règlement politique, qui est le seul possible.
C’est un accord de paix que nous recherchons, et que l’Arménie recherche, monsieur le sénateur, avec son voisin. Je prévois de me rendre à Bakou et à Erevan dans le courant du mois d’avril pour porter ce message et rappeler la nécessité d’une solution politique.
J’y rappellerai également la nécessité de respecter le cessez-le-feu auquel les deux parties se sont engagées et je soulignerai combien les menaces d’emploi de la force sont inacceptables.
Je le redis, monsieur le sénateur : nous sommes déterminés, je suis déterminée. La France agit, elle ne regarde pas ailleurs ; elle ne parle pas, mais elle agit !
projet de fusion de l’autorité de sûreté nucléaire et de l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Angèle Préville. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l’aube du lancement d’un grand programme nucléaire dans notre pays, le Gouvernement a proposé, par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, la fusion de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), ou plutôt l’absorption de l’IRSN par l’ASN.
Ce projet de loi, qui prévoit tout un panel de mécanismes dits d’accélération, avait déjà été examiné au Sénat, mais sans cet amendement.
Quelle drôle d’idée, quand on a un parc vieillissant qui nécessite toute notre attention et quand on lance un programme très ambitieux de huit ou quatorze nouveaux réacteurs, voire plus encore !
Fort heureusement, les députés, plus raisonnables, ont rejeté cette fusion.
Dois-je rappeler que nous ne sommes à l’abri de rien ? Dans le pays le plus nucléarisé au monde, nous pouvons remercier tous les jours notre sûreté pour n’avoir connu, jusqu’ici, aucun accident nucléaire.
L’IRSN est indépendant. Il exerce des fonctions d’expertise et de recherche, qu’il fournit à l’ASN. C’est l’ASN, en tant qu’autorité, qui prend les décisions. C’est basique, c’est efficace et c’est une nécessité absolue.
Pourquoi casser ce qui fonctionne ? Pourquoi créer de la confusion, voire du désordre ? Les salariés de l’IRSN sont d’ailleurs sous le choc, KO debout. Sur quelle étude d’impact repose ce choix ?
L’arrêt de quatre réacteurs à l’automne, à la suite de la détection de problèmes de corrosion sous contrainte, qui ont conduit à agiter le spectre du blackout, a-t-il agacé ? A-t-il provoqué l’ire de certains, pour qui « la sûreté, ça suffit comme ça ! » ?
Nous sommes au printemps et il n’y a pas eu de blackout, mais de nouvelles corrosions ont depuis été découvertes. La réalité est que nous avons plus que jamais besoin d’organismes robustes, qui ont largement fait leurs preuves et qui sont même reconnus internationalement.
En matière de nucléaire, notre boussole doit être cette aiguë conscience des périls dont parle Edgar Morin.
Votre volonté d’effacement de l’IRSN a été sèchement rejetée par l’Assemblée nationale. Non seulement elle est malvenue, mais elle est dangereuse.
On se doute – ce n’est pas dans l’ADN de ce gouvernement – que vous n’allez pas lâcher prise, madame la ministre. Or, sur ce sujet comme sur les autres, gouverner, est-ce s’entêter ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition énergétique.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique. Madame la sénatrice Préville, en matière énergétique, le Président de la République a un objectif ambitieux : faire de la France le premier grand pays à sortir des énergies fossiles et à reprendre en main son destin énergétique.
C’est dans ce contexte que le Gouvernement travaille à un programme nucléaire de six nouveaux EPR 2 et à la mise à l’étude de huit réacteurs supplémentaires.
C’est un projet pour notre indépendance énergétique ; c’est un projet pour la planète ; c’est un projet qui doit aussi nous permettre de reprendre le fil de la plus grande aventure industrielle française depuis les années 1970.
Le conseil de politique nucléaire du 3 février dernier, qui s’est tenu sous l’égide du Président de la République et de la Première ministre, a mis à jour la feuille de route pour mobiliser tous les maillons de notre filière nucléaire.
C’est dans ce contexte que le Gouvernement a décidé le renforcement – le renforcement ! – de notre sûreté nucléaire en avançant sur le rapprochement de l’ASN et de l’IRSN.
De quoi s’agit-il ? Très simplement, il est proposé d’élargir les missions de l’Autorité de sûreté nucléaire, en s’inspirant des modèles éprouvés des autorités de sûreté du Canada ou encore des États-Unis, en rapprochant la décision et le contrôle des missions d’expertise et de recherche. (Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Émilienne Poumirol s’exclament.)
Il s’agit donc, au fond, de réunir sous la même bannière et sous le statut le plus indépendant qui soit, celui d’autorité administrative indépendante – c’est le statut de l’ASN –, des services qui concourent à la même mission de service public.
Au terme de cette réforme, l’Autorité de sûreté nucléaire – ou cette composition ASN-IRSN – deviendrait la deuxième autorité de sûreté du monde, au regard de ses moyens humains et financiers. Sa crédibilité scientifique serait en outre renforcée.
Nous sommes donc bien loin des fantasmes et des modèles que vous évoquez. (Mme Laurence Rossignol et M. Pierre Laurent protestent.)
Le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, adopté hier à une large majorité par l’Assemblée nationale, prévoit entre autres la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport explicitant les modalités de mise en œuvre de cette réforme et l’avis de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst).
M. le président. Il faut conclure !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Mon collègue Franck Riester et moi-même ne manquerons pas de vous solliciter, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les modalités selon lesquelles le Sénat souhaite être associé à cette réforme.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Nous avancerons dans la concertation. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Franck Montaugé proteste.)
visa consulaire pour les algériens
M. le président. La parole est à M. Damien Regnard, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Damien Regnard. Madame la ministre, après la visite en Algérie du président Macron en août 2022, suivie de la visite de la Première ministre accompagnée de seize de ses ministres, après la visite de M. Darmanin en décembre 2022, qui nous a expliqué à son retour que tout allait bien et qui a supprimé la réduction de 50 % du nombre de visas délivrés aux Algériens par la France, il semble que nous ayons tout lâché. Mais pour quel résultat ?
Les délivrances de laissez-passer consulaires vers l’Algérie pour les personnes faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) étaient déjà extrêmement faibles, inférieures à 1 %.
Après le rappel de son ambassadeur en France le 8 février 2023, l’Algérie a annoncé que ses dix-huit consulats présents sur notre territoire ne délivreraient sine die plus un seul laissez-passer consulaire et menacé de suspendre la délivrance des visas pour les Français souhaitant se rendre en Algérie.
Je t’aime moi, non plus !
Où en sommes-nous, madame la ministre, de la main tendue et de cette repentance incessante envers l’Algérie ? Où sont les résultats ?
La réforme de votre ministère, qui écarte des diplomates chevronnés, véritables négociateurs et bâtisseurs de ponts entre nos pays respectifs, commence à faire vaciller tout un édifice.
À quand des mesures fortes pour une France forte et respectée ?
Des mesures de rétorsion existent pourtant. Elles sont simples : suspendre la délivrance des visas aux Algériens souhaitant se rendre en France. Parallélisme des formes et égalité de traitement, ni plus ni moins ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, depuis la visite d’amitié du Président de la République les 25, 26 et 27 août 2022, nous avons engagé avec l’Algérie une dynamique ambitieuse. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
Cette visite a été suivie de la tenue de la cinquième session du Comité intergouvernemental de haut niveau franco-algérien, sous l’autorité de Mme la Première ministre et de son homologue algérien, les 9 et 10 octobre 2022.
Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le ministre de l’intérieur s’est ensuite rendu en Algérie le 17 décembre dernier.
J’ajouterai enfin – vous l’avez oubliée – la visite en France du chef d’état-major de l’armée algérienne, une première depuis bien longtemps.
M. Philippe Tabarot. Génial !
Mme Catherine Colonna, ministre. Monsieur le sénateur, il faut éviter de tomber dans le piège de ceux qui souhaitent faire échouer notre ambition. (M. Damien Regnard proteste.) Ce n’est pas votre vœu, j’en suis sûre.
Nous continuerons de travailler avec les autorités algériennes à la levée des difficultés constatées, car l’approfondissement de notre relation est dans l’intérêt de nos deux pays.
C’est dans cet esprit que la France traite notamment la question de la migration entre l’Algérie et la France. La coopération entre nos deux pays porte sur la délivrance des visas – un groupe de travail conjoint doit favoriser les mobilités, notamment entre les jeunes professionnels –, mais également, pour que cette coopération soit cohérente, sur le retour en Algérie des Algériens en situation irrégulière, comme le droit le commande.
Ce dossier fait partie de nos priorités immédiates. Nous y travaillons, notamment avec le président Tebboune, dont je suis sûre, monsieur le sénateur, que vous aurez noté avec intérêt les dernières déclarations. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Damien Regnard, pour la réplique.
M. Damien Regnard. Si la visite du président algérien Tebboune en France au mois de mai prochain est confirmée, il sera toujours temps de remettre le sujet sur la table avec fermeté.
Enfin, je pense opportun de rappeler que la naïveté peut être considérée comme de la faiblesse. Non, madame la ministre, nous ne voulons pas d’une France qui se couche. Nous voulons une France qui se fasse respecter ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
prix de l’essence
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, madame la Première ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adressait à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, mais il est parti…
En mars 2022, le prix du baril de Brent oscillait entre 115 et 130 dollars, tandis que le prix à la pompe était élevé : le prix du litre de gazole était de 2,11 euros et celui d’un litre d’essence sans plomb de 2,06 euros en moyenne.
Douze mois plus tard, alors que le prix du baril de pétrole n’a jamais été aussi bas depuis quinze mois – il est de 75 dollars – et alors que l’euro remonte, le prix des carburants ne baisse pourtant quasiment pas, ou très peu.
M. Vincent Segouin. C’est vrai !
M. Pierre-Antoine Levi. Ces derniers jours, les prix à la pompe étaient toujours très élevés pour les automobilistes : le litre de gazole était à 1,82 euro et le litre d’essence sans plomb à 1,97 euro en moyenne.
Nul besoin d’être prix Nobel d’économie pour se rendre compte que lorsque le prix du baril est en hausse, les prix à la pompe augmentent très fortement, mais que lorsque le prix du baril baisse significativement, les prix à la pompe ne diminuent que très peu.
Monsieur le ministre, il est d’usage de faire des comparaisons avec nos voisins européens. Aussi, je me suis permis d’observer la situation dans quelques pays : en Allemagne, le sans plomb 95 est à 1,76 euro et le gazole à 1,73 euro ; en Belgique, ces prix sont respectivement de 1,65 euro et de 1,70 euro ; en Espagne, enfin, ils sont de 1,62 euro pour le sans plomb 95 et de 1,55 euro pour le gazole.
Comparaison n’est pas raison certes, mais comprenez que dans le contexte actuel de tensions économiques, sociales et maintenant politiques, nos concitoyens ont l’impression de ne pas payer le juste prix.
Nos concitoyens, c’est évident, ne réclament pas un nouveau chèque carburant ; ce qu’ils veulent, c’est une véritable baisse des prix à la pompe.
Monsieur le ministre, j’ai conscience que le prix des carburants est un mécanisme complexe. Il est temps cependant que les prix soient transparents et enfin cohérents avec les variations du prix du baril.
Ma question est donc la suivante : que compte faire le Gouvernement, à très court terme, pour que les prix à la pompe reflètent enfin de manière plus visible les cours du marché du pétrole ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)