M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, auteure de la question n° 642, adressée à Mme la ministre de la transition énergétique.
Mme Kristina Pluchet. Madame la ministre, au début du mois de mars, le Gouvernement a lancé auprès des fédérations professionnelles concernées une consultation pour modifier l’arrêté qui fixe les conditions d’obtention du label basse consommation – je fais référence ici aux dispositifs liés à MaPrimeRénov’.
Est ainsi envisagée l’exclusion des « chaudières alimentées majoritairement par des combustibles fossiles ». Nous ne sommes pas naïfs : il s’agit là d’une première mesure allant dans le sens du projet de règlement de la Commission européenne, qui souhaite interdire dès 2029 toutes les chaudières, y compris celles qui sont compatibles avec des biocombustibles, alors même que les parlementaires européens sont parvenus à un compromis pour les autoriser.
Or les parlementaires français vont devoir se saisir de la stratégie française sur l’énergie et le climat avec deux échéances majeures en 2023 et en 2024.
Ces orientations sont donc, vous en conviendrez, éminemment questionnables. Le Gouvernement semble procéder à des orientations énergétiques stratégiques par voie réglementaire, en amont du législateur.
Madame la ministre, sur cette question épineuse au sujet de laquelle le Gouvernement a été plusieurs fois interrogé, j’ai lu vos arguments, vos chiffres, vos promesses de concertation, mais j’aimerais une fois pour toutes que vous nous expliquiez sur quelles études précises vous vous fondez pour envisager d’exclure tout un vecteur énergétique de chauffage qui remplira pourtant des critères très intéressants de performance.
Quels sont les résultats de l’étude d’impact économique que vous avez bien évidemment menée pour envisager une mesure d’une telle envergure ?
Compte tenu des lourdes conséquences financières pour les ménages français, il serait dommage que l’on s’aperçoive a posteriori que tout cela repose sur des projections dogmatiques et incomplètes, comme d’autres décisions énergétiques passées.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Pluchet, il n’y a, à ce jour, pas d’interdiction d’installation de chaudières au gaz dans les logements existants. Depuis le début de l’année 2022, la réglementation environnementale RE2020 impose le recours à une part importante d’énergie décarbonée pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire dans les logements neufs.
S’agissant du biogaz, énergie décarbonée qui n’est pas utilisée seulement dans le secteur des bâtiments, son développement doit être encouragé. Je rappelle néanmoins les ordres de grandeur en jeu : nous avons consommé 480 térawattheures de gaz en 2021 et nous avons actuellement une capacité d’injection dans le réseau de seulement 10 térawattheures de biogaz, avec un gisement global de biomasse qui restera limité et fortement sollicité par ailleurs.
Les tarifs d’achat du biogaz injecté dans les réseaux seront bientôt revalorisés et accompagnés de plusieurs mesures de simplification et de flexibilisation. Le dispositif des certificats de production de biométhane introduit par la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets de 2021, dite loi Climat et résilience, obligera progressivement les fournisseurs à augmenter la part de biométhane incorporée.
Réduire notre consommation globale de gaz n’est donc pas incompatible avec un développement fort du biogaz, au service des secteurs et pour le cas où les alternatives au gaz sont limitées. Nous devons faire les deux afin de sortir au plus vite des énergies fossiles, décarboner notre économie et renforcer notre souveraineté énergétique.
Enfin, concernant une éventuelle interdiction progressive de la vente de chaudières à gaz neuves, une telle décision ne pourrait s’envisager qu’après une concertation large et documentée avec les parties prenantes, et dimensionnée précisément en tenant compte de l’ensemble des enjeux techniques et économiques associés. Il importe de ne laisser aucun ménage dans l’impasse et de donner suffisamment de visibilité aux professionnels.
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour la réplique.
Mme Kristina Pluchet. Madame la ministre, vous n’avez pas tout à fait répondu à ma question. Il importe, selon moi, de tirer la leçon de ce qui s’est produit l’hiver dernier. Soyez pragmatique, le mix énergétique est toujours plus prudent !
création d’un budget opérationnel de programme en normandie
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 673, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Agnès Canayer. Madame la ministre, pendant près de cinquante ans, l’administration française aimait tellement la Normandie qu’elle en avait créé deux. Depuis 2015, la Normandie est réunifiée au bénéfice de sa rationalité et de sa performance.
Pourtant, ce rapprochement naturel demeure inabouti. En effet, l’organisation de la justice en Normandie est tout sauf normande. Elle est tantôt nordique, tantôt bretonne !
Ainsi, l’unité opérationnelle (UO) de Rouen est rattachée au budget opérationnel de programme (BOP) Grand Nord, géré par la cour d’appel de Douai, quand celle de Caen dépend du BOP Grand Ouest, relevant de la cour d’appel de Rennes.
Cette organisation subordonne la cour d’appel de Rouen à quatre cours d’appel selon les thématiques, entraînant de graves conséquences sur le pilotage de la justice en Normandie. Cette situation amenuise l’efficacité judiciaire, voire l’entrave.
Cet état de fait illustre parfaitement les conclusions du rapport des états généraux de la justice, lequel pointait « la discordance entre les cartes administratives et judiciaires au niveau régional ».
La création d’un BOP normand est indispensable pour assurer l’efficacité de l’action de la justice à l’échelon régional tout en étant en cohérence avec le schéma territorial de toutes les autres administrations de l’État.
Les acteurs normands demandent de la cohérence territoriale. Quelles sont les intentions du Gouvernement quant à la création d’un BOP normand ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Canayer, comme vous le savez, le Gouvernement et le garde des sceaux sont très attachés à la proximité de l’institution judiciaire avec les territoires.
Le garde des sceaux connaît à la fois votre engagement pour votre territoire, mais également pour la justice de notre pays.
Cette question d’organisation budgétaire et comptable revêt une importance toute particulière à l’heure où il s’apprête à présenter la loi de programmation pour la justice. En effet, ces 7,5 millions d’euros supplémentaires sur cinq ans que M. le garde des sceaux vous propose d’accorder aux tribunaux et à l’administration pénitentiaire ont une évidente contrepartie : celle de la bonne gestion.
La question que vous soulevez est donc en lien direct avec la transformation majeure que le garde des sceaux porte pour la justice. L’une des clés du succès est bien celle de la réorganisation des services administratifs déconcentrés de l’administration judiciaire.
C’est la raison pour laquelle le garde des sceaux a demandé à l’administration de mettre en place une grande opération de déconcentration au 1er janvier 2024. Aujourd’hui, nous sommes encore en train d’envisager toutes les hypothèses pour bâtir un projet cohérent. Vous comprendrez que nous ne pouvons donner une réponse ferme sur une cour d’appel alors que nous souhaitons penser une solution plus globale.
Toutefois, le garde des sceaux conserve en mémoire votre proposition particulièrement bien étayée. Il vous suggère d’en discuter prochainement avec lui à la Chancellerie afin d’avancer sur des propositions concrètes.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.
Mme Agnès Canayer. M. le garde des sceaux me fait une réponse de Normand (Sourires.), qui ne satisfait en rien la Normandie !
Nous connaissons bien les intentions de M. le garde des sceaux à propos de la justice, mais je tenais ce matin à attirer particulièrement son attention sur l’enjeu pour la Normandie d’une telle réorganisation, dont nous ignorons les contours exacts.
conditions d’éligibilité aux aides relatives au statut de calamités agricoles sécheresse
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 607, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Max Brisson. Madame la ministre, face au sévère épisode de sécheresse de 2022, l’état de calamité agricole a été reconnu dans les Pyrénées-Atlantiques.
Oui, le Gouvernement a pris la mesure de la gravité de la situation, en diligentant un assouplissement des critères d’éligibilité, dont un abaissement de 13 % à 11 % du taux de pertes sur le produit brut.
Depuis le 16 janvier, les paysans basques et béarnais peuvent faire leur déclaration pour toucher l’indemnité compensatoire qui leur revient.
Toutefois, près de 33 % des demandes déposées sur l’ensemble du département ont été rejetées, soit un éleveur sur trois exclu du dispositif. Et pour cause : celui-ci n’est pas adapté aux spécificités des exploitations d’élevages du département.
En effet, les fermes y ont une surface moyenne d’environ 30 hectares, surface relativement faible en comparaison des moyennes nationales, mais elles supportent, grâce à la transhumance en montagne, des cheptels considérables pour leur permettre de dégager un revenu.
Cette singularité, qui permet de placer le département sur le podium des installations de jeunes agriculteurs, est toutefois difficilement prise en compte dans les différentes mesures d’aides conjoncturelles mises en place.
Les remontées du terrain indiquent que le seuil de 11 % de perte de produit brut est trop excluant.
Madame la ministre, pour répondre au désarroi des éleveurs, le Gouvernement est-il enclin à proposer de nouveaux critères d’éligibilité aux aides ?
Accepterait-il au moins de fixer un nouveau seuil de pertes à 8 %, conformément à la motion formulée par la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Brisson, depuis le début de l’été 2022, le Gouvernement s’est pleinement mobilisé face à l’épisode inédit de sécheresse.
Pour le régime des calamités agricoles, nous avons prévu une accélération exceptionnelle de la procédure au profit des éleveurs les plus affectés. Plus de quatre mois ont ainsi été gagnés.
Nous avons également pris la décision exceptionnelle de relever le taux d’indemnisation de 28 % à 35 %.
S’agissant du département des Pyrénées-Atlantiques, le comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) du 9 décembre a émis un avis favorable sur la reconnaissance du département en calamités agricoles pour les pertes subies à la suite de la sécheresse sur fourrages.
Le CNGRA du 15 mars 2023 a aussi émis un avis favorable concernant des pertes de fonds sur plants de cultures pérennes sur l’ensemble du département.
J’ai néanmoins conscience que ni l’accélération du calendrier ni le relèvement exceptionnel du taux d’indemnisation ne bénéficient aux agriculteurs qui ne sont pas éligibles aux calamités, notamment ceux qui n’atteignent pas le seuil de 11 % de pertes globales.
Il convient de rappeler que ce seuil a déjà fait l’objet d’un abaissement, à titre exceptionnel, dans le cadre de la sécheresse de 2022.
Le Gouvernement est conscient du fait que le département des Pyrénées-Atlantiques n’a pas été concerné par les sécheresses ces années passées et que le dispositif des calamités agricoles sur fourrages, complexe à déployer, n’est pas un outil habituel dans le département.
Aussi, Marc Fesneau a demandé aux services de la direction départementale des territoires (DDT), avec l’appui des équipes du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, de réaliser un travail approfondi de vérification des paramètres de cette calamité.
Un travail d’analyse des dossiers inéligibles et de vérification d’erreurs de déclaration ou de saisie a été mené. Ce critère n’existe plus dans le nouveau système d’assurance récolte, en vigueur depuis le 1er janvier 2023.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Madame la ministre, un tiers des dossiers sont actuellement rejetés. Les éleveurs du département lancent un véritable cri de détresse. Ils ont d’ailleurs alerté le ministre Marc Fesneau lorsqu’il est venu dans les Pyrénées-Atlantiques.
Certaines exploitations sont aujourd’hui en danger. La courbe des installations, qui connaissait une dynamique positive, est en train de s’inverser. Les critères mis en place ne répondent pas à la réalité du département, avec une économie de montagne et de transhumance particulièrement performante. Je demande de nouveau au Gouvernement d’examiner de près la situation des éleveurs de la montagne pyrénéenne.
rôle et moyens de l’agence française anticorruption
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 606, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la situation de l’Agence française anticorruption.
Cette agence, créée par la loi du 9 décembre 2016, devait répondre notamment aux critiques de l’OCDE, qui pointait « la faible réactivité des autorités françaises » et « la faiblesse des moyens affectés aux enquêtes » dans la lutte contre la corruption.
Or, depuis juillet 2022, les six personnalités qui composent la commission des sanctions pouvant être saisie par l’agence ont cessé leurs fonctions et leurs successeurs n’ont pas encore été nommés à ce jour.
De plus, le magistrat qui dirigeait l’Agence française anticorruption vient de terminer son mandat et la direction est donc vacante.
Enfin, une circulaire dédiée au traitement des atteintes à la probité, annoncée en septembre 2022 et qui devait être adressée début 2023, se fait également attendre.
Quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il prendre afin que cette agence, dont le rôle est essentiel, ait les moyens d’assumer sa mission ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Sueur, l’Agence française anticorruption, l’AFA, joue un rôle essentiel, qui est pleinement reconnu et encouragé par le gouvernement français.
Dans son rapport de 2021, l’OCDE soulignait que la France avait entrepris des réformes de première importance pour lutter efficacement contre la corruption.
Si l’AFA comptait 36 agents à sa création en 2017, elle en dénombre 50 depuis décembre 2022. Par ailleurs, 5 créations d’emplois supplémentaires ont été arbitrées sur la trajectoire 2023-2024 afin de multiplier les contrôles liés à la Coupe du monde de rugby en 2023 et aux jeux Olympiques de 2024, de renforcer les contrôles des sociétés publiques locales, des entreprises étrangères opérant en France, ainsi que les contrôles de suite sur les acteurs publics et sur les entreprises. La dotation globale de l’AFA pour ses dépenses d’expertise est maintenue à un haut niveau, à savoir 350 000 euros annuels pour les années 2023 à 2027. À cette somme s’ajoutent les avances de frais d’expertise des conventions judiciaires d’intérêt public (CJIP) qui peuvent représenter de 2 millions à 3 millions d’euros par an.
Le décret portant nomination de membres de la commission des sanctions a été publié le 17 avril 2023 et la nomination d’un nouveau directeur de l’agence est en cours.
Le Gouvernement est particulièrement soucieux de préserver à un haut niveau les moyens alloués à l’AFA et de les faire évoluer en lien avec les nécessités inhérentes à la poursuite de ses missions.
Par ailleurs, une circulaire portant sur les relations entre l’autorité judiciaire et les juridictions financières sera très prochainement diffusée afin d’améliorer la détection de ces infractions et les moyens permettant de favoriser des enquêtes efficaces et une réponse pénale dynamique.
Enfin, des travaux interministériels importants sont actuellement menés, sous la coordination de l’AFA, pour l’élaboration d’un nouveau plan pluriannuel de lutte contre la corruption pour la période 2023-2025. Celui-ci sera au niveau des standards internationaux les plus exigeants. Vous pouvez compter sur nous, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Sueur. Je vous remercie de vos déclarations, madame la ministre. J’espère que les six personnes composant la commission des sanctions vont être effectivement réunies à la suite de la parution du décret et que le directeur, en cours de nomination depuis déjà un certain temps, finira par être nommé. Je rappelle que l’ancien directeur a déclaré devant une commission de l’Assemblée nationale que les capacités d’action et les moyens en personnel de cette instance étaient nettement inférieurs à ce qui était prévu lors du vote de la loi : 53 agents, alors que 70 étaient prévus. Il est absolument nécessaire d’augmenter ces effectifs vu l’importance du sujet.
fichier des comptes bancaires et données personnelles des français
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 227, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Gilbert Roger. Monsieur le ministre, j’ai déposé cette question en octobre dernier. Force est d’admettre que la réponse a tardé à venir jusqu’à nous…
À la suite de révélations de la presse, les Français, comme les parlementaires, ont appris la tentative de la direction générale des finances publiques (DGFiP) de faire évoluer le fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba), en 2021, pour y inclure toutes les informations bancaires des citoyens français. Ce processus s’est fait dans une opacité telle que ni le Parlement ni la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), pourtant garants des libertés publiques, n’ont été avertis de ces démarches. Nombreux sont nos concitoyens qui s’interrogent et nous interpellent sur cette tentative de Bercy de s’arroger autant de données personnelles sans l’accord de la représentation nationale.
Aussi, monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir vous expliquer sur cette réforme, qui ne repose, me semble-t-il, sur aucune base légale à ce jour, et de nous détailler la vision de Bercy quant à l’utilisation des informations bancaires des Français dans un avenir proche.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Monsieur le sénateur, l’article 1649 A du code général des impôts (CGI) fait obligation aux organismes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières de déclarer à l’administration fiscale l’ouverture et la clôture des comptes de toute nature, ainsi que la location de coffres-forts.
Les données collectées sont répertoriées dans le fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba), détenu par la DGFiP. Ce fichier est consulté par les services de la DGFiP en charge du contrôle fiscal et du recouvrement, ainsi que par les organismes dûment autorisés par le législateur, à des fins, notamment, de lutte contre la fraude.
Le fichier des comptes bancaires et assimilés, créé en 1971, informatisé en 1982 et mis à jour en 2002 (Ficoba 2), recense donc les comptes de toute nature ouverts sur le territoire national. Il fournit aux organismes légalement habilités, dans le cadre de l’exercice de leurs missions, des informations sur les comptes détenus par une personne ou une société.
Cette application est aujourd’hui obsolète, sur le plan tant fonctionnel que technique. Elle n’est pas en mesure de prendre en compte les évolutions du secteur bancaire et doit répondre à un accroissement des sollicitations.
Dans ce contexte, la refonte de Ficoba est essentielle pour la DGFiP et les nombreux partenaires et acteurs en charge de la lutte contre les différents types de fraude. Elle vise plus largement à améliorer le recouvrement des créances publiques.
Des études de modernisation technique et fonctionnelle ont donc été engagées – il s’agit du projet Ficoba 3 – sur la période 2020-2023. Un financement a été obtenu à cette fin dans le cadre du fonds de transformation de l’action publique (FTAP) 2020.
Dans le cadre de ces travaux, des réflexions internes à l’administration ont été conduites sur l’intégration ou non dans le fichier des données relatives aux soldes des comptes bancaires à une date déterminée. Il s’agit d’une réflexion logique, car disposer du solde des comptes n’est pas en soi une nouveauté conceptuelle.
En effet, le fichier national des contrats d’assurance vie (Ficovie), qui recense les assurances vie, permet de connaître le solde de ces dernières. De même, l’administration fiscale dispose des soldes des comptes bancaires détenus à l’étranger par des résidents fiscaux français grâce aux données de l’échange automatique d’informations internationales.
Une telle évolution du fichier Ficoba ne serait, en tout état de cause, possible qu’après avis de la Cnil et intervention du législateur.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour la réplique.
M. Gilbert Roger. Je ne serai plus sénateur en septembre prochain, mais j’encourage le Gouvernement à présenter devant la représentation nationale, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2024, les voies et moyens d’une approbation du législateur, au-delà de toute considération d’ordre technique. Ne marchez pas sur les plates-bandes du Parlement !
guichet unique
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 506, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la secrétaire d’État, depuis le 1er janvier 2023, en application de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, tous les centres de formalités des entreprises ont été regroupés sur un seul site dénommé le guichet unique. Cela représente un défi colossal à la charge de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi). Pour avoir rencontré les représentants de la chambre de métiers et de l’artisanat (CMA) de mon territoire, je puis vous assurer que la situation sur le terrain est difficile.
Depuis la mise en œuvre de cette simplification, de nombreux dysfonctionnements sont apparus, laissant dans le désarroi des milliers d’entrepreneurs, mais aussi le réseau consulaire, et provoquant le mécontentement et le stress des mandataires, des clients et des collaborateurs consulaires. Si les chambres des métiers ont perdu leur rôle de service public dans la gestion des centres de formalités, elles le conservent quant à la validation des déclarations traitées par le guichet Inpi. Or des erreurs d’orientation ont été constatées, des entreprises étant dirigées vers les registres du commerce ou de l’Urssaf plutôt que vers les chambres de métiers.
Cela a un impact financier pour les CMA, puisque les entreprises non inscrites à la section artisanale du répertoire national ne seront pas soumises à la taxe pour les frais de la chambre. Par ailleurs, la qualification professionnelle n’est pas vérifiée, ce qui peut porter préjudice aux consommateurs.
Madame la secrétaire d’État, comment comptez-vous sécuriser ces aspects dans les évolutions de la plateforme unique ? Quand pourra-t-on compter sur un guichet unique pleinement opérationnel ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre des armées et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Monsieur le sénateur Devinaz, l’instauration du guichet unique pour les formalités des entreprises constitue à la fois un projet technique de grande ampleur et une redéfinition en profondeur des rôles de l’ensemble des acteurs de l’écosystème des formalités, après plus de quarante ans de fonctionnement des centres de formalités des entreprises (CFE). Ces deux facteurs expliquent en grande partie les retards que le projet a connus à son démarrage, et que le Gouvernement s’est engagé à résorber.
Ouvert en janvier dernier conformément à la loi Pacte, le guichet unique a permis aux entreprises de réaliser plus de 485 000 formalités depuis cette date. Il prend d’ores et déjà en charge la totalité des formalités de création, et ce sera également le cas des cessations dans quelques jours. Les tests se poursuivent actuellement pour les formalités de modification, qui ouvriront progressivement d’ici au mois de juin. Enfin, une nouvelle version simplifiée du dépôt des comptes est disponible depuis la fin du mois d’avril. Je sais que vous y tenez, monsieur le sénateur.
Dans cette transformation, les chambres de métiers et de l’artisanat, qui accompagnent par ailleurs nos entreprises de manière essentielle sur nos différents territoires, conservent un rôle déterminant. Il leur appartient en effet de vérifier le caractère artisanal de l’activité déclarée par une entreprise. Il leur revient également de contrôler la qualification professionnelle.
Enfin, l’orientation des dossiers vers les organismes en charge de la validation, dont les CMA, repose exclusivement sur les informations fournies par les entreprises concernant leur activité, au moyen d’une classification fine des activités, qui a été élaborée conjointement avec les chambres de métiers et de l’artisanat.
Monsieur le sénateur Devinaz, malgré les difficultés inhérentes à un projet d’une aussi grande ampleur que le guichet unique, soyez rassuré sur la pleine mobilisation du Gouvernement pour corriger les défauts constatés et permettre une mise en place pleine et effective le plus rapidement possible. C’est l’engagement que les services de Bercy ont pris.
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.
M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Pour avoir visité l’Inpi avec la délégation sénatoriale aux entreprises, et après avoir entendu les explications de ses représentants, je suis persuadé que, si les chambres consulaires avaient été considérées comme de véritables partenaires à part entière, et non comme de simples acteurs, la construction de ce guichet unique se déroulerait beaucoup mieux.
automatisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée et impact sur le budget de la commune de lambersart