M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Guylène Pantel. En l’absence de M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer, ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Madame la ministre, les « Beauvau » s’enchaînent. Après le Beauvau de la sécurité et le Beauvau des polices municipales, votre ministère lançait mardi dernier celui de la sécurité civile, afin de faire le bilan du modèle français et de donner des perspectives.
En parallèle, une intersyndicale représentant neuf organisations de sapeurs-pompiers appelle à une mobilisation nationale le 16 mai prochain.
Il ne fait aucun doute que cet appel sonne comme un avertissement : il faut des réponses concrètes et efficaces aux carences financières et humaines que l’on observe dans nos départements respectifs.
Comme cela a été dit ces derniers temps, l’un des éléments ayant mis le feu aux poudres au sein de la profession est la publication du rapport commun de l’inspection générale de l’administration et de l’inspection générale de la sécurité civile sur l’activité des sapeurs-pompiers volontaires, qui recommande notamment la réduction du nombre d’heures de gardes postées, remettant en cause la notion d’engagement citoyen librement consenti qui caractérise cette activité.
Une telle évolution pourrait amputer les capacités opérationnelles, donc la réponse de nos services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), puisque leurs effectifs sont, dans une large majorité, des volontaires, notamment en zone rurale et hyperrurale, comme dans mon département de la Lozère.
C’est pourquoi la profession, faisant preuve d’un sens aigu de l’intérêt général, fait part de son refus de toute application de la directive européenne de 2003 sur le temps de travail aux sapeurs-pompiers volontaires.
Les diverses prises de parole du ministre de l’intérieur à ce sujet se veulent plutôt rassurantes : M. Darmanin s’est en effet engagé à ne pas appliquer les recommandations du rapport précité.
Pour autant, de nombreuses interrogations demeurent.
Comment comptez-vous répondre aux besoins de recrutement ? Quand comptez-vous publier le décret relatif à la bonification des trimestres de retraite des sapeurs-pompiers volontaires ? Enfin, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour rétablir les capacités budgétaires des Sdis, en termes tant d’investissement que de fonctionnement ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Pantel, notre modèle français de sécurité civile est solide, agile et résilient. Nous sommes tous ici très attachés à nos pompiers.
Depuis de nombreuses années, ce modèle a fait la preuve de sa capacité à proposer des réponses rapides et adaptées à des sollicitations opérationnelles toujours croissantes.
Toutefois, vous avez raison, il faut regarder la réalité en face et reconnaître que ce modèle est sous tension. Il doit aujourd’hui faire l’objet d’une adaptation en profondeur, afin qu’il soit en mesure de faire face aux enjeux à venir, en particulier ceux qui résultent des évolutions sociétales et du changement climatique.
Les près de 500 000 acteurs de la sécurité civile et les quelque 255 000 sapeurs-pompiers sont tous indispensables à notre dispositif de secours. C’est pourquoi nous devons être attentifs à leurs inquiétudes, que vous avez extrêmement bien exprimées.
Le Président de la République, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin et moi-même avons souhaité lancer la démarche que vous avez citée, une démarche absolument inédite et qui fonctionne.
Nous avons ainsi engagé une vaste concertation nationale destinée aux policiers municipaux, que nous avons baptisée « Beauvau de la sécurité civile ».
Durant toute l’année 2024, un certain nombre de rencontres auront lieu : elles permettront de faire le point sur l’ensemble des difficultés que la profession rencontre – notamment celles que vous avez citées –, et de recueillir toutes les idées. Nous allons écouter et étudier les propositions, puis réfléchir à la meilleure manière de façonner la sécurité civile de demain aux côtés des sapeurs-pompiers volontaires, professionnels ou militaires, des bénévoles des associations agréées, des pilotes, des démineurs, mais aussi des élus locaux et nationaux.
Au travers de ces échanges, nous aurons l’occasion d’aller sur le terrain, au plus près des réalités, à la rencontre de tous, de sorte que chacun puisse participer. Nous avons en outre publié une enquête en ligne qui permettra à ceux qui le souhaitent d’exprimer leurs opinions et leurs idées.
C’est à l’occasion de ces cinq Beauvau – deux se tiendront avant l’été, trois après – que les sujets que vous avez cités seront traités. Vous y serez naturellement conviée, madame la sénatrice.
M. Mickaël Vallet. Et le décret ?…
projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Catherine Conconne. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui est malheureusement absent.
Le 28 février dernier, en marge du salon de l’agriculture, le Président de la République a tenu à faire savoir à la profession agricole de ladite outre-mer que cette dernière n’avait pas été oubliée par l’État dans les négociations qui ont suivi la crise de ce début d’année.
Selon le Président de la République, « la souveraineté alimentaire française passe aussi par cette ferme outre-mer. […] Au cœur de nos paysages, de nos territoires, avec des spécificités propres à chacun, il y a un projet à bâtir et des défis parfois plus importants ». Présente lors de la réunion, je l’ai moi-même entendu tenir ces propos.
Or nous sommes aujourd’hui forcés de constater la criante absence de ces spécificités et de ces défis dans le projet de loi d’orientation agricole présenté il y a un mois.
Je le rappelle, l’agriculture de nos dits pays d’outre-mer représente près de 40 000 emplois, dont une part non négligeable est occupée par des actifs vivant sous le seuil de pauvreté. Elle correspond à près de 60 % du total des emplois salariés dans nos territoires ultramarins, essentiellement au sein de la filière agro-alimentaire. Dans les outre-mer, on dénombre plus de 25 000 exploitations, qui occupent près d’un cinquième de leur superficie totale.
Le sort d’une politique publique aussi essentielle, surtout quand il est question d’autonomie alimentaire, doit-il être réglé une fois de plus à coups d’ordonnances ou dépendre du vote aléatoire d’amendements au Parlement ?
Les travaux engagés par le comité interministériel des outre-mer (Ciom) il y a de cela un an avaient permis à nos territoires de retrouver l’espoir et de renouer une relation de confiance avec les services de l’État. J’invite le Gouvernement à poursuivre dans cette voie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Conconne, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre Agnès Pannier-Runacher, qui est retenue en ce moment même par une audition et qui m’a chargée de vous répondre.
Oui, le projet de loi d’orientation agricole que nous défendons affirme avec force l’impératif de souveraineté alimentaire et la dimension stratégique de notre agriculture, partout, sur tous nos territoires.
Il vise trois objectifs, qu’il est important de rappeler ici.
Le premier est d’assurer le renouvellement des générations, car, sans forces vives, il n’y a pas de souveraineté alimentaire. Nous devons être capables de former les nouvelles générations aux métiers de notre agriculture, pour produire davantage dans un contexte climatique exigeant.
Le deuxième objectif est de donner un nouveau souffle à notre politique d’installation et de transmission des exploitations, car, sans cela, il n’y aura pas non plus de souveraineté alimentaire.
Le troisième et dernier objectif est de sécuriser, simplifier et libérer, car il ne peut y avoir de souveraineté alimentaire sans suppression des contraintes inutiles.
Comme vous le savez, l’élaboration de ce texte repose sur de larges concertations, qui ont duré plus de six mois et qui se sont déroulées dans chacune de nos régions métropolitaines comme en outre-mer.
J’entends parfaitement votre préoccupation et le signal d’alerte que vous lancez, et je puis vous assurer ici que les ministres Agnès Pannier-Runacher et Marc Fesneau se tiennent à votre disposition pour étudier en détail les autres dossiers que vous voudrez bien leur soumettre.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour la réplique.
Mme Catherine Conconne. Non, madame la ministre, il n’y a pas eu de larges concertations !
Je prends donc la balle au bond et j’attends avec impatience la concertation que vos deux collègues du ministère de l’agriculture, Marc Fesneau et Agnès Pannier-Runacher, sont censés engager. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
groupe exxonmobil
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Céline Brulin. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.
Monsieur le ministre, malgré près de 92 milliards de dollars de bénéfice net en deux ans et des dividendes faramineux, ExxonMobil annonce vouloir mettre fin à ses activités chimiques à Port-Jérôme-sur-Seine, en Seine-Maritime, et vendre sa raffinerie de Fos-sur-Mer, ainsi que des dépôts de carburant.
Dans mon département, 647 emplois directs sont en jeu, voire plusieurs milliers si l’on tient compte des entreprises sous-traitantes et de l’ensemble du tissu économique touché.
Les ressources des communes du bassin d’emploi et de l’agglomération Caux Seine seraient elles aussi considérablement affectées.
Le Gouvernement et même le Président de la République doivent faire pression sur le groupe. Comment accepter que celui-ci continue d’avoir accès aux marchés français et européen, alors qu’il tire un trait sur la mobilisation, quatre-vingt-dix ans durant, de tout un territoire, ainsi que sur l’engagement et le savoir-faire de milliers de salariés et de dizaines de PME ?
Le vapocraqueur doit être pérennisé. Moyennant un certain nombre d’investissements, il peut produire des plastiques recyclés et contribuer à la décarbonation.
L’unité de polypropylène, qui peut fonctionner en autonomie en étant alimentée par TotalEnergies Normandie, doit être préservée.
Enfin, vous devez empêcher ExxonMobil d’imposer son calendrier et son plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) au mépris de ses obligations légales.
Le site de Port-Jérôme-sur-Seine contribue à la fabrication de plastiques qui sont indispensables, que ce soit dans les domaines médical et pharmaceutique ou dans l’industrie automobile. L’abandonner ferait perdre un peu plus de souveraineté encore à la France. Cela mettrait notre pays à la merci de productions issues de gaz de schiste américains ou venues d’Asie, dans les conditions environnementales et sociales que l’on sait.
Monsieur le ministre, à quand la souveraineté en actes ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie. Madame la sénatrice Céline Brulin, comme vous l’avez dit, ExxonMobil a annoncé le 11 avril dernier la fermeture de plusieurs activités chimiques à Gravenchon, dans la commune de Port-Jérôme-sur-Seine, mais aussi la vente d’une raffinerie à Fos-sur-Mer.
J’ai bien sûr pris contact immédiatement avec la direction française d’ExxonMobil, ainsi qu’avec le siège de l’entreprise à Houston, aux États-Unis, pour leur signifier mon mécontentement et ma déception vis-à-vis de cette décision et pour les interroger sur les raisons qu’ils mettent en avant pour la justifier.
Ils soulignent que le vapocraqueur est bien plus petit que celui de ses concurrents et souffre ainsi d’un déficit de compétitivité, qui est d’ailleurs en partie dû à un manque d’investissement ces dernières années.
M. Fabien Gay. Et c’est aux salariés de trinquer !
M. Roland Lescure, ministre délégué. En effet, cette activité est déficitaire en France depuis de nombreuses années.
Nous avons également rencontré immédiatement le repreneur de la raffinerie de Fos-sur-Mer. Je m’éloigne quelque peu de votre question, mais il était important de nous assurer que les 300 salariés concernés conserveraient leur emploi dans le cadre de la reprise par l’entreprise Rhône Énergies, laquelle a véritablement la volonté d’investir dans la raffinerie.
En ce qui concerne le site de Port-Jérôme-sur-Seine, la reprise s’accompagnera en effet malheureusement d’un PSE. Nous serons intraitables avec ExxonMobil, pour que cette société respecte ses obligations légales, et même, au-delà, pour qu’elle fasse preuve de responsabilité d’un point de vue social, vis-à-vis tant des salariés que du territoire, ces usines étant présentes dans la région depuis plus de quatre-vingt-dix ans.
Nous sommes en contact avec les représentants de l’entreprise. Nous le sommes aussi avec les élus : j’ai rencontré la vice-présidente de région et une députée, et mon cabinet vous transmettra, s’il ne l’a pas déjà fait, des dates pour fixer le rendez-vous que vous avez sollicité, afin que nous suivions ce dossier ensemble.
Cette décision est triste. Il s’agit d’une mauvaise nouvelle, qui intervient dans un territoire en développement, au sein duquel existent des perspectives d’emploi et d’investissement, y compris de la part de grandes entreprises américaines. Nous suivrons ce dossier de très près, en collaboration avec les élus locaux et, bien sûr, nationaux. (M. Ludovic Haye applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, nous attendons plus que des regrets. Nous parlons d’activités stratégiques. Le Gouvernement, qui s’y refusait jusqu’à présent, semble examiner la possibilité de reprendre les activités stratégiques d’Atos. Pourquoi ne pas le faire également dans ce cas ?
Pourquoi ne pas étudier la création d’un pôle pétrochimique ancré en France, en partenariat avec TotalEnergies, plutôt que de laisser ce dernier s’expatrier et entrer en bourse à Wall Street ?
Nous avons besoin de maintenir ces activités, qui ont des débouchés dans les industries pharmaceutique, médicale et automobile. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Cadic. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adressait à M. le ministre des armées.
Cela a fait la une à l’international : en janvier 2021, quelque 116 parlementaires issus de 15 pays ont été ciblés par une cyberattaque parrainée par l’État chinois. J’ai appris officiellement hier que je faisais partie des 7 parlementaires français concernés, aux côtés de nos collègues sénateurs Isabelle Florennes et Bernard Jomier, de la députée Anne Genetet et de nos anciens collègues André Gattolin et André Vallini.
Ces parlementaires ont tous été membres de l’Alliance interparlementaire sur la Chine, l’Ipac (Inter-Parliamentary Alliance on China), qui suit attentivement les actions de Pékin et du parti communiste chinois.
Les investigations du FBI ont formellement attribué ces cyberattaques au groupe de hackers APT31, associé au renseignement chinois. Ces hackers font nommément l’objet d’un acte d’accusation du ministère de la justice américain depuis le 25 mars dernier.
Il s’agit clairement d’un acte de cyberguerre, commis par une dictature 2.0. À moins d’une semaine de la venue en France du président Xi Jinping, nous sommes confrontés à une manifeste ingérence étrangère d’envergure de la part de la Chine, qui utilise les moyens de la guerre hybride pour attaquer des parlementaires.
Quelles mesures le Gouvernement a-t-il prises pour contrer les attaques du groupe APT31 ? Attribuerez-vous formellement ces attaques à ce groupe, comme l’ont fait d’autres pays, et demanderez-vous l’ouverture d’une enquête ?
Prévoyez-vous de renforcer l’assistance aux parlementaires, pour les protéger des États qui ne tolèrent pas la liberté d’expression et qui les menacent ouvertement ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Cadic, vous mentionnez des cyberattaques ayant visé les membres de l’Ipac, dont vous faites partie.
Vous le savez, le suivi de la menace cyber fait l’objet d’une extrême vigilance de la part des services de renseignement et de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), d’autant plus à l’approche des jeux Olympiques et Paralympiques.
Nous détectons et déjouons des centaines d’attaques cyber chaque année. Aussi le mode opératoire de l’APT31 fait-il l’objet d’un suivi particulier par l’Anssi, qui a publié des recommandations pour y faire face.
En lien avec nos partenaires européens et de manière bilatérale, nous exprimons dans le cadre approprié nos préoccupations concernant les cyberattaques qui visent nos intérêts. Ces dernières font l’objet d’investigations au plan national, y compris d’un point de vue judiciaire.
Si le Gouvernement n’exclut pas d’attribuer publiquement ces cyberattaques à un groupe donné, vous comprendrez que nous ne puissions pas, à ce stade, communiquer davantage sur ce sujet.
Plus généralement, nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour contrer ces menaces.
Mme Sophie Primas. Nous voilà rassurés… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour la réplique.
M. Olivier Cadic. Je vous remercie de cette réponse, même si je ne suis pas sûr, en effet, qu’elle soit de nature à nous rassurer…
M. Roger Karoutchi. En somme, il faut vous débrouiller !
M. Olivier Cadic. Il semblerait que l’information soit arrivée à nos services depuis 2022, donc je comprends que vous travaillez sur cette question depuis déjà un petit moment… Nous attendons impatiemment de nous sentir rassurés. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes GEST et SER.)
visite d’état du président de la république en chine et prochaine visite d’état en france du président de la république populaire de chine
M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Antoinette Guhl. La semaine prochaine, le Président de la République recevra le président chinois, Xi Jinping.
Je fais l’impasse sur la balade bucolique dans les Hautes-Pyrénées sur le chemin des souvenirs d’enfance d’Emmanuel Macron, qui est prévue au programme de cette visite d’État. Ce qui nous importe, c’est que cette visite officielle ne soit pas perçue par le président chinois comme une caution de la France sur Taïwan, sur notre sécurité ou encore sur les Ouïghours.
La semaine dernière, Joe Biden a promulgué un plan d’aide de 7,7 milliards d’euros pour contrer l’influence militaire de la Chine et soutenir Taïwan. Il s’agit d’un engagement clair de la part des États-Unis. Quelle est la position française ?
En ce qui concerne notre sécurité, l’espionnage chinois – c’est-à-dire une ingérence étrangère – s’invite dans notre hémicycle et dans la campagne des élections européennes, ce qui constitue une menace réelle pour la souveraineté et l’intégrité de l’Europe. Est-ce au programme des discussions ?
Enfin, les atrocités commises contre les Ouïghours exigent une action immédiate de la part de la communauté internationale. Le peuple ouïghour continue, au vu et au su du monde entier, de subir la répression et l’exploitation. Je veux parler un instant des femmes, qui en sont les premières victimes en subissant viols, stérilisation et tortures.
Nos penderies, nos voitures, nos téléphones, nos ordinateurs : toute notre économie est complice de ce crime étouffé, que commet le gouvernement chinois sur son peuple. Nous devons accroître la pression sur la Chine pour mettre fin à ces violations, pour garantir l’accès à des observateurs indépendants et pour poursuivre les responsables.
Comment le Gouvernement va-t-il, lors de cette visite du président chinois, réaffirmer les grandes valeurs de la France et son engagement envers les droits humains, la protection de notre démocratie et les droits fondamentaux des Ouïghours ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du développement et des partenariats internationaux.
Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée du développement et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice Guhl, vous évoquez la visite d’État du président Xi Jinping en France les 6 et 7 mai prochains.
Cette visite s’inscrit dans le cadre du soixantième anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la République populaire de Chine. Elle doit nous permettre d’évoquer tous les sujets : les défis mondiaux, les enjeux globaux, les irritants commerciaux et la protection des droits de l’homme.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Bien sûr… On y croit ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État. Tout d’abord, les crises internationales doivent être abordées, car nous avons des attentes fortes vis-à-vis de la Chine, qui doit agir sur la situation en Ukraine, mais aussi au Proche-Orient, pour parvenir à une sortie de crise.
Ensuite, nous chercherons à obtenir de nouvelles avancées sur les enjeux globaux, après celles qui ont été acquises l’année dernière lors de la visite du Président de la République en Chine. Nous proposerons à la Chine des actions communes en matière de décarbonation, de protection de la biodiversité et de financement du développement.
Sur les sujets difficiles, nous assumons d’entretenir un dialogue politique exigeant avec la Chine. Nous exprimerons clairement le caractère insoutenable du déficit commercial bilatéral et notre détermination à défendre nos industries et nos emplois. Par ailleurs, nous aborderons la situation des droits de l’homme en Chine.
Enfin, je souligne que nous travaillons étroitement avec nos partenaires européens sur l’ensemble de ces sujets. La présidente de la Commission européenne, qui avait accompagné le Président de la République en Chine, en avril 2023, sera ainsi en France pour cette visite d’État.
situation du groupe atos
M. le président. La parole est à M. Thierry Meignen, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Thierry Meignen. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Le groupe Atos englobe une myriade d’activités dites sensibles, et pas seulement dans le domaine de la défense. Or il fait face à des difficultés vitales, et vos annonces récentes, mais tardives, monsieur le ministre, ne répondent pas aux questions suivantes : quelle est la stratégie du Gouvernement ? Qu’avez-vous fait depuis que le groupe est en difficulté, et avec qui ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. (Ah ! sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur, le groupe Atos est un groupe privé. Un tel groupe se gère lui-même, mais l’État intervient quand il y a des difficultés.
Dès que ce groupe a rencontré des difficultés, nous sommes intervenus, et nous continuons de le faire depuis plusieurs mois. J’ai immédiatement chargé le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) de suivre le dossier, de participer à la restructuration de la dette et d’apporter son conseil. Un mandataire ad hoc a été nommé ; je l’ai reçu.
Dès que les difficultés de ce groupe, qui compte 10 000 salariés et exerce des activités stratégiques, se sont renforcées, nous avons sollicité de potentiels repreneurs, en particulier Airbus. Naturellement, nous avons laissé l’entreprise Airbus poursuivre les discussions avec Atos pour étudier cette solution.
Lorsque cette piste a été abandonnée, l’État a pris ses responsabilités.
Tout d’abord, il a pris part au tour de table avec les autres financeurs en débloquant 50 millions d’euros pour sécuriser Atos. (M. Fabien Gay ironise.)
Ensuite, il a mis en place une action de préférence, pour s’assurer qu’aucun repreneur étranger ne puisse prendre le contrôle de l’entreprise.
Nous avons pris toutes nos responsabilités vis-à-vis d’Atos.
M. Fabien Gay. On verra !
M. Bruno Le Maire, ministre. Le week-end dernier, j’ai déposé une offre d’intention pour acheter l’intégralité des activités stratégiques d’Atos et éviter que la moindre d’entre elles, que ce soit dans les supercalculateurs, dans la cybersécurité ou dans les transmissions sécurisées, notamment pour la défense, ne puisse passer sous un contrôle étranger.
L’État a pris toutes ses responsabilités : il protège Atos et ses activités stratégiques, il a pris la décision de faire une offre d’intention sur les activités stratégiques et il élargit maintenant le tour de table. Nous travaillons sur le dossier depuis des mois.
Monsieur le sénateur, ce n’est pas parce que nous faisons les choses discrètement (Exclamations ironiques sur les travées des groupes Les Républicains, SER et CRCE-K.) que nous ne les faisons pas efficacement.
Ce n’est pas parce que nous travaillons dans le silence que nous ne prenons pas nos responsabilités. Il vaut mieux traiter certaines affaires discrètement, pour prendre les décisions au bon moment, comme nous l’avons fait. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)