Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Garnier, auteure de la question n° 1151, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, la loi confortant le respect des principes de la République a modifié les modalités d’encadrement et de contrôle de l’instruction en famille.
Nous sommes notamment passés d’un régime de simple déclaration à un système d’autorisation préalable pour les familles qui souhaitent faire l’école à la maison.
Les maires de nos communes sont en première ligne face à ces évolutions. Ce sont eux qui reçoivent de la part des services départementaux de l’éducation nationale un courrier les priant de réaliser une enquête de la mairie. Il leur est notamment demandé de s’assurer que l’instruction délivrée à l’enfant est compatible avec son état de santé.
Je suis heureuse que ce soit le ministre de la santé qui me réponde ce matin, car les maires et les élus locaux n’ont aucune compétence pour évaluer l’état de santé des enfants !
En Loire-Atlantique, les maires qui m’ont interpellée sur ce sujet sont respectivement cadre bancaire, agriculteur et retraité de la fonction publique territoriale. Aucun d’entre eux n’estime être à même de juger de l’état de santé de ces enfants.
Cette situation n’est bonne ni pour les enfants concernés ni pour les maires et les élus locaux, auxquels on ne peut pas faire assumer toutes les exigences de suivi de l’État en matière d’encadrement de l’instruction en famille.
Aussi, comment entendez-vous mobiliser les services de l’éducation nationale et ceux de votre ministère de la santé, pour assurer le suivi de ces enfants ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Laurence Garnier, depuis 2022, il ne peut plus être dérogé à l’obligation de scolarisation que sur autorisation préalable d’instruction dans la famille, délivrée par les services académiques pour des motifs tirés de la situation de l’enfant et limitativement définis par la loi.
Le directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen) qui a rendu l’autorisation en informe le maire de la commune de résidence de l’enfant. Le maire, agent de l’État, a le soin de mener une enquête visant les enfants résidant sur les territoires de la commune qui reçoivent l’instruction en famille.
Cette enquête doit être réalisée dès la première année, puis tous les deux ans. Son résultat est communiqué aux Dasen et aux personnes responsables de l’enfant.
La loi du 24 août 2021 a modifié l’objet de l’enquête du maire.
Ainsi, depuis la rentrée scolaire 2022, il s’agit pour le maire de vérifier non pas l’état de santé des enfants, mais la réalité des motifs qui ont été avancés par les personnes responsables de l’enfant. L’édile est également chargé de contrôler si l’instruction donnée à l’enfant est compatible avec son état de santé et les conditions de vie de la famille.
Enfin, il est demandé au maire d’obtenir une attestation de suivi médical, qui est un document établi par un professionnel de santé – et non par lui-même – attestant que l’enfant fait l’objet d’un suivi individuel de son état de santé. Cette enquête vise à s’assurer de la réalité du motif pour lequel l’enfant a reçu une autorisation d’instruction dans la famille.
Vous aviez proposé que soit confiée à une assistante sociale de l’éducation nationale, plutôt qu’au maire, la charge de réaliser cette enquête. Toutefois, la loi ne prévoit pas que les services académiques puissent se substituer aux services municipaux pour effectuer l’enquête. Ce rôle de substitution a été dévolu au préfet de département.
L’enquête du maire complète le contrôle pédagogique mis en œuvre par les autorités académiques, qui porte sur la qualité de l’instruction et la vérification de l’acquisition progressive par l’enfant des compétences et des connaissances du socle commun.
Le Gouvernement entend préserver cette dualité de contrôle de l’instruction dans la famille. Afin d’accompagner les maires, le guide interministériel relatif au rôle des acteurs locaux dans le cadre de l’instruction dans la famille est en cours d’actualisation par le Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.
Mme Laurence Garnier. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.
Dans un contexte de réduction croissante de l’offre médicale sur notre territoire, soyons attentifs à ne pas faire porter cette responsabilité aux maires, qui ne sont pas compétents en la matière.
Demain, d’autres enjeux les attendront, comme le maintien à domicile. Or, monsieur le ministre, ils ne pourront faire face à tout.
bilan de la formation au numérique des formateurs instaurée par la loi pour une école de la confiance
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteure de la question n° 1173, adressée à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je voudrais attirer l’attention du Gouvernement sur l’état de la formation du numérique en France et sur la bonne application de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance.
Dès 2018, dans le rapport d’information Prendre en main notre destin numérique : l’urgence de la formation, dont l’une des séries de recommandations avait pour objet : « Apprendre à se servir des écrans et apprendre à s’en passer », j’avais formulé de nombreuses propositions pour que l’ensemble des élèves, et plus largement des citoyens, soient des acteurs actifs de leur destin numérique.
Ces préconisations sont encore d’une vive actualité, à l’heure où internet et les réseaux sociaux sont devenus un espace de non-droit et de menaces pour les jeunes, qui en sont les premières victimes.
Le phénomène est tel que le Président de la République s’est engagé à limiter l’accès des jeunes aux écrans en janvier 2024.
Dans ce rapport, j’avais notamment signalé l’importance de « former les formateurs ». La douzième recommandation consistait ainsi à « revoir la maquette de formation en écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espé), afin que la littératie numérique devienne un axe structurant de la formation ».
Ce besoin a été le fondement de mon amendement à la loi du 26 juillet 2019, afin que les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé) « forment les étudiants et les enseignants à la maîtrise des outils et ressources numériques et à leur usage pédagogique, ainsi qu’à la connaissance et à la compréhension des enjeux liés à l’écosystème numérique et à la sobriété numérique ».
Depuis l’adoption de cette loi, à l’occasion d’auditions préalables aux lois de finances, j’ai systématiquement interrogé le ministre compétent pour que soit dressé un bilan de ces dispositions.
Jusqu’à maintenant, seules des réponses lacunaires m’ont été fournies. Le Digital Services Act (DSA), entré en application en février 2024, contraint les plateformes à atténuer les risques qu’elles représentent, y compris pour les jeunes. Il revient à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), autorité compétente, de veiller efficacement à son respect.
Toutefois, la protection des jeunes en ligne et la question de leur exposition aux écrans ne peuvent être appréhendées qu’au prisme de la sécurité.
La formation des formateurs est également une clé pour relever les défis sociaux et démocratiques que pose l’utilisation des réseaux sociaux.
L’accompagnement des jeunes est important. Aussi, je réitère ma demande d’un bilan précis des dispositions prévues par cette loi.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Catherine Morin-Desailly, je vais essayer de vous apporter la réponse la plus précise à partir des éléments que m’a transmis la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Le Gouvernement a pleinement conscience des enjeux du développement des compétences numériques. Elles constituent en effet un élément essentiel du parcours scolaire, de l’insertion professionnelle et de la vie citoyenne.
Depuis mars 2022, les acteurs de l’éducation nationale ont conduit une réflexion stratégique sur le numérique pour l’éducation, qui a conduit à l’élaboration de la stratégie numérique pour l’éducation 2023-2027.
De plus, depuis la rentrée 2023, le ministère de l’éducation nationale, avec l’Arcom, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) et le Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information (Clemi), a rédigé la charte pour l’éducation à la culture et la citoyenneté numériques, qui fixe les trois grands axes de ce cadre de la citoyenneté numérique. Ce document est un repère des actions du ministère et de ses déclinaisons dans les académies et les établissements.
Vous évoquez le Digital Services Act, qui concerne d’abord les plateformes grand public du numérique. Il vise en particulier les plateformes des entreprises américaines des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ou chinoises des BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi).
Le ministère de l’éducation nationale, avec la stratégie nationale du numérique, s’appuie sur les plateformes souveraines et protectrices du droit des usagers, qu’il s’agisse des élèves, des personnels éducatifs ou des parents. L’application du règlement général sur la protection des données (RGPD) limite les usages avec les élèves des plateformes des Gafam.
Face aux enjeux d’éducation au numérique et de lutte contre le cyberharcèlement et afin de lutter contre les discours de haine et les contenus illicites, nous avons lancé en novembre 2022 le déploiement de l’attestation de sensibilisation aux compétences numériques à l’aide de la plateforme Pix pour les élèves de sixième.
Par ailleurs, la formation des enseignants est essentielle pour atteindre les objectifs fixés. La formation au et par le numérique constitue à ce titre une dimension obligatoire de la formation initiale des professeurs.
Enfin, dans le cadre de la loi pour une école de la confiance, les écoles peuvent mener des expérimentations pédagogiques de cinq ans portant sur l’organisation de la classe ou de l’école, l’utilisation des outils numériques ou encore la répartition des heures d’enseignement sur l’année scolaire. Ces expérimentations sont encadrées et font systématiquement l’objet d’un suivi d’évaluation par la recherche.
Le ministère de l’éducation nationale est donc pleinement engagé pour relever les défis de la formation au et par le numérique. Une approche équilibrée, progressive et sécurisée des enjeux du numérique permettra à l’école d’éduquer les futurs citoyens de demain.
difficultés financières des établissements et services d’aide par le travail
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton, en remplacement de Mme Nadège Havet, auteure de la question n° 1168, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Nicole Duranton. Monsieur le ministre, je prends en effet la parole au nom de ma collègue Nadège Havet, sénatrice du Finistère.
Ma collègue tenait en introduction à féliciter toute l’équipe de l’établissement et service d’aide par le travail (Ésat) Les Genêts d’or de Briec, qui a organisé le week-end dernier sa trente-huitième Fête des fleurs, un atelier d’horticulture remarquable.
Elle souhaitait ensuite appeler votre attention sur les difficultés de financement rencontrées par les Ésat, notamment dans son département. Rappelons ici toute l’importance de ces lieux d’accès au travail en France, qui proposent un accompagnement spécifique pour plus de 120 000 personnes en situation de handicap.
Dans la continuité du plan de transformation de ces établissements, accueilli favorablement par les structures concernées, la loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi s’est inscrite dans cette dynamique positive amorcée il y a plusieurs années. Elle comprend ainsi des mesures dont la mise en œuvre doit soutenir une évolution favorable du statut des travailleurs concernés : remboursement des frais de transport public, accès aux titres-restaurant et aux chèques-vacances et prise en charge de la couverture complémentaire collective.
Cependant, de fortes inquiétudes ont été exprimées quant aux coûts additionnels induits par ces avancées, alors que la situation financière des Ésat est complexe.
Plus d’un établissement sur quatre est déjà en déficit net. Sans soutien supplémentaire, une détérioration de l’accompagnement adapté proposé sera à déplorer, à savoir une sélection plus forte à l’entrée des travailleurs en situation de handicap, la fermeture d’ateliers moins rentables ou un temps plus restreint accordé à la formation, volet indispensable pour une insertion progressive en milieu ordinaire de travail.
Aussi, monsieur le ministre, de quelle façon le Gouvernement entend-il prendre en compte ce cadre financier dégradé ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice, vous avez souhaité appeler l’attention de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, sur les difficultés financières que pourraient rencontrer les Ésat à l’occasion de la mise en œuvre des mesures de la loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi, à la suite des engagements pris par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap (CNH) d’avril 2023.
Les 1 500 Ésat et les organisations et fédérations qui les représentent jouent un rôle fondamental pour favoriser l’inclusion socioprofessionnelle de près de 120 000 travailleurs.
La loi pour le plein emploi consacre la logique de parcours, pour permettre aux personnes en situation de handicap de trouver un emploi plus facilement. Elle prévoit notamment l’accompagnement de France Travail autour du projet de la personne, avec des mises en situation en entreprise. L’Ésat sera la solution pour accompagner ces personnes, afin qu’elles parviennent à travailler en milieu ordinaire.
Pour cela, le Gouvernement a souhaité faire converger les droits des travailleurs en Ésat avec ceux des salariés, tout en gardant la protection, spécifique à leur statut, qui empêche leur licenciement.
La loi leur octroie également des droits collectifs, comme celui de faire grève ou de se syndiquer, mais aussi individuels, tels que la complémentaire santé ou la participation aux frais de transport.
Concernant le financement de la transformation des Ésat et de la mise en place de ces nouveaux droits, l’inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale des finances (IGF) ont rendu un rapport, à l’origine du plan de transformation des Ésat, coconstruit avec les représentants du secteur.
La convergence des droits des travailleurs admis en Ésat vers ceux des salariés fait l’objet d’un large consensus. Cependant, la mise en place d’une complémentaire santé obligatoire, prise en charge pour moitié par l’employeur, à partir du 1er juillet 2024, représente une source d’inquiétude très forte pour le secteur.
À cet effet, des travaux sont en cours pour définir le meilleur moyen d’accompagner les Ésat et leurs travailleurs dans cette transition indispensable.
Je veux enfin rappeler que, en 2024, plus de 3,2 milliards d’euros sont consacrés au secteur des Ésat, au travers du budget de l’État et de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam). Nous trouverons ensemble une solution qui protège la situation financière des Ésat et la santé de leurs travailleurs.
régime spécifique d’approvisionnement
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Malet, auteure de la question n° 1226, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Viviane Malet. Madame la ministre, je souhaite évoquer ici la problématique du régime spécifique d’approvisionnement (RSA), qui correspond à la compensation des surcoûts pour l’alimentation animale liée à l’éloignement et à l’absence de cultures céréalières dans les territoires ultramarins.
Sachant que le coût de l’alimentation représente les deux tiers des coûts de production des éleveurs ultramarins, ce dossier a des implications majeures en matière de pouvoir d’achat et de sécurité alimentaire. En outre, il nuit à l’émergence de filières de viandes biologiques dans nos départements d’outre-mer (DOM), pourtant indispensables pour répondre aux obligations fixées par les lois Égalim.
Le plafond du RSA n’a pas été relevé depuis dix ans et il est saturé depuis quatre ou cinq ans. À l’heure où je vous parle, ce sont 8 millions d’euros de coût de fret qui sont indûment supportés par les éleveurs des DOM, dont 5 millions d’euros pour les seuls éleveurs de La Réunion.
L’État avait pourtant pris un engagement clair vis-à-vis de nos éleveurs : il leur a demandé de ne pas répercuter ces 8 millions d’euros sur les consommateurs. En échange, le ministère de l’agriculture s’était engagé à prendre en charge le complément du RSA, dès lors qu’il aurait obtenu le feu vert de la Commission européenne.
Les éleveurs ont respecté leur engagement malgré la flambée des coûts de production consécutive à la crise de la covid-19, l’explosion du coût du fret à la fin des confinements et l’inflation galopante post-guerre en Ukraine.
Toutefois, l’État n’a pas encore respecté le sien. Bien que la Commission ait autorisé la France à verser cette aide, le ministère s’est abrité derrière le refus des collectivités locales de cofinancer ce dispositif, alors même qu’il n’en a jamais été question, et il a laissé sans réponse les nombreux courriers et les interrogations des éleveurs réunionnais.
Pourtant, le Président de la République a fait de la diversification alimentaire une priorité absolue et nous a invités collectivement, le 28 février dernier, à la mettre « au centre de notre ambition agricole ».
Madame la ministre, nous attendons donc votre réponse. Pouvez-vous aujourd’hui nous confirmer que l’État abondera bien l’enveloppe du régime spécifique d’approvisionnement de 8 millions d’euros supplémentaires, comme il s’y était engagé et comme l’Union européenne l’y autorise depuis l’été 2023 ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Malet, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Marc Fesneau, dont je me ferai la porte-parole.
Vous m’interrogez sur le régime spécifique d’approvisionnement et l’aide au fret pour les céréales destinées à l’alimentation animale.
Je voudrais tout d’abord clarifier le périmètre du feu vert que la Commission européenne aurait donné à l’État, sur la prise en charge du rehaussement du plafond du régime spécifique d’approvisionnement : celle-ci a bien confirmé en juin 2023 que le rehaussement du régime spécifique d’approvisionnement pouvait être abondé par des crédits nationaux, mais cela ne signifie pas que l’État a accepté d’en verser la totalité.
En effet, dans le cadre de la préparation de la visite officielle de la Première ministre à La Réunion en mai 2023, il a été décidé, concernant le financement du RSA, que le rehaussement de son plafond pour les filières animales serait pris en charge par la collectivité territoriale.
Cette volonté est bien connue : un courrier cosigné des ministres chargés de l’agriculture et des outre-mer a été adressé aux collectivités territoriales en août 2023. Ce courrier mettait en avant l’effort déjà consenti par l’État avec le relèvement de 15 millions d’euros des crédits du comité interministériel des outre-mer (Ciom) et demandait si la collectivité voulait contribuer au développement des filières animales de son territoire par la prise en charge de l’augmentation du plafond RSA et participer à la gouvernance du dispositif.
Les retours des différentes collectivités sont à ce stade encore incomplets sur les montants et les périmètres de répartition des coûts entre État, région et département. Mais le Gouvernement a confirmé, en février dernier, les termes initiaux de la négociation : un abondement de l’État n’est envisageable qu’à la condition d’un cofinancement de la part des collectivités territoriales.
Nous restons à la disposition des collectivités pour avancer sur la définition des montants et des périmètres de répartition des coûts entre l’État, les régions et les départements.
compatibilité des aides de la politique agricole commune avec l’agrivoltaïsme
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, auteur de la question n° 999, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Jean-François Longeot. Madame la ministre, ma question est simple : je souhaite porter à votre attention la problématique cruciale pour nos agriculteurs de la compatibilité entre les aides de la politique agricole commune (PAC) et le développement de l’agrivoltaïsme – un dossier que vous connaissez bien.
Vous le savez, ce sujet me tient particulièrement à cœur. De l’eau a coulé sous les ponts depuis la proposition de résolution tendant au développement de l’agrivoltaïsme en France, que j’avais déposée avec mon collègue Jean-Pierre Moga il y a deux ans : le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a été adopté, ce qui a permis de hâter le développement de l’agrivoltaïsme.
Notre chambre a instauré un cadre législatif novateur pour promouvoir cette forme d’agriculture durable. Malheureusement, des obstacles persistent, notamment en raison de l’arrêté du 13 mai 2023 relatif aux conditions d’éligibilité à la PAC, qui pose des difficultés majeures, en particulier du fait de la rédaction de son article 8.
Ce texte impose des critères stricts, notamment celui selon lequel 30 % d’une parcelle au maximum doivent être recouverts par des panneaux photovoltaïques, ce qui entrave la liberté des agriculteurs, lesquels cherchent parfois à équiper une plus grande surface de leurs terres. Cela n’a aucun sens d’admettre l’éligibilité à la PAC des surfaces couvertes à 28 % par des panneaux, mais pas celle des surfaces couvertes à 50 % !
De plus, les dispositions selon lesquelles l’usage non agricole doit être limité dans le temps et intervenir après la récolte ne correspondent pas à la réalité de l’agrivoltaïsme, tel qu’il se développe en France. Il est évident que les agriculteurs ne vont pas ôter leurs panneaux avant la récolte et les réinstaller quelques semaines après.
Face à cette situation ubuesque, je vous interpelle sur la possibilité de prendre un arrêté modificatif, afin d’ajuster ces critères et de mieux refléter la réalité de l’agrivoltaïsme. Les agriculteurs français réclament une meilleure compatibilité entre les aides de la PAC et ces activités non agricoles. Cette demande est, je crois, en accord avec les pratiques observées chez nos voisins.
Il est crucial que nous soutenions pleinement le développement de l’agrivoltaïsme en France, non seulement pour sa contribution à la transition énergétique, mais aussi pour sa capacité à promouvoir une agriculture plus durable et résiliente.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Longeot, la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi APER, à la rédaction de laquelle vous avez fortement contribué, fixe un cadre clair et opérationnel pour l’agrivoltaïsme.
Je le rappelle, l’agrivoltaïsme, tel qu’il est défini par la loi française, vise les installations photovoltaïques sur terre agricole exploitée, dont la fonction première est d’apporter un bénéfice à l’exploitation agricole – amélioration des rendements ou de la qualité agronomique, protection contre des aléas climatiques tels que la grêle, économies d’eau, amélioration du bien-être animal, etc.
Dans ces conditions, il n’y a pas d’opposition entre production énergétique et production agricole, cette dernière étant systématiquement privilégiée.
La loi APER indique explicitement que la présence d’une installation agrivoltaïque ne fait pas obstacle à l’éligibilité du terrain agricole au versement des aides de la PAC.
Vous avez raison de le souligner, plusieurs évolutions réglementaires sont nécessaires, dont la modification de l’arrêté définissant les conditions d’éligibilité aux aides de la PAC. Il s’agit en particulier de ne pas soumettre les projets effectivement reconnus en agrivoltaïsme à la limite du taux de 30 % de couverture que vous rappelez.
S’agissant d’agrivoltaïsme, une limite de 40 % de taux de couverture a été introduite, sur la base des éléments scientifiques actuellement disponibles. Mais je rappelle que la démonstration du bénéfice agronomique est le principal critère et peut exiger, selon les situations, de s’en tenir à des taux de couverture moindres.
Pour les projets en service qui répondraient à la définition de l’agrivoltaïsme, une visite par les services de l’État devra être menée rapidement, afin de confirmer le maintien de l’activité agricole et de permettre le versement des aides de la PAC.
En revanche, les installations photovoltaïques au sol sur terrain agricole, qui ne sont pas agrivoltaïques dès lors qu’elles ne permettent pas le maintien strict de l’activité agricole, continueront à être soumises au régime actuel. Vous le savez, il est désormais interdit de mettre des installations photovoltaïques au sol sur des terres agricoles exploitées.
En conclusion, je vous confirme qu’un arrêté modificatif est en cours de préparation et qu’il sera signé dans les prochaines semaines, pour ajuster la situation au cas spécifique de l’agrivoltaïsme sur terrain agricole.
accueil d’enfants palestiniens blessés en provenance de gaza
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, auteure de la question n° 1209, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, selon l’Unicef, la bande de Gaza est aujourd’hui l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant. Un enfant y est blessé ou tué toutes les dix minutes, ce qui signifie que, depuis le début de cette séance de questions, six enfants ont certainement été tués ou blessés à Gaza.
Jusqu’à présent, plus de 14 000 enfants ont été tués et deux fois plus blessés, dont des milliers qui ont été amputés, souvent sans anesthésie. Des milliers d’autres sont portés disparus et sont probablement sous les décombres.
En novembre dernier, le Président de la République a déclaré : « Concernant les enfants blessés ou malades de Gaza qui ont besoin de soins urgents, la France mobilise tous les moyens à sa disposition, notamment aériens, pour qu’ils puissent être soignés en France, […] où des dispositions sont prises pour recevoir jusqu’à 50 patients dans nos établissements hospitaliers. »
Or, selon l’association PalMed France, branche française de PalMed Europe qui regroupe des médecins palestiniens en Europe, malgré la transmission au ministère de l’Europe et des affaires étrangères d’une liste de noms d’enfants gazaouis blessés, aucun enfant en provenance de Gaza n’a été accueilli par la France.
Seuls quelques enfants, dont le nombre est bien inférieur à celui qui avait été évoqué dans cet engagement présidentiel, ont été accueillis en provenance du Caire, où ils étaient déjà pris en soins à l’hôpital.
Aujourd’hui, une quinzaine de médecins, dont deux Français, partent à Gaza dans le cadre d’une sixième mission organisée par l’association PalMed, via des organismes internationaux et toujours pas par des organismes français.
Aussi, que compte faire le Gouvernement pour faciliter enfin le départ de médecins français à Gaza ? Et quand la France ouvrira-t-elle les 50 lits actifs annoncés, afin d’accueillir des enfants gazaouis blessés en provenance de Gaza ? (M. Ian Brossat applaudit.)