Sommaire

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Guy Benarroche,

Mme Alexandra Borchio Fontimp.

Questions d'actualité au Gouvernement

rodéos urbains

réseaux d'éducation prioritaire rep et rep+

annonces du président de la république

augmentation de la pauvreté et crise du logement

violences contre les sapeurs-pompiers

contamination aux pfas de l'eau potable dans le haut-rhin

agression de sapeurs-pompiers en haute-savoie

insécurité et lutte contre la criminalité organisée à fort-de-france

préparation du projet de loi de finances pour 2026

situation de la nouvelle-calédonie

relations franco-algériennes

dysfonctionnements du dispositif maprimerenov'

avenir institutionnel de la nouvelle-calédonie

absence de cap institutionnel

situation de l'université lyon-ii

violences dans les outre-mer du bassin caribéen

PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé

vice-président

Mises au point au sujet de votes

Communication relative à une commission mixte paritaire

Communication d'avis sur des projets de nomination

Modification de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française

Adoption d'une proposition de loi organique dans le texte de la commission

Discussion générale

proposition de loi organique tendant à modifier le ii de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la polynésie française

Article unique

Vote sur l'ensemble

Amélioration du dispositif de protection temporaire

Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale

proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en france

Article 1er

Articles 2 et 3

Article 4

Article 5

Vote sur l'ensemble

Création d'un groupe de vacataires opérationnels de sécurité civile

Discussion et retrait d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

proposition de loi encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile

Article unique

Conférence des présidents

Conclusions de la conférence des présidents

Ordre du jour

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Guy Benarroche,

Mme Alexandra Borchio Fontimp.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres d'État, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat, ainsi que sur notre site internet.

J'appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

rodéos urbains

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Cyril Pellevat. Le week-end dernier, lors d'un rodéo urbain à Évian-les-Bains, Niccolo Scardi, sapeur-pompier volontaire, a été délibérément pris pour cible par un chauffard défavorablement connu des services de police. Après avoir été héliporté en urgence absolue, il a été hospitalisé ; son état de santé s'est heureusement amélioré au cours des derniers jours.

Plus tard, dans la commune de Saint-Cergues, deux sapeurs-pompiers volontaires ont été agressés alors qu'ils intervenaient à l'occasion d'un accident de la route. Je veux leur adresser, ainsi qu'à l'ensemble des sapeurs-pompiers de Haute-Savoie et de France et à leur famille, l'expression de tout notre soutien. Leur courage et leur engagement au service de nos concitoyens méritent respect et reconnaissance.

L'attaque d'Évian-les-Bains, filmée et largement diffusée, a choqué. Elle révèle une réalité inquiétante : aujourd'hui, les rodéos urbains ne sont plus des provocations ; ce sont des actes violents dirigés contre ceux qui incarnent l'ordre républicain.

L'auteur, délinquant multirécidiviste auquel son permis avait été retiré, est aujourd'hui visé par une enquête pour tentative d'homicide volontaire.

La loi du 3 août 2018 relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique a posé un premier cadre, mais force est de constater qu'elle ne suffit plus. Les dispositifs actuels ne permettent ni une réponse pénale suffisamment dissuasive ni une prévention efficace. Les élus, les forces de sécurité, les secours et les habitants attendent une réponse claire, ferme, mais aussi structurée.

Monsieur le ministre de l'intérieur, vous étiez avec François-Noël Buffet à nos côtés, à Évian, la semaine dernière ; votre présence et vos annonces ont été vivement appréciées, mais, face à la gravité de la situation, êtes-vous prêt à porter une initiative législative d'ampleur pour encadrer et sanctionner plus fermement ces pratiques ?

Mes collègues Sylviane Noël et Pauline Martin compléteront cette question. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Sylvie Vermeillet et M. Olivier Cadic applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux, à mon tour, saluer le corps des sapeurs-pompiers, qui est très éprouvé. J'ai une pensée particulière pour le chef Niccolo Scardi, qui lutte encore entre la vie et la mort, pour sa famille – son épouse et son fils de 7 ans –, ses amis et ses parents. Nous avons tous été très choqués par cet événement, et François-Noël Buffet et moi-même nous sommes rendus, dès le week-end dernier, à son chevet et au centre de secours, où nous nous sommes retrouvés, monsieur le sénateur.

Cette tentative de meurtre était véritablement choquante ; je l'ai qualifiée d'abjecte. Toutes les tentatives de meurtre le sont, bien évidemment, mais celle-ci l'est particulièrement, et cela pour trois raisons.

Tout d'abord, vous l'avez indiqué dans votre question, il y a eu de la part de ce chauffard une volonté délibérée de tuer, et il s'en est fallu de très peu que les sapeurs-pompiers accompagnant le chef Niccolo connussent le même sort.

Elle est abjecte, ensuite, parce que nous parlons là d'un récidiviste, d'une personne défavorablement connue des forces de sécurité, qui, bien qu'elle ait été privée de son permis de conduire, était au volant d'une voiture, dans le cadre d'un rodéo, puis de dérapages qui troublaient le voisinage.

Enfin, et surtout, elle est abjecte, parce qu'il y a, d'un côté, ce voyou, qui cherche à tuer, et de l'autre un sapeur-pompier volontaire, dont l'objectif, la mission, est précisément de sauver des vies humaines, y compris au péril de la sienne propre.

Voilà ce qui rend cette tentative de meurtre particulièrement abjecte. Quelles réponses apporter ? Je l'ai dit, il y a tout d'abord une réponse de long terme : mettre fin à cette société laxiste, qui a engendré ce que j'ai appelé une « fabrique de barbares », parce qu'il faut bien nommer les choses et regarder la réalité en face.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre d'État.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Cela impliquera de reconstruire des cadres et des hiérarchies, ainsi que de restaurer le respect. Il faudra aussi durcir la réponse pénale, comme vous l'avez dit. Nous sommes prêts à le faire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.

M. Cyril Pellevat. Je vous remercie de nouveau, monsieur le ministre d'État, de votre présence à nos côtés samedi dernier. Je vous remercie également de votre réponse à ma question.

Je comprends que des efforts sont déjà engagés, mais, face à la multiplication des rodéos urbains et des agressions des forces de l'ordre et des pompiers, nous avons besoin d'une réponse ferme. Nos concitoyens l'attendent, et nous serons à vos côtés pour la construire. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

réseaux d'éducation prioritaire rep et rep+

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe du RDSE. – Mme Anne-Sophie Patru applaudit également.)

M. Henri Cabanel. Ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale.

Mardi dernier, un jeune garçon de 14 ans s'est donné la mort, dans l'Hérault, le département dont je suis l'élu. Cela a suscité bien évidemment une sincère tristesse, et nous exprimons à sa famille et à ses proches toute notre solidarité.

Il serait indécent de corréler ce geste à la situation du collège La Dullague, de Béziers, où il était scolarisé ; telle n'est pas mon intention. Toutefois, ce drame met une fois en lumière cet établissement, qui réclame depuis des années d'être classé en réseau d'éducation prioritaire renforcé (REP+), une demande d'ailleurs soutenue par le rectorat. Ce collège se situe dans le quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) d'Iranget Grangette, qui, avec un taux de pauvreté de 71 %, est le cinquième quartier le plus pauvre de France.

Plus généralement se pose la question du gel national depuis 2019 du classement du réseau d'éducation prioritaire : six années ont passé sans aucune actualisation de ce classement, alors que, en vertu de la circulaire du 4 juin 2014, cette actualisation doit avoir lieu tous les quatre ans et il faut prioriser les REP dans les QPV !

Depuis 2019, donc, plus rien, en dehors des promesses renouvelées de ministre en ministre… Enfin, pas tout à fait rien : les auteurs d'un rapport de la Cour des comptes, publié voilà quelques jours, expliquent que les REP coûtent cher et préconisent de repenser l'éducation prioritaire.

Eh oui, l'éducation a un coût ! Mais faire de la politique, c'est établir des priorités en fonction des enjeux. Penser, repenser, faire, défaire et refaire, tout cela peut durer longtemps, mais les résultats des REP et REP+ ont fait la preuve de l'intérêt de ces dispositifs.

Madame la ministre d'État, quand privilégierez-vous les enjeux humains et l'éducation, plutôt que les budgets ? Quand réactualiserez-vous le classement des REP ? Plusieurs lois censées nous donner confiance ont vu le jour depuis 2017, mais la confiance ne se décrète pas. Elle se mérite par des actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Élisabeth Borne, ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Cabanel, je souhaite avoir à mon tour une pensée pour le jeune Is'Hak, pour sa famille, ses proches et toute la communauté éducative du collège de La Dullague, profondément choquée par ce drame.

Ma conviction est que, pour prévenir de tels drames, nous devons prendre à bras-le-corps la question de la santé mentale de nos jeunes. Or, je puis vous l'assurer, mon collègue Yannick Neuder et moi-même sommes pleinement mobilisés sur ce sujet, qui est au cœur des assises de la santé scolaire, que je clorai cet après-midi.

Vous évoquez plus particulièrement la question de l'éducation prioritaire. Comme vous, je suis convaincue que l'école doit offrir les mêmes chances de réussite partout et à tous.

La politique de l'éducation prioritaire a précisément pour objet de corriger l'effet des inégalités sociales et territoriales sur la scolarité des enfants. Cet objectif justifie l'effort significatif consenti à cette fin en faveur de mon ministère, puisqu'un montant de 2,7 milliards d'euros est consacré à cette politique cette année, ce qui représente une hausse de 70 % par rapport à 2017.

Cette augmentation s'explique notamment par le dédoublement des classes de grande section de maternelle, de cours préparatoire (CP) et de première année de cours élémentaire (CE1) que nous avons mise en œuvre.

Toutefois, vous l'avez rappelé, la carte actuelle date de 2014 et mériterait donc d'être actualisée. C'est un chantier complexe, mais nécessaire. Nous devons réinterroger notre modèle, pour le rendre à la fois plus efficace et mieux ciblé. C'est le sens du rapport de la Cour des comptes que vous avez mentionné. C'est également du travail que je vais demander au cours des prochains jours sur cette question à l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche.

Aussi, monsieur le sénateur, soyez assuré que l'éducation prioritaire est une priorité de mon action, et qu'elle le restera. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.

M. Henri Cabanel. Je vous remercie, madame la ministre d'État, mais vous n'avez pas répondu à ma question.

Je vous demandais quand vous réviseriez ce classement, notamment pour ce qui concerne cet établissement, qui a, hélas ! fait parler de lui dans l'actualité. Voilà un bon moment qu'il demande à être intégré à la catégorie REP+. Vous savez pertinemment, vous l'avez souligné, que ce dispositif a des résultats probants.

J'espère donc que cette carte sera révisée rapidement, pour la rentrée de septembre prochain, afin que les promesses de vos prédécesseurs ou de vous-même soient tenues. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. François Patriat applaudit également.)

annonces du président de la république

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Laurence Rossignol. Monsieur le Premier ministre, auriez-vous la gentillesse de partager avec nous ce que vous avez retenu de l'intervention du Président de la République d'hier soir (Sourires.) et ce que vous en déduisez pour la conduite de l'action du Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et RDPI. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER., ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Patrick Mignola, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice Rossignol, conformément à la Constitution, le Président de la République agit dans ce que l'on appelle son domaine réservé, les questions internationales ou de défense.

Ainsi, il a pris des initiatives s'agissant de nos relations avec les États-Unis ou avec la Russie, il s'est efforcé de réunir une coalition des volontaires pour obtenir la paix en Ukraine et il conduit l'action de la France à propos du drame de Gaza. Il devait donc évidemment, comme il le fait à échéances régulières, rendre des comptes aux Français.

Cela dit, lors de son intervention d'hier, il a également entendu articuler cette action avec la politique intérieure conduite par le Gouvernement. En effet, il n'est pas de grande puissance qui n'ait des finances saines, une économie durable et une jeunesse éduquée. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains. – Des sénateurs du groupe SER miment les mouvements d'un rameur.)

Mme Agnès Evren. Il n'a pas l'air très convaincu !

M. Victorin Lurel. Sa tâche est complexe !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. De même, il n'est pas de politique intérieure efficace qui ne s'appuie sur un message puissant et sur les valeurs de la République, celles qui ont fondé notre pays. (Bravo ! et applaudissements ironiques sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Fabien Gay. Déjà une minute d'écoulée !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. Si je puis percevoir dans vos yeux quelque ironie, que je relie à votre opposition au Président de la République, je reste persuadé, en ma qualité de ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, que nous pouvons partager un certain nombre des orientations données hier soir,…

M. Patrick Mignola, ministre délégué. … que celles-ci concernent la sécurité des Français, l'éducation, la protection de nos enfants face aux écrans ou encore l'organisation territoriale de notre pays.

Mme Cécile Cukierman. Il n'a rien dit !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. En tout état de cause, que l'on appartienne à l'opposition ou à l'alliance majoritaire qui participe au Gouvernement, force est de le reconnaître, ce qui est ressorti de cette émission hier soir, c'est que le Président de la République a une vision pour notre pays (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.),…

M. Patrick Mignola, ministre délégué. … que l'on peut partager ou non, mais qu'il a aussi des valeurs que, j'en suis sûr, nous partageons tous. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.

Mme Laurence Rossignol. Je vais vous aider, monsieur le ministre, en complétant votre propos à partir de ce que, comme beaucoup de Français, j'ai entendu.

Tout d'abord, à propos d'ArcelorMittal, le Président de la République a déclaré qu'il ne voulait pas bloquer les entreprises qui souhaitent « ajuster les choses ». Or les « choses », cela s'appelle des salariés, c'est-à-dire des gens qui n'ont que leur travail pour faire vivre leur famille, et les « ajustements », cela désigne, en l'espèce, 600 licenciements. Peut-être le Président de la République pourrait-il « ajuster » un peu son vocabulaire… (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)

D'ailleurs, je souhaite relever une incohérence : comment peut-on prétendre assurer la souveraineté de la France et de l'Europe en matière de défense et, en même temps, refuser les nationalisations temporaires et laisser filer l'industrie de l'acier, indispensable à l'armement ?

Ensuite, le Président de la République entend faire peser le financement de la protection sociale sur la consommation. Je traduis : en langage courant, cela s'appelle la TVA sociale, c'est-à-dire une augmentation de la TVA destinée à faire payer aux couches populaires et aux classes moyennes les cadeaux fiscaux que vous avez accordés au CAC40, aux actionnaires et aux rentiers. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)

Enfin, nous avons eu droit à un numéro d'autosatisfaction sur le chômage. Il faudra donc dire au Président de la République que, en Île-de-France, le chômage des jeunes a augmenté de 28 % au cours du dernier trimestre, sachant, que, dans le même temps, en raison de vos réformes de l'indemnisation du chômage, nombre d'entre eux ne touchent plus aucun revenu.

Par conséquent, à toutes ces annonces du Président de la République, je vous le dis solennellement, monsieur le Premier ministre, les socialistes s'opposeront avec fermeté et détermination, en recourant à tous les moyens dont le Parlement dispose. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)

augmentation de la pauvreté et crise du logement

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Mme Marianne Margaté. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée du logement.

L'Insee a récemment publié une enquête intitulée Pauvreté monétaire, privation et difficultés financières, qui montre que 15 % de la population se situe sous le seuil de pauvreté. L'inflation que nous connaissons depuis quelques années laisse craindre le pire à cet égard, et le nombre de familles qui rencontrent des difficultés chaque fin de mois va encore augmenter.

Hier soir, le Président de la République a parlé pendant trois heures, mais il n'a rien dit, ni sur la pauvreté ni sur le logement, alors que cette crise concerne 12 millions de personnes. En 2017, il déclarait : « Je ne crois pas au ruissellement, […] je crois à la cordée. » En ce qui nous concerne, nous ne voyons ni cordée ni ruissellement. Nous ne voyons que des familles de plus en plus nombreuses à être prises à la gorge par des dettes insurmontables.

Je pense notamment aux dettes locatives. On observe en effet une hausse sans précédent des loyers impayés : les commandements de payer ont crû de 11 % en un an. En outre, les commissaires de justice ont constaté une explosion des expulsions de locataires, qui ont augmenté de 87 % en un an. Or seuls 10 % à 15 % des personnes expulsées sont finalement relogées.

Combien d'enfants sont-ils concernés ? Combien vont à l'école après avoir passé la nuit dans une voiture ? Combien de ruptures scolaires sont ainsi provoquées ? Nous avons tous ici adopté une résolution demandant qu'il n'y ait plus d'enfants à la rue. Or la moindre des choses pour atteindre cet objectif est de ne pas les y envoyer, surtout sans solution de relogement.

La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (Dalo) a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, voilà dix-huit ans. Depuis lors, c'est la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, dite Kasbarian, qui prime, et 51 % des ménages que l'on expulse sans solution de relogement sont reconnus Dalo ; 18 650 ménages ne sont ainsi pas relogés dans les délais réglementaires.

Madame la ministre, si les locataires ont des devoirs, l'État en a aussi. Le droit au logement n'est pas appliqué aujourd'hui en France ; d'ailleurs, en 2023, c'était la première fois que l'accès au logement des ménages Dalo chutait, représentant seulement 4,81 % des attributions annuelles.

Ma question est donc simple : quand l'État respectera-t-il la loi ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Vous avez raison, madame la sénatrice, de rappeler que le logement connaît une crise inédite, qui pèse particulièrement sur les plus fragiles.

Face à cela, notre premier défi consiste bien évidemment à relancer la production de logements abordables. Pour ce faire, nous avons fait le choix résolu de nous appuyer sur les bailleurs sociaux. C'est le sens de la feuille de route que j'ai signée avec ce secteur en février dernier, dans la foulée du travail que j'avais préalablement mené avec les parlementaires, que je remercie, car ils ont été un vrai soutien, ainsi qu'avec Éric Lombard.

Ce travail a permis d'obtenir une baisse du taux du livret A à hauteur de 850 millions d'euros, afin d'encourager la production de logements, et une diminution de la réduction de loyer de solidarité (RLS). À cet égard, je remercie le Premier ministre, qui, malgré nos difficultés financières, a validé l'arrêté RLS consacrant la mobilisation de fonds propres pour obtenir ce taux du livret A et ces liquidités, afin d'être au rendez-vous pour atteindre l'objectif des 116 000 logements nouveaux et des 130 000 rénovations qui figurent dans la feuille de route conclue avec les bailleurs sociaux.

Évidemment, nous avons également relancé la Commission nationale des impayés de loyer , pour envisager des propositions de solutions, en coordination avec les départements, afin de mieux prévenir ce risque.

En outre, afin d'accompagner le secteur et de répondre ainsi au besoin d'attributions de logement, nous allons développer le prêt à taux zéro pour les ménages modestes, qui libéreront alors des places dans le parc locatif.

Nous améliorerons par ailleurs le statut du bailleur privé, afin de relancer la production de logements locatifs abordables privés.

Ainsi, parallèlement à la lutte contre l'habitat indigne, à laquelle le Sénat prend toute sa part, nous allons mettre les bouchées doubles sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI.)

violences contre les sapeurs-pompiers

M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Pascal Martin. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Comme notre collègue Cyril Pellevat, j'aimerais revenir sur l'agression inqualifiable dont a fait l'objet un sapeur-pompier volontaire samedi dernier, à Évian-les-Bains, en Haute-Savoie. Cet homme, aujourd'hui grièvement blessé, a été délibérément fauché par une voiture, alors qu'il tentait de mettre fin à un rodéo urbain. Le lendemain, deux sapeurs-pompiers ont été agressés dans le même département, alors qu'ils intervenaient pour un accident de la route.

À l'occasion de cette question, je veux rendre hommage à ces hommes, dont le seul tort aura été de s'engager au service de leurs concitoyens. Je veux aussi avoir une pensée pour leurs proches.

Aussi impressionnants et révoltants que soient ces faits, ils ne doivent pas être les arbres qui cachent la forêt des agressions quotidiennes dont sont victimes les sapeurs-pompiers. Comme les élus, les médecins et les enseignants, ils sont confrontés à la violence physique et verbale endémique de notre société.

Crachats, insultes, coups, voilà ce que récoltent ces femmes et ces hommes, qui risquent leurs vies pour protéger celle des autres et incarnent les valeurs de fraternité et de justice qui nous sont si chères. Je le dis simplement : pour eux, c'est un vrai traumatisme. Ils ne comprennent pas. Certains sortent de la caserne la boule au ventre.

Monsieur le ministre d'État, les pouvoirs publics ont fini par prendre conscience de cette réalité. Les peines encourues pour des violences contre les sapeurs-pompiers ont été alourdies en 2017. L'Observatoire national des violences envers les sapeurs-pompiers a été créé en 2020. Les chiffres que cet organisme communique attestent de la difficulté à endiguer durablement et substantiellement le phénomène. Ainsi, en 2024, chaque jour, quatre sapeurs-pompiers ont fait l'objet d'une agression. Cela suffit. C'est intolérable !

Face à cela, certains, tel le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, plaident pour une application effective des peines ; d'autres demandent que les sapeurs-pompiers soient mieux formés, qu'ils soient équipés de caméras-piéton ou encore que les dépôts de plainte soient anonymisés.

Monsieur le ministre d'État, que proposez-vous pour améliorer la sécurité des sapeurs-pompiers ?

M. le président. La parole est à M. le ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Martin, je souhaite souligner de nouveau, devant la Haute Assemblée, l'extrême émotion qui a été celle de Bruno Retailleau et de moi-même, samedi dernier, à Évian, quand nous avons su les conditions dans lesquelles le brigadier-chef Niccolo Scardi avait été agressé.

Et encore, en disant « agressé », je suis en dessous de la réalité, car il s'agit bel et bien d'un crime. D'ailleurs, le Procureur de la République a qualifié cet acte de tentative de meurtre, une information judiciaire a été ouverte et l'auteur a été bien évidemment placé en détention. La violence avec laquelle cette agression a eu lieu est tout à fait inacceptable. Elle est même effroyable.

Malheureusement, vous l'avez rappelé, en 2024, 1 462 agressions ont été signalées par l'ensemble de nos sapeurs-pompiers et 602 parmi ces derniers ont été blessés. Il n'est pas rare, depuis déjà longtemps, que nos sapeurs-pompiers, à l'occasion de leurs interventions dans le cadre de la lutte contre l'incendie ou du secours aux personnes, soient attaqués, blessés, « caillassés », parce qu'ils représentent une forme d'autorité, alors même qu'ils sont là pour secourir, aider et sauver.

Les peines pénales ont été augmentées, vous l'avez justement rappelé. Il faudra naturellement que les tribunaux et les magistrats appliquent fermement les sanctions.

M. Bruno Sido. Et voilà !

M. Roger Karoutchi. Tout à fait !

M. François-Noël Buffet, ministre. Néanmoins, ce ne sera sans doute pas suffisant. Nous allons donc devoir réfléchir, dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile, qui va se clore prochainement, à améliorer les choses, à renforcer la protection des sapeurs-pompiers ou à leur donner plus de moyens pour se protéger.

Lundi dernier, je me suis rendu à Montpellier. J'ai pu y visiter le centre de formation des pompiers de l'Hérault, qui est magnifique. J'étais avec les sénateurs Christian Bilhac, Jean-Pierre Grand et Hussein Bourgi. Nous avons vu à quel point nos pompiers, professionnels ou volontaires, sont engagés. Dans le cadre du Beauvau des polices municipales, nous allons devoir entendre leur appel.

Je recevrai pour ma part le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France vendredi prochain, au matin. Nous aborderons évidemment ce sujet. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

contamination aux pfas de l'eau potable dans le haut-rhin

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Jacques Fernique. Madame la ministre de la transition écologique, depuis lundi dernier, dans onze communes d'Alsace, il est interdit de boire l'eau du robinet ! C'est en tout cas interdit pour les populations jugées sensibles : enfants de moins de deux ans, femmes enceintes et allaitantes, personnes immunodéprimées.

En cause, une contamination par les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), qui nécessiterait de lourds investissements de traitement pour espérer revenir, à terme, à la normale, sachant que l'agglomération concernée n'en a pas les moyens ; notre collègue Patricia Schillinger pourrait en témoigner.

Qui est le pollueur ? Sans doute l'aéroport de Bâle-Mulhouse et les mousses anti-incendie qu'il a longtemps utilisées.

Ce cas n'est pas isolé : l'observatoire de la nappe d'Alsace révèle combien les PFAS, résultant de multiples autres usages, affectent bien d'autres zones de la région, de Lauterbourg à Colmar, de Thann à Chalampé. Cette situation alsacienne est un symptôme avant-coureur des dégâts des PFAS pour les milieux, pour la santé et, par conséquent, mes chers collègues, pour nos collectivités, obligées d'agir pour la qualité de l'eau.

Madame la ministre, le Sénat a inséré dans la récente loi du 27 février 2025 visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, dites PFAS, l'impérieuse nécessité de définir, d'ici au mois de février 2026, un plan de financement de la dépollution de l'eau dans notre territoire. Cette loi crée une redevance pour que les pollueurs commencent à payer. Ce principe, dit du pollueur-payeur, êtes-vous résolue à l'activer dès maintenant ou laisserez-vous ces Alsaciens, privés d'une eau saine, payer l'addition d'une eau qui deviendrait hors de prix ?

Cette loi anticipe, là où c'est possible, l'interdiction progressive des PFAS à laquelle l'Union européenne pourrait parvenir, mais ce texte, qui s'appliquera dès 2026, ne sera rien sans ses décrets. En outre, l'initiative européenne réunissant cinq pays ne débouchera pas sans une forte implication de la France.

Madame la ministre, contre les PFAS, le Parlement a fait son job. Faites-vous le vôtre ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Patricia Schillinger applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Fernique, le Gouvernement a pris ses responsabilités et fait son job !

Ce sont ce gouvernement et ses prédécesseurs qui ont mis en place un plan sur les PFAS, voilà plus de deux ans, avant même que la loi ne soit évoquée. Ce plan a permis de mesurer les rejets dans le milieu aqueux dans 2 900 sites industriels et de fixer aux 200 sites industriels les plus émissifs des régulations et des obligations de réduction des pollutions aux PFAS, qui, c'est vrai, affectent durablement les milieux, donc potentiellement notre eau potable.

Vous l'avez souligné, à Saint-Louis et dans son agglomération, les habitants ne peuvent plus boire d'eau potable en raison de l'emploi de mousses anti-incendie lors d'exercices dans un aéroport. Il s'agit d'un usage classique de ces produits dans le cadre de la politique de maîtrise des risques.

Cette situation montre qu'il faut accroître notre connaissance des usages des PFAS pour remplacer ceux qui peuvent être évités. Je vous confirme que nous travaillons actuellement sur les décrets permettant d'interdire ces produits dans les produits cosmétiques et les vêtements, hors vêtements de sécurité, de façon à écarter ces usages, qui sont à faible enjeu. Nous le faisons naturellement en lien avec les entreprises industrielles, afin de les accompagner dans l'organisation de la phase intermédiaire et la gestion de leurs stocks.

Je vous confirme également que j'ai demandé à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) des études sur 34 PFAS que nous recherchons dans l'eau potable, élargissant ainsi le champ de cette recherche.

Je vous confirme enfin que nous prélèverons une redevance supplémentaire à la redevance pour pollution sur le sujet spécifique des PFAS, à partir du 1er janvier 2026.

Vous pouvez compter sur le Gouvernement pour qu'il s'implique dans la résolution de cette question et porte une voix forte à l'échelon européen, afin de prévenir plutôt que de guérir ces pollutions coûteuses. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour la réplique.

M. Jacques Fernique. Je vous remercie, madame la ministre, de votre implication, notamment au sujet des décrets.

Toutefois, qui paiera le traitement à Saint-Louis ? Nos collectivités, en première ligne, ont besoin d'une action gouvernementale cohérente et rapide. Les PFAS sont persistants et tenaces : soyons-le aussi ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Laurence Rossignol et M. Bernard Jomier applaudissent également.)

agression de sapeurs-pompiers en haute-savoie

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sylviane Noël. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.

Samedi dernier, alors qu'il tentait de mettre fin à un rodéo urbain, un sapeur-pompier d'Évian a été volontairement fauché par un multirécidiviste âgé de 19 ans, avec une violence inouïe. Quelques minutes plus tard, ce même délinquant, bien connu des services, est revenu cracher sur la victime qui gisait au sol. Ce pompier volontaire de 38 ans, père de famille, est encore aujourd'hui dans un état très grave. J'ai une pensée pour lui et pour sa famille.

Le lendemain, toujours en Haute-Savoie, deux sapeurs-pompiers ont de nouveau été pris à partie, par un individu qui les a frappés alors qu'ils soignaient sa femme enceinte…

Monsieur le ministre, nous faisons face non pas à des faits divers, mais à des faits de société abominables, qui en disent long sur le niveau de décivilisation où nous sommes arrivés. Le pays a atteint un point de bascule en matière de sentiment d'impunité. Quand on est capable de faucher volontairement un pompier donnant de son temps pour secourir et sauver son prochain, c'est qu'il n'y a plus de limites en France !

C'est une réalité : ces délinquants, ces barbares n'ont plus peur de la justice ni de la loi. Ils savent que, aussitôt arrêtés, ils ressortiront libres, sans avoir rien compris ni rien appris.

Aussi, ma question est simple : quand le Gouvernement prendra-t-il enfin les mesures de fermeté qui s'imposent pour mettre un terme à cette escalade de l'horreur ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, je répondrai en lieu et place de mon collègue garde des sceaux, qui se trouve actuellement avec le Président de la République. Ils commémorent le crime commis à l'endroit de deux agents pénitentiaires lors de l'évasion de M. Amra.

Vous avez raison, et j'ai d'ailleurs employé les mêmes termes à vos côtés, il y a deux semaines : cette tentative d'homicide, comme l'a très bien qualifiée le procureur de la République, est non pas un fait divers, mais un fait de société. Plus choquant encore, le voyou, après avoir percuté le sapeur-pompier à toute vitesse, a fait demi-tour, baissé la vitre de sa voiture et craché sur la victime et sur le camarade qui était en train de porter secours à celle-ci. C'est absolument inadmissible.

Je pense – une fois encore, vous avez parfaitement raison – qu'il faut des réponses à la hauteur de la gravité des événements.

Pour commencer, je vous donnerai trois chiffres : ce voyou a 19 ans, quinze antécédents judiciaires et il a passé moins de six jours en prison – et encore, il s'agissait de préventive !

La question de l'hyperviolence, notamment celle des mineurs, ne sera pas réglée sans une réforme pénale, je dirais même sans une révolution pénale. En effet, on a choisi d'enfermer tous ces jeunes dans de longs parcours de violence, car la sanction qui suit les crimes de sang tombe souvent trop tardivement. Pour la victime comme pour eux-mêmes, il est alors trop tard pour rattraper les choses. J'appelle depuis longtemps cette réforme de tous mes vœux.

La doctrine face aux rodéos dépend toutefois du ministère de l'intérieur. Elle est double : d'un côté, la police et la préfecture de Paris donnent le droit de poursuivre les véhicules ; de l'autre, dans le reste de la France, la gendarmerie et la police nationale n'autorisent pas les poursuites. La circulaire que je signerai dans quelques jours visera à autoriser en cas de rodéo sur l'ensemble du territoire les poursuites, qui devront bien sûr se faire dans des conditions garantissant la sécurité.

J'ajoute que le Gouvernement a accompli d'importants efforts : le nombre de véhicules confisqués est en hausse de 55 % depuis six mois. Depuis un an, le nombre de personnes interpellées a augmenté de pas moins de 52 %. Comptez sur ma détermination ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Loïc Hervé et Jean-Baptiste Lemoyne applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour la réplique.

Mme Sylviane Noël. Monsieur le ministre, la France figure actuellement à la première place du triste palmarès des pays les plus violents d'Europe.

La majorité présidentielle doit maintenant ouvrir les yeux sur cette France Orange mécanique (M. Rachid Temal s'exclame.), qui gangrène notre société et l'enfonce chaque jour un peu plus dans l'abject ! Que faisait cet individu en liberté après quinze condamnations ?

Les Français attendent de nous un véritable choc d'autorité : réforme réelle et profonde de la justice des mineurs pour mettre fin à ces parcours délinquants, rétablissement des peines planchers, fin des remises de peine, application ferme et rigoureuse de la loi par les magistrats, construction rapide des 15 000 places de prison promises par Emmanuel Macron, réarmement de nos tribunaux pour une justice rapide et efficace. Agissons ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)

insécurité et lutte contre la criminalité organisée à fort-de-france

M. le président. La parole est à M. Frédéric Buval, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Catherine Conconne applaudit également.)

M. Frédéric Buval. Le groupe RDPI s'associe à l'hommage national rendu aux agents pénitentiaires tués à Incarville.

Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, je vous interroge aujourd'hui avant de l'être à mon tour par les mères de famille martiniquaises, qui se demandent pourquoi il faut toujours attendre qu'il advienne un drame pour que les demandes de moyens supplémentaires en outre-mer deviennent légitimes et acceptables. Comment leur expliquer que, en plein cœur de Fort-de-France, on peut impunément tuer trois personnes lors d'une fusillade impliquant des armes de guerre ?

La sidération est générale en Martinique, car la situation sécuritaire devient de plus en plus préoccupante aux Antilles. Force est de constater que, en dépit de la mobilisation de l'État et des élus, rien ne semble arrêter l'escalade de la violence qui embrase désormais tout l'arc caribéen.

En effet, cette tragédie du dimanche 11 mai s'inscrit dans un contexte de recrudescence significative des tentatives d'homicide. Depuis le début de l'année, on déplore déjà en Martinique douze homicides, soit un par semaine, principalement liés à des règlements de comptes et au trafic d'armes ou de drogue.

La Martinique, en raison de sa position géographique, est devenue la principale porte d'entrée de la drogue en Europe, devant la Guadeloupe et la Guyane.

Que dire aux familles endeuillées ? Comment ne pas partager la colère et, surtout, l'inquiétude de la population face à l'indicible sentiment d'insécurité, qui gangrène peu à peu la confiance de nos compatriotes de Martinique dans l'État de droit ?

Bien sûr, il faut plus de moyens matériels et humains pour la police, la gendarmerie et la justice. C'est indispensable pour restaurer à court terme l'autorité et l'ordre public. Néanmoins, face à une jeunesse désœuvrée et en perte de repères, il est tout aussi urgent, sur le long terme, de proposer des modèles positifs d'émancipation, c'est-à-dire des modèles autres que l'exil ou la débrouille, notamment par la prévention, l'emploi, la formation, le sport ou la culture.

Un renforcement des contrôles et des patrouilles est prévu, mais ces redéploiements se font à moyens constants. Aussi, ma question est simple : quelles sont les mesures supplémentaires que le Gouvernement envisage de prendre rapidement pour lutter contre l'enracinement en Martinique de réseaux criminels bien organisés et alimentés par des trafics internationaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Catherine Conconne et M. Jérôme Durain applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je partage entièrement votre constat. La fusillade du week-end dernier, qui a causé trois morts, est inacceptable.

Dès mon arrivée à Beauvau, j'ai tenu à déployer plus de 3 700 gendarmes et policiers. Ces agents ont permis de répondre immédiatement – cela a été une question de jours – au crime que vous mentionnez : déploiement de deux pelotons de gendarmerie, renforcement des patrouilles et opérations de confiscation des armes sous l'autorité judiciaire, grâce à des fouilles systématiques.

Le Gouvernement pense que le réseau de vidéosurveillance n'est pas assez dense. Le préfet se tient à la disposition du maire pour apporter son aide en la matière.

Vous avez également raison de dire que ces fusillades ont quelque chose à voir avec les narcotrafiquants. Les Antilles, particulièrement la Martinique, sont une zone de transit toute proche des pays producteurs, permettant de livrer de la drogue en Europe ou en Amérique du Nord.

Il y a quinze jours, j'ai envoyé le directeur général de la police nationale sur place pour une mission dont il me rendra compte en me formulant des propositions. Je peux d'ores et déjà vous faire trois annonces très importantes en matière de surveillance des accès à la Martinique, afin d'améliorer cette dernière.

Premièrement, à des fins de surveillance maritime et côtière, le Gouvernement déploiera trois bateaux supplémentaires et 140 gendarmes, puis, à l'automne prochain, un drone de longue portée et deux radars de surveillance, technologiquement très efficaces.

Deuxièmement, il sera procédé dès ce week-end à des contrôles au sein de l'aéroport sur 100 % des passagers. En effet, les trafiquants saturent désormais de mules les avions.

Troisièmement, et enfin, d'ici à quinze jours ou trois semaines, le Gouvernement équipera d'un scanner mobile le grand port maritime, ce qui permettra de mieux contrôler les containers.

Ces dispositifs sont, à mon avis, de première nécessité. Mais le Gouvernement ne s'arrêtera pas là. J'attends les propositions du directeur général de la police nationale dans le cadre de sa mission spécifique antidrogue à la Martinique et dans les Antilles. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

préparation du projet de loi de finances pour 2026

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Somon. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

Lundi, Matignon indique que le Gouvernement envisage de proposer au Président de la République l'organisation d'un référendum sur le budget pour 2026.

Mardi, l'Élysée laisse entendre que ce n'est pas à l'ordre du jour.

M. Laurent Somon. Mercredi, le Président de la République exclut toute procédure référendaire en matière budgétaire et fiscale, ne souhaitant pas dessaisir le Parlement, mais déclare dans le même temps qu'un référendum sur la politique économique pourrait être proposé…

Jeudi, Bercy appelle les sénateurs pour leur proposer la constitution de groupes de travail thématiques sur le projet de loi de finances (PLF) 2026, afin de prendre en compte les attentes du Parlement.

Vendredi, Bercy continue de détricoter méticuleusement nos propositions, comme le dispositif de lutte contre la fraude aux dividendes adopté à l'unanimité par le Sénat lors du dernier examen budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Laurent Somon. Aussi, monsieur le Premier ministre, y a-t-il un pilote dans l'avion ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Laurent Somon, le copilote va vous répondre, sous l'autorité du pilote, qui est le Premier ministre. (Sourires.)

La méthode du Gouvernement n'a pas changé : dès son arrivée à Matignon, le Premier ministre a demandé à mon ministère qu'un dialogue ait lieu. Celui-ci se poursuit dans toutes ses dimensions.

Tout d'abord, en matière de sécurité sociale – retraites, santé… –, il prend la forme du conclave, pour reprendre le terme adopté, qui se déroule en ce moment. Il avance en toute autonomie. Nous en verrons les résultats dans quelques semaines.

Ensuite, le Premier ministre et l'ensemble des membres du Gouvernement ont engagé une revue des politiques publiques de l'État, de façon à maîtriser la dépense dans le projet de loi de finances qui sera proposé au Parlement à la rentrée.

Enfin, en matière d'organisation territoriale, sous l'autorité du Premier ministre et du ministre François Rebsamen, mon ministère a engagé le 6 mai dernier une concertation avec les associations représentant les élus de toutes les strates de collectivités locales, afin de déterminer comment ces dernières peuvent contribuer à l'effort commun.

Je rendrai compte de ces concertations au Premier ministre, qui rendra ses arbitrages avant l'été prochain.

Dans le même temps, mon ministère dialoguera, comme il l'a fait pour l'adoption du projet de loi de finances pour 2025 malgré des délais réduits, avec l'ensemble des parties qui le souhaitent, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, de façon à préparer le texte qui, de façon normale, sera présenté aux députés à la rentrée.

Les choses se déroulent comme prévu, de façon organisée et méthodique. Mon ministère rendra compte régulièrement au Sénat des avancées de ce processus. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour la réplique.

M. Laurent Somon. D'après Alphonse Karr, « l'incertitude est le pire de tous les maux, jusqu'au moment où la réalité vient nous faire regretter l'incertitude ». Nous y sommes !

L'incertitude se retrouve, d'une part, dans la définition d'un cap et d'objectifs nationaux qui ne soient pas que des discours et qui mènent à des réformes, et, d'autre part, dans la conduite de nos politiques. Organisées, ces dernières gagneraient en cohérence, donc en efficacité.

Ne revivons pas cette période au cours de laquelle le Président de la République regardait le Premier ministre comme – je cite le verbatim d'un conseiller de l'Élysée d'alors, que chacun reconnaîtra – « un athlète pliant sous la charge de 200 kg, marchant sur une planche étroite au-dessus d'un ravin. » Je me dis que si l'athlète s'en sort indemne, la prochaine fois, le Président fera passer la charge à 400 kg. Quant à la planche, elle sera remplacée par un fil !

D'aucuns estiment que « sans l'incertitude, l'aventure n'existerait pas ». Lorsqu'elle est d'essence poétique ou amoureuse, l'incertitude est passionnante, mais, dans les circonstances « confli-actuelles », elle est anxiogène, pour reprendre un terme employé par le Président du Sénat.

Il est temps non plus de partir à l'aventure, mais d'affronter les réalités. Parler, c'est bien ; agir, c'est préférable ! Aussi, monsieur le Premier ministre, employez votre ardeur à vous mettre en action ! Proposer un dialogue dans toutes ses dimensions, c'est bien, mais avoir une direction, c'est mieux !

Redonnez un cap, relevez la ligne d'horizon de notre pays, mettez-vous en harmonie avec les autres membres du Gouvernement et donnez à tous des espérances, de sorte que l'avenir soit résolument plus rassurant. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)

situation de la nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Mes pensées vont, pour commencer, aux Néo-Calédoniens. Depuis maintenant une année, jour pour jour, ces derniers vivent une grave crise politique : quatorze personnes sont mortes, dont des gendarmes, les dégâts se chiffrent à 2 milliards d'euros, les émeutes ont duré des semaines, l'économie est au bord du chaos, la jeunesse est désœuvrée, la population s'inquiète, des ingérences étrangères se font jour, l'image de la France dans l'Indopacifique est dégradée. Telle est la situation que vivent nos concitoyens.

Monsieur le ministre des outre-mer, le 30 avril dernier, vous indiquiez que c'était « l'accord ou le chaos ». D'accord, il n'y a pas eu…

Aussi, j'ai deux questions.

Tout d'abord, quels étaient vos objectifs au travers de votre proposition d'État associé ? Il est important de les spécifier devant la représentation nationale.

Ensuite, l'exécutif – Président de la République, Premier ministre et Gouvernement – avait-il des propositions concrètes pour sortir de la crise ? J'y insiste, nos concitoyens ne peuvent pas rester plusieurs semaines ou plusieurs mois sans solution.

Je le répète, cette crise met à mal la population de la Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre des outre-mer.

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Rachid Temal, vous avez très justement décrit la situation de la Nouvelle-Calédonie.

Depuis un an – en ce qui me concerne, depuis plusieurs mois –, le Gouvernement travaille au redressement du territoire, grâce à un soutien qui se chiffre à 3 milliards d'euros pour la seule année 2024. Il continuera en ce sens, en se penchant sur les indispensables réformes économiques et fiscales.

Par ailleurs, il assure, sous l'autorité du haut-commissaire de la République et avec les moyens du ministère de l'intérieur, la sécurité de tous les Calédoniens. Ils la méritent, car chacun sur place a droit à la protection de l'État. Cet effort sera poursuivi.

À la demande du Premier ministre, que je remercie de la confiance qu'il m'accorde, j'ai voulu recréer les conditions d'un dialogue entre les différents partenaires politiques, indispensable à la reconstruction d'un projet commun. La méthode du Gouvernement a permis que tous – je dis bien tous – se retrouvent autour de la même table, non pas seulement pour discuter, mais pour négocier, ce qui était encore impensable il y a quelques mois.

En effet, les fractures sont profondes après le traumatisme du 13 mai 2024 et les inacceptables violences qui ont fait de nouveau couler le sang. La rupture de confiance trouve toutefois son origine dans une histoire ancienne, qu'il faut regarder en face. Tant que nous n'aurons pas réglé la question de la fin du processus de décolonisation, donc de l'exercice du droit à l'autodétermination du peuple kanak, les conditions ne seront pas réunies pour rétablir le dialogue et de la paix civile.

Sans mettre sur la table une formule particulière, j'ai proposé une voie, afin de concilier l'aspiration au maintien d'un lien fort avec la France et l'achèvement du processus de décolonisation. Essentiel, ce dialogue se poursuivra entre l'État et les partenaires politiques, avec le soutien – je n'en doute pas – du Sénat.

Je serai dans quelques jours devant le groupe de contact sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, présidé par Gérard Larcher, pour fournir une nouvelle fois un maximum d'informations et d'explications. Je pense que le dialogue peut être fructueux dans les jours et semaines qui viennent.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre d'État.

M. Manuel Valls, ministre d'État. J'ai beaucoup pensé à Jean-Marie Tjibaou, à Jacques Lafleur, à Michel Rocard et à Lionel Jospin ces derniers temps. Non que j'éprouve la moindre nostalgie, mais parce que, au nom d'une certaine idée de la responsabilité, ils ont montré la voie à suivre. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour la réplique.

M. Rachid Temal. Que dire ?... Vous n'avez pas développé votre projet, aussi, j'espère que nous aurons l'occasion d'échanger de nouveau dans le cadre du groupe de contact.

Il faut se dire les choses. Vous avez cité Michel Rocard et Lionel Jospin, mais à cette époque, l'État était impartial : il apportait de la sérénité. Aujourd'hui, à lire les gazettes – j'espère que ce sera démenti rapidement –, on comprend que des options différentes s'opposent au sein de l'exécutif et même du Gouvernement, ce qui est une mauvaise chose.

Certes, vous êtes invité à venir rapidement dans le groupe de contact, monsieur le ministre. Toutefois, il est important qu'un débat sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie ait lieu en séance publique, monsieur le Premier ministre. (M. le Premier ministre acquiesce.) En effet, plusieurs sujets sont devant nous, notamment la question du corps électoral pour les élections provinciales.

Quand j'entends les propos de la présidente de la province du Sud, permettez-moi de m'inquiéter très profondément pour la suite des discussions qui ont été annoncées. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

relations franco-algériennes

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Boyer. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, le 31 mars dernier, le Président de la République et son homologue algérien s'accordaient sur une reprise du dialogue et de la coopération. Pourquoi une telle bienveillance de la part de notre pays, alors que l'incarcération inique de Boualem Sansal dure depuis maintenant six mois ?

Le bilan de cette tentative de rapprochement sous couvert de repentance perpétuelle et unilatérale est calamiteux. Aucun dossier n'a avancé, Boualem Sansal est toujours un otage politique et diplomatique du président Tebboune et les affronts se succèdent, puisque l'Algérie vient d'expulser quinze agents des services diplomatiques et consulaires français.

Obligations de quitter le territoire français (OQTF) refusées, Kabyles et réfugiés politiques menacés sur le sol français, élus de notre pays actuellement utilisés par l'Algérie pour déployer ses stratégies d'influence : la liste est longue. Vous qualifiez vous-même ces faits de « brutaux » et d'« incompréhensibles ». Ils révèlent les véritables intentions d'Alger à notre égard.

Pour y répliquer, vous avez annoncé le renvoi en Algérie de tous les agents titulaires de passeport diplomatique ne disposant pas de visa. Combien sont-ils ? Pouvez-vous nous en dire plus sur la « riposte graduée » ?

Vous n'avez pas répondu à mon collègue Pascal Allizard, il y a quelques jours. Aussi, je vous le demande de nouveau : pourquoi poursuivre les relations entre nos pays sur la base des accords dérogatoires de 1968 ? Le coût de ces accords reste inconnu, malgré les interrogations du Sénat.

M. Michel Savin. C'est vrai !

Mme Valérie Boyer. Par ailleurs, monsieur le ministre, comment justifiez-vous le silence du Président de la République, qui, hier, après trois heures d'interview, n'a pas prononcé une seule fois le nom de notre compatriote Boualem Sansal ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Valérie Boyer, la relation entre les gouvernements algérien et français est totalement gelée depuis le 14 avril dernier, date à laquelle les autorités algériennes ont pris la décision injustifiée et injustifiable d'expulser douze agents français en poste sur leur territoire.

Cette décision s'oppose à l'esprit qui avait présidé à l'échange entre les deux présidents et à ma visite du 6 avril. Cette dernière avait vocation à ouvrir le champ des coopérations, y compris en posant la question de la révision éventuelle des accords qui régissent notre relation, mais aussi à plaider en faveur d'un geste d'humanité à l'égard de notre compatriote Boualem Sansal, dont le Gouvernement se préoccupe de l'état de santé et des conditions de détention.

Le gouvernement français a répondu à ces décisions brutales de manière immédiate et ferme, en expulsant à son tour douze agents algériens en poste en France et en rappelant notre ambassadeur – je lui rends hommage – pour des consultations, qui sont en cours.

Dimanche 11 mai, les autorités algériennes ont pris, une nouvelle fois, une décision incompréhensible et brutale consistant à demander le départ immédiat de leur territoire des agents français en poste pour de courtes missions, à savoir moins de quatre-vingt-dix jours, lesquelles ne nécessitent pas de visa.

Le gouvernement français y a répondu une fois encore de manière immédiate et ferme : j'ai convoqué le chargé d'affaires algérien à Paris pour lui signifier que nous prenions exactement la même décision – renvoyer tous les agents titulaires d'un passeport diplomatique qui ne disposent pas de visa – et que, en fonction de l'évolution de la situation, nous ne nous interdisions rien.

La France s'est montrée ouverte au dialogue. Les autorités algériennes ayant préféré prendre un autre chemin, il leur appartient désormais de choisir : veulent-elles mettre un terme aux tensions qui perturbent la relation entre nos deux pays ? (Mme Valérie Boyer lève les yeux au ciel.)

De son côté, la France ne s'interdit pas – j'y insiste –, si besoin, de prendre de nouvelles mesures, comme elle l'a déjà fait sous l'autorité du Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Olivier Cadic applaudit également. – Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Grosperrin. Ce qui veut dire ?

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.

Mme Valérie Boyer. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais il y a urgence : Boualem Sansal est en danger de mort. Pourquoi ne répondez-vous pas aux demandes d'intervention en sa faveur ?

Rien ne justifie que la France cesse de défendre ses intérêts ou qu'elle accepte encore, avec le soutien d'une partie de la gauche, des provocations et des ingérences qui n'ont que trop duré ! Comme l'a justement rappelé Bruno Retailleau, « la France est une grande nation. Il n'y a pas seulement un problème diplomatique, il y a aussi une question de fierté du peuple français, qui ne veut plus que l'Algérie puisse nous humilier. »

Soixante-trois ans après, il est temps de changer de paradigme et de revenir sur des accords iniques et défavorables à la France. Quelles que soient les douleurs de l'Histoire, rien ne peut justifier que l'on humilie notre pays, que l'on retienne un de nos compatriotes, âgé et malade, que des ingérences aient lieu sur notre sol ou que des actions soient menées à l'encontre de nos compatriotes réfugiés politiques.

Monsieur le ministre, il faut vraiment que cesse ce comportement : il y a urgence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

dysfonctionnements du dispositif maprimerenov'

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Amel Gacquerre. Ma question s'adresse à Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Elle porte sur l'enjeu de la rénovation énergétique du logement, plus précisément sur les dysfonctionnements qui affectent le dispositif MaPrimeRénov'.

Lundi dernier, une manifestation était organisée devant le siège de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), l'opérateur de l'État chargé de verser les fonds. Les manifestants dénonçaient un allongement considérable des délais de paiement de la prime. Cette situation affecte très lourdement les particuliers, qui s'endettent pour réaliser les travaux. Et certains professionnels du bâtiment, parfois au bord de la faillite ou à court de trésorerie, se retrouvent contraints de licencier.

Outre les retards de paiement, les délais d'instruction des dossiers se sont également allongés. Cela signifie que MaPrimeRénov' est, en quelque sorte, victime de son succès, pour le meilleur et pour le pire.

Pour le meilleur, parce que le nombre de rénovations d'ampleur a triplé au premier trimestre 2025 par rapport à la même période en 2024.

Pour le pire, car le ralentissement des procédures serait causé par la multiplication des contrôles dans le cadre de la lutte contre les fraudes. De fait, un dossier sur dix serait frauduleux…

Par ailleurs, la montée en puissance du dispositif fait craindre une insuffisance des crédits budgétaires qui lui sont dévolus. Pour rappel, son enveloppe globale a été considérablement réduite entre 2024 et 2025, au motif que les crédits de 2024 auraient été largement sous-consommés.

Madame la ministre, ma question est triple. Dans quelles proportions les délais de paiement se sont-ils allongés et comment comptez-vous les réduire ? Comment comptez-vous faire face au développement de la fraude ? Enfin, comptez-vous abonder le budget alloué à la prime si les demandes sont plus importantes que prévu ? (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Madame la sénatrice Amel Gacquerre, MaPrimeRénov' a permis de soutenir la rénovation thermique de 2,5 millions de logements de particuliers depuis 2020.

Comme vous l'avez rappelé, il faut distinguer les délais d'instruction des dossiers et les délais de paiement une fois les travaux effectués. Les délais de paiement sont stables entre 2024 et 2025, soit quarante jours en moyenne. En revanche, les délais d'instruction ont augmenté, spécifiquement pour les rénovations d'ampleur.

Ces retards ont plusieurs causes.

Tout d'abord, ils sont liés à la forte dynamique du nombre de dossiers de rénovation. Comme vous l'avez rappelé, l'outil est victime de son succès : le triplement des rénovations d'ampleur montre bien que le Gouvernement a visé juste. D'ailleurs, c'est la première année que le nombre de ces rénovations décolle vraiment.

En outre, face à la demande de plus en plus forte, l'adoption tardive du PLF 2025 a eu des répercussions non négligeables sur les délais. Il faut le mentionner.

Enfin, le Gouvernement a fait de la lutte contre les fraudes un axe prioritaire et indispensable de cette politique publique, étant donné ce que l'on pourrait qualifier de professionnalisation des arnaques. Évidemment, le renforcement des contrôles allonge les délais.

Il faut laisser le temps aux agences de s'adapter aux nouveaux outils – elles doivent néanmoins le faire rapidement ! –, notamment à ceux qui figurent dans la proposition de loi du député Cazenave, que le Sénat a adopté tout récemment. Les conclusions de la commission mixte paritaire réunie sur ce texte sont en ce moment même examinées à l'Assemblée nationale ; Amélie de Montchalin, qui étude le sujet avec attention, se trouve au banc des ministres.

En parallèle, les services instructeurs doivent effectivement être renforcés, car nous devons poursuivre dans les meilleures conditions cette politique dans les prochaines années, et nous allons le faire. Une expérimentation est d'ores et déjà en cours dans plusieurs territoires : elle vise à apporter un appui national supplémentaire en matière de ressources humaines pour limiter et réduire les délais d'instruction.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre. Comme vous l'aurez compris, madame la sénatrice, le Gouvernement est mobilisé pour assainir la situation et être au rendez-vous de la réduction des délais.

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour la réplique.

Mme Amel Gacquerre. J'entends qu'il faille laisser le temps de s'adapter à l'accroissement exponentiel du nombre de demandes. Mais je vous alerte de nouveau, madame la ministre : il est problématique de mettre en péril des milliers d'entreprises.

avenir institutionnel de la nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)

M. Georges Naturel. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

Monsieur le Premier ministre, un an jour pour jour après le début des émeutes insurrectionnelles en Nouvelle-Calédonie, je veux avoir une pensée pour toutes les victimes de cette violence, ainsi que pour celles et ceux qui ont souffert et qui souffrent encore. Leur courage m'oblige.

Les récentes négociations entre indépendantistes et non indépendantistes, sous l'égide du ministre d'État Manuel Valls, se sont achevées sans qu'aucune convergence décisive ait pu être trouvée. Force est de constater que ces négociations, voulues comme un sursaut de dialogue, ont été un échec.

Or la Nouvelle-Calédonie n'a plus le luxe du temps. L'économie s'effondre, la société est profondément fracturée et les Calédoniens s'interrogent sur l'avenir d'un pays dont le destin et la paix restent suspendus à la conclusion d'un nouvel accord politique.

Dans ce contexte d'urgence politique, je souhaite vous poser trois questions simples, mais essentielles.

Tout d'abord, à l'heure où le silence succède à l'échec, quelles suites concrètes le Gouvernement entend-il donner au processus de négociation ?

Ensuite, à quelle date entendez-vous fixer les prochaines élections provinciales, reportées à deux reprises dans des conditions exceptionnelles, mais désormais attendues comme un repère démocratique indispensable ?

Enfin, le Gouvernement envisage-t-il de déposer, préalablement à ce scrutin, un projet de loi organique permettant d'ouvrir partiellement le corps électoral provincial, notamment à tous les natifs de Nouvelle-Calédonie et aux petits-enfants de citoyens calédoniens, afin de rendre plus démocratiques les prochaines élections provinciales ?

Il s'agit non plus seulement aujourd'hui de maintenir la paix, mais de reconstruire un pacte de confiance entre Calédoniens. La République est attendue, non comme un arbitre lointain, mais comme le garant actif d'un avenir partagé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre des outre-mer.

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Georges Naturel, nous avons, vous et moi, évoqué ces sujets, y compris à Nouméa.

J'ai évidemment pris acte de l'absence d'accord sur l'essentiel entre les partis à ce stade. Cependant, contrairement à votre analyse, je pense que les points de convergence pour l'avenir entre les différents partenaires politiques méritent d'être étudiés et peuvent tracer un chemin commun.

Vous le savez, le Conseil d'État, dans son avis sur la proposition de loi organique visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, présentée par Patrick Kanner, a considéré que ce nouveau report se justifiait, afin de donner le temps de rechercher un nouvel accord, la situation économique et sociale compromettant la sérénité nécessaire à l'organisation d'un scrutin.

Bien que la situation économique et sociale demeure extrêmement compliquée, comme je l'ai rappelé au sénateur Temal il y a un instant, un nouveau report des élections en l'absence d'accord apparaît difficile politiquement et juridiquement.

Cependant, j'ai bon espoir que les discussions se poursuivent, car un accord est indispensable et incontournable si l'on veut la stabilité et la paix. Je sais pouvoir compter sur votre sens de la mesure et de l'intérêt général.

Je ne veux pas m'avancer tout de suite ni sur une date d'organisation des élections ni sur la question du corps électoral. Nous avons encore un peu de temps pour permettre le rapprochement des points de vue.

Quoi qu'il en soit, je le dis clairement : de la même manière que l'on ne saurait organiser un référendum sans les Kanaks, on ne peut pas non plus entreprendre une réforme du corps électoral contre eux. Fort de cette maxime, je vous invite à réfléchir et à participer – je sais que vous le ferez, cher Georges Naturel – à l'élaboration de toute solution permettant d'avancer vers un compromis. (M. François Patriat applaudit.)

absence de cap institutionnel

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jérôme Durain. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

Je vais citer le général de Gaulle. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Francis Szpiner. Il n'est jamais trop tard !

M. Jérôme Durain. Celui-ci écrivait, à propos du président Albert Lebrun : « Au fond, comme chef d'État, deux choses lui avaient manqué : qu'il fût un chef ; qu'il y eût un État. » Hier soir, nous avons vu qu'il n'y a pas de chef. Et où est passé l'État ? (Mme Colombe Brossel approuve.)

Le chef, tout d'abord. Emmanuel Macron n'a plus les moyens politiques de ses révolutions. Sa virtuosité est désormais stérile, le patron est devenu chroniqueur, il ne lui reste que le commentaire et la justification de ses quatre-vingt-seize mois à l'Élysée. Où est passée sa vision pour le pays ? Chacun peut d'ailleurs ressentir de la gêne à voir le Président de la République ratifier, les unes après les autres, les propositions du maire de Béziers.

L'État, ensuite. Que reste-t-il de l'État régalien quand on transfère des compétences de police autant par incapacité à faire que par volonté de décentraliser ? Que reste-t-il de l'État régalien quand nous en sommes à imaginer louer à l'étranger des places de prison ?

Le Président de la République a dit hier soir : quand le Parlement légifère, il est difficile de l'arrêter... (Exclamations sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.) Que reste-t-il de la Ve République elle-même quand le Gouvernement en est réduit à scruter les propositions de loi pour déterminer et conduire la politique de la Nation ?

En sommes-nous vraiment arrivés là ? Un pays endetté, un Président de la République sans ressort, des services publics en carafe et des référendums sans sujet ni calendrier ! Chacun voit que nous sommes dans l'ornière. Comment et quand comptez-vous nous en sortir ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. (Exclamations ironiques sur les mêmes travées.)

M. Patrick Mignola, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Durain, il y a un chef, c'est le Président de la République, le seul Français qui ait été élu par tous nos compatriotes. C'est de cela qu'il tire sa légitimité. (Murmures sur des travées des groupes SER et Les Républicains.)

Et il y a un État, certes dans une situation inédite, à l'Assemblée nationale en particulier et au Parlement au sens large : l'autorité du Premier ministre, avec un Gouvernement qui rassemble plusieurs forces politiques ayant accepté de travailler ensemble, nous permet d'avancer.

Après les textes budgétaires, que vous avez très largement contribué à voter, ici, au Sénat, nous avons pu progresser sur des textes agricoles, afin de tenir la parole qui avait été donnée à nos agriculteurs. Nous avons aussi avancé sur quasiment tous les textes concernant les collectivités locales. Il y en a encore deux en discussion : la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local et la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux (Trace).

Nous avançons également sur les lois sociétales, et la navette parlementaire se poursuit s'agissant du texte sur l'énergie.

M. Max Brisson. Ce n'est pas la question !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. La situation est difficile. Et pourtant, ce Parlement, il tourne.

M. Jérôme Durain. Tout seul !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. Vous avez attiré mon attention sur le domaine régalien. En quatre mois, avec le ministre d'État, ministre de l'intérieur, nous avons pu voter la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, dont vous étiez l'un des inspirateurs avec Étienne Blanc, que je salue.

Hier, avec le ministre d'État, garde des sceaux, nous avons fait voter la loi visant à aménager le code de la justice pénale des mineurs et certains dispositifs relatifs à la responsabilité parentale.

M. Michel Savin. Il faut aller plus loin !

M. Patrick Mignola, ministre délégué. Plusieurs propositions de loi, émanant souvent du Sénat, nous permettront d'avancer également sur des sujets sportifs, culturels et régaliens. Je pense, en particulier, à la lutte contre le terrorisme et à l'éloignement des étrangers dangereux.

M. Max Brisson. Et la proposition de loi Savin ?

M. Patrick Mignola, ministre délégué. Votre question, monsieur le sénateur, bien qu'elle ait été brillamment formulée, ne correspond donc qu'imparfaitement à la réalité ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.

M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, il s'agissait moins d'une question que d'une inquiétude ! Vous connaissez la responsabilité gouvernementale des socialistes (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.). Nous ne censurons pas à la légère. Nous prêtons nos voix à des textes qui les méritent.

Toutefois, encore faut-il qu'il y ait une vision : où est-elle ? Encore faut-il qu'il y ait un arbitre : qui est-il ? Encore faut-il qu'il y ait un sursaut : nous ne le voyons pas venir ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

situation de l'université lyon-ii

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. Max Brisson. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Le 9 avril dernier, j'ai demandé des sanctions contre les agresseurs du professeur Balanche. Le 30 avril, ma collègue Agnès Evren a renouvelé cet appel. Nous sommes le 14 mai, et je suis contraint de poser pour la troisième fois la même question. Car, depuis un mois, aucune sanction n'a été prise, aucune reprise en main n'a eu lieu et il n'a été procédé à aucune identification des agresseurs.

Mme Valérie Boyer. Il ne s'est rien passé !

M. Bruno Sido. Rien n'a été fait !

M. Max Brisson. Pourtant, il y a quelques semaines, ces mêmes individus négociaient l'occupation d'une salle avec la présidence.

M. Max Brisson. De qui se moque-t-on ?

Ma question est donc simple : l'autonomie des universités autorise-t-elle de piétiner les libertés académiques, de tolérer la violence et, surtout, de révéler au grand jour l'impuissance du ministère ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Brisson, vous revenez de nouveau sur l'incident inacceptable qui a eu lieu le 1er avril dernier à l'université Lyon-II.

Comme je l'ai déjà fait à de nombreuses reprises et comme la ministre d'État, Elisabeth Borne, l'a fait également, au Parlement ou dans les médias, je tiens à adresser devant vous un message de fermeté absolue et de soutien total envers le maître de conférences Balanche, la communauté académique et l'université de Lyon-II.

Interdire à un maître de conférences, à un professeur ou à un chercheur de faire cours, c'est extrêmement grave et cela mérite évidemment des sanctions à la hauteur.

Dès la connaissance des faits, le recteur a déclenché un signalement au procureur au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. Le ministère s'est porté partie civile. Nous avons également apporté publiquement notre soutien au maître de conférences et à l'université, qui ont déposé plainte. Une enquête, qui est toujours en cours, a été ouverte par le parquet de Lyon.

M. Michel Savin. Et alors ?

M. Philippe Baptiste, ministre. Dès qu'elle aura permis d'identifier les auteurs, il est évident, monsieur le sénateur, que des procédures disciplinaires seront engagées par l'université.

J'ajoute, par ailleurs, que la présidente de Lyon-II et le maître de conférences Balanche sont aujourd'hui menacés de mort dans leur université. Avec le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, j'ai dû m'assurer qu'ils bénéficiaient bien tous deux des protections nécessaires. Cette situation est intolérable. J'appelle aujourd'hui à de la retenue et à de l'apaisement sur ce sujet.

Par ailleurs, comme je l'ai déjà indiqué, le 28 avril, le recteur a fait un autre signalement, s'agissant cette fois-ci du vice-président du conseil d'administration de l'université de Lyon-II, à propos d'un hommage appuyé à M. Nasrallah. Le 5 mai, ce même vice-président a démissionné.

En parallèle, nous travaillons avec le ministre de l'intérieur sur l'intervention rapide des forces de l'ordre lorsque les présidents d'université le demandent, et avec le garde des sceaux sur les signalements au titre de l'article 40.

Comme vous le constatez, monsieur le sénateur, je ne crois pas que nous fassions preuve d'une quelconque tolérance ou d'une quelconque permissivité. C'est au contraire une tolérance zéro et une très grande fermeté que nous affichons sur l'ensemble de ces sujets.

Mme Agnès Evren. Cela ne saute pas aux yeux !

M. Laurent Burgoa. À suivre…

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Monsieur le ministre, l'heure n'est pas à la retenue, comme vous venez de le souligner. Ouvrons les yeux ! Certaines universités sont devenues des citadelles de l'extrême gauche (Marques d'ironie sur les travées des groupes SER et GEST.), avec la complicité silencieuse des directions et la complaisance de certains professeurs. (Marques d'approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)

Au nom d'une idéologie radicale, dans certaines universités, les recrutements sont biaisés, les financements fléchés, la recherche orientée et la controverse étouffée. Et gare à celui qui ose penser autrement : il est ostracisé, invectivé, violenté !

L'affaire Balanche, monsieur le ministre, n'est pas anodine. Elle est la révélatrice d'une emprise idéologique sur certaines universités. Elle traduit la pensée profonde de ceux qui, imprégnés par le wokisme et l'islamogauchisme, ne supportent plus la moindre contradiction. Ils ferment alors les yeux sur les actes de violence lorsque ceux-ci servent leur dessein idéologique.

Non, monsieur le ministre, l'heure n'est pas à la retenue. Elle est aux sanctions, à la fermeté et à la reprise en main, pour enfin rétablir l'ordre républicain ! (Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.)

violences dans les outre-mer du bassin caribéen

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Micheline Jacques. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, dimanche dernier, la Martinique a été secouée par une fusillade d'une violence inouïe : trois morts, quarante-cinq douilles retrouvées sur les lieux. Celle-ci vient s'ajouter à une trop longue liste de chiffres vertigineux relatifs à la violence dans les outre-mer du bassin caribéen : une fusillade à Saint-Martin la semaine dernière a fait un mort, un motard a été tué par balles en Guadeloupe le mois dernier, etc.

La Guyane est le département le plus meurtrier de France avec 20,6 meurtres pour 100 000 habitants. Viennent ensuite la Guadeloupe, avec 9,4 meurtres, et la Martinique avec 6,4 meurtres pour 100 000 habitants. Nous enregistrons déjà 24 meurtres depuis le début de cette année !

Au total, depuis le début de l'année, on compte environ un homicide par semaine dans les outre-mer caribéens. Seul Saint-Barthélemy échappe à ces funestes statistiques.

Au moins en partie, ces crimes par armes à feu sont liés au trafic de drogue et d'armes. Plus d'un millier d'armes ont été saisies en 2024 et les saisies de drogue atteignent des records. Ces chiffres indiquent que votre action porte ses fruits, monsieur le ministre, et qu'elle doit non pas faiblir, mais, au contraire, s'amplifier.

Le mois dernier, j'ai appelé ici même à la vigilance, car un hub de la drogue et des armes est en train de se constituer à 900 kilomètres de la France, en Haïti !

Je réitère ma demande d'amplification de la sécurisation dans les territoires, mais aussi de renforcement de la coopération. À défaut, nous ne viendrons pas à bout de ce phénomène de violence, qui est multinational.

Monsieur le ministre, de quels moyens disposez-vous et quelles mesures avez-vous prises pour empêcher la circulation d'armes illégales dans les outre-mer caribéens et, d'une manière générale, dans les outre-mer ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Madame la présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer, chère Micheline Jacques, nous dressons bien sûr le même constat : la cause racine de cette ultra-violence, c'est le narcotrafic, plus généralement la criminalité organisée, qui englobe à la fois la drogue et les armes.

Cette zone est très sensible, parce qu'elle est située sur la route de la drogue et du trafic d'armes. L'Office anti-stupéfiants (Ofast) a d'ailleurs estimé que 55 % du total des saisies de drogue avaient comme provenance géographique la zone caraïbéenne.

J'ai évoqué il y a quelques instants, en réponse à une question précédente, les mesures de riposte immédiate. Je me concentrerai donc sur les mesures structurelles qui concernent précisément la criminalité organisée. J'ai demandé au directeur général de la police nationale de se rendre en mission dans la zone. Il a fait le déplacement il y a quinze jours. Il me remettra un rapport qui comprendra un certain nombre de mesures.

Sans attendre, nous avons renforcé les moyens de la lutte maritime, avec cent quarante gendarmes de plus affectés au trait de côte, trois bateaux supplémentaires, un drone de longue portée et deux radars de bonne définition. Nous mettrons en place à l'aéroport, dès ce week-end, le contrôle à 100 % de l'ensemble des passagers, pour détecter les mules. Dans quelques jours, un scanner mobile sera positionné sur le grand port maritime.

Par ailleurs, nous avons inauguré ce matin l'état-major interministériel de lutte contre la criminalité organisée (EMCO). Ce dispositif, issu du texte sur le narcotrafic, est capital ; il concentrera dans un même lieu l'ensemble des services de renseignement et d'enquête de quatre ministères. Les personnels qui y sont affectés – direction nationale de la police judiciaire, douanes, etc. – nous ont d'ores et déjà indiqué qu'ils commençaient à ressentir l'effet positif d'un tel dispositif.

Soyez assurée, madame la sénatrice, de ma détermination totale : cette zone n'est pas sous contrôle, mais nous refusons la fatalité et nous mettrons en œuvre d'autres mesures encore pour protéger nos populations d'outre-mer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour la réplique.

Mme Micheline Jacques. Monsieur le ministre, je ne doute pas que votre action et votre détermination redonneront de l'espoir à nos populations ultramarines, qui vivent dans la peur.

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 21 mai 2025, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)

PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

2

Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour une mise au point au sujet d'un vote.

M. Franck Montaugé. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 277 sur l'ensemble de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires, mon collègue Gilbert-Luc Devinaz et moi-même souhaitions voter contre, et non nous abstenir.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour une mise au point au sujet d'un vote.

Mme Catherine Di Folco. Lors du scrutin public n° 271 sur l'ensemble de la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé, mes collègues Sylvie Valente Le Hir et Daniel Laurent souhaitaient voter pour.

Par ailleurs, lors du scrutin public n° 277, mon collègue Alain Houpert souhaitait s'abstenir.

M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour une mise au point au sujet d'un vote.

M. Patrice Joly. Lors du scrutin public n° 277 sur l'ensemble de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires, je souhaitais voter contre, et non m'abstenir.

Il en va de même de mes collègues Éric Jeansannetas, Jean-Claude Tissot et Viviane Artigalas.

M. le président. Acte vous est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles figureront dans l'analyse politique des scrutins concernés.

3

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l'article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets et autres matières est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

4

Communication d'avis sur des projets de nomination

M. le président. En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable, par 32 voix pour et 1 voix contre, à la nomination de Mme Lydie Evrard aux fonctions de directrice générale de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

Par ailleurs, la commission des lois a émis un avis favorable, par 37 voix pour et 1 voix contre, à la nomination de M. Christian Charpy aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

5

 
Dossier législatif : proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française
Article unique (début)

Modification de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française

Adoption d'une proposition de loi organique dans le texte de la commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, présentée par Mme Lana Tetuanui et M. Teva Rohfritsch (proposition n° 223, texte de la commission n° 581, rapport n° 580).

Ce texte a fait l'objet d'une consultation de l'Assemblée de la Polynésie française, qui a émis un avis défavorable le 24 avril 2025.

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Lana Tetuanui, auteure de la proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et RDPI.)

Mme Lana Tetuanui, auteure de la proposition de loi organique. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, je salue toutes celles et tous ceux du fenua, c'est-à-dire de notre territoire, qui nous suivent via le net : ia ora na – bonjour à tous !

Permettez-moi avant tout de remercier le président du Sénat, ainsi que l'ensemble des présidents de groupe, d'avoir inscrit notre proposition de loi à l'ordre du jour de cette séance.

Cette proposition de modification du II de l'article 43 de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française, que mon collègue Teva Rohfritsch et moi-même avons déposée, tend tout simplement à accorder aux maires des 48 communes et des 98 communes associées la possibilité d'intervenir, « s'ils le souhaitent » – ces mots ont leur importance –, dans certains domaines relevant de la compétence de notre collectivité.

En effet, si les dispositions actuelles de notre statut obligent au vote d'une loi du pays pour permettre l'intervention de nos communes dans les compétences énumérées au II de l'article 43, il se trouve que rien n'a été fait depuis 2004. Ce constat a été mis en exergue dans les rapports de diverses missions sénatoriales et dénoncé fortement par nos maires lors du dernier congrès de nos communes à Tubuai.

Il aura fallu de la volonté, de la détermination et de l'audace pour faire bouger les lignes, pour clarifier et légitimer les actions de nos tavana, c'est-à-dire de nos maires.

Pour lever toute ambiguïté, il n'est pas question ici de transfert de compétences, et encore moins de transfert de moyens. Il ne s'agit que de la volonté légitime de faire en sorte que le pays, l'État et les communes avancent ensemble, en bonne intelligence.

Cette réforme est d'autant plus attendue que, en Polynésie, la clause de compétence générale ne produit que des effets a minima.

La modification est largement soutenue par 47 des 48 maires polynésiens – cherchez l'erreur… (Sourires.) Par ailleurs, lors de son examen de la proposition de loi, le 16 avril dernier, la commission des institutions de l'assemblée de Polynésie a émis sur celle-ci un avis favorable à l'unanimité. C'était sans compter sur les manœuvres du leader indépendantiste, qui n'a d'autres centres d'intérêt que la décolonisation et l'indépendance de la Polynésie…

Nous proposons une nouvelle rédaction du II de l'article 43, pour permettre aux communes d'intervenir quand elles le souhaitent, sans forcément solliciter les moyens du pays, mais avec l'obligation d'informer les autorités de celui-ci et de l'État. En ce sens, l'amendement du rapporteur qui a été adopté en commission des lois répond parfaitement aux préconisations formulées en Polynésie française, auxquelles je souscris pleinement.

Monsieur le ministre, nous espérons vivement que le souhait de nos tavana d'agir conformément au texte qui est soumis à notre examen de ce jour sera entendu et que vous ne céderez pas aux manœuvres purement politiciennes ou aux caprices de certains.

Mes chers collègues, oui, je plaide pour plus de considération à l'égard de l'ensemble de nos maires polynésiens dans l'exercice de leurs fonctions.

Je plaide aussi pour que nos tavana, au travers de cette modification statutaire, cessent d'être les victimes de marchandages politiques, au gré des gouvernements.

Je plaide surtout pour que nous puissions tous répondre à cet appel, en votant unanimement notre proposition de modification. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Teva Rohfritsch, auteur de la proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Teva Rohfritsch, auteur de la proposition de loi organique. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, Lana Tetuanui et moi-même vous soumettons aujourd'hui, avec force et conviction, une proposition de loi organique très attendue par nos maires de Polynésie, nos tavana.

Il s'agit de modifier le statut de la Polynésie française pour permettre enfin à nos communes de répondre efficacement aux besoins concrets de leurs habitants dans des domaines autres que ceux de l'eau, de l'assainissement ou du traitement des déchets ménagers.

En Polynésie, la clause générale de compétence a été attribuée non aux communes, mais au pays, la collectivité. Depuis l'adoption de la loi organique du 27 février 2004, l'article 43 du statut de la Polynésie française prévoit que, pour intervenir dans certains domaines d'intérêt local, les communes polynésiennes doivent être expressément et préalablement habilitées par une loi du pays, selon un mécanisme lourd.

Comme ma collègue l'a rappelé, ce mécanisme n'a été mobilisé que trois fois en vingt ans, notamment lors de la crise covid, pour des mesures sociales d'urgence. C'est vers les maires que l'État et le pays en plein chaos se sont alors tournés.

Mes chers collègues, trois fois en vingt ans ! C'est maigre… Vous l'aurez compris, ce chiffre témoigne non pas d'une absence de besoin, mais d'une sorte de verrou institutionnel qui pose potentiellement la question de la libre administration de nos collectivités.

Nos communes constituent le seul maillon visible de la République, le seul lien direct entre nos populations et une autorité publique, la seule porte à laquelle il est possible de frapper lorsque surviennent les urgences du quotidien ou pour de simples démarches administratives.

Oui, nos îles sont paradisiaques, mais elles sont isolées par l'océan, sur une étendue de 5 millions de kilomètres carrés. Dans nos îles, le mot « résilience » n'est pas une notion philosophique : c'est un défi quotidien, avec pour lourd fardeau le paroxysme de la vie chère, sur fond de carence des services publics.

Dans ce contexte, c'est vers nos tavana que se tournent les administrés quand ils requièrent une intervention sur des dispositions relevant du champ de compétence du pays.

Ce constat a été fréquemment rappelé ici, ces derniers mois, par les missions sénatoriales qui ont fait le déplacement jusque dans nos archipels, notamment dans le cadre des travaux de notre commission des lois et de la délégation aux outre-mer. Je sais que vous-même y êtes très sensible, monsieur le ministre.

Bien qu'il soit au service de sa population, un maire ne peut aujourd'hui venir en aide à ceux qui font vivre leur île, les pêcheurs, les agriculteurs, les artisans ou les perliculteurs.

Les tavana sont bien seuls dans leur commune, les administrations ne pouvant être représentées sur chacune des 78 îles habitées du fenua. Aussi, parce que nécessité fait loi, ils agissent, sans cadre, sans filet, sans moyens, pour répondre aux urgences, comme ils le peuvent.

Nos tavana agissent pour faire éclore des activités sur leur territoire : réunir des artisans sous un abri de fortune pour accueillir un bateau de croisière et vendre des produits locaux ; transporter les fruits et légumes vers le village avec une barge ; soutenir le nettoyage des plages ; préserver la paix sociale ; protéger les ressources du lagon, qui se réchauffe et s'acidifie ; mener des actions de protection des espèces endémiques…

Ils agissent sans pouvoir mobiliser de l'ingénierie publique, sans gouvernance claire et cohérente, s'exposant à des risques évidents, notamment sur le plan pénal.

Concrètement, cette proposition de loi vise à mettre le droit en conformité avec la réalité. Elle assouplit le dispositif prévu dans le statut, en supprimant l'obligation préalable d'une loi du pays habilitant expressément les communes à intervenir dans les domaines d'action énumérés.

Enrichie avec pertinence par l'amendement, adopté en commission des lois, du rapporteur Mathieu Darnaud, que je tiens à remercier personnellement de son travail de très haute qualité, notre proposition de loi prévoit aussi d'encourager encore le dialogue entre les collectivités. Elle répond ainsi aux demandes formulées par le gouvernement de M. Brotherson, actuel président du territoire.

J'y insiste, notre texte ne crée pas de rupture et ne vient en aucun cas réduire ou limiter le champ d'intervention des autres institutions de la Polynésie française. Il s'agit bien d'habiliter nos communes à agir, au plus près de nos populations, dans un cadre qui respecte la réglementation édictée par l'État et le pays, auquel elles ne sauraient se substituer.

Mes chers collègues, comme l'a dit ma collègue Lana Tetuanui, cette évolution statutaire est soutenue, en Polynésie française, par 47 maires sur 48. Elle a recueilli le soutien unanime de la commission des institutions de notre assemblée le 16 avril dernier, même s'il est vrai que, en séance plénière, elle a pu diviser la majorité indépendantiste.

Notre débat doit être abordé de manière transpartisane, avec la rigueur et la solennité auxquelles nous appelle la matière organique.

Protéger les tavana et leur reconnaître la capacité d'agir par la mise en application des principes de différenciation et d'adaptation, n'est-ce pas là l'essence même de notre mandat de sénateur ? À cet égard, je sais toute la sagesse de notre chambre et toute la bienveillance et l'attention que vous accordez à nos territoires, certes lointains, mais bien ancrés dans la République.

C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à soutenir cette proposition de loi organique, à soutenir les maires de Polynésie française et à rappeler tous ensemble que le Sénat est bien la chambre des communes, mais aussi celle de tous nos tavana.

Mauruuru ! Je vous remercie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, depuis toujours, notre institution, le Sénat, fait résonner la voix de nos communes.

Le « grand conseil des communes de France », comme l'appelait Gambetta, a toujours su tisser un lien étroit avec nos différentes collectivités locales, dans l'Hexagone, mais également outre-mer. C'est finalement l'esprit de ce texte, dont je veux saluer les auteurs.

Aujourd'hui, le Sénat, en examinant cette proposition de loi, souhaite mettre en exergue les nécessaires proximité et agilité que permettent les communes.

À de nombreuses reprises, il a souligné dans différents rapports – je pense notamment au dernier en date, celui de nos collègues Nadine Bellurot, Guy Benarroche et Jérôme Durain –, la nécessité que les communes de Polynésie, n'ayant pas la clause de compétence générale, puissent prendre des initiatives qui leur permettent d'exercer des pans de compétences non définis au I de l'article 43, parce qu'il y va d'un intérêt de proximité. Cela a été rappelé par notre collègue Teva Rohfritsch et mis sur le devant de la scène notamment à l'occasion de la crise sanitaire du covid.

J'oserai poser la question : finalement, quel territoire a plus que la Polynésie française, qui s'étend sur un espace aussi vaste que l'Europe, besoin de cette proximité ? Quel territoire a davantage besoin de donner une capacité d'initiative aux maires, les tavana, pour qu'ils puissent répondre aux diverses problématiques, lesquelles sont tout à fait différentes selon que nous nous situons à Tahiti, aux Marquises ou aux Australes ?

La volonté des auteurs du texte est justement de permettre plus d'agilité. Je l'ai dit, le statut de la Polynésie française dresse la liste, au I de l'article 43, des compétences qui sont celles des communes en Polynésie française. Mais c'est bien le pays qui a la clause de compétence générale.

Aussi, il semblait important de sécuriser les pratiques de nombreux maires en Polynésie, qui sont sollicités par la population sur de nombreux sujets – au-delà de la crise sanitaire, on peut évoquer, plus largement, l'action de proximité en matière d'aide sociale ou de développement économique.

Je crois que cette proposition de loi organique répond à cet impérieux besoin d'agilité, à ce besoin de plus de proximité que tous, quelle que soit leur appréciation du texte, ont souligné, que ce soit le président du gouvernement, le président de l'assemblée de Polynésie française ou le syndicat des communes – je le dis pour avoir échangé avec l'ensemble des responsables politiques concernés.

Pour répondre à cet impérieux besoin de proximité et d'agilité, il était en effet nécessaire de revisiter le II de l'article 43 du statut, qui permet aux communes d'aller au-delà des compétences énumérées au I du même article.

Nous avons, bien sûr, entendu les préoccupations du pays. À cet égard, considérant qu'il y avait urgence à agir, je me suis efforcé de présenter un amendement visant à ce qu'un dialogue soit établi entre les communes et le pays, pour que l'exercice partagé de la compétence puisse s'opérer dans les meilleures conditions possible, avec ou sans convention.

J'insiste sur un point important : comme notre collègue Lana Tetuanui l'a dit à raison, ce que demandent les tavana de Polynésie française, ce n'est assurément pas d'exercer plus de compétences ni de voir décentralisés des pans entiers de l'action publique. Ce qu'ils demandent, c'est tout simplement de pouvoir agir de façon plus sécurisée et plus encadrée, pour répondre à cette exigence de proximité que j'ai mentionnée, par-delà les nécessaires lois du pays, dont il a été rappelé qu'il n'y en a malheureusement eu que trois en vingt ans. Tel est, mes chers collègues, l'enjeu de ce texte.

Compte tenu du consensus autour du dernier rapport du Sénat sur le sujet – je l'ai cité – et de la quasi-unanimité qui s'est manifestée pour soutenir cette initiative législative, je crois que, aujourd'hui encore, nous aurons tous ici la volonté de faire entendre la voix des tavana, qui s'est élevée à plusieurs reprises.

Mes chers collègues, en votant ce texte, je crois que vous ferez œuvre utile pour les tavana, pour la proximité et pour les habitants de la Polynésie française. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP, RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, madame, monsieur les auteurs de la proposition de loi organique, mesdames, messieurs les sénateurs, la Polynésie française est un territoire unique au sein de la République.

Elle abrite plus de 280 000 habitants, répartis sur 48 communes, elles-mêmes disséminées dans 5 archipels, comptant 118 îles, dont 76 sont habitées. Elle s'étend sur 4 000 kilomètres carrés de terres émergées, dispersées sur 5 millions de kilomètres carrés d'océan, soit – rappelons-le – la superficie de l'Union européenne. On conçoit que, dans ces conditions, les enjeux et les attentes ne soient pas forcément les mêmes selon que l'on habite aux Marquises, dans les îles du Vent ou dans les Australes.

Ces quelques chiffres permettent de mieux appréhender le contexte dans lequel intervient cette initiative.

Le cadre institutionnel qui est celui de la Polynésie est également unique. Il est le fruit de la géographie, vous l'avez compris, mais aussi de l'histoire. Et il se caractérise aujourd'hui par une grande autonomie, tant les transferts de compétences vers le pays sont nombreux.

Auditionné hier par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les conséquences des près de 200 essais nucléaires qui ont été menés en Polynésie française entre 1966 et 1996, j'ai eu l'occasion de rappeler que la France était redevable à la Polynésie et aux Polynésiens.

Il en résulte aujourd'hui qu'il n'en va pas en Polynésie française comme il en va ailleurs. Il faut parfois des règles singulières pour adapter la manière d'exercer les politiques publiques, afin de mieux répondre aux besoins de nos concitoyens.

Je veux saluer le travail et la détermination, chacun dans un style différent, des auteurs de la proposition de loi, Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch, deux sénateurs à l'écoute des maires polynésiens et engagés pour l'amélioration des dispositifs juridiques et normatifs. Et nous savons à quel point l'exercice du droit, en Polynésie française, requiert ambition et approfondissement.

Je veux aussi saluer l'apport du rapporteur, qui a permis d'améliorer le dispositif du texte. Cher Mathieu Darnaud, vous avez réussi une synthèse dont d'autres n'auraient pas été capables et qui n'était pas évidente concernant la Polynésie – j'y reviendrai.

Le point de départ de cette initiative est, comme l'ont expliqué les auteurs de la proposition de loi, la situation et les compétences des communes polynésiennes, de création relativement récente : la majorité d'entre elles a vu le jour en 1971.

Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, la loi organique du 27 février 2004 définit le statut de l'autonomie et la répartition des compétences. La Polynésie est unique, je le répète, en ce que les communes ne disposent pas de la clause générale de compétence, qui est réservée au pays. Leurs domaines d'interventions sont définis à l'article 43 de la loi organique.

Le I de cet article énumère le champ des compétences des communes. Il énumère neuf items, dont la voirie communale, la collecte et le traitement des déchets ménagers, la gestion des eaux usées, les écoles du premier degré…

Le II, qui fait l'objet de la présente proposition de loi, prévoit un mécanisme permettant l'exercice par les communes d'autres compétences, mais après le vote d'une loi du pays. Or force est de constater que ce mécanisme ne fonctionne pas, sans doute parce qu'il est trop complexe.

J'en veux pour preuve qu'il n'a été utilisé que trois fois en vingt ans, dont une fois pendant la pandémie de covid, alors même qu'il permet des actions de proximité dans des domaines comme l'aide sociale, l'économie, la culture, le patrimoine local ou le sport.

Dans cet hémicycle, sans doute encore plus qu'ailleurs, on sait que l'échelon communal est celui de la proximité. Et quiconque a exercé des fonctions de maire sait que les administrés attendent que ce dernier réponde à leurs besoins spécifiques quand les autres échelons ne peuvent y pourvoir ! Qui mieux que le maire est en prise avec les besoins des populations, leurs aspirations, leur détresse parfois ?

Vous me l'avez expliqué, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, notamment à l'occasion d'une rencontre avec les maires du pays : le contexte actuel, en Polynésie, n'y déroge pas. Et que font les maires, compte tenu de la rigidité du cadre législatif ? Ils exercent déjà de facto certaines compétences qui relèvent pourtant du pays.

L'organisation des festivals culturels et des opérations cartables, les interventions spécifiques pour aider les familles en difficulté à payer la cantine de leurs enfants, l'aménagement des sentiers de randonnée, la gestion des musées ou les interventions en matière de logement : tout cela, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la Polynésie française le font déjà, mais en dehors d'un cadre juridique sécurisé.

Les maires agissent dans un esprit de responsabilité, car, par-dessus tout, ils savent les devoirs que leur fonction implique auprès de leurs administrés.

Néanmoins, les élus locaux aussi ont besoin de sécurité. L'exercice des compétences doit être réalisé dans un cadre organisé et, si possible, serein. Cette sécurité s'obtient d'abord par un cadre juridique adapté à la réalité du terrain et qui permette aux maires de faire ce à quoi la nécessité les oblige déjà.

La présente proposition de loi organique est très courte, puisqu'elle comporte un unique article. Elle vise l'efficacité. Elle a pour objet de faciliter et de sécuriser juridiquement l'exercice des compétences par les communes de la Polynésie française.

Voilà pour l'esprit général. Reste à définir les meilleures modalités d'articulation de l'exercice des compétences entre le pays et les communes, car nous devons évidemment garder également à l'esprit un principe cardinal, celui de la lisibilité et de l'efficacité de l'action publique, au service de l'intérêt général.

La rédaction initiale de la proposition de loi prévoyait la suppression de la condition d'adoption d'une loi du pays comme préalable pour permettre l'intervention de communes ou d'EPCI dans les domaines prévus au II de l'article 43 de la loi organique.

La suppression de cette condition pouvait être vue comme une simplification bienvenue, mais pouvait aussi interroger sur la bonne organisation des compétences entre le pays et le bloc communal – vous en avez d'ailleurs débattu.

De même, nous pouvions douter du recours effectif aux conventions entre le pays et les communes ou les EPCI que prévoyait le texte initial. Par ailleurs, dans l'avis qu'elle a rendu le 24 avril et que le Gouvernement ne peut ignorer, l'assemblée de Polynésie regrettait que celui-ci ne prévoie pas « un mécanisme d'information du président de la Polynésie française ».

Le travail en commission mené sous l'égide du rapporteur avec les deux sénateurs polynésiens a permis de trouver une solution de compromis. Le texte qui est soumis au débat cet après-midi prévoit désormais des outils propices au dialogue et à l'articulation entre les différents échelons.

Une commune ou un EPCI qui entend exercer tout ou partie d'une compétence en informera préalablement, par délibération, le président de la Polynésie française, le président de l'assemblée et le haut-commissaire. Cette délibération ouvrira une période minimale de six mois avant la mise en œuvre de l'exercice de la compétence. Six mois, c'est le temps de l'écoute et du partage des points de vue. C'est le temps qu'il faut pour conclure une convention et prévoir les moyens mis à disposition si le besoin s'en fait sentir.

Depuis 2019, l'obligation de transfert de moyens concomitamment au partage de la compétence a été supprimée, afin de faciliter ce partage, mais nous savons que, dans certains cas, un tel transfert sera nécessaire et devra donner lieu à discussion.

Cette nouvelle rédaction est indéniablement une amélioration. Certes, cela créera des différences entre les communes : tout le monde n'exercera pas les compétences de la même manière. Mais n'est-ce pas déjà le cas ?

Les besoins sont différents, car les réalités sont différentes. Les jardins à la française sont d'une grande beauté, mais, selon moi, de bonnes institutions, notamment dans les outre-mer, doivent laisser s'épanouir la diversité des territoires, en conférant à ces derniers un cadre adapté. C'est peut-être cela le jardin à la polynésienne… (Sourires.) En tout état de cause, ce n'est pas la triste uniformité qui nivelle par le bas et qui ne répond à aucune attente ni à aucun besoin.

Nous savons bien que l'exercice des compétences doit parfois être partagé. La présente proposition de loi organique a précisément pour objet de sécuriser ces situations de partage, dans le respect, comme elle le précise bien, de la réglementation du pays.

L'examen des amendements nous permettra sans doute d'aborder les garanties d'action publique partagée, concertée ou, a minima, non contradictoire entre les différents échelons.

Je fais confiance à l'avis du rapporteur et à l'intelligence collective – autrement dit, à la sagesse du Sénat – pour trouver le bon niveau d'intervention, celui qui permet de répondre le mieux possible aux défis sociaux du quotidien. Et je fais confiance aux maires, comme je fais confiance au pays, pour concevoir, avec les élus communaux, les meilleures solutions, adaptées à chaque territoire. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE. – Mme Lana Tetuanui et M. Jérôme Durain applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour échanger sur une proposition de loi qui, en quelque sorte, incarne le travail de notre assemblée : elle montre l'attention portée aux territoires et la concrétisation des travaux menés par les commissions.

En avril 2024, lors d'un déplacement en Polynésie, avec nos collègues Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch, je suis allé à la rencontre des acteurs locaux, afin d'explorer ce que beaucoup considèrent, à juste titre, comme le modèle le plus abouti de l'autonomie institutionnelle rendu possible par notre Constitution. Cependant, quoiqu'il soit abouti, ce modèle reste inachevé.

À cette occasion, nous avions rédigé un rapport dans lequel nous émettions quelques préconisations. La recommandation n° 18, en particulier, portait sur la reconnaissance de plein droit aux communes de certaines compétences relevant actuellement du pays. Tel est l'objet de cette proposition de loi organique.

Le rapport d'information de 2024 le soulignait : nous assistons actuellement à une réticence du pays à mettre en œuvre l'article 43 de la loi organique, que nous souhaitons modifier.

En vingt ans, et en prenant en compte l'élargissement, en 2019, des compétences en jeu pouvant être mobilisées par une commune après approbation par un tel acte législatif, seules trois lois du pays ont autorisé l'exercice d'une partie de ces compétences, et cela sur des questions très limitées ou dans des circonstances exceptionnelles.

Le rapporteur l'a bien résumé : certaines de ces matières sont déjà investies par les communes. Le dispositif des lois du pays n'a que très rarement été mobilisé et celles-ci n'ont porté que sur des objets particulièrement restreints. Cette situation fait peser un risque juridique important sur les collectivités, qui exercent parfois déjà de facto certaines de ces compétences de proximité.

Aussi, notre commission a travaillé sur la notion d'opérationnalité de la mesure : une convention facultative pourra être conclue entre les communes ou les EPCI et la Polynésie française, afin de préciser le cadre de ces interventions et les moyens mis à leur disposition. En outre, le texte prévoit un mécanisme d'information préalable du pays sur les actions que les communes ou les EPCI entendent mener.

Le dispositif proposé vise donc à remplacer le mécanisme d'autorisation votée par l'assemblée par des conventions entre la Polynésie et les communes ou EPCI. Il reprend la promesse, elle aussi inachevée, de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS) : celle de la différenciation.

Il s'agit non pas d'imposer de nouvelles compétences aux communes de manière globale, mais de permettre l'intervention dans différents domaines de celles qui le souhaitent, pour lesquelles cela est nécessaire ou qui en ont les moyens. C'est une possibilité d'agir, mais dans un cadre de coordination avec le pays.

Ce texte a reçu un soutien massif des maires – 47 sur 48 d'entre eux y sont favorables –, ainsi que, initialement, de l'assemblée de la Polynésie française. En effet, dans son rapport, la commission des affaires internationales et des relations avec les communes de cette assemblée avait rendu un avis unanimement favorable sur cette proposition de loi organique.

Pour des raisons plus complexes, vraisemblablement liées au contexte politique local et à l'arrivée potentielle d'un autre texte concurrent, Moetai Brotherson, président du pays, et Antony Géros, président de l'assemblée de la Polynésie française, ont localement fait basculer le consensus pourtant établi. Cela nous amène au choix – insatisfaisant – de voter un texte sans cette unanimité pourtant au fondement de nos travaux.

La Polynésie est un très beau territoire : j'ai moi-même eu l'occasion de le constater ! Mais ce territoire, morcelé, s'étend sur près de 2,5 millions de kilomètres carrés. Aussi, la centralisation excessive des décisions sur des enjeux parfois très locaux peut freiner le développement de certains territoires.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires soutient l'échelon local et promeut le développement d'une action publique de proximité décentralisée. Au vu de la réalité du terrain, nous voterons donc ce texte, qui garantira également une meilleure protection de l'action des élus locaux. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER, RDSE et RPDI. – Mme Lana Tetuanui applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux que nous examinions ce texte, qui illustre ce que sait faire de mieux la Haute Assemblée : rester à l'écoute de nos territoires et essayer de trouver la meilleure solution pour faciliter leur fonctionnement.

Tel est l'état d'esprit qui animait la délégation de la commission des lois, alors composée de François-Noël Buffet, Nadine Bellurot, Guy Benarroche, Philippe Bonnecarrère et moi-même, avec laquelle je me suis rendu en Polynésie française, en avril 2024, pour identifier des pistes d'amélioration.

Au cours de ce travail, nous avons bénéficié de l'accompagnement étroit et du regard bienveillant de nos collègues Teva Rohfritsch et Lana Tetuanui, qui nous ont aidés à pointer les difficultés de nature institutionnelle et ont remonté les demandes, parfois touchantes, des tavana.

La superficie de la Polynésie française, qui s'élève à 5 millions de kilomètres carrés – M. Benarroche était deux fois en dessous de la réalité ! (Sourires.) – impose une action publique différenciée de celle qui est en vigueur dans l'Hexagone.

Cette proposition de loi organique s'appuie sur la recommandation n° 18 formulée dans le rapport issu de ce travail. Il s'agit de répondre à une demande pressante des tavana.

L'éloignement des territoires polynésiens les uns des autres fait primer les enjeux territoriaux dans le débat institutionnel. Il est nécessaire de rendre plus aisée la conduite d'actions de proximité dans certaines matières essentielles au quotidien de nos citoyens. Ces compétences, qui relèvent de la collectivité de Polynésie française, communément appelée le pays, comme le développement économique, l'aide sociale, la culture ou le sport, sont d'ores et déjà partiellement exercées, en pratique, par certaines communes.

L'article 43 de la loi organique de 2004, qui complexifie la situation, n'est pas allé au bout de ses promesses. En effet, dans le cadre du statut d'autonomie, cet article prévoyait que les communes puissent intervenir dans des matières relevant normalement de la compétence du pays, à condition qu'une loi du pays le permette. Or ces lois n'ont quasiment jamais été édictées.

Ce système aurait pu favoriser la subsidiarité et une adaptation fine des politiques publiques aux réalités locales. Or, en pratique, cette faculté n'a quasiment jamais été utilisée. Une loi qui n'est pas appliquée est une mauvaise loi, et il faut la corriger : c'est ce que nous proposons aujourd'hui.

Depuis vingt ans, aucune loi du pays n'a été adoptée pour autoriser l'intervention des communes, à l'exception d'une mesure exceptionnelle durant la crise du covid-19 en 2020. Ce blocage a conduit de nombreuses communes à agir en dehors d'un cadre juridique clair, par nécessité, notamment pour répondre aux urgences sociales – logement, alimentation, aide aux familles.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain défend la volonté de mieux adapter le droit aux réalités du terrain et de permettre aux communes d'intervenir de manière autonome. Nous reconnaissons, de cette manière, l'importance de leur rôle dans la cohésion sociale et le maillage territorial du service public.

Voté à l'unanimité en commission des lois, ce texte a été enrichi par un amendement de notre excellent rapporteur, Mathieu Darnaud, qui vise à mettre en place une procédure d'information préalable du pays sur les interventions envisagées par la commune ou l'EPCI. Le dispositif, qui concilie ainsi décision locale, information et possibilité de convention, me paraît opérationnel ; la boucle est bouclée !

En effet, cette mesure vise à ouvrir un espace de dialogue entre la commune ou l'EPCI et les autorités du pays, pouvant déboucher sur la conclusion d'une convention destinée à préciser la nature et la complémentarité des interventions de chacun.

Si ce dispositif n'est sans doute pas idéal, il s'inscrit dans une démarche de petits pas, projet par projet, afin de créer une confiance mutuelle entre les autorités communales et celles du pays. C'est tout le sens de la démarche que notre mission avait encouragée en formulant ses propositions. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST, RDSE et RDPI. – Mme Lana Tetuanui applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle.

M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, la Polynésie française dispose du statut de collectivité d'outre-mer, régi par l'article 74 de la Constitution. À ce titre, elle bénéficie de plus de compétences qu'un département ou qu'une région et, surtout, d'une plus large autonomie. Elle est en effet compétente dans toutes les matières, à l'exception de celles qui relèvent expressément de l'État – justice, droits civiques, politique étrangère ou encore défense.

Cependant, malgré cette autonomie renforcée dont dispose le territoire, les communes de la Polynésie sont confrontées à une difficulté tout à fait similaire à celle que rencontrent les élus de l'Hexagone : le sentiment d'une trop grande centralisation et d'un manque de souplesse dans l'exercice de leurs compétences.

C'est d'autant plus vrai que, contrairement aux communes de l'Hexagone, celles de la Polynésie ne bénéficient pas de la clause de compétence générale. Les matières dans lesquelles elles peuvent intervenir sont strictement énumérées dans la loi organique.

Si, en métropole, nos communes ont déjà le sentiment de subir la centralisation, imaginez comment cela peut se traduire dans un territoire dont la superficie des îles ne dépasse pas celle de la Corse ! Une centralisation excessive est impossible dans un tel territoire et risque de bloquer l'action des communes.

C'est pourtant ce que prévoit l'article 43 de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Son II, précisément, impose aux communes l'obtention d'une autorisation, sous la forme d'une loi du pays, pour intervenir dans différentes matières, telles que le développement, l'aide sociale, l'urbanisme, la culture ou encore la jeunesse et le sport. Ce dispositif manque donc de souplesse. De ce fait, il n'a été utilisé que trois fois depuis sa création, il y a vingt ans.

Pour autant, la nécessité d'agir pour répondre aux besoins de la population s'impose aux communes de la Polynésie. Il leur faut mettre en place des structures aussi élémentaires et essentielles que des cantines scolaires, par exemple, sans pouvoir attendre l'adoption d'une loi du pays. Mais en agissant ainsi, les élus œuvrent en dehors du cadre légal.

Les communes ont donc le choix entre deux solutions : laisser les concitoyens sans réponse face à leurs besoins essentiels ou engager leur responsabilité pénale. Ni l'une ni l'autre ne sont satisfaisantes.

La présente proposition de loi organique vise donc à supprimer l'exigence de l'adoption d'une loi de pays comme préalable à l'action des communes. Cela me semble être une solution pragmatique face à la situation actuelle, qui suscite autant de difficultés et de blocages.

Sur proposition de la commission, la suppression de cette exigence s'accompagnera d'une procédure d'information préalable des autorités du pays sur les actions envisagées par les communes et, éventuellement, de la signature d'une convention pour recevoir d'éventuels financements.

Je remercie les sénateurs de la Polynésie française, Teva Rohfritsch et Lana Tetuanui, de leur intervention en commission, qui a permis de rendre particulièrement claires l'importance et la nécessité de ce texte. Celui-ci a d'ailleurs reçu le soutien de 47 des 48 maires que compte ce territoire et celui du président de l'assemblée de la Polynésie française.

Notre groupe soutiendra évidemment cette proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE. – Mme Lana Tetuanui applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques.

Mme Micheline Jacques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ia ora na – bonjour ! Comment ne pas souscrire d'emblée au dispositif prévu par la proposition de loi organique visant à modifier le statut de la Polynésie française, portée conjointement par nos collègues Lana Tetaunui et Teva Rohfritsch ? En effet, dans les outre-mer, plus qu'ailleurs, la décentralisation et l'organisation territoriale doivent être mises au service de l'adaptation. C'est l'une des approches au cœur des travaux de la délégation aux outre-mer que j'ai l'honneur de présider.

Dans leur rapport intitulé L'Action de l'État outre-mer : pour un choc régalien, notre ancien collègue Philippe Bas et le sénateur Victorin Lurel soulignaient la problématique de l'adaptation des modes d'action aux caractéristiques des territoires en matière d'organisation de l'État. Les rapporteurs montraient à quel point l'ancrage et l'acclimatation aux réalités locales doivent contribuer à renforcer l'action de l'État.

Vous le savez, la Polynésie française s'étend sur un territoire maritime aussi vaste que l'Europe et rassemblant 115 îles. L'insularité du territoire et la dissémination des communes, réparties sur différents archipels, imposent ainsi une double décentralisation. Cette problématique se pose, à un degré moindre évidemment, en Guadeloupe.

C'est donc pour tenir compte des difficultés particulières liées à la distance que la possibilité de déléguer aux communes des compétences du pays a été ouverte par le législateur organique, à l'article 43. Les auteurs de la proposition de loi relèvent toutefois que, en pratique, cet article est demeuré inopérant, hormis durant l'épidémie de covid.

L'article 43 pose en effet deux conditions à l'intervention des communes dans les matières en question. Ces exigences sont à l'origine de la complexité d'un mécanisme dont la vocation était pourtant de simplifier l'action, au plus près du citoyen. Le rapporteur Mathieu Darnaud, fin connaisseur de la Polynésie française pour avoir rapporté plusieurs textes relatifs à ce territoire, l'a relevé à juste titre : le très faible recours à ce dispositif est à lui seul la preuve de son inadaptation à la Polynésie.

En premier lieu, mobiliser le dispositif de l'article 43 suppose l'adoption d'une loi du pays autorisant et encadrant la possibilité pour les communes d'intervenir dans les domaines ouverts à cette faculté.

En second lieu, par symétrie avec l'article 72-2 de la Constitution, l'intervention d'une commune dans une compétence du pays suppose que des moyens soient mis à leur disposition.

Or ce mécanisme me semble davantage s'apparenter à celui de l'habilitation, prévu par l'article 73 de la Constitution, qui constitue, de fait, une sorte de prêt de compétence qui ne s'accompagne pas des moyens afférents. Permettez-moi, du reste, de profiter de ce débat pour observer que le dispositif d'habilitation est sans doute confronté au même problème d'inadaptation, au vu du faible nombre de demandes.

À mon sens, la proposition de nos collègues Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch s'inscrit dans une logique facilitatrice, et c'est heureux. Le tavana est l'acteur le mieux placé pour agir lorsque les îles sont isolées et peu peuplées.

Dans ce contexte, l'aide sociale peut être mieux ciblée par le tavana, généralement fin connaisseur de la réalité de ses administrés. Il en va de même de l'urbanisme, enjeu cardinal de l'aménagement du territoire. C'est un sujet que nous connaissons bien à Saint-Barthélemy, car l'urbanisme cristallise les équilibres sociaux, économiques et financiers de l'action publique de manière d'autant plus forte que le territoire est exigu.

Les deux autres domaines de compétences – l'aide et les interventions économiques –, tout autant que la culture et le patrimoine local, sont là encore des leviers du dynamisme local : qui mieux que le tavana peut en apprécier la portée ?

À une exception près, les communes polynésiennes ont approuvé la proposition de loi organique : c'est donc qu'elles la perçoivent comme une amélioration. Elles pourront ainsi œuvrer de manière complémentaire au pays, en apportant la précision de la proximité.

On peut aussi voir dans cet assouplissement un gage d'économie dans les coûts de fonctionnement. Le démembrement de l'ensemble des services est impossible pour le pays, et leur gestion est lourde. L'amélioration et la facilitation de la coordination entre le pays et les communes seront source d'efficacité.

En ma qualité de président de la délégation aux outre-mer, je ne puis qu'encourager toute forme d'adaptation qui corresponde davantage aux besoins des territoires, à chacun des échelons.

Le groupe Les Républicains soutient la demande des tavana et votera donc ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – Mme Lana Tetuanui applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Bernard Buis. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le rapporteur, cher Mathieu Darnaud, mes chers collègues, qu'est-ce qu'être maire ? Incarnant la République de proximité, le maire est l'élu qui agit en première ligne au quotidien, avec des moyens souvent modestes, mais toujours dans l'intérêt de ses administrés.

À l'heure où nos concitoyens sont de plus en plus exigeants envers leurs élus, le maire reste pour beaucoup, il faut bien le reconnaître, un repère, en prise avec les réalités du terrain.

Toutefois, pour avoir une capacité d'action, encore faut-il que le droit le permette. Or la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française n'octroie pas aux tavana la même liberté d'action que celle dont jouissent leurs homologues de l'Hexagone. Selon les règles en vigueur dans cette collectivité, les maires polynésiens ne peuvent pas agir dans certains domaines d'action locale, tels que le sport, la culture, l'aide sociale ou encore le développement économique.

Dans ce contexte, seule l'adoption préalable d'une loi du pays par l'assemblée de Polynésie française leur laisse une certaine latitude pour mettre en place des actions de proximité dans ces domaines.

Néanmoins, force est de constater que, en vingt ans, seules trois lois du pays ont été adoptées à cet effet, avec une portée juridique très limitée. L'une d'entre elles, temporaire, avait pour objet l'action sociale des communes pendant la crise sanitaire liée à la covid-19. Or, sur le terrain, les maires interviennent déjà dans ces domaines, poussés par les besoins urgents et légitimes de la population, sans attendre une hypothétique loi du pays.

Autrement dit, les tavana agissent pour le bien de leurs concitoyens, en toute illégalité ! Mes chers collègues, en tant que législateurs, nous ne pouvons pas laisser cette situation perdurer.

La proposition de loi organique présentée par nos collègues Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch tend à apporter une solution viable, adaptée aux réalités insulaires polynésiennes, en remplaçant l'exigence d'adoption d'une loi du pays par une convention facultative.

Ainsi, ce texte garantit une sécurité juridique aux maires, en leur offrant l'occasion de répondre aux besoins de leurs communes et de leurs habitants dans un cadre légal et adapté.

Plus encore, il reflète une certaine convergence, progressive et mesurée, de la clause générale de compétence dans toute la République, à commencer par la Polynésie française. Cet élargissement du cadre juridique est placé sous le signe du dialogue, grâce à l'amendement de notre collègue rapporteur Mathieu Darnaud, voté en commission des lois.

En vertu de son dispositif, la commune ou l'EPCI devra, après délibération, informer préalablement les autorités du pays et le haut-commissaire de la République en Polynésie française des actions envisagées et de leurs modalités de mise en œuvre. Il s'agit donc d'une procédure facilitant les échanges et le respect mutuel entre les communes, le haut-commissaire et le pays.

Mes chers collègues, comme nombre d'entre vous, j'ai été maire. Élu à la tête de la commune de Lesches-en-Diois pendant près de vingt ans, en tant que tavana drômois (Sourires.), j'ai eu le droit de mettre en place un certain nombre d'actions et de projets pour les Leschoises et les Leschois. Avec l'équipe municipale de l'époque, j'ai pu dessiner un plan des itinéraires remarquables de la commune et ainsi baliser plusieurs sentiers sur notre territoire.

J'ai également pu aménager une piste d'atterrissage et de décollage avec un hangar de 240 mètres carrés dédié au stockage des ULM du club des Engoulevents. Au bout de cette piste du lieu-dit Saint-Martin, nous avons aussi créé une aire d'atterrissage pour les parapentistes.

Enfin, j'ai mis en place un financement pour aider les jeunes écoliers de mon village à se rendre dans les écoles des communes voisines de Beaurières ou de Luc-en-Diois, à hauteur de 500 euros par enfant chaque année.

Ce sont autant de projets dont je suis fier et que j'ai pu accomplir avec rapidité, parce que, en tant que maire, le droit me le permettait.

Mes chers collègues, je remercie chaleureusement mon collègue Teva Rohfritsch de m'avoir fait confiance pour intervenir en discussion générale sur ce texte. (M. Teva Rohfritsch sourit.)

À plus de 15 800 kilomètres d'ici, nombreux sont ceux qui soutiennent cette initiative transpartisane. Ainsi, ce texte a suscité l'adhésion de 47 des 48 élus locaux polynésiens, ainsi que le soutien unanime de la commission des institutions, des affaires internationales et des relations avec les communes de l'assemblée de Polynésie française.

Au vu des nombreuses attentes légitimes qu'il suscite, et pour permettre aux maires polynésiens d'agir sur leur fenua – leur territoire –, le groupe RDPI votera bien évidemment pour l'adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et SER. – Mmes Lana Tetuanui et Valérie Boyer applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui une proposition de loi dont l'objectif de rationalisation de l'action locale est fortement soutenu par les 48 communes de Polynésie française.

Cette réforme, promue par nos collègues Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch, illustre une volonté tout à fait légitime d'adaptation du droit aux réalités locales.

Cela a été souligné par les auteurs du texte, l'article 43 de la loi organique du 27 février 2004, qui porte sur le statut d'autonomie de la Polynésie française, impose aux communes de recourir à une loi du pays avant d'intervenir dans certains domaines. Quoiqu'elle fût pertinente à l'origine, cette exigence est devenue un frein majeur à l'action des communes, en particulier dans les zones les plus isolées.

Le constat est révélateur : en plus de vingt ans, seule une loi du pays a été adoptée, et cela uniquement pour faire face à la crise sanitaire de 2020.

Par ailleurs, les communes, notamment celles qui sont situées sur des archipels éloignés, sont souvent les seules à pouvoir répondre aux besoins urgents de leurs populations. L'absence de services déconcentrés dans ces zones les contraint à agir localement, sans pour autant disposer d'un arsenal administratif satisfaisant. L'obligation de passer par une loi du pays empêche de proposer des réponses efficaces aux besoins immédiats.

La proposition de loi vise donc à supprimer cette exigence. En modifiant l'article 43, elle permettra aux communes et à leurs établissements publics de coopération intercommunale d'intervenir directement, sans devoir attendre l'adoption d'une loi du pays.

Le texte prévoit toutefois un mécanisme de coordination, qui impose aux communes de notifier leur intention d'agir au pays et au haut-commissaire de la République. C'est un bon équilibre, qui garantira une coordination efficace entre les différents acteurs, sans freiner l'initiative locale.

Cette réforme s'inscrit directement dans l'esprit de la mission d'information, lancée sur l'initiative du RDSE et dont la présidente Carrère est la rapporteure, sur les vingt ans de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). Cette mission, dont les travaux sont en cours, a pour but d'évaluer l'impact de la décentralisation sur nos territoires et d'identifier les ajustements nécessaires pour renforcer l'efficacité des collectivités locales.

Ici, nous y sommes ! Ce texte incarne en effet parfaitement cet objectif, en offrant plus de flexibilité aux communes de Polynésie française.

Enfin, le dispositif permet aux communes de répondre efficacement aux défis locaux sans imposer de charges financières supplémentaires à l'archipel. Cette souplesse permettra aux collectivités locales de s'adapter plus rapidement et plus efficacement aux spécificités de leurs territoires.

Le groupe RDSE soutient pleinement cette proposition de loi, convaincu qu'elle constitue un progrès tangible vers une gestion plus réactive du territoire ultramarin. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI. – Mme Lana Tetuanui et M. Jérôme Durain applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Florennes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Teva Rohfritsch applaudit également.)

Mme Isabelle Florennes. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, il est symbolique que nous commencions cet espace transpartisan par l'examen d'un texte dont les deux auteurs, Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch, appartiennent à des groupes politiques différents.

Cette proposition de loi organique vise à donner davantage de compétences aux collectivités de Polynésie française. En effet, le dispositif en vigueur semble mal adapté à la situation polynésienne.

Les compétences communales sont actuellement conditionnées par l'adoption d'un acte de l'assemblée de la Polynésie française, dit loi du pays. L'article 43 de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie opère la distinction entre les compétences que les communes exercent directement et celles qui requièrent l'adoption d'une loi du pays, dans le cadre de la réglementation fixée par la Polynésie française.

Je le précise, la loi du pays a non pas pour effet de transférer la compétence du pays vers les communes, mais seulement de permettre l'intervention des communes en la matière. Le dispositif en vigueur empêche les communes ou les EPCI d'exercer des actions de proximité, pourtant indispensables, au profit des habitants de leurs territoires.

Depuis 2004, cette disposition n'a été utilisée qu'à trois reprises pour permettre une meilleure répartition des compétences entre le pays et les communes de Polynésie française. Ces lois du pays étaient a fortiori de portée limitée. La visée de l'une d'entre elles était même temporaire, car elle portait sur l'action sociale des communes pendant la crise du covid-19.

C'est donc une simplification que proposent nos deux collègues par le biais de ce texte. Son article unique vise à permettre aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale de Polynésie française une intervention directe dans les matières où le statut conditionne aujourd'hui celle-ci à l'adoption préalable d'une loi du pays.

Le texte tend également à supprimer la référence à la réglementation édictée dans ces matières par la Polynésie française.

La proposition de loi organique s'inscrit donc dans une logique de clarification, afin de rendre plus opérant le principe de la libre administration des collectivités locales en Polynésie. Les communes et EPCI pourront ainsi exercer les compétences prévues dans le statut sans l'adoption d'une loi du pays.

Je tiens à saluer le travail du président Darnaud, rapporteur de ce texte. L'amendement qu'il a proposé en commission vise à mettre en place une procédure d'information préalable du pays sur les interventions envisagées par la commune ou l'EPCI. Les interventions sollicitées par les collectivités ne pourront intervenir qu'à l'expiration d'un délai de six mois.

Cette mesure tend à ouvrir un espace de dialogue entre la commune ou l'EPCI et les autorités du pays, pouvant déboucher sur la conclusion d'une convention destinée à préciser la nature et la complémentarité des interventions de chacun. En tout état de cause, cette convention resterait facultative. En effet, la commune ou l'EPCI pourra, en cas de dialogue infructueux, procéder aux interventions prévues à l'expiration d'un délai de six mois suivant l'information du pays.

Cette proposition de loi a d'autant plus sa place dans l'espace transpartisan qu'elle reprend l'une des vingt-deux propositions formulées dans le rapport de nos collègues Nadine Bellurot, Guy Benarroche et Jérôme Durain pour conforter l'autonomie et la proximité de l'action publique en Polynésie française.

Cette proposition de loi organique bénéficie également d'un soutien transpartisan à l'échelle locale. En effet, 47 des 48 maires que compte la Polynésie, ainsi que le président de l'assemblée de la Polynésie française, soutiennent ce texte qui permettra aux maires – ou tavana, en polynésien – d'exercer davantage d'actions au service de leur population.

Telle est la philosophie de ce texte. C'est donc en toute logique que le groupe Union Centriste votera pour cette proposition de loi organique. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et RDSE. – M. Alain Chatillon applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie.

M. Robert Wienie Xowie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je salue à mon tour nos deux collègues Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch, auteurs de ce texte qui permet de donner un coup de projecteur sur le travail acharné, et souvent peu reconnu, des maires et de leurs conseillers dans nos pays d'outre-mer.

La proposition de loi organique que nous examinons aujourd'hui touche à un point fondamental : la reconnaissance effective du rôle des communes dans les outre-mer, en l'occurrence chez l'un de nos voisins du Pacifique, la Polynésie française.

Dans les discussions sur l'évolution institutionnelle des outre-mer, les communes sont souvent les grandes oubliées. À l'heure où nous examinons cette proposition de loi relative au statut d'autonomie de la Polynésie française, les maires de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie préparent également l'avenir institutionnel de nos communes en intégrant des réflexions telles que l'élargissement de leurs compétences – je profite de l'occasion qui m'est ici offerte pour saluer ces élus et les encourager dans leurs travaux.

Pourtant, cette institution de proximité, qui est la plus ancienne, a souvent relevé des défis majeurs en termes de gestion locale, sur le terrain, des populations. Ayant assumé les fonctions de premier magistrat communal, je comprends les difficultés auxquelles sont confrontées les communes de Polynésie française.

Souvenons-nous de la crise du covid : qui était là pour distribuer les masques, organiser la solidarité, relayer les messages de prévention ou répondre dans l'urgence aux besoins des plus nécessiteux ? C'était bel et bien les maires ! Et ce sans lever d'impôt, sans disposer de fiscalité propre, dans une logique de service public pur et désintéressé. Cela doit nous interroger !

Nous le disons ici, la proposition de loi organique qui nous est soumise part d'un constat juste : il faut redonner de l'air, de la clarté et de la reconnaissance à l'échelon communal.

Oui, certaines compétences gagneraient à être mieux définies et exercées de manière plus souple et plus cohérente. Il est ainsi prévu, dans la présente proposition de loi organique, une convention qui précisera les modalités d'intervention et les moyens mis à disposition.

Toutefois, dans le même mouvement, je ne peux ignorer – nous ne pouvons ignorer – la position exprimée par l'assemblée de la Polynésie française, qui s'est majoritairement prononcée contre ce texte.

Cette parole, il ne nous appartient pas de la balayer d'un revers de main. Elle mérite le respect. Elle est aussi porteuse d'une certaine crainte, en ce qu'elle exprime la nécessité d'une concertation supplémentaire, l'inquiétude portant sur les futurs équilibres internes au pays, l'aspiration à une plus grande clarté sur les responsabilités morales, pénales, financières et à une plus grande cohérence des politiques publiques entre institutions concernant l'exercice des compétences.

Il s'agit de redonner de la confiance, des moyens et du respect à l'échelle communale. Je ne suis pas Polynésien, je suis Kanak, mais je comprends la force des symboles et la fragilité des équilibres. En effet, rien de durable ne se construit sans dialogue et sans écoute. Je ne doute pas de la capacité de résilience de nos peuples, qui permettra de trouver des consensus pour le bien-être des populations.

Ce débat est l'occasion de poser une question véritablement politique : comment construire l'avenir institutionnel de la Polynésie en intégrant pleinement les communes dans cette réflexion ?

C'est pourquoi je vois dans ce texte un signal utile, une base de discussion. En effet, il s'agit ici d'un projet institutionnel, donc d'un choix de société à l'océanienne, une société où tout se fait par le bas.

Les membres du groupe CRCE-K attendront, en conscience, que soient apportées des clarifications répondant aux craintes qui s'expriment. Il ne s'agit pas d'une opposition de principe à la réforme : je veux croire qu'il est encore possible d'aboutir à un texte qui rassemble davantage. Tel est le sens des amendements que nous avons déposés.

Nous devons redonner aux maires les moyens d'agir, mais aussi la lisibilité et la protection juridique dont ils ont besoin. Il nous faut sortir de l'ambiguïté concernant les compétences, mais aussi faire confiance au pays pour porter lui-même cette évolution.

Nous avons là une belle occasion d'avancer. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST. – M. Teva Rohfritsch et Mme Lana Tetuanui applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Georges Naturel. Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le rapporteur – cher Mathieu Darnaud –, madame, monsieur les auteurs de la proposition de loi organique – chers Lana Tetuanui et Teva Rohfritsch –, mes chers collègues, je vais défendre devant vous ce texte qui a été validé – cela a été dit à plusieurs reprises – par 47 des 48 maires de Polynésie française ; c'est un élément important qu'il convient de souligner.

Mon collègue Robert Wienie Xowie qui vient de s'exprimer et moi-même savons, en tant qu'anciens maires, de quoi l'on parle ici !

Chacun connaît les défis que pose l'éparpillement géographique de nos territoires d'outre-mer. Mais il faut avoir vécu cette réalité pour comprendre au quotidien combien elle rend la puissance publique fragile, quand elle est distante, mais aussi efficace quand elle est incarnée localement, au plus près des habitants.

Dans les archipels de la Polynésie française comme dans les provinces rurales ou insulaires de la Nouvelle-Calédonie, les communes sont bien souvent le seul visage de la République. Elles assurent la distribution de l'eau potable, la gestion des déchets, l'état civil et les secours d'urgence. Elles prennent en charge des compétences sociales, éducatives, sanitaires, parfois sans base juridique, mais avec responsabilité, parce qu'il faut bien faire et parce que personne d'autre ne le fera.

Or, trop souvent, ces communes sont contraintes d'attendre l'aval ou les moyens d'un gouvernement éloigné, à Tahiti comme à Nouméa. Cette attente ralentit et, parfois, décourage.

Dans le cas polynésien, le mécanisme prévu depuis 2004 pour encadrer l'intervention des communes, au travers de l'adoption de lois du pays, n'a été mobilisé que trois fois en vingt ans, et toujours pour des objets très limités – on a évoqué notamment la crise sanitaire. Ce constat d'immobilisme a conduit nombre de maires à agir en dehors du droit, avec les risques que cela implique pour eux.

La proposition de loi organique que nous examinons vise précisément à lever ce verrou en Polynésie française, en autorisant les communes à intervenir de plein droit dans certains domaines de proximité comme l'aide sociale, la culture, le sport ou le développement local, sans attendre que soit votée une loi du pays, mais en permettant, si les communes le souhaitent, d'encadrer leur action par une convention.

Ce texte ne bouleverse pas l'équilibre institutionnel. Il ne remet pas en cause les compétences du pays. Il ne procède à aucun transfert autoritaire. Il permet simplement ce que la pratique impose déjà : que les communes puissent exercer des responsabilités dès lors qu'elles sont en situation d'y répondre, avec le soutien de leurs administrés. Il prévoit que cette action peut être encadrée par convention avec la Polynésie française, mais sans en faire une condition préalable. Il rétablit, en somme, la confiance dans l'intelligence des élus de terrain et dans leur attachement au cadre collectif.

Cette subsidiarité est une adaptation logique à la géographie, à la réalité de terrain et à la volonté des élus locaux de répondre présent.

Permettez-moi de souligner un autre mérite du texte : il sécurise juridiquement les initiatives locales. Car, aujourd'hui, les maires qui prennent leurs responsabilités le font souvent dans une zone grise, en s'exposant à des risques juridiques, sans garantie de financement ni appui en ingénierie. Ce n'est plus tenable. À la légitimité démocratique doit correspondre une sécurité juridique ; cette proposition de loi organique le permet.

Je veux ici remercier les auteurs de cette proposition de loi organique, nos collègues polynésiens, et saluer les travaux de la commission des lois, qui ont permis d'en préserver l'esprit tout en renforçant les garanties de coordination avec le pays. Le dialogue est maintenu, la hiérarchie des compétences respectée et l'action de proximité enfin rendue possible.

C'est d'ailleurs dans ce sens que vont les préconisations du rapport sénatorial rendu à l'issue de la mission d'avril 2024 en Polynésie française. Il y a là un socle solide, équilibré, permettant de faire évoluer le statut de manière pragmatique.

Pour conclure, je veux élargir un instant mon regard. Monsieur le ministre, la Nouvelle-Calédonie observe cette réforme avec beaucoup d'intérêt, car nous connaissons les mêmes tensions, les mêmes besoins et les mêmes attentes. Nos communes rurales, nos communes insulaires, aux moyens parfois dérisoires, assument pourtant des responsabilités de plus en plus lourdes. Elles le font avec courage, avec inventivité,...

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Georges Naturel. ... mais trop souvent avec des outils juridiques dépassés ou inadaptés à nos réalités archipélagiques.

La présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer l'a dit avant moi : les membres du groupe Les Républicains voteront ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Teva Rohfritsch applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi organique tendant à modifier le ii de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la polynésie française

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française
Article unique (fin)

Article unique

Le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, les mots : « Dans les conditions définies par les actes prévus à l'article 140 dénommés “lois du pays” et la réglementation édictée par la Polynésie française, » sont supprimés ;

2° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent détermine par délibération les actions qu'il entend mener dans les matières énumérées aux 1° à 8°, dans le respect de la réglementation édictée par la Polynésie française et au terme d'un délai qui ne peut être inférieur à six mois, ainsi que les modalités de leur mise en œuvre. Cette délibération est transmise au président de la Polynésie française, au président de l'assemblée de la Polynésie française et au haut-commissaire de la République.

« Au terme du délai mentionné dans cette délibération, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale peut engager les actions qu'elle prévoit. Les modalités d'interventions respectives de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale et de la collectivité de Polynésie française ainsi que les moyens mis à leur disposition sont, le cas échéant, précisés par convention. »

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 4

1° Première phrase

Remplacer le mot :

édictée

par les mots :

et des politiques publiques adoptées

2° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Elles ne peuvent entrer en contradiction avec ces dernières

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Cet amendement, étroitement lié aux échanges que nous avons eus avec le gouvernement de la Polynésie française, vise à apporter une clarification, attendue, dans l'organisation de l'action publique locale sur le territoire polynésien.

Dans la rédaction actuelle de l'article unique, il est fait référence au respect de la réglementation édictée par le pays. Mais chacun sait ici que cela ne suffit pas à rendre compte de la réalité de l'action publique. Le pays ne se contente pas d'édicter des normes ; il planifie, impulse, porte des politiques publiques, souvent transversales, qui mobilisent des moyens importants et structurent des trajectoires de développement à long terme.

C'est dans ce cadre que tend à s'inscrire cet amendement visant non pas à contraindre, mais à organiser, non pas à limiter la libre administration communale, à laquelle notre groupe est profondément attaché, mais à permettre à chacun d'agir dans un cadre lisible, cohérent et partagé.

Concernant les compétences énumérées au II de l'article 43 de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française, la coordination n'est pas un luxe : elle est une nécessité démocratique, car, au bout de la chaîne, la responsabilité suivant la compétence, ce sont bien souvent les communes qui porteront la charge budgétaire, juridique ou pénale.

Cela protège le cadre d'action, sécurise les décisions locales et renforce la cohérence d'ensemble, dans le respect de toutes les composantes institutionnelles qui maillent la Polynésie française.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je comprends tout à fait l'esprit de cet amendement. Pour autant, je voudrais souligner deux points.

Premièrement, lors de nos échanges, que j'ai rappelés lors de la discussion générale, avec l'assemblée de la Polynésie française, avec les tavana, leurs syndicats et le président de la Polynésie française, tous ont pointé du doigt le besoin d'agilité et souhaité, unanimement, faire en sorte que le II de l'article 43 soit utilement complété par certaines dispositions.

Cet amendement vise à prévoir que les politiques publiques du pays d'outre-mer qu'est la Polynésie française soient inscrites dans la convention, laquelle demeure facultative, ou qu'elles soient portées par les tavana et les communes dès lors qu'un accord serait trouvé.

À cet égard, je tiens à formuler une mise en garde. Au cours des six mois que dureront les discussions entre les tavana et le pays, au terme desquelles un accord doit être trouvé, afin de permettre l'exercice des compétences et la mise en œuvre des actions souhaitées dans les meilleures conditions, il convient de ne pas alourdir la charge de travail des maires. J'insiste sur ce point ; notre collègue drômois, Bernard Buis, a d'ailleurs établi une comparaison audacieuse, mais éclairante, avec sa commune de Lesches-en-Diois...

Il est évident que, si cette démarche est rendue trop complexe, des communes telles que Hiva Oa, dans les Marquises, ou Tumaraa auront beaucoup plus de mal à mener ce travail à bien, car elles ne disposent pas nécessairement de l'ingénierie dont bénéficient, par exemple, les communes de Faaa ou de Papeete. Je pense donc qu'il faut conserver cette agilité, cette liberté et cette intelligence collective si l'on veut qu'un accord soit conclu.

J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. Sans aucunement contester le droit d'amendement, je rappelle que, à la suite des divers débats et concertations qui ont eu lieu, M. le rapporteur a porté en commission un amendement visant, à la fois, à consolider l'agilité qu'il a décrite et à créer les conditions d'une cohérence entre le pays et les communes.

Le Gouvernement part du principe qu'il convient de conserver cette agilité et de conforter le compromis qui a été élaboré. Je m'en remets donc, sur cet amendement, à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 5, seconde phrase

Remplacer le mot :

sont

par les mots :

peuvent être

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Il s'agit ici de clarifier le caractère facultatif des conventions prévues au II de l'article 43 organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

Dans le texte qui nous est soumis, la formulation suivante pose une difficulté d'interprétation : « Les modalités d'interventions respectives de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale et de la collectivité de Polynésie française, ainsi que les moyens mis à leur disposition sont, le cas échéant, précisés par convention. »

En droit, le recours au présent de l'indicatif tend à produire une obligation, là où l'intention du rapporteur, si l'on se réfère au texte de son rapport, est bien de préserver une souplesse dans les relations entre le pays et les communes, sur la base du caractère facultatif des conventions.

L'expression « le cas échéant » n'efface pas cette ambiguïté : elle ne désigne ni l'autorité qui apprécie la situation ni les critères qui fonderaient l'opportunité d'une convention. Elle laisse donc ouverte la possibilité pour une collectivité locale de considérer qu'une convention s'impose et d'en tirer des conséquences juridiques, financières, voire contentieuses. On comprend ainsi que des inquiétudes puissent subsister.

En proposant de remplacer le mot « sont » par les mots « peuvent être », nous souhaitons réaffirmer le principe de libre engagement des parties sur la base du consentement mutuel. Ce principe ancre l'esprit de coopération dans la loi, sans transformer la souplesse attendue en obligation imprévue.

C'est pourquoi nous vous invitons à adopter cet amendement, que nous qualifions de rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je crois avoir été relativement clair, et le texte l'est tout autant : je réaffirme le caractère facultatif de la convention.

L'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. Sagesse.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'article unique de la proposition de loi organique, je donne la parole à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.

Mme Lana Tetuanui. Même si le vote n'est pas encore intervenu – je suis convaincue qu'il sera positif –, il convient de vous remercier tous, mes chers collègues !

Je veux dire à mon collègue de Nouvelle-Calédonie, Robert Wienie Xowie, que dans son intervention un mot m'a interpellée, celui de « parole ». En effet, le peuple polynésien, qui est un peuple du Pacifique, est très sensible à ce mot.

Je pense, cher Robert Wienie Xowie, que si d'aucuns ont renié leur parole, ce ne sont certainement pas ceux qui ont voté la proposition de loi, unanimement, une semaine avant cette séance publique ! En commission, le vote était unanime ; alors, en séance, qui donc a renié sa parole ? Je pose la question en toute sérénité...

Une semaine après le vote en commission, certains ont oublié le quotidien de 280 000 habitants au profit d'une personne ; je tenais à le dire. Or on ne peut pas sacrifier le quotidien des Polynésiens pour assouvir, peut-être – c'est moi qui le dis –, les ambitions d'un seul ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC, RDSE, RDPI et Les Républicains. – M. Éric Jeansannetas applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Teva Rohfritsch, pour explication de vote.

M. Teva Rohfritsch. Je tiens tout d'abord à remercier l'ensemble des orateurs, ainsi que M. le ministre d'État, M. le rapporteur et tous les groupes, en particulier le groupe Communiste Républicain Citoyen Écologiste – Kanaky, lequel souhaitait, si je me réfère à l'intervention de son chef de file, faire preuve d'ouverture, tout au moins en fonction de la tournure que prendrait notre débat...

Lana Tetuanui a évoqué la question de la parole. Pour ma part, j'ai débattu, au sein de la commission des institutions, des affaires internationales et des relations avec les communes de l'assemblée de la Polynésie française, avec le gouvernement et la majorité, qui s'est clairement prononcée en faveur de la proposition de loi organique.

Certes, lors de la séance plénière, le débat a été davantage politicien et polémique, et il a moins porté sur le fond. Mais, si l'on examine les suffrages exprimés, on constate que le texte n'a pas été rejeté à une large majorité : sur les 57 représentants de l'Assemblée de la Polynésie française, il y a eu 29 voix contre, 25 voix pour et 3 abstentions. Pour autant, les discussions concernaient clairement autre chose que le fond du sujet que nous avons évoqué aujourd'hui.

Les seuls arguments techniques qui, à notre sens, méritaient de retenir l'attention des sénateurs ont été repris et synthétisés par M. Mathieu Darnaud dans l'amendement de la commission des lois, dont l'adoption a réglé les problèmes qui avaient été présentés objectivement par le président de la Polynésie française, Moetai Brotherson.

À aucun moment M. Brotherson n'a évoqué, au sein de la commission des institutions de l'Assemblée de la Polynésie française, la question des politiques publiques ! Son souci était simplement que la réglementation polynésienne soit respectée ; il lui a été fait droit au travers de l'amendement porté par le rapporteur.

J'appelle tous les groupes du Sénat à soutenir cette proposition de loi organique de manière transpartisane, à l'occasion de cette niche transpartisane, car les maires polynésiens et la population de nos îles ont besoin du soutien de tous. N'entrons pas dans la polémique politicienne qui peut exister entre les groupes politiques siégeant au sein de l'assemblée de la Polynésie française !

Il est de notre devoir et de notre responsabilité, en tant que sénateurs, de voter unanimement sur la seule question qui nous est posée aujourd'hui : va-t-on donner aux maires polynésiens le cadre juridique qui leur permettra d'agir ?

Nous savons tous ici qu'ils agissent d'ores et déjà sans bénéficier de ce cadre, ce qui met en péril leur mandat et, plus largement, leur honneur en tant que responsables politiques ; ils encourent en effet des sanctions qu'ils ne méritent pas, dans la mesure où ils ne font que combler une carence du service public.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à soutenir unanimement ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 278 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 326
Pour l'adoption 326

Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)

Article unique (début)
Dossier législatif : proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française
 

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Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
Article 1er

Amélioration du dispositif de protection temporaire

Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France, présentée par Mme Nadia Sollogoub et plusieurs de ses collègues (proposition n° 233, texte de la commission n° 596, rapport n° 595).

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la proposition de loi.

Mme Nadia Sollogoub, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie tout d'abord le président du Sénat et les présidents de groupe – particulièrement Hervé Marseille, président du groupe Union Centriste – d'avoir accepté d'inscrire dans cette niche transpartisane un texte qui peut sembler quelque peu technique, mais qui clarifiera et simplifiera la situation de ceux qui relèvent aujourd'hui du dispositif très particulier de la protection temporaire et de ceux qui en bénéficieront peut-être demain, ainsi que le travail des différents services et associations qui instruisent ces dossiers et de tous ceux qui aident et accompagnent les bénéficiaires.

Je remercie également Isabelle Florennes, rapporteure du texte, la présidente de la commission des lois et les membres de ladite commission de leur découverte bienveillante d'une réalité particulière, de leur maîtrise du dossier et de leurs apports pondérés et équilibrés.

Je rappelle que, le 3 mars 2022, à la suite de l'agression de l'Ukraine par la Russie, le Conseil de l'Union européenne a, pour la première fois, enclenché le dispositif de la protection temporaire.

La protection temporaire concerne les étrangers non européens contraints à l'exil en raison de conflits armés, de violences ou de graves violations des droits de l'homme dans leur pays d'origine. Il s'agit de gérer le cas très particulier des mouvements migratoires temporaires.

Devant l'afflux de populations fuyant les bombardements, l'Europe a estimé que les conditions exceptionnelles étaient pour la première fois réunies pour que chaque pays de l'Union, selon ses modalités propres, accueille les Ukrainiens sous le régime de la protection temporaire.

Ainsi, la France a mis en place un « panier » de droits correspondant à ce statut.

Unanimement, les Ukrainiens ont exprimé leur reconnaissance et leur profonde gratitude pour tout ce qui a été organisé en urgence et leur a permis de trouver la sécurité dont ils avaient un besoin vital.

Je vous remercie également, mes chers collègues, d'avoir légiféré en urgence, afin que le dispositif soit rapidement opérationnel.

Personne n'imaginait – ni nous, ni vous, ni eux – que ce conflit durerait aussi longtemps. En 2025, force est de constater que le dispositif de la protection temporaire n'est pas adapté dans la durée et que, dans l'intérêt de tous, il doit être ajusté. Le recul nous donne cette expérience et nous permet de dresser un constat.

La tendance est claire et elle s'accélère : les bénéficiaires de la protection temporaire se tournent massivement vers des demandes d'asile, ce qui est totalement contraire à l'esprit du dispositif, lequel doit rester transitoire !

Aujourd'hui, la France est au sein de l'Union européenne le neuvième pays d'accueil des Ukrainiens, mais elle reçoit près de 50 % des demandes d'asile formulées par des ressortissants ukrainiens au sein de l'Union.

Les demandes de sortie du dispositif de la protection temporaire vers l'asile deviennent systématiques. C'est un phénomène qui s'accélère et qui est propre à la France : 3 250 demandes ont été formulées en 2023, puis 12 031 en 2024 ; et l'on compte déjà près de 5 000 demandes en 2025.

Ces demandes reçoivent généralement une réponse positive. Il y a urgence à enrayer ce phénomène, et cela pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, parce que les Ukrainiens et Ukrainiennes de tous âges, arrachés brutalement à leur patrie, souhaitent dans leur grande majorité y retourner, et il faut absolument que cette possibilité leur reste toujours offerte.

Ensuite, parce que la France n'a pas vocation à garder sur son territoire ces populations fragilisées, auxquelles elle a proposé, avec une immense générosité, un abri temporaire.

Enfin, parce que nos services administratifs sont déjà embolisés par les demandes d'autres réfugiés, dont certains ont un besoin urgent de leurs papiers, il est ridicule de les surcharger avec les dossiers de protégés qui demandent l'asile par défaut, mais souhaitent au fond pouvoir retourner chez eux.

Mes chers collègues, je vous le répète, ce texte traite de l'exemple ukrainien, mais ce n'est pas un texte pour les Ukrainiens. Il s'appuie sur notre expérience récente afin d'améliorer un dispositif qui, demain, hélas ! bénéficiera peut-être à d'autres peuples fuyant la barbarie et la guerre.

Plusieurs causes étant à l'origine des demandes d'asile massives que l'on constate actuellement, plusieurs pistes d'amélioration existent.

Tout d'abord j'ai souhaité, à l'article 1er, améliorer la reconnaissance des diplômes, en particulier médicaux, afin de permettre des retours à l'emploi dans des métiers en tension.

Une autorisation d'exercice temporaire avait été accordée aux Ukrainiens jusqu'au 27 décembre 2023 seulement. Cette possibilité leur avait été donnée au début de leur séjour en France, alors qu'ils ne maîtrisaient ni les procédures ni la langue et qu'ils se trouvaient en état de choc. Très peu étaient alors en capacité d'en bénéficier.

Un amendement du Gouvernement, adopté hier lors de l'examen de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires, non seulement rétablit pour les réfugiés et apatrides la possibilité d'exercer temporairement, dans l'attente de leur réussite aux épreuves de validation des compétences, mais accorde la même possibilité aux bénéficiaires de la protection temporaire. C'est une volonté que je salue.

J'aborde ensuite les problématiques traitant de la mobilité.

Je profite de la présence de M. le ministre pour évoquer un problème récurrent qui, bien qu'il ne soit pas de nature législative, doit faire l'objet d'une attention particulière et trouver une solution rapide : la non-reconnaissance du permis de conduire ukrainien est choquante, alors que le permis de conduire russe est reconnu en France à la suite d'accords bilatéraux.

Alors que le gouvernement ukrainien a réalisé de gros efforts de dématérialisation des procédures afin de sécuriser la délivrance des titres, rien ne semble s'opposer à la signature d'un accord bilatéral sur ce point entre la France et l'Ukraine. La reconnaissance du permis de conduire ukrainien non seulement constituerait un signe diplomatique fort envoyé par la France à ce peuple ami, mais permettrait de nombreux retours à l'emploi, particulièrement dans les territoires ruraux.

Monsieur le ministre, je reçois chaque semaine de tous les collègues et de tous les départements, des demandes pressantes à ce sujet. Je vous sollicite en présence, dans notre tribune, de M. le consul d'Ukraine en France, que je salue. Je vous remercie de comprendre mon insistance et de nous aider.

Par cette proposition de loi, je souhaite contribuer à lever les difficultés de mobilité que rencontrent les bénéficiaires de la protection temporaire en France. Il est à noter que les problèmes d'assurance seront automatiquement réglés lorsque le permis ukrainien sera reconnu en France.

Le troisième volet du texte traite de la couverture sociale des bénéficiaires de la protection temporaire.

Comme je vous l'expliquais plus tôt, la très grande majorité des protégés ukrainiens, dans un contexte de tension budgétaire, de désinformation et d'inégalité de traitement selon les départements, basculent actuellement vers des demandes d'asile. Ces demandes sont accordées dans 98 % des cas et ouvrent droit à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), au revenu de solidarité active (RSA), à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et à l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

La solution la plus coûteuse pour le budget des collectivités et de l'État, c'est de laisser faire ! En effet, dans tous les cas, ces bénéficiaires obtiendront une prise en charge sociale. Si nous ne changeons rien, ils obtiendront l'asile, de façon difficilement réversible et donc probablement définitive.

En revanche, si nous rendons le statut de la protection temporaire suffisamment protecteur pour que les Ukrainiens le conservent jusqu'à la fin du conflit, leur prise en charge restera limitée dans le temps et sera donc moins coûteuse.

Ma proposition, monsieur le ministre, mes chers collègues, vise à éviter que la protection temporaire ne soit, pour les réfugiés qui arrivent sur notre territoire, que l'antichambre de l'asile. Bien entendu, elle ne réglera pas tous les problèmes. Des difficultés administratives subsisteront, mais elles sont inévitables en pareille situation. Plusieurs dispositions sont d'ordre réglementaire et ne peuvent donc être traitées ici.

Je ne peux conclure sans évoquer la question de l'apprentissage de la langue, lequel est absolument essentiel. Des moyens suffisants doivent être prévus pour permettre l'intégration des populations concernées le temps de leur séjour.

J'entends les craintes qui sont exprimées. Aussi, je le redis, améliorer le dispositif de la protection temporaire en France, ce n'est en aucun cas créer une charge supplémentaire.

Améliorer ce dispositif en France, c'est clarifier, simplifier la tâche administrative, permettre une insertion temporaire.

Améliorer ce dispositif en France, c'est aider ceux qui sont arrivés chez nous bien malgré eux à rester debout, en attendant la paix et le jour tant espéré de leur retour. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Corinne Bourcier applaudit également.)

Mme Isabelle Florennes, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'a expliqué Nadia Sollogoub, que je remercie vivement pour la qualité de nos échanges, cette proposition de loi vise à améliorer le régime de la protection temporaire.

Celui-ci a été introduit par une directive européenne du 20 juillet 2001, qui laisse aux États membres une importante marge d'appréciation pour préciser ses modalités pratiques. Il a été appliqué pour la première fois à l'occasion de l'invasion du territoire ukrainien par la Russie et sur l'initiative de la France.

J'insisterai sur un point en guise de préambule : il s'agit, dans l'ensemble, d'une réussite dont nous pouvons nous féliciter. Toutes les personnes que j'ai auditionnées, qu'il s'agisse du consul d'Ukraine à Paris, que je salue, des associations représentant les Ukrainiens en France, des administrations centrales compétentes ou encore du préfet de région d'Île-de-France, ont souligné la qualité de cette politique publique et, plus largement, de l'accueil offert par la France aux Ukrainiens.

Cette mobilisation a permis de leur apporter l'accompagnement dont ils avaient besoin, en termes de logement, de travail et de scolarisation. Nous devons nous réjouir de la mobilisation de nos services, des associations et de la société tout entière.

Il s'agit désormais, au regard de ce premier bilan, d'améliorer ce régime dans la perspective de futures crises.

La commission a pu constater que certaines évolutions avaient déjà permis de satisfaire plusieurs des objectifs du texte – j'y reviendrai. En tout état de cause, cela témoigne du fait que la volonté d'améliorer le dispositif est partagée : gageons que cette démarche sera poursuivie.

L'article 1er étend, au profit des bénéficiaires de la protection temporaire qui exercent une profession médicale, un dispositif dérogatoire aujourd'hui applicable aux réfugiés, apatrides et bénéficiaires de la protection subsidiaire qui appartiennent à la catégorie des professionnels de santé diplômés hors de l'Union européenne, que l'on appelle couramment les Padhue.

Ces professionnels de santé doivent en principe passer avec succès des épreuves de vérification de connaissances spécifiques à leur profession. Suivant ce dispositif, le nombre maximum de candidats susceptibles d'être reçus dans le cadre de ces épreuves n'est pas opposable aux réfugiés, apatrides et bénéficiaires de la protection subsidiaire. L'article 1er prévoit qu'il ne le sera pas non plus aux bénéficiaires de la protection temporaire.

Cette mesure a semblé opportune à la commission, dans la mesure où elle favorisera l'intégration des professionnels de santé qui disposent de ce statut.

L'article 2 visait à faciliter la souscription d'une assurance automobile par les bénéficiaires de la protection temporaire. Ces derniers auraient rencontré de nombreuses difficultés, le permis ukrainien n'étant pas reconnu par la France.

Pour surmonter ce problème, le dispositif permettait au propriétaire d'un véhicule immatriculé à l'étranger de le faire immatriculer en France, même s'il ne possède pas de permis de conduire reconnu par la France.

Cet article n'a pas semblé judicieux à la commission dans la mesure où ses conséquences potentielles dépassent tant la question de l'assurance des véhicules que la situation des bénéficiaires de la protection temporaire. Par ailleurs, un tel dispositif ne relève pas du domaine de la loi.

La commission a donc supprimé cet article, considérant qu'il incombe au Gouvernement, en concertation avec les assureurs, de trouver une solution à ce problème.

L'article 3 visait à faciliter le passage du permis de conduire par les bénéficiaires de la protection temporaire, qui peinaient à attester d'une résidence normale, comme le requiert le code de la route.

Si la commission a évidemment accueilli favorablement ce dispositif, puisque le permis de conduire est bien souvent un facteur important d'intégration dans notre pays, où la circulation en voiture est généralement nécessaire pour obtenir un emploi, il apparaît que son objectif est déjà satisfait par le droit actuel.

En effet, l'arrêté du 10 février 2025 prévoit expressément que l'autorisation provisoire de séjour permet de justifier d'une résidence normale.

La commission a donc supprimé cet article.

J'en viens à l'article 4, qui constitue le dispositif central de cette proposition de loi et résulte d'un constat préoccupant : les bénéficiaires de la protection temporaire sont de plus en plus nombreux à se détourner de ce dispositif au profit du régime de l'asile.

Les chiffres sont édifiants : les Ukrainiens ont déposé près de 2 000 demandes d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) en 2021 et en 2022. En 2023, ils en ont déposé 3 250, puis plus 12 000 en 2024. Il s'agit donc presque d'une multiplication par six depuis 2021.

Et cette tendance se poursuit : alors que l'Ukraine était le dixième pays de provenance des demandes d'asile en 2023, le deuxième en 2024, derrière l'Afghanistan, elle est désormais le premier au premier trimestre de cette année.

Il s'agit d'une exception à l'échelle de l'Union européenne. La France, qui est le dernier pays d'accueil de l'Union en proportion de sa population, reçoit la moitié des demandes d'asile formulées par des Ukrainiens au sein de l'Union. L'Ofpra accueille favorablement ces demandes, dans plus de 92 % des cas, et accorde en principe la protection subsidiaire. Or ce régime n'est pas adapté à la population ukrainienne. Il suffit de songer au fait qu'un bénéficiaire de la protection subsidiaire ne peut, en principe, regagner son pays d'origine durant quatre ans. Les autorités ukrainiennes et les associations représentant les Ukrainiens en France sont donc très inquiètes de voir leurs concitoyens engager en si grand nombre cette procédure.

Les personnes que j'ai auditionnées ont identifié plusieurs facteurs pouvant expliquer cette tendance, à laquelle nous devons remédier. Je citerai les quatre principaux.

Le premier tient à la fréquence des démarches administratives attachées à ce régime, l'autorisation provisoire de séjour (APS) devant être renouvelée en préfecture tous les six mois. Un amendement avait été déposé sur ce sujet, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Des travaux doivent néanmoins être conduits sur le dispositif actuel afin de l'adapter. La commission a remarqué que le Gouvernement pourrait procéder à une telle adaptation par décret.

Le deuxième résulte de l'incertitude qui plane quant aux modalités de sortie du dispositif. En effet, l'échéance actuelle a été fixée au 4 mars 2026. Les États membres devraient bientôt s'entendre sur une prolongation, assortie d'un plan de sortie du dispositif, mais les bénéficiaires du régime cherchent un statut pérenne du fait de l'incertitude actuelle.

Le troisième découle de la difficulté que certains auraient pu rencontrer à se loger. Ils se dirigeraient donc vers l'asile pour bénéficier du dispositif national d'accueil.

Enfin, le quatrième provient de l'éventuelle insuffisance de la couverture sociale associée à la protection temporaire.

L'article 4 repose sur cette dernière hypothèse. Il vise donc à étendre au profit des bénéficiaires de la protection temporaire plusieurs prestations et aides sociales. Il s'agit de l'allocation personnalisée d'autonomie, des allocations aux personnes âgées que sont l'allocation de solidarité aux personnes âgées et l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), et de l'allocation aux adultes handicapés.

La commission vous propose d'étendre la couverture sociale garantie par ce régime à l'APA, à l'Aspa, à l'ASI et à l'AAH. Elle a cependant décidé d'écarter le RSA du dispositif, dans la mesure où cette prestation n'apparaît pas appropriée au régime de la protection temporaire. Celle-ci a en effet une vocation provisoire et se caractérise par la mobilité de ses bénéficiaires. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion de l'amendement qui vise à le réintroduire.

Je terminerai en soulignant que la question des aides sociales n'épuise en rien ce sujet d'importance. La situation actuelle prouve qu'il faut agir dès maintenant pour prévenir le report des bénéficiaires de la protection temporaire vers l'asile. Il faut les informer de la prolongation vraisemblable du régime, voire, s'ils souhaitent s'installer durablement en France, les orienter vers des titres de séjour de droit commun, qui apparaissent bien plus adaptés à leur situation. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a un peu plus de trois ans, la guerre, que nous pensions reléguée au musée de l'Histoire, frappait de nouveau notre continent.

Des centaines de milliers d'hommes ont été jetés les uns contre les autres par la violence des combats, qui continuent malheureusement au moment où je vous parle. Des familles ont été décimées et une grande partie de la population ukrainienne, des femmes, des enfants, des vieillards, des hommes parfois, ont été contraints à l'exode et obligés de quitter l'Ukraine.

Souvent critiquée, l'Union européenne a su, en cette heure grave de notre histoire collective, être au rendez-vous de notre destin commun, en faisant bloc pour dénoncer l'agresseur, en faisant corps avec l'agressé, en entravant, par des sanctions, l'effort de guerre du premier et en permettant au second, par l'envoi d'armes, de maintenir le sien, en accueillant, surtout, ces hommes et ces femmes contraints de quitter leur foyer.

Au 19 février 2025, selon l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), près de 6,4 millions d'Ukrainiens avaient dû fuir leur terre pour trouver refuge sur les nôtres, en Pologne et en Allemagne, bien sûr, qui accueillent, et de loin, le plus grand nombre d'Ukrainiens, mais partout ailleurs aussi, de Chypre jusqu'en Irlande, en passant par la France. Notre pays en hébergeait près de 115 000 en décembre 2024.

En activant, le 4 mars 2022, pour la première fois de son histoire, la directive relative à la protection temporaire, le Conseil de l'Union européenne a permis d'assurer à des millions de personnes une protection efficace sans que celle-ci ne désorganise profondément les régimes d'asile nationaux.

Trois ans plus tard, ce sont près de 4,3 millions de personnes qui bénéficient de ce statut dans l'un des vingt-sept États membres de l'Union.

Trois ans plus tard, nous devons nous féliciter de tout ce que nous avons accompli, mais également mesurer ce qu'il nous faut améliorer. Car si le dispositif de protection temporaire a constitué une réponse souple et agile face à la fragilité et à la précarité de ces familles, il révèle aujourd'hui un certain nombre de limites, notamment en France.

Tel est l'objet de la proposition de loi que présente aujourd'hui Mme la sénatrice Nadia Sollogoub, dont je veux saluer l'infatigable engagement en faveur de ces personnes injustement chassées de leur foyer.

En effet, à peine plus de 56 000 ressortissants ukrainiens, mineurs accompagnants non compris, bénéficient en ce moment même de ce dispositif en France. Ce chiffre relativement faible s'explique par l'augmentation du nombre d'Ukrainiens qui demandent, et obtiennent, l'asile en France. L'an dernier, les ressortissants de ce pays ont ainsi représenté 10 % des premières demandes d'asile.

Or, il faut le dire, les bénéficiaires de la protection temporaire n'ont pas vocation à devenir des bénéficiaires de la protection internationale, parce qu'ils n'ont pas vocation à s'implanter durablement en France. Ils sont destinés, lorsque la guerre sera terminée, à retrouver leur foyer. Leurs familles et leurs proches les y attendent. Eux-mêmes y aspirent, dans leur immense majorité. Leur gouvernement le souhaite. Je peux en témoigner pour avoir reçu il y a quelques semaines mon homologue ukrainien au ministère. Nous faisons évidemment clairement passer ce message.

Si le refuge transitoire que devait offrir à ces civils la protection temporaire tend à se transformer en étape vers l'installation pérenne, c'est parce que ce mécanisme semble inadapté aux besoins qu'exprime aujourd'hui cette population.

Plus de trois ans après le déclenchement de cette protection, nous disposons dorénavant d'assez de recul pour l'ajuster et interrompre ce jeu de vases communicants qui est, il faut le redire, contraire à l'esprit de ce mécanisme et coûteux, notamment pour nos collectivités territoriales. Je rappelle en effet que le statut de réfugié ne permet pas seulement une installation durable ; il donne aussi droit à de nombreuses prestations sociales, comme le RSA, sans délai de carence.

C'est précisément l'ambition de la proposition de loi qui nous occupe aujourd'hui. Je remercie la rapporteure Isabelle Florennes, ainsi que tous les membres de la commission des lois, pour leur sens de l'écoute et du dialogue. Les échanges que nous avons eus, ainsi que les modifications qui ont été apportées, ont permis d'aboutir à un texte qui améliore sensiblement le dispositif de la protection temporaire en renforçant l'autonomie de ses bénéficiaires.

Je rappelle que la reconnaissance des permis de conduire relève soit du domaine réglementaire, soit du domaine supranational, et non de la loi. Le ministre ukrainien que j'ai rencontré a évoqué cette difficulté et des démarches sont engagées pour trouver une solution pragmatique.

Nous l'avons dit, les Ukrainiens ont vocation à retourner dans leur pays lorsque la guerre aura pris fin. C'est pourquoi nous devons d'ores et déjà préparer leur retour. Pour cela, il importe que nous leur permettions de conserver la même autonomie que celle dont ils disposaient dans leur pays d'origine, à savoir une autonomie professionnelle et familiale.

La France a déjà consenti de nombreux efforts en favorisant l'intégration au marché du travail des bénéficiaires de la protection temporaire, la scolarisation de leurs enfants, la socialisation des familles. Ce texte en prévoit d'autres, notamment pour les professionnels de santé. Le Gouvernement est favorable à ce texte.

A contrario, nous nous opposons à tout ce qui peut constituer une trappe à inactivité. Je veux de nouveau remercier la rapporteure et les membres de la commission, qui ont entendu nos préventions sur le droit au RSA en particulier.

En renforçant l'intégration professionnelle de nos amis ukrainiens et en adoptant un équilibre subtil dans l'octroi des droits sociaux qui améliorent le quotidien des plus précaires et des plus éloignés de l'emploi, cette proposition de loi vise juste. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est tout à fait favorable à son adoption.

Cette proposition de loi traduit bien l'engagement du Sénat, qui soutient les efforts que nos amis ukrainiens doivent fournir durant cette période difficile. Tous ceux qui sont présents dans cet hémicycle s'en souviennent, le Sénat avait reçu au mois de février 2023 Ruslan Stefanchuk, président de la Rada, qui avait eu le rare privilège de s'exprimer à cette tribune. Nous avions apprécié son intervention.

Ce symbole a illustré bien plus que les liens de confiance et d'amitié entre la Rada et le Sénat, il a rehaussé la solidarité profonde qui existe entre nos deux peuples. Cette solidarité ne se démentira jamais. Le texte que vous allez adopter aujourd'hui, et que le Gouvernement soutient, permet de confirmer cet engagement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou. (Applaudissements sur les travées du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.)

M. Christophe Chaillou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous venez de le rappeler, monsieur le ministre, il y a plus de trois ans, la Fédération de Russie a déclenché une guerre d'agression totale contre l'Ukraine, en violation flagrante des principes fondamentaux de la Charte des Nations unies et du droit international.

Dès les premiers jours du conflit, des centaines de milliers de civils ont été contraints de fuir leur pays pour échapper aux bombardements et aux exactions de l'armée russe.

Les citoyens européens se sont spontanément mobilisés en manifestant leur soutien à nos voisins ukrainiens, traduisant la solidarité européenne et internationale.

En Pologne, en Roumanie, en Allemagne massivement, et dans l'ensemble des pays européens, les États, les collectivités territoriales et les citoyens se sont mobilisés pour accueillir au mieux les personnes déplacées. En France, de très nombreuses initiatives ont été prises dans nos communes. Cette forte mobilisation ne s'est jamais démentie.

Confrontée à la situation d'urgence, l'Union européenne a fait preuve de responsabilité et activé, pour la première fois de son histoire, la directive 2001/55/CE instituant un régime de protection temporaire.

Ce mécanisme exceptionnel, conçu pour faire face à des afflux massifs de personnes déplacées, garantit un accès immédiat à une autorisation de séjour, au logement, à l'emploi, aux soins de santé. Initialement prévu pour une durée d'un an, renouvelable une fois, puis prorogeable à titre exceptionnel, ce régime a été reconduit à deux reprises, compte tenu des circonstances.

Trois ans après son activation, alors que la guerre se poursuit, plusieurs difficultés opérationnelles ont été identifiées quant aux conditions d'accueil : difficulté d'accès à certains droits sociaux, obstacles à la reconnaissance des qualifications professionnelles, situations d'incertitude prolongée pour les familles.

Ce décalage entre le droit en vigueur et la réalité du terrain conduit de plus en plus de bénéficiaires de la protection temporaire à solliciter l'asile. Déjà sous tension, l'Ofpra fait face à un afflux de très nombreuses demandes : 12 000 en 2024, contre 3 000 en 2023. Chacun est conscient des mécanismes qui aboutissent à cette évolution.

La quasi-totalité de ces demandes émanent de personnes déjà sous protection temporaire, ce qui contribue bien évidemment à cet afflux. Cette pression fragilise la qualité du traitement des demandes et compromet l'efficacité de notre politique d'accueil, déjà sous tension.

C'est dans ce contexte que s'inscrit la proposition de loi de notre collègue Nadia Sollogoub, que je salue pour la constance de son engagement, notamment en tant que présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, pour sa mobilisation, son enthousiasme et sa détermination à préserver très concrètement ici, au Sénat, les liens profonds qui nous unissent à nos amis ukrainiens.

Cette initiative, présentée dans un esprit transpartisan, vise à améliorer le fonctionnement du dispositif de protection temporaire en prenant appui sur les retours d'expérience de ces trois dernières années. Elle répond à un besoin identifié par de nombreux acteurs de terrain, visant à adapter le cadre juridique.

Le texte initial comportait cinq articles. Il prévoyait d'ouvrir l'accès à certaines prestations sociales aujourd'hui réservées aux réfugiés et de lever les freins liés à la mobilité, notamment en matière d'immatriculation et de permis de conduire. Il s'agissait ainsi de corriger plusieurs angles morts du droit actuel, sans remettre en cause la logique transitoire du régime européen.

La commission a examiné la proposition de loi dans un souci de dialogue, en lien avec le Gouvernement, pour aboutir au texte qui nous est aujourd'hui soumis. Les articles 1er et 4 ont été maintenus. Ils contiennent les dispositions les plus adaptées aux situations les plus critiques que nous connaissons.

L'article 1er permet aux professionnels de santé bénéficiant de la protection temporaire de se voir reconnaître le statut de praticien associé, facilitant ainsi leur intégration dans les établissements de soins. Nous en avons très objectivement grandement besoin dans un certain nombre de nos territoires.

L'article 4 ouvre plus largement aux bénéficiaires de la protection temporaire l'accès à plusieurs aides sociales – je n'y reviens pas.

L'élargissement au revenu de solidarité active, initialement envisagé, n'a pas été retenu. J'entends les différents arguments qui ont été avancés. Même si nous considérons que les conséquences seront assez marginales, nous regrettons cette exclusion.

Pour autant, nous demeurons très favorables à ce texte, qui apporte des réponses concrètes et pragmatiques aux difficultés constatées dans l'application du régime de protection temporaire. Il traduit également une volonté claire : celle de faire évoluer notre droit en cohérence avec les engagements européens et internationaux de la France et les principes d'humanité qui ont toujours guidé notre politique d'accueil, qui ne valent pas que pour l'Ukraine, mes chers collègues.

Enfin, si ce texte vise à mieux encadrer un dispositif, il ne saurait clore la réflexion. En effet, trois ans après leur arrivée en France, certaines personnes ont fondé une famille, inscrit leurs enfants à l'école, appris la langue, trouvé un emploi. Devant ces situations, nous savons déjà qu'il nous faudra imaginer d'autres évolutions et revenir sur le sujet. Ce n'est pas le petit-fils de réfugiés politiques espagnols, dont la famille a connu un parcours semblable l'ayant mené à l'intégration républicaine dans notre pays, qui vous dira le contraire.

Ce texte positif est bienvenu. Les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain le voteront. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, RDPI, RDSE et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier.

Mme Corinne Bourcier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 24 février 2022, la Russie envahissait l'Ukraine, provoquant un exode de la population pour fuir les bombardements et les violences de la guerre. Trois ans plus tard, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés recense un peu plus de 6,9 millions de réfugiés ukrainiens dans le monde.

L'office européen de statistiques, Eurostat, dénombre quant à lui près de 4,3 millions de ressortissants non européens ayant fui l'Ukraine et bénéficiant du statut de protection temporaire au sein de l'un des vingt-sept États membres.

Ce statut particulier a été enclenché pour la première fois par l'Union européenne en mars 2022, de crainte que le système d'asile standard ne soit débordé. Toutefois, le dispositif de la protection temporaire présente des failles : il offre un statut plus précaire que l'asile et se révèle peu adapté aux réfugiés, qui aspirent à une nouvelle vie dans le pays qui les accueille.

Je tiens donc à saluer l'initiative de notre collègue Nadia Sollogoub, qui préside le groupe d'amitié France-Ukraine. Cette proposition de loi, qui comportait initialement cinq articles, se veut surtout pragmatique en apportant des améliorations et des solutions concrètes à certaines difficultés rencontrées depuis trois ans dans la mise en œuvre de la protection temporaire.

Ainsi, son article 1er permet d'étendre aux bénéficiaires de la protection temporaire un dispositif dérogatoire d'accès aux épreuves de vérification des connaissances (EVC) organisées pour les praticiens à diplôme hors Union européenne.

L'article 2 instaurait une procédure dérogatoire d'immatriculation d'un véhicule.

L'article 3 attribuait à l'autorisation provisoire de séjour (APS) la qualité de justificatif de résidence normale, requis pour solliciter le permis de conduire.

L'article 4 étend l'octroi de plusieurs aides sociales aux bénéficiaires de la protection temporaire.

Enfin, l'article 5 gage les conséquences financières entraînées par l'application de ces dispositions.

La commission a apporté à cette proposition de loi plusieurs modifications utiles. Elle a opportunément supprimé le dispositif dérogatoire d'immatriculation qui ne ciblait pas spécifiquement les bénéficiaires de la protection temporaire. En outre, une telle disposition ne relève pas du domaine de la loi.

Je rejoins également la position de la commission, qui a supprimé le dispositif envisagé pour faciliter le passage du permis de conduire, qui relève de mesures réglementaires d'application du code de la route et qui est déjà satisfait par l'arrêté du 10 février 2025.

Enfin, si je souscris à l'objectif visé par l'article 4, je me félicite de la suppression de l'éligibilité au RSA des bénéficiaires de la protection temporaire, en raison de leur mobilité.

Avant de conclure, je veux remercier la rapporteure, notre collègue Isabelle Florennes, pour la qualité de ses travaux.

Monsieur le ministre, chers collègues, le monde se trouve confronté à une forte augmentation du nombre de personnes déplacées en raison de conflits armés, de persécutions politiques ou du changement climatique. La situation de ces personnes mérite toute notre attention et notre compassion. C'est dans ce contexte que nous examinons cette après-midi cette proposition de loi, qui a pour ambition de parfaire dès à présent le régime de protection temporaire en France.

Aussi, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera cette proposition de loi, améliorée par les travaux de la commission des lois. (Mme Nadia Sollogoub applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Di Folco. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Nadia Sollogoub, que je salue, vise à consolider certaines garanties accordées aux bénéficiaires de la protection temporaire, notamment dans les domaines professionnel et social.

Cela a déjà été rappelé, la protection temporaire est un régime juridique particulier, distinct de l'asile et de la protection subsidiaire, créé par la directive du 20 juillet 2001. Conçu comme un outil de réponse rapide à des crises aiguës, il garantit le droit de séjour aux étrangers extérieurs à l'Union européenne fuyant en masse leur région d'origine et ne pouvant y retourner.

Sa première activation fut décidée par le Conseil de l'Union européenne le 24 février 2022, au bénéfice des Ukrainiens, à la suite de l'invasion de leur pays par la Russie. Reconduit depuis lors, ce régime prendra fin, en principe, le 4 mars 2026.

La protection temporaire a permis d'assurer un bon accueil à plusieurs millions d'Ukrainiens, en respectant leur dignité et en assurant leur protection, à l'échelle de l'Union européenne – et notamment de plus de 110 000 femmes et enfants en France. Il s'agissait d'une réponse salutaire à l'ampleur du défi humanitaire aux portes de l'Union européenne et d'une démonstration de notre solidarité envers le peuple d'Ukraine. En somme, c'était la bonne réponse à une situation unique et urgente née de la guerre russo-ukrainienne.

Après plusieurs années d'application, la nécessité d'ajuster certains éléments de la protection temporaire est devenue apparente. Les limites du régime tel qu'il est appliqué en France sont notamment illustrées par un phénomène de glissement de certaines personnes protégées temporairement vers le statut de réfugié.

C'est dans cette optique d'amélioration incrémentielle que cette proposition de loi prévoit notamment de garantir l'accès des bénéficiaires de la protection temporaire aux épreuves de vérification des connaissances des praticiens médicaux diplômés hors Union européenne. Pour l'instant, l'accès des Ukrainiens à ces épreuves repose sur une série de mesures dérogatoires. Toutefois, le cadre juridique entourant les Padhue ayant évolué ces dernières années, il paraît utile d'intégrer plus solidement les bénéficiaires de la protection temporaire en son sein plutôt que de multiplier les expédients.

La proposition de loi prévoit également des aménagements à l'octroi de plusieurs aides sociales aux bénéficiaires de la protection temporaire qui y seraient éligibles, telles que l'allocation aux adultes handicapés ou l'allocation de solidarité aux personnes âgées. Cette mesure opère un rapprochement vis-à-vis de certaines garanties associées à d'autres formes de protection internationale, tout en s'inscrivant dans la continuité des particularités de la protection temporaire et, au risque de paraître tautologique, de sa nature transitoire.

L'objectif est d'éviter un report vers le dépôt de demandes d'asile, comme cela a été rappelé, qui dénature le régime de protection temporaire en risquant d'en faire une simple antichambre de l'asile plutôt qu'un régime à part entière, alors même que la présence de cette population sur notre sol a vocation à se limiter à la durée de la guerre.

Pour ces mêmes raisons, nous soutenons la décision de la rapporteure de retirer le RSA de la liste des prestations dont pourront bénéficier les personnes protégées temporairement. Cette aide ne nous paraît pas adaptée au cadre provisoire de la protection temporaire ni à la mobilité de ses bénéficiaires.

Nous serons particulièrement vigilants sur les conséquences financières de ces mesures dans le champ des aides sociales. Ce texte ne doit pas être le véhicule de nouvelles charges pesant sur les collectivités territoriales, dont les finances sont fragiles et qui ont largement contribué à l'accueil dans de bonnes conditions des Ukrainiens sur notre territoire.

Nous formulons par conséquent le vœu que cette proposition de loi puisse, au terme de son cheminement législatif, être assortie de solides assurances politiques et juridiques à cet égard de la part du Gouvernement.

Nous formulons enfin, pour les Ukrainiens, le vœu que la guerre cesse rapidement et que tous les réfugiés qui le souhaitent puissent retrouver leur patrie et reconstruire leur vie au mieux.

Au bénéfice de ces observations et éclaircissements sur notre position, le groupe Les Républicains votera la proposition de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mmes Nadia Sollogoub et Corinne Bourcier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Duranton. (Mme Nadia Sollogoub applaudit.)

Mme Nicole Duranton. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 24 février 2022, la Russie attaquait l'Ukraine, entraînant le déplacement de dizaines de milliers d'Ukrainiens.

En mars 2022, l'Union européenne a activé le dispositif de protection temporaire décliné par les pays membres pour garantir un accueil digne aux populations ayant fui le conflit.

Depuis le début de la guerre, la France a fait preuve de solidarité en accueillant 85 000 ressortissants ukrainiens sur son territoire.

Trois ans après sa mise en place, ce dispositif requiert des ajustements. C'est l'objet de la présente proposition de loi, présentée par notre collègue Nadia Sollogoub, présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, à qui je redis mon soutien et mes félicitations pour cette initiative. Je félicite également Isabelle Florennes, notre rapporteure, pour son excellent travail.

Ce texte nous invite à tirer des enseignements de l'application du dispositif de protection temporaire tel qu'il a été mis en place pour les Ukrainiens. Le but est que son utilisation soit plus pérenne, dans un contexte géopolitique nous faisant craindre que d'autres populations ne soient chassées de leur pays par la guerre.

Ce texte vise deux finalités complémentaires : d'une part, il s'agit de garantir des conditions d'accueil respectueuses de la dignité des personnes protégées ; de l'autre, il convient de prévenir le contournement du caractère temporaire du dispositif, certains bénéficiaires finissant par solliciter le statut de réfugié.

La protection temporaire n'a pas vocation à se substituer à l'asile, dont les conditions d'octroi dépendent d'un autre régime. Le dispositif n'a pas davantage vocation à se pérenniser. Il est, par définition, une réponse d'urgence, activée pour faire face à des déplacements massifs de population résultant d'une crise grave.

La présente proposition de loi apporte des améliorations substantielles à la protection temporaire. Son article 1er permet à ses bénéficiaires d'exercer des professions de santé, sous certaines conditions. Il s'agit de permettre aux ressortissants qualifiés de travailler en France et d'y vivre dignement. Dans le même temps, cela permet à notre pays de bénéficier de leur expertise dans des secteurs connaissant des difficultés de recrutement.

Les ajustements effectués par la commission, sous l'impulsion de Mme la rapporteure, ont fait évoluer le texte dans la bonne direction.

Pour ce qui est de l'ouverture aux droits sociaux, la commission a fait le choix de retirer l'accès au RSA. Cette mesure ne nous paraissait pas adaptée à la logique de protection temporaire. Le maintien du bénéfice des autres allocations garantira le soutien nécessaire aux personnes concernées.

Un dispositif de protection temporaire qui n'offre pas des conditions de vie stables ni un accompagnement suffisant devient inefficace. Il pousse mécaniquement ses bénéficiaires vers des procédures plus protectrices, mais moins adaptées. Ainsi, en 2024, plus de 11 800 premières demandes d'asile ont été déposées par des ressortissants ukrainiens. Ce chiffre a été multiplié par quatre par rapport à 2023.

C'est précisément ce que ce texte entend corriger. Il apporte une sécurité juridique et matérielle aux bénéficiaires de la protection temporaire. Par la même occasion, il permet de mieux organiser leur retour dans leur pays d'origine, dès lors que la situation le permettra.

Il s'agit ici de maintenir un certain équilibre : assurer une intégration et une stabilité suffisantes tout en évitant une installation définitive des personnes protégées.

Pour résumer, ce texte n'élargit pas indéfiniment le champ de la protection temporaire ; il en réaffirme la vocation transitoire en clarifiant ses contours et en améliorant son contenu. Ce faisant, il évitera d'accentuer la pression sur le système français de demande d'asile.

Pour conclure, je souhaite rappeler que l'accueil de nos amis ukrainiens est un enjeu d'humanité et de dignité. Améliorer le dispositif de protection temporaire, ce n'est pas seulement une question politique ; c'est aussi un impératif moral pour garantir un accueil digne et respectueux à ces personnes qui fuient la guerre.

Pour toutes ces raisons, le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. André Guiol.

M. André Guiol. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi de notre collègue Nadia Sollogoub, que je félicite pour sa pugnacité. Ce texte corrige une série de décalages juridiques et administratifs concernant les bénéficiaires de la protection temporaire.

Depuis l'activation exceptionnelle, le 4 mars 2022, du mécanisme prévu par la directive de 2001, près de 4,2 millions de déplacés ont bénéficié de ce régime dans l'Union européenne. En France, environ 120 000 autorisations provisoires de séjour ont été délivrées depuis 2022 et 56 000 personnes en bénéficient encore.

Il s'agit, pour l'essentiel, de femmes et d'enfants ukrainiens ayant fui une guerre toujours en cours, qui a provoqué plus de 10 millions de déplacés. Le statut de ces personnes est bien défini : elles bénéficient d'une protection immédiate, collective et temporaire, décidée par le Conseil de l'Union européenne.

En pratique, ces personnes sont pourtant encore traitées comme des demandeurs d'asile, en particulier sur le plan social. Ils perçoivent une aide transitoire prévue pour des personnes sans droit au séjour établi.

Cette incongruité juridique conduit certaines personnes à déposer une demande d'asile, uniquement pour bénéficier de prestations plus adaptées. Ce phénomène détourne la logique du régime temporaire et alourdit la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatride. En 2024, 11 800 Ukrainiens ont déposé une demande d'asile en France, alors même que la grande majorité d'entre eux relèvent déjà du régime temporaire.

La présente proposition de loi vise à corriger cette situation en alignant les droits sociaux des bénéficiaires de la protection temporaire sur ceux des personnes protégées au titre de l'asile. Ce n'est pas une mesure de faveur, c'est une mise à jour conforme aux engagements de la France, à la logique du droit européen et à la dignité des personnes concernées.

La commission a cependant supprimé l'ouverture du RSA aux bénéficiaires de la protection temporaire, pour ne pas imposer un coût supplémentaire aux départements. Cette préoccupation est compréhensible, même si le nombre de personnes concernées est limité et que seule une part d'entre elles auraient effectivement rempli les conditions pour percevoir le RSA. En réalité, le surcoût pour les finances départementales aurait été modéré… Dont acte. Cette mesure aurait pourtant permis de stabiliser des parcours d'insertion déjà engagés, tout en évitant le recours détourné à l'asile pour accéder à un revenu de base.

Pour autant, le texte comporte toujours des avancées très concrètes. Il ouvre l'accès à l'allocation aux adultes handicapés, à l'allocation personnalisée d'autonomie, à l'Aspa et facilite l'intégration professionnelle des professionnels de santé étrangers, notamment par la clarification de l'éligibilité au statut de praticien associé. Ces ajustements répondent à des besoins réels, exprimés depuis des mois par les collectivités territoriales et les agences régionales de santé.

Enfin, permettez-moi, en tant que membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'insister sur le caractère géopolitique de ce texte. Il n'est pas uniquement question d'un ajustement technique. Il s'agit aussi d'un geste de solidarité et de cohérence diplomatique : en renforçant l'accueil des déplacés ukrainiens, nous contribuons à la résilience de ce peuple, à la préservation de ses forces vives et au soutien moral qu'il est en droit d'attendre de ses partenaires européens.

Ce texte est donc nécessaire, équilibré, et conforme à nos engagements multilatéraux, bien mis à mal ces derniers temps.

Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen le votera donc avec détermination. (Mmes Nadia Sollogoub et Isabelle Florennes applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Olivia Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Olivia Richard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques mois, notre délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, sous l'impulsion de sa présidente Dominique Vérien, a publié un rapport intitulé Femmes sans abri, la face cachée de la rue.

Pour préparer ce texte, nous avons participé à un exercice en immersion auprès du Samu social de Paris. Casque sur les oreilles, une jeune salariée m'expliquait le processus de réponse téléphonique. Face au nombre vertigineux d'appels, seules deux places pouvaient être proposées pour des femmes seules pour la nuit suivante.

Nous avons pris le premier appel. C'était une Ukrainienne. Elle parlait vite, dans un français approximatif. Elle suppliait qu'on l'aide à trouver un abri, pour elle et son fils. À côté d'elle, on entendait l'enfant tousser.

Mes chers collègues, nos travaux ont révélé qu'en France, chaque nuit, au moins 3 000 femmes dorment à la rue, souvent accompagnées de leurs enfants. Environ 40 % d'entre elles sont étrangères, et notamment originaires d'Ukraine.

Les dispositifs d'hébergement sont totalement saturés dans les grandes villes. À Paris, des critères de priorité ont été instaurés. Une femme enceinte ne peut espérer un hébergement que si sa grossesse a dépassé les sept mois. Une fois l'enfant né, l'hébergement est garanti, en théorie, jusqu'à ses trois mois. Mais lorsque plusieurs enfants sont présents, il n'y a parfois pas de place pour tous et les plus grands doivent rester dehors.

Le garçon qui accompagnait cette mère avait 7 ans ; c'est jeune pour dormir dans la rue, surtout quand on est malade. Mais, paradoxalement, c'est trop grand pour donner droit à une priorité d'hébergement, même malade.

On a conseillé à cette mère de se rapprocher d'une association d'aide aux Ukrainiens, censée être mieux dotée, mais elle en venait. Aucune solution n'a pu lui être apportée. Ces associations, comme les autres, travaillent sans aucune visibilité budgétaire.

Près de 60 000 Ukrainiens ont été accueillis en France, selon un dispositif dépendant de l'Union européenne, qui active la protection temporaire.

Je veux ici saluer l'initiative de notre collègue Nadia Sollogoub. Son travail met en lumière une réalité difficile à regarder.

Lors du débat budgétaire, grâce à sa détermination et au soutien précieux de la ministre du logement, 10 000 places d'hébergement ont été obtenues pour les Ukrainiens. Il en aurait fallu 30 000. Les associations, elles, continuent d'accueillir avec peu de moyens, leur financement étant soumis aux aléas budgétaires. Le pire est à craindre pour le prochain exercice.

Mes chers collègues, l'engagement de notre collègue Nadia Sollogoub, que ce soit envers les plus vulnérables comme envers la population ukrainienne, en tant que présidente du groupe interparlementaire d'amitié, trouve aujourd'hui une nouvelle matérialisation.

Nous avons accueilli massivement, mais selon des modalités qui poussent désormais les Ukrainiens à demander l'asile, statut plus protecteur, mais aussi plus coûteux et moins adapté à leur situation, puisqu'il leur interdit de retourner dans leur pays, auprès de leur famille, ou de ce qu'il en reste… Notre rapporteure Isabelle Florennes a bien présenté les différents dispositifs, je n'y reviens pas.

Nadia Sollogoub tire la sonnette d'alarme pour parfaire un dispositif qui, hélas ! bénéficiera à d'autres à l'avenir – nul ne peut en douter. Diverses dispositions, comme celle qui concernait le permis de conduire, étaient certes d'ordre réglementaire, mais néanmoins essentielles.

J'en veux pour preuve le témoignage d'Orane, qui fait actuellement un stage dans mon équipe. Sa famille, qui vit dans un village où même la boulangerie n'est accessible qu'en voiture, a accueilli trois Ukrainiennes. Elles étaient âgées, il fallait les conduire partout, elles ne parlaient pas français et la communication était trop difficile. Elles ont fini par demander à être relogées ailleurs.

La reconnaissance du permis de conduire est indispensable : les Français installés hors de France en savent toute l'importance. Je compte donc aussi sur la direction chargée des conventions internationales du ministère de l'Europe et des affaires étrangères pour qu'elle favorise la conclusion rapide d'un accord.

Nous avons accueilli les Ukrainiens. Nous leur avons dit qu'ils pouvaient venir chez nous et y trouver protection le temps nécessaire à la négociation de la paix. Trois ans plus tard, ce provisoire qui dure montre ses limites.

Les questions soulevées sont des plus pertinentes s'agissant d'améliorer l'intégration de personnes présentes sur notre territoire en raison de circonstances dramatiques. Nadia Sollogoub propose des pistes qui relèvent du bon sens : pouvoir travailler, notamment lorsque les qualifications possédées font cruellement défaut à notre pays, comme dans le domaine de la santé ; pouvoir apprendre notre langue ; bénéficier d'une protection sociale adaptée au grand âge…

Mme Olivia Richard. Ce sont des propositions de bon sens, j'y insiste, et je ne doute pas que l'examen de cette proposition de loi permette d'améliorer d'autres aspects de notre droit, qui peuvent conduire à des situations incompréhensibles. À cet égard, je tiens à saluer le travail de notre rapporteure Isabelle Florennes.

L'auteure de la proposition loi souligne que, si c'est bien le vécu de la population ukrainienne accueillie en France qui a conduit à la rédaction de ce texte, celui-ci a vocation à s'appliquer à l'ensemble des personnes qui seraient amenées à rechercher la protection de la France. L'ambition est donc importante, comme le serait le nombre de personnes concernées.

J'ai entendu les préoccupations financières qui ont été exprimées. En tout état de cause, la recherche d'économies peut parfois coûter cher. Favoriser une protection temporaire à la hauteur des annonces est en réalité un bon investissement. Je suis convaincue qu'un ressortissant étranger bien intégré coûte moins cher à notre société, notamment lorsque sa présence est limitée dans le temps, comme l'a rappelé Nadia Sollogoub.

Mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Laurent Somon applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes amenés à débattre de la directive relative à la protection temporaire, celle-là même que nous pourrions surnommer la belle endormie du système d'asile européen, inutilisée face aux crises liées à l'accueil des réfugiés syriens et afghans, entre autres.

Ce refus de solidarité et d'humanité a conduit des dizaines de milliers de personnes à la mort en Méditerranée centrale, faisant de cet itinéraire la route migratoire la plus mortelle au monde. Rappelons que les femmes et les hommes qui atteignent nos frontières charrient avec eux la misère qui ploie sous les accords miniers, les concessions pétrolières et les contrats d'armement, dont notre économie n'est jamais tout à fait absente.

Ce n'est que lors de l'invasion de l'Ukraine que cette directive, vingt ans après la création du mécanisme, a été appliquée et a permis de constituer une véritable bouée de sauvetage juridique pour les quelque 4,3 millions d'Ukrainiens ayant fui leur pays en raison de la guerre qui y fait rage.

La proposition de loi examinée ce soir vise à améliorer ce dispositif de protection temporaire en permettant une intégration effective et digne des personnes protégées, notamment en leur accordant un soutien social de droit commun.

Nous y sommes naturellement favorables et notre groupe votera ce texte. La guerre en Ukraine, qui suscite une mobilisation officielle sans faille dans l'accueil des déplacés, révèle que l'exceptionnel et le temporaire peuvent devenir une ressource pour reconnaître, accompagner et inclure, au lieu de militariser, refouler, marginaliser.

Tandis que, le 28 mars 2022, le ministre de l'intérieur a fait débloquer 100 000 places d'hébergement pour les réfugiés ukrainiens – et ce fut la première fois que les collectivités territoriales furent sollicitées dans le cadre de l'accueil de réfugiés –, pour les autres nationalités, les gares et les trains restent ce qu'ils ont toujours été : des lieux de traque et de contrôle.

Pendant que l'État noue un partenariat inédit avec la SNCF pour permettre aux familles ukrainiennes de se déplacer gratuitement vers les régions où on leur propose un hébergement, dans le même temps, en plein cœur de la vallée de la Roya, un escadron de gendarmerie mobile contrôle toujours les environs de la commune de Sospel et sa gare TER, tandis que la direction de la SNCF demande aux cheminots, selon un communiqué de la CGT du 14 mars, de « vérifier la provenance des réfugiés dans le train [...]et d'agir avec bienveillance s'ils sont Ukrainiens. »

Monsieur le ministre, pourquoi une différence de traitement aussi manifeste ? Un Syrien, un Palestinien, un Soudanais, un Afghan, un Birman ne trouvent-ils pas autant grâce aux yeux de vos services qu'un ressortissant ukrainien ? Ne fuient-ils pas, eux aussi, une guerre ou une menace irrépressible pesant sur leur vie et celles de leurs proches ? Quand la France impulsera-t-elle, au sein du Conseil européen, l'application de la protection temporaire à l'égard du peuple palestinien ?

Il est à noter que les prises de commandes d'armement français se maintiennent à 19 milliards d'euros en 2024. Frontex dépense chaque année près de 1 milliard d'euros, dont plus des deux tiers pour des radars, drones et algorithmes. Le marché mondial de la sécurité frontalière devrait atteindre 95 milliards de dollars en 2032. Plus le projectile déracine, plus la caméra thermique se vend : expulsion à l'amont, capture à l'aval – double facturation sur le même mouvement humain.

La solidarité n'est qu'un mot à la mode si elle ne façonne pas véritablement notre système. La stratégie actuelle de l'Union européenne repose sur des violations avérées des droits de l'homme, tout en faisant engranger des bénéfices substantiels aux industries d'armement. Personne n'est illégal. Les causes de la fuite sont diverses, mais presque toujours liées à la guerre, à l'inégalité mondiale entre les riches et les pauvres. Le droit au refuge doit être effectif pour toute personne qui en relève. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST.)

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe UC.)

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite avant tout exprimer l'espoir constant de notre groupe d'un retour à la paix sur notre continent.

Nous nous retrouvons dans cet espace transpartisan afin d'étudier une proposition de loi qui est chère à mon groupe à bien des égards, car elle touche à la fois à l'accueil des migrants et au processus d'évaluation des lois.

Oui, ce texte souhaite améliorer une situation après en avoir évalué les écueils, que l'on n'avait pas forcément perçus au premier abord. Il traite du sujet de la protection temporaire, que notre pays a su si justement et rapidement mettre en place pour les Ukrainiens dès le début de l'agression russe.

Ce dispositif représente à la fois un modèle de coopération européenne et la preuve que nous savons organiser un accueil digne pour les personnes en détresse, forcées de s'éloigner de leur pays. Il faudrait simplement en étendre le bénéfice à d'autres personnes et à d'autres situations…

Notre pays s'est honoré d'accueillir près de 55 000 Ukrainiens sous ce statut. Tout comme les auteurs de ce texte, nous pensons que cette protection temporaire et ses modalités ont vocation à être mises en œuvre pour d'autres personnes qui fuient les conflits partout dans le monde.

Au vu de la situation en Ukraine, qui semble enlisée, ce dispositif temporaire perdure, hélas. Le texte européen qui lui sert de base a déjà été prorogé à deux reprises et devrait expirer, à ce stade, au début du mois de mars 2026.

Cette pérennisation du conflit n'est pas sans conséquence pour les bénéficiaires de la protection temporaire, qui sont de moins en moins nombreux à exprimer une intention de retour dans leur pays.

Le nombre de demandes d'asile, ce statut individuel plus protecteur sur le temps plus long, est en forte hausse. En 2024, 11 800 dossiers ont été déposés ; c'est quatre fois plus qu'en 2023. Les Ukrainiens sont aujourd'hui la deuxième nationalité pour le nombre de demandes d'asile en France, derrière les Afghans.

L'autorisation provisoire de séjour de ceux qui sont placés sous protection temporaire n'est que de six mois. Notre groupe avait proposé de porter cette durée à un an, et certains orateurs viennent de défendre cette idée. En effet, la fréquence des démarches administratives attachées au régime de la protection temporaire est l'un des facteurs explicatifs de la hausse du nombre de demandes d'asile. Si les concernés bénéficient, contrairement aux demandeurs d'asile, et malgré nos demandes répétées en faveur de ces derniers, d'une autorisation temporaire de travail, la précarité de leur situation demeure problématique.

Nous avons regretté l'interprétation de l'article 40 de la Constitution, qui a conduit à une déclaration d'irrecevabilité. La démarche que nous proposions aurait au contraire permis des économies. Nous joignons nos voix à celle de Mme la rapporteure pour demander au Gouvernement de se saisir rapidement du sujet.

C'est aussi à une problématique financière que sont confrontées les personnes ayant fui la guerre en Ukraine. L'accompagnement social est essentiel pour leur vie sur notre territoire.

L'amélioration du dispositif de protection temporaire via une meilleure protection sociale des bénéficiaires est salutaire : les Ukrainiennes et les Ukrainiens présents en France sont de plus en plus soumis à des difficultés économiques, dans un contexte de hausse du coût de la vie. Cette précarisation a des conséquences dramatiques : plus de la moitié des personnes qui retournent en Ukraine le font en raison de pressions économiques – loyers impayés, dettes, frais de santé, etc. –, et 27 % de ces retours s'effectuent même dans des zones proches de lignes de front, en dépit des risques pour la vie des rapatriés.

C'est pourquoi notre groupe regrette la suppression par la commission de l'ouverture du revenu de solidarité active pour les Ukrainiens bénéficiaires de la protection temporaire ; cette décision nous semble aller à rebours de l'objectif du texte. Nous proposerons un amendement tendant à rétablir cette possibilité.

Autre problématique majeure sur laquelle nous n'avons de cesse d'alerter : le logement. Ainsi que le rappellent les auteurs de la proposition de loi dans l'exposé des motifs, les aléas budgétaires empêchent d'avoir de la stabilité et de la visibilité à long terme en la matière.

Comme souvent, notre groupe alerte sur le besoin de sécuriser et de pérenniser de tels financements dans le domaine de l'accueil, comme dans tant d'autres.

Vous l'aurez compris, nous saluons la démarche de notre collègue Nadia Sollogoub, dont le texte s'appuie sur un retour d'expérience de terrain pour améliorer la situation de ceux qui ont dû fuir leur pays.

L'inconditionnalité de la dignité de l'accueil pour le plus grand nombre est un objectif permanent du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires : droit au travail, droit au logement, droit à la santé et droit à l'école. Nous voterons donc en faveur de la présente proposition de loi, qui va dans ce sens. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner une proposition de loi de Mme Nadia Sollogoub, que je salue, visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France dont bénéficient les ressortissants ukrainiens.

Cette initiative, inscrite dans un cadre transpartisan, mérite une attention particulière.

Depuis le début du conflit en Ukraine, la France a su répondre avec solidarité et efficacité à l'afflux des déplacés ukrainiens.

Le 4 mars 2022, le mécanisme de protection temporaire a été déclenché par l'Union européenne, accordant ce statut aux 4 millions d'Ukrainiens fuyant leur pays en guerre. En France, ce sont 111 299 ressortissants qui ont été accueillis. Les modalités d'accueil ont été précisées par une instruction ministérielle du 10 mars 2022 : séjour, accès au marché du travail et logement, assistance médicale et sociale et accès des enfants à l'éducation. Les efforts déployés sont indéniables et témoignent de notre engagement humanitaire.

Cependant, malgré ces avancées, des difficultés subsistent. Dans les démarches à suivre, il faut obtenir l'autorisation provisoire de séjour portant la mention « bénéficiaire de la protection temporaire », d'une durée de six mois, renouvelable dans la limite de trois ans maximum. L'échéance actuelle de la protection temporaire a été établie au 4 mars 2026. Et c'est là que réside tout le problème…

En effet, deux options s'offrent à eux : faire une demande d'asile pour continuer de bénéficier de toutes les prestations ou rentrer dans leur pays.

Si l'Union européenne n'apporte pas une solution coordonnée et collective, les systèmes d'asile peuvent se retrouver submergés après le moins de mars 2026, en France comme dans les autres pays.

Cela peut conduire à une approche fragmentée, avec des personnes qui tomberont dans l'irrégularité faute d'avoir demandé le droit d'asile, parce que souhaitant pouvoir retourner un jour dans leur pays.

Les mesures proposées visent à maintenir le soutien aux bénéficiaires de la protection temporaire et à limiter ainsi le recours à la demande d'asile, et ce en leur conférant les mêmes droits que ceux qui sont accordés aux bénéficiaires de l'asile.

Les auteurs de la proposition de loi cherchent également à améliorer, dans le cadre d'une future crise, le régime de la protection temporaire. Il s'agit de répondre aux enjeux en étendant l'accès à certaines prestations sociales telles que les allocations personnalisées d'autonomie, l'allocation aux adultes handicapés, l'allocation de solidarité aux personnes âgées et l'allocation supplémentaire d'invalidité.

Il est toutefois essentiel de rappeler que la protection temporaire est, par définition, un statut provisoire. Accorder un accès élargi aux prestations sociales pourrait remettre en cause le principe de temporalité inhérent à ce statut.

Le revenu de solidarité active a quant à lui été exclu de cette extension. C'est une décision prudente, mais qui soulève la question de la cohérence d'ensemble du dispositif.

De plus, la proposition de loi ne prend pas suffisamment en compte les enjeux budgétaires et les conséquences sur notre modèle social. Alors que la France fait face à une situation économique complexe, il est crucial de veiller à ce que l'élargissement des droits sociaux ne mette pas en péril la solidarité nationale.

En tant que sénateurs, notre responsabilité est de veiller à l'équilibre entre solidarité et responsabilité. Nous devons nous assurer que les mesures prises soient adaptées, proportionnées et compatibles avec les principes fondamentaux de notre République.

Tout en reconnaissant la volonté d'accompagnement des auteurs de cette proposition de loi, nous pensons qu'il est impératif de procéder avec prudence et discernement. Nous devons nous assurer que les mesures envisagées soient véritablement adaptées aux besoins des bénéficiaires, de la protection temporaire et qu'elles ne compromettent pas l'équilibre de notre budget. Mais, comme vous le savez, le groupe Les Républicains votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en france

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
Articles 2 et 3

Article 1er

Au troisième alinéa du I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique, après le mot : « apatrides », sont insérés les mots : « , bénéficiaires de la protection temporaire ».

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... – Au quatrième alinéa de l'article L. 4221-12 du code de la santé publique après les mots :« apatrides », sont insérés les mots : « , bénéficiaires de la protection temporaire ».

La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre. Un aménagement de la procédure de droit commun d'autorisation d'exercice est prévu pour les praticiens bénéficiant du statut de réfugié, d'apatride, de l'asile territorial, de la protection subsidiaire ainsi que pour les Français ayant regagné le territoire national à la demande des autorités françaises.

Afin de faciliter l'accès de ces publics au plein exercice, les épreuves de vérification des connaissances prennent la forme d'un examen, et non d'un concours. L'article 1er de la proposition de loi élargit cette disposition dérogatoire aux bénéficiaires du statut européen de la protection temporaire pour les médecins, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes, mais pas pour les pharmaciens, qui dépendent d'un autre article du code.

L'amendement a pour objet d'y remédier en intégrant les pharmaciens dans la liste, dans un souci de cohérence des politiques publiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. La rectification proposée par le Gouvernement nous paraît très opportune : avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
Article 4

Articles 2 et 3

(Supprimés)

Articles 2 et 3
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
Article 5 (début)

Article 4

I. – Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° À l'article L. 232-2, après le mot : « régulière », sont insérés les mots : « ou bénéficiant de la protection temporaire » ;

2° (Supprimé)

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 2° de l'article L. 816-1 est complété par les mots : « ou de la protection temporaire » ;

2° Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 821-1, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Peuvent bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés les personnes bénéficiaires de la protection temporaire. »

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Senée, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rétablir le 2° dans la rédaction suivante : 

2° Au a du 2° de l'article L. 262-4, après le mot : « subsidiaire, », sont insérés les mots : « de la protection temporaire, ».

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Cet amendement, que j'ai évoqué en discussion générale, tend à rétablir l'ouverture du RSA aux bénéficiaires de la protection temporaire qui figurait dans la version initiale du texte, mais qui a été supprimée par la commission des lois.

Comme je l'ai indiqué précédemment, les personnes concernées connaissent des difficultés financières de plus en plus importantes, qui aboutissent parfois à des demandes d'asile ou à des retours au pays.

Le rétablissement que nous proposons nous paraît à la fois justifié dans son principe et peu coûteux pour les finances publiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. Ainsi que nous l'avons rappelé à plusieurs reprises, le RSA ne nous paraît pas adapté aux bénéficiaires de la protection temporaire, qui se caractérisent par leur grande mobilité au sein de l'Union européenne. De surcroît, ce régime est en principe, comme son nom l'indique, temporaire.

J'insiste sur un autre point : conformément à la volonté de Mme Sollogoub, la présente proposition de loi ne concerne pas seulement les Ukrainiens. Le régime juridique pourrait malheureusement être de nouveau activé dans les années à venir, dans des conditions dont vous conviendrez avec nous qu'elles sont, à l'heure actuelle, inconnues : nous ne pouvons préjuger des crises à venir.

La commission considère qu'il convient de laisser au Gouvernement une marge d'appréciation dans la détermination de la prestation de base. C'est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François-Noël Buffet, ministre. Le Gouvernement ne saurait dire mieux que la commission, dont il partage totalement l'analyse : avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
Article 5 (fin)

Article 5

I. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour l'État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

III. – La perte de recettes résultant pour l'État du II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre. Cet amendement vise à lever le gage. Après une analyse un peu fine du texte, il nous est apparu que, compte tenu notamment de la suppression de certains articles, nous restions dans l'enveloppe disponible.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 5 est supprimé.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l'ensemble de la proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 279 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 343

Le Sénat a adopté. (Vifs applaudissements.)

La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la proposition de loi.

Mme Nadia Sollogoub, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis à la fois comblée et très émue.

Au mois de septembre 2020, lorsque je suis devenue présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, jamais je n'aurais imaginé que nous aurions un jour à défendre la cause d'Ukrainiens accueillis en France. Jamais je n'aurais imaginé qu'un cauchemar aussi épouvantable, pire que tout ce que nous aurions pu concevoir, viendrait bousculer ce qui aurait dû être une relation paisible.

Notre amitié a grandi dans un contexte difficile, mais elle n'en est que plus forte. Et je tiens à remercier tous ceux qui ont été à nos côtés dans ces moments. Malgré tous les écueils, c'est dans un esprit lucide et dépassionné que j'ai voulu défendre devant vous ce texte, qui se veut également technique.

Je voudrais remercier tous ceux qui sont en première ligne depuis le mois de février 2022 dans ce que l'on appelle le « deuxième front », c'est-à-dire le front humanitaire.

Je le souligne devant celui qui est devenu mon ami, Serhii Esaulov, le consul d'Ukraine, présent en tribune ; lui et tous les services de l'ambassade ukrainienne en France font un travail – j'ose le dire – héroïque ! (Applaudissements.)

Je salue aussi l'expertise, l'engagement constant et la bienveillance dans les travaux que nous menons ensemble au quotidien du préfet Joseph Zimet, ici présent. (Nouveaux applaudissements.)

J'adresse un très grand merci aux nombreuses associations engagées, chaleureuses, et à tous ceux qui sont devenus mes amis.

Mes remerciements vont également à la rapporteure Isabelle Florennes, à l'oratrice du groupe Union Centriste, Olivia Richard, et aux orateurs de tous les groupes, qui m'ont témoigné leur amitié et leur soutien.

Merci aussi à tous les membres du groupe d'amitié France-Ukraine, qui est toujours très mobilisé et dont la secrétaire exécutive encadre toujours nos travaux avec amitié, constance et professionnalisme.

Monsieur le ministre, votre analyse objective et constructive nous permet aujourd'hui de faire un grand pas en avant.

J'espère évidemment que ce texte pourra à présent être rapidement inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et qu'un vote conforme nous permettra d'avancer.

Enfin, je vous indique en guise de clin d'œil que, demain, ce sera la Vyshyvanka, la fête des chemises brodées. Grâce à vous tous, nos chemises brodées ukrainiennes seront un peu plus légères sur nos épaules. (Applaudissements.)

Article 5 (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France
 

7

 
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile
Article unique (début)

Création d'un groupe de vacataires opérationnels de sécurité civile

Discussion et retrait d'une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile, présentée par M. Grégory Blanc et plusieurs de ses collègues (proposition n° 691 rectifiée bis, texte de la commission n° 598, rapport n° 597).

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Grégory Blanc, auteur de la proposition de loi.

M. Grégory Blanc, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord d'exprimer mes pensées les plus émues au sergent-chef Niccolo Scardi, à sa famille et à l'ensemble de ses camarades. Nous sommes tous abasourdis par ce drame en Haute-Savoie. Rien ne justifie qu'un homme engagé au service des autres soit la cible d'actes sans nom.

Monsieur le ministre, dans ce contexte tendu, nous manquons de moyens humains. La culture de la sécurité doit être davantage ancrée dans nos territoires. Face aux enjeux, qu'il s'agisse de tranquillité publique, de sécurité publique ou de sécurité civile, les dangers s'accroissent. Cela requiert du Gouvernement, du Parlement et de l'ensemble des responsables politiques qu'ils ouvrent le débat pour clarifier les horizons.

Notre modèle de sécurité civile fonctionne. En France, les personnes qui ont besoin d'assistance sont secourues. Cela résulte d'une construction patiente, au fil de l'histoire, articulant engagement citoyen et savoir-faire professionnel. Néanmoins, si cela fonctionne bien, des fragilités existent et s'aggravent.

C'est le débat que nous posons : alors que la société change et que nos modes de vie évoluent, comment devons-nous adapter notre modèle de sécurité civile aux défis qui viennent, ceux de 2030, ceux de 2040, dans dix ans, dans quinze ans ? Je ne parle pas seulement du passé ou du présent ; nous devons nous projeter dans les défis qui sont devant nous.

En un peu plus de vingt ans, 2 400 casernes ont fermé ; c'est plus d'une caserne sur cinq. Pourquoi, alors que le nombre de volontaires stagne, notre maillage territorial se réduit-il, fragilisant l'ancrage dans quelques territoires de notre culture de la sécurité civile ?

À nos yeux, l'adaptation de notre modèle ne peut être seulement, d'un côté, une évolution du pilotage des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) et, de l'autre, toujours plus d'argent et de subventions, a fortiori dans le contexte de crise des finances publiques que nous connaissons.

Si nous voulons passer les caps, il nous appartient de réfléchir à notre organisation et à un éventail d'évolutions en la matière. Disons-le clairement, il nous faudra à l'avenir à la fois plus de sapeurs-pompiers professionnels et plus de sapeurs-pompiers volontaires. Mais cela ne doit pas nous dispenser d'une réflexion sur les moyens d'avoir un service public plus efficient, y compris financièrement.

Monsieur le ministre, il y a quand même un sérieux problème. Je prends les chiffres, les vrais, ceux du ministère, ceux de l'inspection générale de l'administration et ceux qui figurent sur le site de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Tous convergent : il a fallu douze ans pour passer de 196 825 volontaires en 2009 à 200 000 en 2023, soit une augmentation de 3 000 personnels, et seulement deux ans, de 2021 à 2023, pour recruter 1 600 sapeurs-pompiers professionnels, afin de sécuriser la réponse opérationnelle. Pourtant, dans cet intervalle, les délais d'intervention se sont allongés.

À quels défis ces réalités d'aujourd'hui font-elles face ?

Le premier défi concerne l'évolution des modes de vie et de nos modes de production. En l'occurrence, je crois qu'il nous appartient de dresser un constat partagé. Aujourd'hui, de nombreux volontaires travaillent très souvent à vingt kilomètres, à trente kilomètres ou à quarante kilomètres de leur domicile, quand le modèle économique reposait auparavant davantage sur l'emploi agricole ou artisanal, ce qui permettait aux volontaires de travailler à côté de chez eux. Cette situation crée des problèmes de disponibilité en journée dans certains territoires, et seulement dans certains territoires.

Pour y répondre, on installe désormais dans certaines casernes de manière permanente des professionnels en journée pour n'assurer que deux ou trois sorties quotidiennes. Ce modèle, qui se développe, n'est pas viable financièrement.

Il faut surtout constater que les entreprises fonctionnent désormais en flux tendu. J'étais moi-même chef d'entreprise dans le secteur de la santé : impossible de laisser partir une infirmière si son départ n'était pas anticipé et programmé. Si la seule réponse consiste à financer ou à indemniser davantage les entreprises qui permettent le système de l'astreinte, cela ne résoudra pas tous les problèmes : le système productif ne fonctionne plus comme il le faisait cinquante ans en arrière.

Le deuxième défi, juridique celui-là, est bien évidemment l'épée de Damoclès de la directive européenne sur le temps de travail. Il est indispensable de sécuriser le système d'astreinte au cœur du modèle du volontariat.

Parallèlement, la garde postée s'est développée dans certains départements. Toutefois, lorsque des sapeurs-pompiers professionnels sous statut volontaire assument de nombreuses heures de garde postée, cela fragilise – et nous devons savoir faire preuve de clarté à cet égard – juridiquement la garde postée pour l'ensemble des volontaires. À nos yeux, nier ce risque, c'est hypothéquer l'avenir.

Le troisième défi, à savoir le changement climatique, est sans doute le plus important. Nous sommes à +1,7 degré. En 2030, nous atteindrons les +2 degrés, sachant qu'en passant de +1,5 à +1,7 nous avons assisté à une augmentation significative de la sinistralité. Le coût des sinistres liés aux dégâts climatiques est chiffré à 143 milliards d'euros sur la période 2020-2050 par l'État lui-même au travers du plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc 3). Nos systèmes assurantiels sont mis sous tension ; nous savons qu'ils ne résisteront pas au-delà de 2,5 degrés. Concrètement, 50 % des forêts seront plus sensibles aux départs de feux d'ici à 2050. Et les précipitations vont augmenter de 15 % à 30 %, voire de 40% selon les territoires. Or nous ne sommes toujours pas en mesure de voter dès à présent un pacte capacitaire « inondations ».

Je tiens à le rappeler ici, le budget consacré par l'État à la sécurité civile est en baisse en 2025 de 5,6 % par rapport à 2024, alors que les aléas climatiques progressent. Parallèlement, je ne le dis pas pour polémiquer, mais il faut tout de même mettre les chiffres les uns en face des autres, le budget de la police de l'immigration est en hausse. Mon propos n'est pas d'ouvrir ici le débat sur l'immigration : je veux juste souligner que la faible place de la sécurité civile dans le débat public produit mécaniquement des effets politiques et budgétaires.

De ce point de vue, alors que le projet de loi de finances pour 2026 est en préparation, le report de l'inscription du Beauvau de la sécurité civile à l'automne au mieux nous paraît inquiétant.

Face à de tels défis, il nous faut tester, innover et inventer un éventail de solutions pour être prêts le moment venu. Pourquoi aurions-nous peur d'expérimenter ? Dans sa version initiale, le texte ne prévoyait rien d'autre que d'apporter une simple pierre apportée à l'édifice des solutions à construire. Il s'agissait, en l'occurrence, d'une expérimentation sur deux ans, dans cinq départements seulement, des groupes de volontaires mobilisables dans le cadre d'une activité programmée, dans un cadre sécurisé juridiquement, sans aucun autre contrat. Force est de le reconnaître ici, cette proposition d'expérimentation soulève des réactions et des blocages pour le moins étonnants.

Ce travail, je l'ai conduit comme n'importe quel parlementaire : humblement, proprement, consciencieusement, avec l'accord des principaux intéressés et dans un esprit transpartisan. Il a fait l'objet d'un colloque dans ces murs. Chacun s'est exprimé librement. Les paroles ont été enregistrées. Elles ne s'envoleront donc pas. Mais il est clair que certaines d'entre elles ont évolué. Être constructif, c'est tenir compte des blocages pour avancer, mais c'est aussi être capable de compromis pour dépasser ces mêmes blocages. Or le constat est là : tout le monde n'est pas prêt à s'engager dans le compromis pour ce faire.

Compte tenu des évolutions extérieures, j'ai souscrit à l'amendement de M. le rapporteur, qui permet d'enrichir la démarche engagée. Le texte de la commission est un texte utile et équilibré.

Je termine sur un point : parce que nous sommes au deuxième rendez-vous de cet espace transpartisan qui se crée au Sénat, l'enjeu du vote que nous allons exprimer ne se réduit pas seulement à l'objet du texte ; ce sera aussi une indication sur notre volonté collective de faire vivre cette niche transpartisane. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – M. Gilbert Favreau applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord avoir une pensée pour les trois sapeurs-pompiers agressés en Haute-Savoie. Deux d'entre eux ont été blessés dimanche lors d'une intervention à Saint-Cergues. Cette agression est survenue à une trentaine de kilomètres d'Évian-les-Bains, où un pompier a été percuté samedi dans les conditions que chacun sait, alors qu'il tentait d'interrompre un rodéo urbain. J'exprime tout mon soutien à ces héros du quotidien, qui incarnent nos valeurs républicaines, et à leurs proches.

Le texte qui nous réunit aujourd'hui est aussi l'occasion d'affirmer ou de réitérer le profond soutien du Sénat au modèle français de sécurité civile et aux pompiers de France.

La création du corps des sapeurs-pompiers professionnels et le développement progressif de la professionnalisation – nous comptons aujourd'hui un peu plus de 41 000 sapeurs-pompiers professionnels – ne se sont jamais faits au détriment de la volonté des pouvoirs publics d'impliquer les citoyens dans la protection de leur prochain.

Il s'agit là, avant tout, d'un choix de valeurs, celui d'une citoyenneté engagée au service d'une société plus solidaire et mieux protégée, mais aussi d'un choix politique réaliste et résolu en faveur d'un service public de proximité à coût maîtrisé.

Nous pouvons donc nous féliciter vivement du franchissement récent du seuil de 200 000 volontaires dans tous les villages et villes de France.

Le franchissement de ce seuil est d'autant plus significatif que les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas, contrairement à ce que leur nom pourrait laisser entendre, une force subsidiaire, qui viendrait en aide aux professionnels pour effectuer des tâches subalternes ou pour les assister uniquement lors d'événements majeurs.

Au contraire, le code de la sécurité intérieure précise bien que les sapeurs-pompiers volontaires, qui constituent 80 % des forces françaises de sécurité civile, exercent les mêmes activités que les professionnels. Ils sont soumis aux mêmes exigences, aux mêmes devoirs et aux mêmes contraintes en termes d'exposition.

Ils assurent des astreintes, des gardes postées et, bien évidemment, des interventions pour lesquelles ils perçoivent non pas un salaire, mais une modique indemnité horaire.

À ce titre, leur mobilisation est essentielle au bon fonctionnement de nos services départementaux d'incendie et de secours, dont ils assurent 67 % des interventions.

Cette force complémentaire apparaît d'autant plus essentielle que la charge indemnitaire des sapeurs-pompiers volontaires ne représente que 20 % du budget des Sdis, lequel est majoritairement pris en charge, vous le savez, par les départements et, dans une moindre mesure, par les communes et les intercommunalités.

Autre réussite, notre modèle de volontariat apporte une certaine souplesse d'organisation aux Sdis : d'une part, les volontaires sont employés à l'échelle du département, ce qui a permis la mise en place d'équipes mobiles ; de l'autre, les Sdis peuvent recourir, pour faire face à des périodes d'accroissement temporaire des risques, à un engagement saisonnier.

En définitive, il nous a semblé excessif de considérer, comme le fait l'auteur du texte dans son exposé des motifs, que nos Sdis font face à un « défaut d'opérationnalité » qui trouverait sa source dans un dysfonctionnement du volontariat.

Bien sûr, cela ne doit pas nous conduire pour autant à ignorer les difficultés que le volontariat rencontre : mode de financement à bout de souffle, manque de disponibilité des volontaires en semaine et en journée ou encore menace que font peser les évolutions de la jurisprudence européenne.

En effet, si la jurisprudence issue de l'arrêt du 21 février 2018 de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 21 février 2018, dite Matzak, qui assimile les astreintes à du temps de travail salarié, était appliquée en France, les Sdis devraient embaucher, selon les calculs de l'inspection générale de l'administration (IGA), pas moins de 22 000 sapeurs-pompiers professionnels supplémentaires, pour un coût supérieur à 1,1 milliard d'euros, soit 20 % de leur budget annuel. Vous voyez bien que cela est impossible.

La nécessité d'agir pour adapter notre modèle de sécurité civile aux défis de notre temps fait donc consensus. Sans surprise, la façon de l'adapter est en revanche nettement moins consensuelle.

Dans la multitude des propositions qui émergent actuellement, une boussole peut guider nos travaux : l'attachement du Sénat à « la préservation du volontariat de sapeur-pompier », exprimé le 26 juillet 2024 au travers de la résolution européenne n° 147 visant à reconnaître la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à renforcer le dispositif européen de protection civile.

J'y suis d'autant plus sensible et attaché que j'ai vécu de près cet engagement des sapeurs-pompiers volontaires comme président du Sdis des Hautes-Alpes pendant de nombreuses années.

Je formule donc le vœu, monsieur le ministre, que cette position soit aussi celle qui ressortira des travaux du Beauvau de la sécurité civile. Vous savez à quel point les acteurs de la sécurité civile de tous ordres, mais aussi les élus locaux et nationaux, en attendent beaucoup. Nous espérons d'ailleurs prendre connaissance de ses préconisations et recommandations dans les prochaines semaines.

J'en viens à présent à l'objet de notre rencontre de ce soir et au dispositif proposé par Grégory Blanc. J'ai bien entendu notre collègue, qui souhaitait au départ créer, pour une période expérimentale de deux ans, des « groupes de vacataires opérationnels de sécurité civile » au sein des services départementaux d'incendie et de secours, dans un premier temps à l'échelle nationale, puis de manière expérimentale, dans cinq départements « particulièrement vulnérables ».

Ces groupes de vacataires auraient été inspirés, au moins dans l'esprit, des réserves opérationnelles dont dispose l'armée. Leur objectif est toutefois apparu confus.

En effet, le texte disposait que ces groupes avaient à la fois vocation à « répondre à des situations d'urgence opérationnelle » et à être mobilisés de manière programmée pour assurer des gardes postées dont le champ de mission aurait été « laissé à la libre appréciation » du Sdis, ce qui à la fois est satisfait par la pratique du volontariat et ne correspond pas à la même temporalité que l'urgence précitée.

Les sapeurs-pompiers volontaires souhaitant, en sus de leur activité de volontaire classique, devenir vacataires opérationnels, auraient alors pu s'engager pour une période maximale de soixante jours.

Selon ma compréhension du texte, il s'agissait donc de créer un statut intermédiaire entre le sapeur-pompier professionnel et le sapeur-pompier volontaire. Le dispositif proposé ne se serait pas substitué à ces deux statuts, mais aurait théoriquement permis aux volontaires déjà sous contrat d'intensifier leur engagement.

Le régime indemnitaire de ces vacataires n'était cependant pas précisé dans le texte. Le terme de vacataire s'appliquant d'ailleurs davantage à un professionnel qu'à un volontaire, l'indemnité horaire de ce dernier aurait été sûrement plus élevée que celle d'un sapeur-pompier volontaire classique.

À cet égard, l'Association nationale des directeurs et directeurs adjoints des services d'incendie et de secours (ANDSIS) a estimé que le coût annuel de chacun de ces vacataires pour les Sdis aurait atteint 10 000 euros à 20 000 euros.

Malgré les bonnes intentions de l'auteur, sur lesquelles je n'ai aucun doute, la commission a estimé que ce texte était au mieux prématuré, au pire inopportun. Il a été en tout cas dénaturé par les discussions initiales et par l'accord qui avait été donné par un certain nombre de fédérations nationales représentatives de pompiers. Je tiens à rappeler cette vérité, qui ne doit pas être contestée.

En outre, la création, même expérimentale, de ces groupes de vacataires opérationnels ne nous est pas apparue pertinente dans la mesure où elle n'aurait apporté, par rapport aux pratiques actuelles du volontariat, aucune plus-value opérationnelle aux Sdis.

L'expérimentation envisagée ne nous a pas semblé non plus judicieuse dans la mesure où le choix des termes « vacataires opérationnels » laisse entendre un glissement vers une semi-professionnalisation du volontariat, une évolution que nous sommes nombreux, me semble-t-il, ici et ailleurs, à ne pas soutenir à ce stade.

Outre son coût très élevé pour les Sdis, et donc pour les départements et pour le bloc communal, cette expérimentation est d'autant moins souhaitable qu'elle semble manifestement contraire à la directive européenne du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, qui a justifié la jurisprudence Matzak.

Nous avons par ailleurs tenu compte de la ferme opposition, particulièrement exprimée lors des auditions, des principales associations ou fédérations des acteurs de la sécurité civile. Ces dernières ont souligné le risque réel de dénaturation du volontariat et l'illisibilité créée par la cohabitation de trois statuts. Nous sommes donc loin, hélas, du consensus qui vient d'être évoqué.

Par ailleurs, l'expérimentation proposée ne répondait pas à la principale difficulté du volontariat, à savoir le manque de disponibilité des volontaires en semaine. Inciter ces derniers à effectuer plus de gardes postées en devenant semi-professionnels ne résoudrait en rien ces difficultés, sauf à demander aux volontaires d'effectuer un temps partiel explicite.

Enfin, ce texte présentait un risque de déstabilisation du volontariat d'autant moins propice que sont attendues d'ici peu les conclusions du Beauvau de la sécurité civile. Monsieur le ministre nous en dira peut-être davantage à ce sujet dans son intervention.

C'est pourquoi, avec l'accord de l'auteur du texte et dans l'esprit d'un espace transpartisan que, pour ma part, j'estime intéressant, nous avons tenté de trouver une voie de passage.

Nous avons ainsi proposé un amendement visant à supprimer cette expérimentation et à lui substituer un nouveau dispositif. J'avais souhaité que ce dernier soit davantage consensuel et opérationnel ; nous verrons ce qu'il en est à l'issue de ces débats.

Nous avons préféré développer l'engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires qui s'investissent sur de courtes périodes pour répondre à des besoins opérationnels ponctuels, en donnant plus de visibilité et en conférant une base législative à cet engagement, qui est actuellement régi en détail par des dispositions réglementaires. Dans nombre de nos départements, nous bénéficions de cet engagement, notamment pour la surveillance des plages.

Dans le même souci de lisibilité du droit applicable aux sapeurs-pompiers, nous avons en parallèle abrogé des dispositions transitoires du code général des collectivités territoriales devenues inutiles, trente ans après la départementalisation des services d'incendie et de secours.

Nous avons ainsi mis en œuvre, grosso modo, certains des dispositifs adoptés par le Sénat le 25 janvier 2024 dans le cadre de la proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit applicable aux collectivités locales, dite Balai 3.

En tant que rapporteur, la méthode de travail que nous avons suivie ne me satisfait pas pleinement. J'accepte néanmoins cette situation, comme chacune et chacun d'entre nous.

Chacun votera en son âme et conscience sur ce texte transpartisan. C'est en tout cas l'esprit dans lequel il a été travaillé. Les modifications que nous avons apportées permettent, de mon point de vue, de faire émerger un compromis et, peut-être, le sens des responsabilités de notre assemblée.

Je salue le travail de la présidente de la commission, qui m'a soutenu dans mon travail de convergence, si bien que la commission des lois a finalement adopté le texte ainsi modifié. J'espère que le Sénat fera de même. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Grégory Blanc et Hussein Bourgi applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, en montant à cette tribune pour aborder le sujet relatif aux sapeurs-pompiers, j'ai une pensée pour le brigadier-chef Niccolo Scardi. Au moment où je vous parle, il continue de lutter pour sa vie.

J'ai aussi une pensée pour les deux sapeurs-pompiers qui, à Saint-Cergues, à quelques kilomètres de là, ont également été agressés.

J'aimerais tout d'abord remercier tous ceux qui, dans chacun des groupes qui composent cette assemblée, ont choisi d'endosser ou de soutenir la proposition de loi défendue par le sénateur Grégory Blanc.

Une fois de plus, vous apportez la preuve que la sécurité civile est et demeure un sujet transpartisan. Sur les travées de cet hémicycle, je retrouve ce même dépassement des clivages que j'ai pu observer à chacune des étapes du Beauvau de la sécurité civile, que le ministre d'État et moi-même avons relancé au lendemain de mon arrivée au ministère de l'intérieur.

Plus que jamais, ce dépassement est important, car rarement notre modèle de sécurité civile aura eu autant besoin d'être consolidé.

Chacun le sait ici, et plus encore ceux qui s'intéressent particulièrement à ce sujet, la dernière loi de modernisation de la sécurité civile date de 2004. Or, en vingt ans, le paysage de la sécurité civile a profondément changé.

Premièrement, les risques climatiques se sont multipliés dans notre pays. En témoignent notamment les inondations de janvier dernier dans les villes d'Ille-et-Vilaine ou encore les cyclones Chido à Mayotte et Garance à la Réunion.

Deuxièmement, les missions ont évolué. La lutte contre les incendies représente à peine 6 % de l'activité de nos Sdis, contre 85 % désormais pour les secours et les soins d'urgence aux personnes. Force est de constater que cette dynamique ne fera que se poursuivre : la population étant à la fois croissante et vieillissante, les secours aux personnes continueront mécaniquement d'augmenter.

Troisièmement, la pression opérationnelle s'est accentuée : en dix ans, le nombre d'interventions quotidiennes a augmenté de 17 %, portant le nombre d'interventions annuelles à 4,9 millions, un chiffre extraordinaire.

Quatrièmement, enfin, la réglementation s'est transformée. La directive européenne de 2003 sur le temps de travail et l'arrêt Matzak de la Cour de justice de l'Union européenne, en 2018, apparaissent – disons-le – comme une véritable menace pour un modèle qui repose essentiellement sur le volontariat. Je rappelle que le corps des sapeurs-pompiers est constitué de 42 000 professionnels et de 200 000 volontaires.

Oui, le volontariat est au cœur même de notre modèle. Si ce dernier agrège des hommes et des femmes provenant d'horizons très différents, ce sont bien les sapeurs-pompiers volontaires qui en constituent la colonne vertébrale.

Au 1er janvier 2024, plus de 78 % des 255 000 sapeurs-pompiers et marins-pompiers – n'oublions pas ces derniers –étaient des volontaires. Ils assurent plus des deux tiers de l'engagement opérationnel des sapeurs-pompiers et permettent que les secours soient distribués sur l'ensemble du territoire, dans la vie de tous les jours ou lors des événements exceptionnels.

Il n'est donc pas exagéré de dire, sans vouloir faire la moindre différence, bien évidemment, avec les sapeurs-pompiers professionnels, que ce sont les volontaires qui assurent la part la plus importante de la charge opérationnelle du secours aux personnes.

Notre système de sécurité civile fait figure de modèle en Europe. Il doit demain être réformé pour conserver son excellence.

Réformer notre modèle, c'est avant tout consolider l'engagement des sapeurs-pompiers et susciter de nouvelles vocations.

C'est l'ambition que nous nous sommes fixée en relançant le Beauvau de la sécurité civile. Durant la phase de concertation, dans le grand amphithéâtre de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers d'Aix-en-Provence (Ensosp), j'ai redit ma détermination et celle du Gouvernement à répondre aux attentes exprimées par nos personnels, au premier rang desquels nos volontaires. Nous partageons tous cette même résolution.

Pas plus tard que lundi dernier, à Montpellier – nous l'évoquions tout à l'heure lors des questions au Gouvernement –, nous avons pu constater la présence importante de nos volontaires ainsi que, j'y insiste, le rôle et l'excellence de la formation.

Pour répondre à cette ambition réformatrice, nous devrons nous appesantir sur la question du champ « missionnel », sur le financement des Sdis – il s'agit probablement du point le plus difficile à trancher – et sur les moyens de valoriser les mérites de nos sapeurs-pompiers volontaires.

Nous devrons aussi nous intéresser au statut juridique particulier de ces derniers ainsi qu'aux obligations propres qui leur sont associées et déterminer les conditions de leur évolution.

À cette fin, nous pouvons nous appuyer sur les conclusions de l'inspection générale de l'administration et de l'inspection générale de la sécurité civile, qui ont été saisies, en mars 2023, d'une mission d'évaluation des pratiques et des modalités de management des sapeurs-pompiers volontaires.

Nous avons d'ailleurs déjà intégré certaines de leurs préconisations pour mieux encadrer, dans les Sdis, les modèles d'organisation les plus à risques, comme le recours excessif aux gardes postées.

Sur ce dernier sujet, qui est au cœur de la présente proposition de loi, nous avons demandé à la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) d'entamer des travaux juridiques pour prévenir le risque de voir l'engagement du sapeur-pompier volontaire requalifié juridiquement en contrat de travail. La problématique de droit est ainsi posée, et clairement posée.

M. Grégory Blanc. Très bien !

M. François-Noël Buffet, ministre. Bien que cette proposition de loi poursuive un objectif analogue, le Gouvernement estime qu'elle ne résout pas totalement cette difficulté, du moins dans sa rédaction actuelle.

Malgré des échanges de grande qualité entre le Gouvernement et la commission, notamment sur la question de la réserve opérationnelle ou des vacataires opérationnels, et malgré les modifications qui y ont été apportées, ce texte ne peut en l'état être soutenu par le Gouvernement.

De notre point de vue, la rédaction proposée ne répond pas totalement aux enjeux de sécurisation juridique de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires ni à ceux, tout aussi importants d'ailleurs, de leur fidélisation.

Telle est la position du Gouvernement, mais c'est aussi et surtout celle de la grande majorité des acteurs de la sécurité civile, notamment de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France.

Cette proposition de loi, vous en conviendrez, monsieur le rapporteur, n'apporte pas la plus-value espérée au cadre juridique de l'engagement du sapeur-pompier volontaire. Contrairement à son ambition, elle ne clarifie pas davantage les missions qu'ils exercent. Nous craignons même qu'elle ne fragilise ce cadre.

L'engagement des sapeurs-pompiers volontaires est indispensable à notre société. Il doit donc pouvoir prendre des formes multiples – disponibilité, astreinte, garde postée –, qui soient toutes adaptées aux besoins du terrain et à la protection de nos concitoyens.

Nous avons donc la responsabilité collective de consolider cet engagement et, bien évidemment, de ne pas l'affaiblir. Pour cela, le sujet doit être abordé non pas sous l'angle d'une seule de ses caractéristiques, mais dans sa globalité. C'est ce à quoi nous nous attachons dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile.

Vous m'avez interrogé tout à l'heure, monsieur le rapporteur, sur l'état d'avancement de cette consultation. Nous en avons quasiment terminé avec le processus d'élaboration d'un projet de loi pour la sécurité civile. Pour ne rien vous cacher, nous recevrons ce vendredi une dernière fois la fédération des sapeurs-pompiers. Nous procédons aux derniers ajustements et l'aspect financier est en cours d'expertise.

Notre objectif est d'établir avant la fin du mois de juin prochain un texte qui pourra sans doute être débattu devant le Parlement à l'automne.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement, qui ne veut pas être désagréable envers l'auteur de ce texte, pas plus qu'envers le rapporteur et l'ensemble des parlementaires ayant travaillé sur ce sujet, est plutôt défavorable à l'adoption de cette proposition de loi, même si, par courtoisie, il pourrait émettre un avis de sagesse. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de m'associer aux propos précédents et d'avoir une pensée pour le sergent-chef Niccolo Scardi, sapeur-pompier volontaire au centre d'incendie et de secours d'Évian-les-Bains, violemment percuté par un barbare de la route.

Après de nombreuses modifications, nous examinons aujourd'hui, dans le texte de la commission, la proposition de loi visant à expérimenter la création d'un groupe de vacataires opérationnels au sein des services départementaux d'incendie et de secours et à encourager le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile.

Si l'objectif est louable, la tâche est difficile. Le cheminement de cette proposition de loi en est le parfait exemple : malgré la volonté assurément sincère de son auteur de défendre le volontariat, l'adoption du texte initial aurait abouti à la création d'un troisième corps de sapeurs-pompiers – en plus des volontaires et des professionnels – encadrant trop strictement le droit des sapeurs-pompiers volontaires de prendre des gardes postées dans les centres d'incendie et de secours. Loin d'être amélioré, notre modèle de sécurité civile eût été fortement dégradé.

Notre modèle de sécurité civile est l'un des meilleurs d'Europe et les 240 000 hommes et femmes sapeurs-pompiers, dont 80 % de volontaires, en sont le pilier essentiel.

Malgré cela, la réalité est tenace : difficultés de recrutement et de fidélisation des sapeurs-pompiers volontaires, manque de budget dans les Sdis pour recruter des professionnels, précarité de certains centres d'incendie et de secours, fermeture temporaire de casernes, faute d'effectifs, et augmentation constante des interventions depuis des années, comme cela a été rappelé.

Les causes profondes de ces difficultés sont connues : désindustrialisation de nos territoires, éloignement des lieux de travail, mobilité accrue, poids administratif croissant et reconnaissance insuffisante des sapeurs-pompiers volontaires. À cet égard, monsieur le ministre, ces derniers attendent toujours le décret relatif à la bonification de leurs trimestres de retraite qui leur avait été promis…

Prétendant contrer la directive européenne sur le temps de travail, ce texte ouvrait en réalité une brèche supplémentaire dans l'argumentaire européen, qui tend déjà à assimiler les pompiers volontaires à des travailleurs.

Bien que le Gouvernement se soit déjà prononcé contre l'application de cette directive, restons vigilants quant aux attaques de la Commission européenne tendant à fragiliser notre modèle de sécurité civile. Aujourd'hui, les sapeurs-pompiers volontaires ; demain, les bénévoles des associations agréées de sécurité civile. Et ensuite ?

Je salue le travail de la commission des lois, qui a modifié ce texte en profondeur pour finalement acter juridiquement le recrutement de sapeurs-pompiers volontaires comme saisonniers pour une durée maximum de quatre mois.

La saison des feux de forêt, la surveillance des plages ou encore les catastrophes naturelles sont autant d'occasions de projeter des sapeurs-pompiers volontaires sous contrat saisonnier.

Je suis d'autant plus sensible à ce sujet de la sécurité civile que j'ai moi-même été sapeur-pompier volontaire.

Monsieur le ministre, les sapeurs-pompiers volontaires de France comptent sur nous. Leurs revendications sont multiples et nous espérons que de nombreuses mesures découleront du Beauvau de la sécurité civile.

(Mme Sylvie Vermeillet remplace M. Loïc Hervé au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la chambre des territoires sait ce que notre pays doit à l'engagement des sapeurs-pompiers.

Nous connaissons tous la valeur des Sdis. Nombre de drames sont évités chaque année grâce à l'action quotidienne de plus de 200 000 femmes et hommes, partout sur le territoire.

Au nom de mon groupe, et encore plus au regard des événements dramatiques récents, je tiens à rendre hommage à ces femmes et à ces hommes qui veillent, interviennent et sauvent.

Je renouvelle notre soutien et notre reconnaissance à celles et ceux qui, au cours de leur mission, ont été blessés, mais aussi aux familles de ceux dont la vie a été brisée. J'y associe leurs proches et leurs collègues.

Je veux dire ici ce que nous avons aussi affirmé à propos des soignants notamment : la République ne tolérera aucune violence envers les sapeurs-pompiers. Ceux qui s'en prennent à eux doivent répondre de leurs actes devant la justice.

La majorité des sapeurs-pompiers sont des hommes et des femmes qui ont pris librement l'engagement, en parallèle de leur vie privée et professionnelle, de porter secours et assistance à nos concitoyens, contribuant directement aux missions de sécurité civile de toute nature qui sont confiées aux services d'incendie et de secours.

Depuis longtemps, ils remplissent leur mission avec un sens du devoir exemplaire. Si leurs services se sont adaptés aux mutations de la société, le dérèglement climatique et la multiplication des événements de tous ordres accroissent aujourd'hui la pression qui pèse sur eux.

Je peux vous parler des inondations survenues dans mon département. À chaque fois, les pompiers sont présents, fidèles au poste, réactifs et solidaires. Plus au sud, les sécheresses favorisent des incendies majeurs. Là encore, les services d'intervention sont en première ligne.

Face à cette intensification des risques, notre collègue Grégory Blanc propose la création de groupes de vacataires mobilisables en cas de besoin.

L'intention est louable, et c'est la raison pour laquelle le Sénat a inscrit ce texte à son ordre du jour, dans un espace transpartisan.

Oui, les pompiers ont besoin de renforts. Toutefois, nous devons rester vigilants : il serait dangereux de bouleverser l'équilibre subtil sur lequel repose notre sécurité civile.

Nous connaissons les contraintes posées par la jurisprudence européenne. Il ne s'agit pas de les ignorer ni de les aggraver.

Je salue le travail de notre rapporteur, qui a su entendre les objections légitimes et proposer des ajustements utiles. Renforcer notre modèle suppose de rester fidèle à ses fondements, à commencer par le principe du volontariat.

La rédaction adoptée par la commission permet de préserver l'équilibre entre volontaires et professionnels, sans créer un troisième statut. C'est important.

Dans un contexte budgétaire contraint, il était aussi essentiel de ne pas fragiliser les finances de nos collectivités locales, ce que l'adoption du texte initial aurait pu provoquer.

Oui, notre modèle est appelé à évoluer, mais il est sage d'attendre les conclusions du Beauvau de la sécurité civile avant d'engager des réformes structurelles. Cette concertation permettra d'intégrer les préoccupations de toutes les parties prenantes. Nous le devons aux pompiers comme à nos concitoyens.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires abordera les débats avec vigilance et votera majoritairement contre ce texte. Nos sapeurs-pompiers protègent la vie. À nous de protéger leur mission avec la même exigence. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Petrus. (Mme Nadine Bellurot applaudit.)

Mme Annick Petrus. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui dans sa version issue des travaux de la commission des lois ne correspond plus à la proposition initiale. Et c'est une bonne chose.

La création d'un statut hybride de vacataire opérationnel, à mi-chemin entre sapeur-pompier volontaire et professionnel, soulevait de nombreuses réserves. Ni utile ni opportune, elle risquait de brouiller la lisibilité de notre modèle de sécurité civile, tout en alourdissant la charge financière pesant sur les Sdis.

Si j'ai souhaité m'exprimer ce soir en tant qu'ancien officier sapeur-pompier, c'est parce qu'à Saint-Martin, nous avons engagé un chantier majeur : la création d'un service territorial d'incendie et de secours autonome.

Ce projet répond à une nécessité absolue, celle de garantir aux Saint-Martinois une sécurité civile réactive, efficace et pleinement adaptée aux réalités de l'île. Je tiens d'ailleurs à remercier M. le ministre François-Noël Buffet, qui m'avait reçue il y a quelques semaines, et dont le soutien a été déterminant pour faire avancer ce dossier. Son écoute attentive et son engagement concret nous permettent de franchir une étape importante dans la structuration du Sdis de Saint-Martin.

Notre expérience locale confirme ce que ce texte évite désormais : le volontariat souffre d'un manque non pas de vocations, mais de disponibilité.

À Saint-Martin, les contraintes sociales, économiques et géographiques rendent le recrutement de volontaires encore plus complexe qu'ailleurs. Nous avons besoin d'outils simples, souples, compréhensibles et pleinement adaptés aux dynamiques de terrain.

La création d'un troisième statut, aussi flou juridiquement qu'instable financièrement, n'aurait rien résolu. Elle aurait, au contraire, créé de la confusion entre engagement citoyen et logique contractuelle, en contradiction avec l'esprit même du volontariat.

Je participerai d'ailleurs, le 26 mai prochain, à la concertation organisée à Saint-Martin dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile. Ce sera l'occasion de faire remonter les réalités de terrain et les attentes spécifiques de notre territoire.

Mes chers collègues, alors que les conclusions du Beauvau sont attendues, il est plus que jamais essentiel de conforter notre modèle, sans le complexifier. Celui-ci repose sur une conviction forte, celle que la sécurité civile est l'affaire de tous. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc vise à créer un groupe de vacataires opérationnels volontaires de sécurité civile, afin de renforcer ponctuellement les effectifs des Sdis dans nos territoires.

Personne ici ne conteste l'état de tension croissante que connaît notre modèle de sécurité civile. Malgré l'engagement exemplaire de près de 250 000 sapeurs-pompiers, dont plus de 78 % sont volontaires, notre système est sous pression.

Les interventions ont augmenté de manière exponentielle, en particulier dans le champ du secours à la personne, qui représente désormais plus de 80 % des sorties. À cela s'ajoutent les effets du dérèglement climatique, qui multiplie les événements extrêmes sur l'ensemble des territoires.

Je tiens à ce stade à témoigner de notre reconnaissance envers tous ceux qui répondent présents face à ces défis, jour et nuit. Nous saluons le dévouement des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires et pensons aujourd'hui avec une émotion particulière au pompier volontaire gravement blessé ce week-end en Haute-Savoie. Son engagement, comme celui de tous ses camarades, mérite notre plus profond respect.

Le Sénat s'est depuis longtemps engagé aux côtés des sapeurs-pompiers. Il a soutenu des textes importants et a été à l'origine d'un certain nombre d'entre eux : je pense à la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers, dite loi Matras, qui a conforté le volontariat, à la récente proposition de loi visant à garantir le suivi de l'exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ou encore à la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé, que nous avons adoptée hier et qui a permis de sécuriser le statut des professionnels de santé intervenant au sein d'un service départemental d'incendie et de secours.

La proposition de loi de notre collègue, que nous examinons aujourd'hui, s'inscrit dans le prolongement de cet engagement constant. Celle-ci, toutefois, aussi bien dans sa version initiale que dans sa version modifiée par la commission, soulève des interrogations.

La version initiale prévoyait la création d'un nouveau statut de vacataire opérationnel, distinct à la fois de celui de sapeur-pompier volontaire et de celui de sapeur-pompier professionnel. Or cette approche a suscité de vives réserves de la part des parties prenantes et notamment de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Celle-ci a mis en garde contre une possible dénaturation du volontariat, une confusion des statuts et les coûts élevés que la mise en œuvre de cette réforme entraînerait pour les Sdis. Elle a aussi rappelé les risques juridiques liés à la jurisprudence Matzak, qui assimile certaines astreintes volontaires à du temps de travail salarié.

Face à ces critiques, le rapporteur a proposé une réécriture du texte, afin de supprimer l'expérimentation visant à créer un groupe de vacataires opérationnels et de conférer un fondement légal aux contrats saisonniers de sapeur-pompier volontaires, qui relevaient jusqu'à présent du seul cadre réglementaire.

Toutefois, ces ajustements restent insuffisants.

Tout d'abord, ils ne répondent pas aux inquiétudes liées à l'introduction d'une forme de semi-professionnalisation du volontariat. En cherchant à sécuriser les contrats saisonniers, nous risquons d'introduire de nouvelles zones grises dans la réglementation et d'ouvrir la porte à des requalifications juridiques, voire à un glissement progressif vers un modèle hybride, qui remettrait en cause les fondements mêmes de notre sécurité civile, qui repose sur l'engagement citoyen, libre et non salarié.

Ensuite, et peut-être surtout, cette proposition de loi intervient alors que nous attendons les conclusions du Beauvau de la sécurité civile, qui devront nous guider pour faire évoluer de manière cohérente notre modèle. Il serait hasardeux d'ajouter une brique nouvelle, potentiellement source d'instabilité, à un édifice en cours de refonte.

C'est pourquoi, si nous saluons l'intention et la volonté de l'auteur de ce texte et du rapporteur de répondre à des besoins réels et de soutenir nos forces de secours, les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants expriment des réserves sur la pertinence du dispositif proposé et, vous l'aurez compris, sur son opportunité, à l'approche de la communication des conclusions du Beauvau de la sécurité publique.

En conséquence, nous sommes défavorables à l'adoption de ce texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il est un métier qui incarne à la fois le courage, le dévouement et le respect unanime de nos concitoyens, c'est bien celui de sapeur-pompier.

Mais derrière cet imaginaire commun se cache une réalité plus âpre. Les 250 000 femmes et hommes qui œuvrent chaque jour pour notre sécurité interviennent parfois dans des conditions très difficiles, sans toujours recevoir la reconnaissance ni le respect qu'ils méritent.

L'actualité, marquée par la multiplication des actes de violence à l'égard des sapeurs-pompiers, tout récemment à Évian-les-Bains ou encore dans mon département des Hautes-Pyrénées, nous le rappelle tristement.

Le Parlement éprouve à l'endroit de la profession la plus grande considération, qu'il a manifestée ces dernières années par l'adoption de deux lois majeures en 2021 et 2023.

L'examen de ce texte, dans le cadre de l'espace transpartisan, illustre une fois encore l'attention constante et les préoccupations que suscite, sur toutes les travées de cet hémicycle, l'avenir de notre modèle de sécurité civile.

En effet, nous partageons tous un même constat : notre système est à bout de souffle. Les Sdis sont de plus en plus sollicités, parfois jusqu'à saturation. Le maillage territorial des centres d'incendie et de secours s'est dangereusement fragilisé, menaçant l'équité de l'accès aux secours.

Si le nombre de sapeurs-pompiers volontaires, en 2023, a franchi pour la première fois en vingt ans le seuil symbolique des 200 000, les effectifs demeurent insuffisants. Cette situation rejaillit sur la disponibilité opérationnelle des Sdis, fortement affaiblie. J'en veux pour preuve qu'en 2008, 25 millions de Français habitaient à plus de dix minutes d'intervention d'une caserne de pompier ; ils sont aujourd'hui plus de 36,5 millions.

À l'avenir, cette tendance pourrait s'aggraver sous l'effet d'au moins trois dynamiques préoccupantes : le vieillissement démographique, l'aggravation des événements climatiques extrêmes et la diminution des moyens à disposition des Sdis.

En l'absence de réponse structurelle, l'ensemble de notre architecture de protection civile risque de s'effondrer. Il est donc urgent d'agir.

Notre rôle est clair : proposer des idées nouvelles, en débattre, les confronter et faire émerger des avancées concrètes, utiles et durables pour nos sapeurs-pompiers et leurs autorités de tutelle.

C'est à cet exercice exigeant qu'est soumise la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc, qui vise à créer, à titre expérimental, un groupe de vacataires opérationnels.

Sur le principe, je suis favorable à ce que l'on introduise dans la loi de nouveaux outils organisationnels pour répondre aux pics d'activités. L'expérimentation est un vecteur intéressant pour tester la pertinence de ces mesures.

Néanmoins, le dispositif proposé initialement par l'auteur du texte présentait des limites sur les plans budgétaire, juridique et opérationnel. Nous devons plutôt repenser le cadre d'exercice des sapeurs-pompiers volontaires dans son ensemble, comme l'a suggéré mon collègue du RDSE Jean-Yves Roux au ministre de l'intérieur en novembre dernier.

Il était donc délicat de maintenir en l'état ce texte. Cela aurait sans doute nécessité un effort de pédagogie supplémentaire.

Je salue donc la proposition du rapporteur de pérenniser dans la loi le dispositif d'engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires, actuellement régi par le décret du 9 octobre 2009. Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen soutient cette idée.

Surtout, de la sorte, nous ne préemptons pas le débat que nous aurons prochainement sur la traduction législative des conclusions du Beauvau de la sécurité civile. Le projet de loi que le Gouvernement présentera devra être à la hauteur des enjeux. Le groupe RDSE y sera particulièrement attentif. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Bernard Delcros. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'associe à l'hommage qui a été rendu par les orateurs précédents au sapeur-pompier qui a été violemment agressé, il y a quelques jours, alors qu'il intervenait pour porter secours. Je tiens aussi à saluer l'ensemble des pompiers de France.

Nous examinons ce soir la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc qui concerne les sapeurs-pompiers volontaires et qui vise à créer un groupe de vacataires opérationnels pour faire face aux défis de la sécurité civile.

Le sujet est d'importance. Je salue le travail de fond de notre collègue rapporteur Jean-Michel Arnault, qui a largement fait évoluer le texte initial et qui s'est employé, avec toute son énergie et toutes ses compétences, à trouver une solution d'équilibre et de compromis.

Il convient de rappeler que le concours des sapeurs-pompiers volontaires à l'exercice des missions de sécurité civile est absolument indispensable, tout particulièrement dans les territoires les plus ruraux.

Les 200 000 sapeurs-pompiers volontaires représentent 80 % de l'effectif des pompiers de notre pays. Ils assurent près de 70 % des interventions réalisées sur le territoire national et la quasi-totalité des missions dans les zones rurales. Dans les départements ruraux, comme le Cantal, la sécurité civile ne pourrait en aucun cas être assurée sans eux.

C'est pourquoi nous devons sans cesse encourager et faciliter le volontariat. Si le nombre de sapeurs-pompiers volontaires a globalement, comme cela a été souligné, tendance à augmenter depuis une vingtaine d'années, ce phénomène ne concerne pas l'ensemble du territoire national. Ainsi, dans les départements ruraux, le nombre de sapeurs-pompiers volontaires continue de diminuer et le recrutement de volontaires reste un enjeu majeur de sécurité civile.

Nous savons bien que la principale difficulté liée au volontariat demeure la disponibilité, essentiellement en raison de l'articulation avec les activités professionnelles exercées par ailleurs. Or notre système de sécurité civile requiert une disponibilité toujours plus importante pour faire face à la diversification des missions et à l'augmentation de leur nombre.

Comme les pompiers professionnels, les pompiers volontaires doivent être capables – vous l'avez rappelé, monsieur le ministre – de gérer de multiples situations : secours à des personnes, incendies, accidents sur la voie publique, etc. Cela suppose de maintenir un niveau exigeant de formation et de préparation physique, ce qui requiert beaucoup de temps en dehors des interventions et appelle une grande disponibilité.

Nous devons toujours chercher à améliorer leur statut et à faciliter l'exercice de leurs missions de service public.

Dans sa version initiale, le texte que nous examinons visait à créer, à titre expérimental, pour une période de deux ans, dans cinq départements, des groupes de vacataires opérationnels de sécurité civile. Ces derniers auraient été composés de sapeurs-pompiers volontaires souhaitant réaliser des gardes plus nombreuses, sur une durée maximale de soixante jours par an.

En lieu et place du dispositif initial, la commission, sur l'initiative de son rapporteur Jean-Michel Arnaud, dont je tiens de nouveau à saluer le travail, propose d'inscrire dans la loi, pour le sécuriser juridiquement, le dispositif de l'engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires, afin de répondre à des besoins opérationnels ponctuels. Il s'agit de recentrer la proposition de loi autour du dispositif existant des contrats saisonniers.

Toutefois, si le volontariat doit être encouragé et la sécurité civile sans cesse améliorée, les arguments légitimes qui ont été avancés non seulement par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, mais aussi par les Sdis eux-mêmes, ont conduit les membres du groupe Union Centriste, dans leur majorité, à souhaiter le retrait du texte, dans l'attente des conclusions du Beauvau de la sécurité civile, qui a été mené en étroite concertation avec l'ensemble des acteurs, et notamment avec la FNSPF. Comme le ministre l'a indiqué dans son propos liminaire, la publication de ces conclusions est imminente.

Nous sommes très réservés sur cette proposition de loi, car nous estimons qu'elle est prématurée. Pour ces raisons, les membres du groupe Union Centriste considèrent, dans leur grande majorité, qu'il n'est pas opportun de donner une suite favorable à ce texte et ne voteront pas en sa faveur.

Toutefois, je ne doute pas que nous pourrons débattre de nouveau de ce sujet, de manière consensuelle, une fois que les conclusions du Beauvau de la sécurité auront été présentées, ce qui devrait avoir lieu au cours des prochaines semaines. (Applaudissements sur les travées des groupes UC ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons vise, après le travail réalisé par le rapporteur et la commission, à sécuriser, tout en lui donnant plus de visibilité, l'investissement des sapeurs-pompiers volontaires qui s'engagent sur de courtes périodes, pour répondre à des besoins opérationnels de sécurité civiles ponctuels, dans le cadre de contrats saisonniers.

J'ai moi aussi, en cet instant, une pensée pour le sapeur-pompier volontaire de Haute-Savoie qui a été percuté par un véhicule, alors qu'il tentait, avec ses collègues, de faire cesser un rodéo urbain. Je lui avais déjà rendu hommage lundi, lorsque nous avons examiné la proposition de loi relative aux missions des professionnels de santé, vétérinaires, psychothérapeutes et psychologues des services d'incendie et de secours.

Je tiens aussi à rendre un hommage appuyé aux 200 000 hommes et femmes, qui, partout en France, s'engagent chaque jour au service de nos concitoyens comme sapeurs-pompiers volontaires. Ils représentent, comme cela a été dit, 80 % des effectifs de la sécurité civile : c'est une particularité de notre modèle, dont nous pouvons nous réjouir, car elle démontre que l'engagement demeure une valeur forte dans notre pays.

Cette particularité mérite d'être réinterrogée à la lumière des défis auxquels sont soumis les sapeurs-pompiers. C'est le sens de la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc, même si les solutions proposées ne se sont pas avérées opportunes ou opérantes.

La mobilisation des sapeurs-pompiers est plus cruciale que jamais pour répondre à la multiplication des sollicitations : opérations visant à apporter des secours et des soins d'urgence aux personnes, qui représentent 86 % des interventions des Sdis, opérations liées au dérèglement climatique, qui provoque des événements et des crises dans des territoires de plus en plus nombreux et de plus en plus divers, ou aux catastrophes naturelles, qui semblent s'intensifier.

Finalement, les interventions des sapeurs-pompiers correspondent de moins en moins au cœur de leurs missions et visent de plus en plus à pallier l'affaiblissement d'autres services publics, ce qui met notre système en tension.

En disant cela, je ne remets évidemment pas en cause l'engagement, le dévouement, les compétences ou le professionnalisme de nos sapeurs-pompiers, qu'ils soient volontaires ou professionnels.

Il s'agit au contraire de réfléchir aux évolutions que nous pouvons apporter à notre système de protection civile, sans fragiliser l'existant.

Nous devons définir un nouveau modèle de financement de nos Sdis. Le système actuel, qui repose quasi exclusivement sur les départements et sur le bloc communal, est à bout de souffle, car ces collectivités elles-mêmes sont au bord de l'asphyxie.

Nous devons aussi nous interroger sur les conséquences de la jurisprudence Matzak, cette épée de Damoclès qui pèse sur le fonctionnement de nos Sdis. Il faut trouver des solutions.

J'ai entendu ce que vous avez dit à cet égard, monsieur le ministre. Certains pensent pouvoir compléter la directive européenne sur le temps de travail par une directive qui prenne en compte les spécificités des services de protection civile, mais cela n'a malheureusement pas été possible durant la présidence française de l'Union européenne.

Nous attendons tous du Beauvau de la sécurité civile un nouveau modèle de financement, qui nous permette de recruter des professionnels et d'investir dans les équipements nécessaires à leurs interventions et à leur protection. Nous souhaitons aussi que les missions des sapeurs-pompiers, qu'ils soient volontaires ou professionnels, fassent l'objet d'une reconnaissance pleine et entière.

Je rappelle que les budgets des Sdis ont aussi été grevés par l'augmentation du taux de cotisation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), ce qui a des effets significatifs sur leur fonctionnement, alors que le décret sur la bonification des trimestres pour la retraite des sapeurs-pompiers volontaires justifiant d'au moins dix ans de service se fait toujours attendre, de même que la pérennisation de la prestation de fidélisation et de reconnaissance.

Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky votera la proposition de loi telle qu'elle a été modifiée par la commission des lois, tout en souhaitant ardemment, monsieur le ministre, que tous les chantiers que je viens d'évoquer trouvent rapidement une issue positive. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Lutte contre les incendies et les inondations, secours d'urgence aux personnes, gestion des risques industriels, intervention sur les accidents de la route : les nombreuses missions confiées aux pompiers nous rappellent, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'ils sont indispensables pour sauver des vies, mais aussi pour protéger nos biens et nos espaces naturels.

Le dévouement et la bravoure des pompiers sont d'autant plus à saluer qu'ils exercent souvent leurs missions dans des conditions difficiles et au péril de leur vie : aux risques encourus lors des interventions, s'ajoute l'exposition à des fumées toxiques, à l'amiante et aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), qui constituent un vrai danger pour leur santé.

Enfin, il faut malheureusement ajouter à cette liste les agressions injustifiables et innommables auxquelles les pompiers sont de plus en plus confrontés.

Je voudrais ainsi rendre hommage au pompier sergent-chef d'Évian-Les-Bains, Niccolo Scardi, qui a été percuté par une voiture samedi lors d'un rodéo urbain, qui se trouve toujours à l'hôpital dans un état critique. Au nom du groupe GEST, j'adresse à sa famille et à ses proches nos pensées les plus émues, en espérant qu'il se rétablisse et obtienne justice le plus rapidement possible.

En dépit des drames qui peuvent survenir dans l'exercice des missions qui lui sont propres, le métier de pompier continue de susciter des vocations. Notre pays compte ainsi 240 000 pompiers, dont 80 % de volontaires assurant 67 % des interventions.

Le modèle français, qui repose sur la combinaison entre un corps de professionnels très bien formés et des volontaires qui restent à disposition des Sdis pour intervenir en cas de forte demande, est évidemment une chance.

Cette organisation, unique en Europe, est un atout que nous devons renforcer. En raison de la multiplication des catastrophes climatiques extrêmes, les pompiers auront tendance à être davantage mobilisés pour protéger la population. Du fait du changement climatique, les pics exceptionnels de sollicitations vont devenir la norme.

Nous devons donc ouvrir le débat sur le meilleur moyen d'adapter notre système de sécurité civile face à cette nouvelle donne climatique. L'examen de ce texte, déposé par notre collègue Grégory Blanc, que je tiens à remercier, nous en fournit précisément l'occasion.

L'expérimentation d'un système de réserve, sur le modèle de celles de l'armée, de la police et de la gendarmerie, qui était proposée dans la rédaction initiale, constitue une piste intéressante, même s'il convient de réfléchir à l'articulation de ce système avec le volontariat, pour ne pas risquer de fragiliser ce dernier.

Conforter le modèle français du volontariat nécessite de prendre le temps de la réflexion. Je suis heureux que notre groupe ait ouvert le débat. Celui-ci devra se poursuivre.

Cette proposition de loi, telle qu'elle a été réécrite par la commission – je tiens d'ailleurs à remercier le rapporteur pour son travail –, vise à sécuriser juridiquement la pratique des contrats saisonniers de sapeur-pompier volontaire : c'est une avancée notable, car la spécificité du modèle français n'est pas toujours bien comprise par les instances européennes. Ce renforcement du droit constitue un pas positif pour en garantir la pérennité.

Nous espérons que le débat ouvert par l'examen de ce texte permettra de résoudre les enjeux auxquels sont confrontés nos pompiers. Je pense notamment aux enjeux sociaux, importants pour la fidélisation des pompiers volontaires et pour attirer de nouvelles recrues, à la réduction des risques sanitaires, à l'amélioration du matériel et au renforcement des moyens, ou encore à l'articulation entre les pompiers et les autres services de secours. Je sais que je peux compter, sur tous ces sujets, mes chers collègues, sur votre volontarisme, dans l'esprit qui anime cet espace transpartisan de notre ordre du jour.

Alors que Beauvau veut reprendre la main, par le biais des assises de la sécurité civile, nous serons attentifs aux prochaines annonces du Gouvernement sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi.

M. Hussein Bourgi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sapeur-pompier, c'est une passion et une vocation. Lorsque l'on prononce ce mot, nous avons à l'esprit l'image de ce héros qui fait battre le cœur des enfants et qui fait briller leurs yeux. Ces 250 000 femmes et hommes sapeurs-pompiers suscitent le respect et l'affection des Françaises et des Français.

Toutes celles et tous ceux qui connaissent ce corps d'armes savent que le quotidien est fait de dureté, d'abnégation, de sacrifices et parfois même d'ingratitude, lorsque nos sapeurs-pompiers se font insulter, caillasser ou violenter, comme ce fut le cas à Évian-les-Bains, la semaine dernière.

Les sapeurs-pompiers sont composés de 20 % de professionnels et de 80 % de volontaires. Ils assurent chaque année plus de 4,7 millions d'interventions, soit une toutes les sept secondes ! Derrière ces chiffres, il y a des vies sauvées, des risques pris et un engagement permanent et total envers les Françaises et les Français. Cet altruisme, ce don de soi force le respect.

Le rôle des sapeurs-pompiers ne cesse de s'étendre et leurs missions de se diversifier.

Si l'image de pompiers éteignant des incendies reste forte dans l'inconscient collectif, ces interventions représentent en réalité moins de 6 % de leurs activités : 85 % des missions concernent le secours à la personne, les chutes et malaises sur la voie publique ou les accidents domestiques.

L'engagement des sapeurs-pompiers s'exerce dans un contexte de plus en plus difficile, anxiogène et violent. Le nombre d'agressions à leur égard augmente de manière constante : on a recensé plus de 3 000 cas en 2022. Ils souffrent également d'un manque de reconnaissance, ce qui entraîne parfois une fatigue psychosociale, voire un burn-out ou une démission.

De nombreux Sdis manquent de moyens humains et matériels sans qu'aucune réponse adéquate à ces insuffisances ne soit apportée. Les finances des départements sont exsangues et ils n'ont pas toujours les marges de manœuvre budgétaire pour répondre aux besoins d'investissement en la matière.

Hélas, les défis à venir ne seront pas de nature à alléger la charge de travail des sapeurs-pompiers.

Le changement climatique emporte déjà des conséquences concrètes et désastreuses : l'étendue des surfaces brûlées par les feux de forêt chaque année a doublé au cours de ces quinze dernières années.

La multiplication des épisodes climatiques extrêmes – canicules, tempêtes, inondations – appellera des réponses rapides, coordonnées et renforcées.

Le vieillissement de la population française, quant à lui, entraînera une hausse des besoins en secours à la personne ainsi qu'un engorgement de notre hôpital public.

À tout cela s'ajoute l'évolution des risques technologiques et industriels. De nouveaux types d'incendies, liés aux batteries en lithium, aux véhicules électriques ou à des installations numériques, apparaissent et leur traitement exige des compétences et des équipements adaptés.

À la lumière de ce constat, notre collègue Grégory Blanc, que je salue, a déposé cette proposition de loi. Celle-ci tendait, dans sa version initiale, à créer un groupe expérimental de vacataires opérationnels au sein des services de sécurité civile, afin de faire face aux carences rencontrées dans certains Sdis.

Nous comprenons l'objet de cette disposition, inspirée des corps de réservistes opérationnels de la gendarmerie, de la police nationale ou de l'armée.

Pour autant, force est de constater que ce texte n'était pas suffisamment consensuel au sein de la profession et de ses organisations représentatives.

En effet, il était à craindre que cette nouvelle réserve ne soit mise en concurrence directe avec les sapeurs-pompiers volontaires. De plus, comme l'a indiqué la FNSPF, le risque serait que ces vacataires soient contractualisés, en application de la directive européenne sur le temps de travail de 2003, à la suite à l'arrêt Matzak, dont la jurisprudence suscite de nombreuses inquiétudes dans les Sdis, comme on peut le constater chaque année lors des conseils d'administration.

Le rapporteur Jean-Michel Arnaud a eu la sagesse et l'élégance de déposer des amendements, lors de l'examen du texte en commission, afin de retirer tout ce qui pouvait irriter. C'est chose faite : nous lui en sommes très reconnaissants.

La commission a adopté un nouveau dispositif. Celui-ci, afin de donner de la visibilité aux volontaires qui s'engagent sur de courtes périodes pour répondre à des besoins opérationnels ponctuels, confère une base légale générale aux contrats saisonniers de sapeur-pompier. Nous sommes plutôt favorables à cette rédaction, qui permet de sécuriser leur statut.

Toutefois, nous restons lucides : si cette disposition est bienvenue, elle ne saurait pleinement répondre aux besoins exprimés par les Sdis.

Nous attendons ainsi avec beaucoup de confiance et un grand intérêt les conclusions du Beauvau de la sécurité publique, qui constitue un exercice de démocratie participative rare dans ce métier. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, d'y avoir consacré du temps et de l'énergie. Nous attendons ses conclusions. Comme vous le savez, le Sénat, dans sa diversité, aura à cœur de vous accompagner pour mettre en œuvre les évolutions souhaitables et nécessaires.

Mes chers collègues, les sapeurs-pompiers sont un pilier essentiel de notre sécurité civile. Il ne suffit pas de les applaudir après chaque catastrophe : nous devons leur donner les moyens d'agir en amont et dans la durée. Cela suppose, par exemple, de veiller à l'entrée en vigueur de toutes les dispositions et avancées contenues dans la loi Matras, que nous avons toutes et tous votée. Cela suppose aussi que les pactes capacitaires en matière de lutte contre les aléas climatiques soient également définis et actés.

En conclusion je forme le vœu que, dans un proche avenir, les doléances des sapeurs-pompiers soient entendues et que des réponses adaptées soient apportées.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Ronan Dantec applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à rendre hommage aux pompiers, notamment à tous ceux qui ont été agressés récemment, même si de tels événements deviennent malheureusement de plus en plus fréquents.

Pour faire face à des enjeux de sécurité civile de plus en plus nombreux, ce texte, présenté par notre collègue Grégory Blanc, visait à créer à titre expérimental, pendant deux ans, dans cinq départements, des groupes de vacataires opérationnels de sécurité civile sur un modèle inspiré de la réserve de la gendarmerie nationale.

L'objectif était de permettre aux sapeurs-pompiers volontaires de choisir entre le régime actuel de l'astreinte et celui, théoriquement moins contraignant, de la garde postée en qualité de vacataire, réalisée de manière programmée.

Je salue le travail réalisé par la commission des lois et son rapporteur, Jean-Michel Arnaud.

Ce texte doit nous inviter à poursuivre notre réflexion de fond sur ce sujet. Il convient d'avancer. J'avais ainsi déjà déposé, le 25 juillet dernier, une proposition de loi visant à créer une réserve communale de sûreté.

Terrorisme, attaques à l'arme blanche, émeutes, rodéos urbains, règlements de compte : notre pays fait face ces dernières années à un risque sécuritaire de plus en plus important. Malgré l'action efficace de notre ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, l'insécurité n'est pas un simple sentiment : c'est une triste réalité.

Cette explosion de la violence dans notre société, qui touche sans distinction des mineurs, des majeurs, des hommes, des femmes, bouleverse la France métropolitaine, mais aussi les départements d'outre-mer, qui sont durement frappés. Notre pays devient ainsi une France Orange mécanique, pour reprendre le célèbre titre d'un essai de Laurent Obertone.

Malheureusement, depuis la fin du service militaire, malgré nos personnels de sécurité, la France ne dispose plus d'effectifs suffisants capables d'intervenir rapidement et en nombre à la suite d'une catastrophe naturelle, d'un accident de grande importance ou d'une défaillance d'un service de l'État.

C'est pourquoi, même si je regrette que l'amendement que j'ai déposé ait été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, je pense que nous nous devons d'avoir une réflexion sur la création d'une unité de réserve communale de sûreté, qui serait une extension de la réserve communale de sécurité civile.

Cette demande est formulée par de nombreux maires, notamment par Philippe Ardhuin, maire de Simiane-Collongue. Avec ce dispositif, nos maires pourraient se donner les moyens de réagir, en renforçant instantanément leur police municipale tout en étant encadrés.

À cet égard, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais vous rappeler ce qui s'est passé dans les Bouches-du-Rhône en 2023. Certaines communes de ce département ont été touchées par de multiples incendies déclenchés volontairement par un pyromane, qui a été traqué plusieurs jours avant d'être interpellé.

Sans remettre en cause les compétences de nos forces de l'ordre, on peut imaginer qu'avec des effectifs de sûreté supplémentaires, ne serait-ce que pour faire des barrages filtrants sur les routes – dans d'autres circonstances, pour encadrer certaines manifestations –, une interpellation plus rapide de l'auteur aurait été possible, ce qui aurait permis de limiter les dégâts.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est cette analyse que je souhaitais partager avec vous et, ainsi, poursuivre les réflexions sur la sécurité civile. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Favreau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Gilbert Favreau. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le diagnostic posé par la proposition de loi qui est soumise à notre examen aujourd'hui est juste sur le fond. Notre modèle de sécurité civile traverse en effet une zone de fragilité et la disponibilité opérationnelle des sapeurs-pompiers volontaires, notamment en journée, constitue un véritable sujet d'inquiétude pour nombre de territoires.

Si nous partageons le constat, nous divergeons toutefois sur la méthode et sur les mesures qui sont avancées.

La création de groupes de vacataires opérationnels n'est pas la réponse appropriée à la situation.

À mon avis, plusieurs raisons justifient cette opposition.

La première est le risque d'une mise en concurrence du volontariat existant et d'un statut de vacataire intermédiaire rémunéré pour des gardes programmées, en plus des astreintes programmées.

Ce mécanisme brouille les lignes entre volontariat et professionnalisation. Il crée un déséquilibre dans les équipes en introduisant une hiérarchie implicite entre ceux qui s'engagent par civisme et ceux qui perçoivent une indemnisation régulière pour des plages ciblées. Il pourrait entraîner la mort du système qui est actuellement en vigueur et dont les Français continuent de se féliciter.

La deuxième raison est le financement de ce nouveau mode de fonctionnement.

L'expérimentation proposée, même si elle est limitée dans le temps, entraînera des coûts accrus pour les services départementaux d'incendie et de secours. Chacun de vous sait que le système actuel est déjà onéreux. Nous connaissons les tensions budgétaires que rencontrent les Sdis, financés par les départements, les communes, les communautés de communes et l'État.

Sans garantie de financement pérenne, le dispositif des réserves opérationnelles risquerait de se transformer en impasse financière et de mettre en péril le modèle français de sécurité civile avec professionnels et volontaires.

La troisième raison est la fragilité de ce modèle soumis au droit européen.

L'arrêt Matzak de la Cour de justice de l'Union européenne a considéré que certaines formes de garde pouvaient relever du temps de travail salarié.

En multipliant les gardes postées, même sous un régime de vacations, cette proposition présenterait donc un risque juridique sérieux, celui de voir le volontariat assimilé à une relation de travail, c'est-à-dire soumis à la directive européenne sur le temps de travail. Je vous laisse imaginer toutes les conséquences que cela pourrait entraîner...

En conclusion, cette proposition de loi soulève plus de risques qu'elle n'apporte de solutions concrètes.

Préserver l'esprit du volontariat, clarifier les statuts et consolider le financement des Sdis doivent rester nos priorités premières.

Pour ces raisons, de même que le Gouvernement et la Fédération nationale des sapeurs-pompiers s'opposent à cette mesure, le groupe Les Républicains votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile
Article unique (fin)

Article unique

I. – Le chapitre III du titre II du livre VII du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° (nouveau) L'article L. 723-3 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L'engagement du sapeur-pompier volontaire est souscrit pour une période pluriannuelle reconductible. Un engagement saisonnier peut également être souscrit pour une période maximale de quatre mois, pour répondre à un accroissement temporaire des risques ou à un besoin opérationnel ponctuel.

« Un décret détermine les conditions d'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et les modalités d'application du présent article. » ;

2° (Supprimé)

bis (nouveau). – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Les articles L. 1424-13, L. 1424-14, le paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre IV du titre II du livre IV de la première partie et les articles L. 1424-36, L. 1424-46 à 1424-48 sont abrogés ;

2° Après la première occurrence du mot : « secours », la fin du premier alinéa de l'article L. 1424-44 est ainsi rédigée : « dispose : » ;

3° À la fin de l'article L. 1424-50, le mot : « loi » est remplacé par le mot : « section ».

II et III. – (Supprimés)

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, auteur de la proposition de loi.

M. Grégory Blanc, auteur de la proposition de loi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis heureux du débat que nous avons ce soir. Il est important.

Nous avons besoin de débattre encore plus régulièrement et de manière beaucoup plus intense des enjeux de sécurité civile. L'ensemble des orateurs ont souligné qu'il existe des failles et des faiblesses sur lesquelles nous devons réfléchir.

Tout le monde a conscience des problèmes de disponibilité et du fait qu'ils sont liés à des évolutions économiques et à des changements de nos modes de vie, et pas seulement à des considérations financières.

J'ai aussi entendu que ce qui coûte cher, c'est d'abord de mettre des « pros » là où c'est moins utile. Nous avons besoin de plus de professionnels et de plus de volontaires, encore faut-il qu'ils soient employés d'abord là où nous en avons besoin.

Monsieur le ministre, vous avez-vous-même souligné, comme plusieurs orateurs, que nous devions expérimenter des évolutions organisationnelles, en reconnaissant les diversités territoriales. Il y a cent départements, cent Sdis, cent réalités différentes. En tant que législateurs, il nous faut offrir de la souplesse pour que les moyens puissent être ajustés de la manière la plus efficace.

J'ai surtout entendu vos propos concernant la nécessité juridique de sécuriser les gardes postées, monsieur le ministre. C'est bien là l'objet initial du texte que j'ai proposé : nous avons besoin de gardes postées tenues par des volontaires dans certains territoires – pas partout.

Monsieur le ministre, vos propos sont importants et vous engagent. Nous attendons qu'à l'occasion du Beauvau de la sécurité civile la réponse sur laquelle vous vous êtes engagé, et que nous attendons tous, soit apportée. Qu'on l'appelle réserve, garde ou groupe, il faudra bien donner un cadre à cette évolution juridique.

Madame la présidente, compte tenu de l'ensemble de ces propos, je retire le texte que j'ai présenté.

À chaque étape de la procédure parlementaire, à chaque instant, j'ai souhaité avancer de manière transpartisane. Sur cet enjeu de sécurité civile, il nous faut absolument conserver cet esprit.

Je remercie le rapporteur Jean-Michel Arnaud de la qualité du travail que nous avons pu conduire ensemble, qui a permis de garantir l'équilibre et l'esprit de compromis qui caractérisent cette maison. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile est retirée de l'ordre du jour.

La parole est à Mme la présidente de la commission des lois.

Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je tiens à saluer le travail de Grégory Blanc, qui a appelé notre attention sur un sujet important. C'est le troisième texte concernant les sapeurs-pompiers que nous examinons en peu de temps.

Ce sujet n'est l'apanage d'aucun groupe de la Haute Assemblée. Parce qu'un Sdis est présent dans chacun de nos territoires, nous sommes tous extrêmement soucieux de la situation des sapeurs-pompiers.

La suggestion qui a été avancée au travers de ce texte a le mérite d'avoir lancé le débat. Elle n'a pas obtenu l'accord des différents groupes. Toutefois, je remercie Jean-Michel Arnaud d'avoir tenté de trouver une solution qu'a accueillie favorablement Grégory Blanc, l'auteur du texte, afin que les discussions et les débats, qui sont constants et nécessaires, continuent de se dérouler sans acrimonie dans notre assemblée.

Malheureusement, la solution trouvée, si elle agréait à l'auteur de la proposition de loi, soulevait de nouveau un débat dont nous savons qu'il est tellement sensible dans nos territoires et pour les sapeurs-pompiers qu'il paraissait difficile de trouver, ce soir, une issue véritablement convaincante pour tout le monde.

Je remercie donc Grégory Blanc d'avoir pris acte de cette situation et d'avoir fait en sorte que nous puissions poursuivre plus sereinement ces débats. Assurément, nous les poursuivrons, comme nous avons l'habitude de le faire.

Merci de cet esprit constructif qui a constamment prévalu, lors de nos travaux en commission comme dans l'hémicycle. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre. Je tiens à redire une nouvelle fois à l'auteur du texte, mais également au rapporteur et à tous ceux qui ont travaillé sur ce sujet, qu'il faudra bien trouver une solution. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute.

Je rappelle néanmoins que ce problème mérite une réflexion plus globale sur le volontariat, singulièrement sur le cadre juridique qui règle cette situation.

Monsieur le sénateur, vous avez raison, il faut tenir compte de la diversité des territoires et avoir la capacité de s'adapter à chacun d'entre eux. Nous en sommes intimement convaincus pour l'avoir constaté : il suffit de se déplacer dans l'ensemble de nos territoires et des Sdis.

Qui plus est – j'ai gardé en quelque sorte le meilleur pour la fin ! – va se poser la question du financement des Sdis.

Tous ces éléments constituent bien un ensemble.

Vous avez retiré votre texte, je vous en remercie. Vous m'avez interrogé et sollicité sur le Beauvau de la sécurité civile. Nous travaillerons sur cette question dans ce cadre. Même si je rappelle que nous avons pour ambition d'élaborer un texte d'ici à la fin du mois de juin, il nous reste un peu du temps pour approfondir le sujet et trouver la bonne solution, et ce dans l'état d'esprit que chacun ici a souligné. Nous avons pour objectif de trouver un consensus sur ce modèle assez remarquable qui est le nôtre, afin de parvenir à un dispositif pérenne. (Applaudissements.)

Article unique (début)
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile
 

8

Conférence des présidents

Mme la présidente. Les conclusions adoptées par la conférence des présidents, réunie ce jour, sont consultables sur le site du Sénat.

En l'absence d'observations, je les considère comme adoptées.

Conclusions de la conférence des présidents

SEMAINE SÉNATORIALE

Jeudi 15 mai 2025

De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures

(Ordre du jour réservé au groupe UC)

- Proposition de loi relative à la raison impérative d'intérêt public majeur de la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse, présentée par M. Philippe Folliot, Mme Marie-Lise Housseau et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée ; texte de la commission n° 585, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 7 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 14 mai matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 14 mai à 15 heures

- Proposition de loi visant à retirer les produits du bois de la responsabilité élargie du producteur produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB), présentée par Mme Anne-Catherine Loisier et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 592, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 7 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 14 mai matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 14 mai à 15 heures

À l'issue de l'espace réservé au groupe UC et au plus tard de 16 heures à 20 heures

(Ordre du jour réservé au groupe SER)

- Proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population, présentée par Mme Corinne Narassiguin, M. Jérôme Durain et plusieurs de leurs collègues (texte n° 54, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 7 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 14 mai matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 14 mai à 15 heures

- Proposition de loi visant à limiter le recours au licenciement économique dans les entreprises d'au moins 250 salariés, présentée par M. Thierry Cozic et plusieurs de ses collègues (texte n° 230, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 7 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 14 mai matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 14 mai à 15 heures

SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT

Lundi 19 mai 2025

À 16 heures

- Projet de loi relatif au transfert à l'État des personnels enseignants de l'enseignement du premier degré dans les îles Wallis et Futuna (procédure accélérée ; texte de la commission n° 618, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 14 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 19 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 19 mai début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 16 mai à 15 heures

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à aménager le code de la justice pénale des mineurs et certains dispositifs relatifs à la responsabilité parentale (texte de la commission n° 573, 2024-2025)

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : vendredi 16 mai à 15 heures

Projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613, 2024-2025) et projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025) (discussion générale commune)

Ces textes ont été envoyés à la commission des lois avec une saisine pour avis de la commission des affaires économiques, de la commission des affaires sociales et de la commission des finances.

Il a été décidé qu'ils feraient l'objet d'une discussion générale commune.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 14 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 19 mai à 12 heures

• Délai limite pour l'ajout d'un signataire à un amendement : mardi 20 mai à 10 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 20 mai après-midi et mercredi 21 mai matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 16 mai à 15 heures

Mardi 20 mai 2025

À 9 h 30

- Questions orales

L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.

Liste des questions orales

À 14 h 30 et le soir

- 1 convention internationale examinée selon la procédure d'examen simplifié :

=> Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et les Nations unies portant sur les arrangements relatifs aux privilèges et immunités ainsi que d'autres questions afférentes aux réunions des Nations unies tenues sur le territoire français (texte de la commission n° 590, 2024-2025)

• Délai limite pour demander le retour à la procédure normale : vendredi 16 mai à 15 heures

Suite du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613, 2024-2025) et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025) (discussion des articles)

Mercredi 21 mai 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 21 mai à 11 heures

À 16 h 30 et le soir

- Projet de loi autorisant la ratification du Traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République de Djibouti (procédure accélérée ; texte de commission n° 620, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 30 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 20 mai à 15 heures

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi renforçant la lutte contre les fraudes aux aides publiques (texte de la commission n° 570, 2024-2025)

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mardi 20 mai à 15 heures

Suite du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission, n° 613, 2024-2025) et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée) (texte de la commission, n° 614, 2024-2025)

Jeudi 22 mai 2025

À 10 h 30, l'après-midi et le soir

Suite du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613, 2024-2025) et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025)

Vendredi 23 mai 2025

Le matin, l'après-midi et éventuellement le soir

Suite du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613, 2024-2025) et du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025)

SEMAINE DE CONTRÔLE

Mardi 27 mai 2025

À 14 heures (hors hémicycle)

Travaux hors hémicycle de la commission des affaires européennes, des délégations et des instances temporaires (jusqu'à 17 heures) et des commissions permanentes (à partir de 17 heures).

À 18 h 30

Explications de vote des groupes puis scrutins publics solennels sur le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613, 2024-2025) et sur le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025)

• Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d'un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe

• Délai limite pour les inscriptions de parole : lundi 26 mai à 15 heures

• Délai limite pour le dépôt des délégations de vote : mardi 27 mai à 16 h 30

À 21 heures

- Débat sur le thème « Quel cap énergétique pour la France ? » (demande du groupe Les Républicains)

• Temps attribué au groupe Les Républicains : 8 minutes

• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure

• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l'orateur de répliquer pendant 1 minute

• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes

• Conclusion par le groupe Les Républicains : 5 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 26 mai à 15 heures

- Débat sur l'avenir du groupe La Poste (demande de la commission des affaires économiques)

• Temps attribué à la commission des affaires économiques : 8 minutes

• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure

• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l'orateur de répliquer pendant 1 minute

• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes

• Conclusion par la commission des affaires économiques : 5 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 26 mai à 15 heures

Mercredi 28 mai 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 28 mai à 11 heures

À 16 h 30

- Débat sur le thème : « Terres rares et matériaux critiques : quel potentiel dans les territoires français et quelle stratégie pour renforcer notre approvisionnement ? » (demande du groupe RDSE)

• Temps attribué au groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen : 8 minutes

• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure

• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l'orateur de répliquer pendant 1 minute

• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes

• Conclusion par le groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen : 5 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 27 mai à 15 heures

- Débat sur le thème : « Quelle politique de protection et d'accompagnement des élèves dans les établissements scolaires, avec quelles modalités de contrôle ? » (demande du groupe SER)

• Temps attribué au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 8 minutes

• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure

• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l'orateur de répliquer pendant 1 minute

• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes

• Conclusion par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 5 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 27 mai à 15 heures

SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT

Lundi 2 juin 2025

À 15 heures et le soir

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l'article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets et autres matières (texte de la commission n° 622, 2024-2025)

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : vendredi 30 mai à 15 heures

- Projet de loi portant création de l'établissement public du commerce et de l'industrie de la collectivité de Corse (procédure accélérée ; n° 552, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 21 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mercredi 28 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 2 juin après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 30 mai à 15 heures

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile (texte de la commission, n° 459, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 17 mars à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 19 mars matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mercredi 28 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 2 juin après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 30 mai à 15 heures

Mardi 3 juin 2025

À 14 h 30 et le soir

- Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile (texte de la commission n° 459, 2024-2025)

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (texte n° 532, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 21 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mercredi 28 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 3 juin début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 2 juin à 15 heures

Mercredi 4 juin 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 4 juin à 11 heures

À 16 h 30 et le soir

- Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (texte n° 532, 2024-2025)

- Projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l'emploi des salariés expérimentés et relatif à l'évolution du dialogue social (procédure accélérée ; texte n° 600, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 26 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 28 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 4 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 3 juin à 15 heures

Jeudi 5 juin 2025

À 10 h 30 et l'après-midi

- Éventuellement, suite du projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l'emploi des salariés expérimentés et relatif à l'évolution du dialogue social (procédure accélérée ; texte n° 600, 2024-2025)

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, instaurant des réponses adaptées et proportionnées pour prévenir notamment le développement des vignes non cultivées (texte n° 414, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 16 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 21 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mercredi 28 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 4 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 4 juin à 15 heures

- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bâtiments de destination autre qu'habitation en habitations

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mercredi 4 juin à 15 heures

SEMAINE SÉNATORIALE

Mardi 10 juin 2025

À 9 h 30

- Questions orales

À 14 h 30 et le soir

- Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile (texte de la commission n° 459, 2024-2025)

• Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d'un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe

• Délai limite pour les inscriptions de parole : vendredi 6 juin à 15 heures

• Délai limite pour le dépôt des délégations de vote : mardi 10 juin à 12 h 30

- Proposition de loi relative à l'organisation, à la gestion et au financement du sport professionnel, présentée par M. Laurent Lafon (texte n° 456, 2024-2025) (demande de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport)

Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 26 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 28 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 5 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 10 juin en début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 6 juin à 15 heures

- Proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires, présentée par M. Rémy Pointereau et plusieurs de ses collègues (texte n° 493, 2024-2025) (demande du groupe Les Républicains)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 26 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 28 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 5 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 10 juin début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 6 juin à 15 heures

Mercredi 11 juin 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 11 juin à 11 heures

À 16 h 30 et éventuellement le soir

- Proposition de loi relative à la composition des conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance, présentée par Mme Isabelle Florennes et plusieurs de ses collègues (texte n° 744, 2023-2024) (demande du groupe UC)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 30 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 10 juin à 15 heures

- Suite de la proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires, présentée par M. Rémy Pointereau et plusieurs de ses collègues (texte n° 493, 2024-2025) (demande du groupe Les Républicains)

- Proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi), présentée par Mme Anne Chain-Larché, M. Pierre Cuypers et plusieurs de leurs collègues (texte n° 416, 2024-2025) (demande du groupe Les Républicains)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois avec une saisine pour avis de la commission des finances.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 26 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 28 mai matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 5 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 10 juin à 15 heures

Jeudi 12 juin 2025

De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures

(Ordre du jour réservé au groupe SER)

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à reconnaître la responsabilité de l'État et à indemniser les victimes du chlordécone (texte n° 373, 2023-2024)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 juin à 15 heures

- Proposition de loi visant à renforcer la protection des ressources en eau potable contre les pollutions diffuses, présentée par Mme Florence Blatrix Contat et plusieurs de ses collègues (texte n° 421, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 juin à 15 heures

À l'issue de l'espace réservé au groupe SER et au plus tard de 16 heures à 20 heures

(Ordre du jour réservé au GEST)

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, instaurant un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des ultrariches (texte n° 380, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des finances.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 juin à 15 heures

- Proposition de loi visant à mieux protéger les écosystèmes marins, présentée par Mme Mathilde Ollivier et plusieurs de ses collègues (texte n° 492, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 2 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 11 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 juin à 15 heures

SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT

Mardi 17 juin 2025

À 14 h 30 et le soir

- Sous réserve de sa transmission, proposition de loi de simplification du droit de l'urbanisme et du logement (procédure accélérée ; texte A.N., n° 1240)

Ce texte sera envoyé à la commission des affaires économiques avec une saisine pour avis de la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 30 mai à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 4 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 12 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 17 juin en début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 16 juin à 15 heures

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation (texte n° 189, 2023-2024)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 6 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 10 juin après-midi

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 17 juin après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 16 juin à 15 heures

Mercredi 18 juin 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 18 juin à 11 heures

À 16 h 30 et le soir

- Éventuellement, suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation (texte n° 189, 2023-2024)

- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mardi 17 juin à 15 heures

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles (texte n° 504, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des lois.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 11 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 18 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 17 juin à 15 heures

- Proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d'avoir recours au modèle de la société portuaire pour l'exploitation de leurs ports, présentée par Mme Nadège Havet, MM. Michel Canévet et Yves Bleunven (procédure accélérée ; texte n° 319, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 11 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 18 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 17 juin à 15 heures

Jeudi 19 juin 2025

À 10 h 30 et l'après-midi

- 3 conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :

=> Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Suriname (procédure accélérée ; texte n° 553, 2024-2025)

=> Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre sur la coopération lors des opérations d'évacuation à partir de la région du Moyen-Orient via le territoire de la République de Chypre dans le cadre d'une situation de crise (texte n° 345, 2024-2025)

=> Sous réserve de son dépôt, projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention d'entraide judiciaire en matière pénale du 28 mai 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale du Brésil

• Délai limite pour demander le retour à la procédure normale : mardi 17 juin à 15 heures

- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à la lutte contre l'antisémitisme, le racisme, les discriminations, les violences et la haine dans l'enseignement supérieur

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mercredi 18 juin à 15 heures

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à renforcer le parcours inclusif des enfants à besoins éducatifs particuliers (texte n° 571, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : mardi 10 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 11 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 18 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 18 juin à 15 heures

- Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi sur la profession d'infirmier

• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes

• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : mercredi 18 juin à 15 heures

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à protéger les personnes engagées dans un projet parental des discriminations au travail (texte n° 568, 2024-2025)

Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 6 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 10 juin après-midi

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 18 juin matin

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 18 juin à 15 heures

Lundi 23 juin 2025

À 16 heures et le soir

- Sous réserve de sa transmission, projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 (texte A.N., n° 1285)

Ce texte sera envoyé à la commission des finances.

• Réunion de la commission pour le rapport : mercredi 18 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 23 juin à 11 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 23 juin en début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale :1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 20 juin à 15 heures

- Sous réserve de son dépôt et de sa transmission, projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024

Ce texte sera envoyé à la commission des affaires sociales avec une saisine pour avis de la commission des finances.

• Réunion de la commission pour le rapport : mercredi 18 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 23 juin à 11 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 23 juin après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 20 juin à 15 heures

Mardi 24 juin 2025

À 9 h 30

- Questions orales

À 14 h 30 et le soir

- Sous réserve de son dépôt, projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030

Ce texte sera envoyé à la commission des lois, avec une saisine pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport, de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires sociales.

• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 6 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 11 juin matin

• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 19 juin à 12 heures

• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 24 juin en début d'après-midi

• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 23 juin à 15 heures

Mercredi 25 juin 2025

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement 

• Délai limite pour l'inscription des auteurs de questions : mercredi 25 juin à 11 heures

À 16 h 30 et le soir

- Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 26 et 27 juin 2025

• Intervention liminaire du Gouvernement

• 4 minutes attribuées respectivement à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, à la commission des finances et à la commission des affaires européennes

• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure

• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur des commissions et des groupes pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l'orateur de répliquer pendant 1 minute

• Conclusion par la commission des affaires européennes : 4 minutes

• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 24 juin à 15 heures

- Sous réserve de son dépôt, suite du projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030

Éventuellement, jeudi 26 juin 2025

À 10 h 30 et l'après-midi

- Sous réserve de son dépôt, suite du projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030

9

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 15 mai 2025 :

De dix heures trente à treize heures et de quatorze heures trente à seize heures :

(Ordre du jour réservé au groupe UC)

Proposition de loi relative à la raison impérative d'intérêt public majeur de la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse, présentée par M. Philippe Folliot, Mme Marie-Lise Housseau et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée ; texte de la commission n° 585, 2024-2025) ;

Proposition de loi visant à retirer les produits du bois de la responsabilité élargie du producteur produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB), présentée par Mme Anne-Catherine Loisier et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 592, 2024-2025).

À l'issue de l'espace réservé au groupe UC et au plus tard de seize heures à vingt heures :

(Ordre du jour réservé au groupe SER)

Proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population, présentée par Mme Corinne Narassiguin, M. Jérôme Durain et plusieurs de leurs collègues (texte n° 54, 2024-2025) ;

Proposition de loi visant à limiter le recours au licenciement économique dans les entreprises d'au moins 250 salariés, présentée par M. Thierry Cozic et plusieurs de ses collègues (texte n° 230, 2024-2025).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quarante.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER