Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-2765, présenté par M. Canévet, est ainsi libellé :

Amendement n° I-1647, alinéa 5

1° Remplacer le taux :

200 %

par le taux :

30 %

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette taxe ne peut être instituée que si le taux prévu au cinquième alinéa de l'article L4332-8-1 du code général des collectivités territoriales est strictement inférieur à 0,15 %.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Il m'a semblé opportun de sous-amender l'amendement de Simon Uzenat, car je trouve logique que les régions, qui prennent leur part dans l'accueil des touristes, notamment en matière de transport, comme il vient de le démontrer, puissent aussi percevoir, si elles le souhaitent, une portion de la taxe de séjour.

En revanche, le taux de 200 % me semble excessif. Je propose donc un taux de 30 % et j'en conditionne l'usage au fait que le versement mobilité régional (VMR) n'excède pas 0,15 %.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Pour tout vous dire, je suis bien embarrassé et quelque peu déboussolé.

La commission des finances avait proposé un avis défavorable sur l'amendement n° I-1647 il y a quelques jours. Les positions de certains semblent avoir vite évolué. Peut-être ne manquait-il pas grand-chose à l'amendement, mais vous comprendrez que cela me laisse interrogatif.

De nombreux amendements tendent à utiliser la taxe de séjour, c'est-à-dire à taxer le tourisme, pour abonder des projets de transport. Or ces projets font l'objet de crédits de la part des collectivités, en particulier les régions, et de l'État. Ils font souvent l'objet de contrats de plan État-région (CPER) et reçoivent parfois des crédits européens. Cela fait déjà beaucoup.

Au bénéfice des régions, je comprends les besoins de mobilités interrégionales, mais aussi au sein de l'espace régional. Dans les territoires urbains, il existe des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) et le versement mobilité. Ce n'est pas le cas dans les territoires moins denses, où c'est souvent la région qui agit pour le compte des intercommunalités à dominante rurale.

L'an passé – c'est-à-dire il y a seulement douze mois ! –, nous avons laissé à la main des régions un bonus facultatif de 0,15 %. Je crois comprendre que ce bonus n'est, à ce stade, pas utilisé par les régions.

Par ailleurs, j'avais proposé il y a deux ans que l'on mobilise des quotas carbone. On m'avait alors reproché de vouloir prendre de l'argent dans les poches de l'État. Il me semble pourtant que l'État, c'est toute la France… L'idée était de flécher au moins 50 % des crédits issus des quotas carbone européens vers des actions vertueuses en matière de décarbonation de l'économie, notamment dans les transports.

Il est amusant de constater que de nombreux amendements ont été déposés cette année pour mobiliser des quotas carbone… En un an, les outils que nous choisissons ne semblent pas les mêmes. Il serait intéressant de disposer d'un tableau pour séquencer les dispositifs retenus.

Il est très difficile pour moi d'arbitrer. Si l'on ouvre la porte à toutes les mesures de taxation qui sont proposées, on ne comprendra plus rien ! Nous nous y perdons nous-mêmes… Si nous mobilisons la taxe de séjour, en perdrons-nous le bénéfice définitivement ? Si nous augmentons de nouveau la taxe de séjour dans deux ans, disposerons-nous de davantage de souplesse par rapport au taux de 0,15 % du VMR ?

Convenez que le sujet est complexe… Je ne veux pas faire une séance de questions-réponses à moi tout seul, mais je ne saisis pas les raisons pour lesquelles vous souhaitez instaurer ce concours fiscal supplémentaire.

Je comprends votre intention : le tourisme est certes un facteur d'attractivité, mais il est vrai qu'il mobilise de nombreux services, qu'il s'agisse des transports publics ou des routes. Pour autant, est-il opportun de traiter cette question par le biais de la taxe de séjour ? Je pose la question.

Il m'est très difficile de trancher, d'autant plus qu'il y a dix minutes, je n'avais aucune information sur ce sous-amendement. Or nous disons souvent qu'il ne faut pas délibérer au débotté…

Je sens une forme de pression sur les réseaux sociaux. La ministre m'a demandé si j'avais moi aussi reçu des dizaines ou des centaines de mails sur cette question. Nous allons bientôt être forcés de fermer nos boîtes mail… Et si nous sommes agressés sur les réseaux sociaux, peut-être que le Président de la République a raison : il faut tout arrêter.

Nous devons pouvoir débattre tranquillement et sereinement. Voilà ma réflexion à chaud sur ce sujet. Sûrement est-elle éminemment critiquable, mais je vous appelle, mes chers collègues, à arrêter de partir dans tous les sens, car nous n'avons plus de ligne directrice. Nous allons finir par nous y perdre et nous y perdrons tous. Je crains, au bout du compte, que les Français nous envoient tous jouer au cerceau ; et je n'ai pas envie de cela.

À ce stade, je ne suis pas en mesure d'émettre un avis sur ce sous-amendement ; j'attends de disposer de plus d'informations.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. L'idée que je perçois dans les propos du rapporteur général, à laquelle je souscris, est la suivante : d'année en année, nous faisons bouger des curseurs, ce qui contribue largement au sentiment de complexité et de bureaucratie qui désespère beaucoup d'élus, de chefs d'entreprise et de Français. Ces derniers ont l'impression que les choses changent en permanence. À peine ont-ils compris un nouveau dispositif qu'il a disparu l'année suivante…

Je rembobine le fil : l'année dernière a eu lieu un grand débat à l'issue duquel a été créé le versement mobilité régional et rural. Les autorités organisatrices de la mobilité percevaient déjà le versement mobilité depuis plusieurs années et, pour tout vous dire, mon ministère était assez défavorable à cette mesure.

En effet, dans une période où toutes les entreprises se plaignent des impôts de production, la création d'un impôt pour financer les transports dans les régions semblait être une offensive assez peu cohérente avec ce que nous cherchons à faire par ailleurs.

Dans cet hémicycle, vous avez voté en faveur de la création de ce versement mobilité régional et rural à un taux assez élevé, qui a ensuite été revu à la baisse en commission mixte paritaire.

Une fois que cet outil a été créé, les régions ont délibéré et, à la grande surprise de certains, elles ont été nombreuses à décider qu'il était hors de question qu'elles le déploient. (MM. Franck Dhersin et Olivier Rietmann renchérissent.) Je rappelle que nous avons collectivement choisi de faire figurer dans le texte qu'il devait faire l'objet d'une concertation avec les entreprises.

Or je crois comprendre, monsieur le rapporteur général, qu'en Bretagne, le président de région, son conseil régional et les organisations patronales bretonnes ont décidé de ne pas utiliser le versement mobilité à taux plein, voire pas du tout. Ainsi, dans le cadre d'un compromis local, il a été proposé que les touristes soient mis à contribution.

M. Simon Uzenat. Comme en Île-de-France !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. En effet, comme en Île-de-France, où la taxe de séjour est bonifiée, parce que la région accueille de nombreux touristes. Ces derniers utilisant beaucoup les infrastructures, nous les faisons contribuer au financement des RER et des métros.

Il paraît excessif d'augmenter jusqu'à 200 % la taxe de séjour, comme vous le proposez, monsieur Uzenat. En revanche, le sous-amendement de M. Canévet vise à abaisser à 30 % le taux de cette surtaxe. Surtout, il tend à inscrire un principe essentiel : cette taxe additionnelle doit être envisagée comme un substitut à la fiscalité des entreprises.

Si cette disposition devait être réécrite au cours de la navette, je serais favorable à ce que le taux de 30 % soit un maximum proposé, et non une obligation. Le taux doit être modulable.

Par ailleurs, je suis sensible à l'argument du rapporteur général. Il ne faudrait pas, l'année prochaine, que l'on en vienne à vouloir mobiliser tous les leviers à la fois.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Bien sûr que c'est ce qui va se passer !

Mme Amélie de Montchalin, ministre. J'entends ses inquiétudes sur le manque de lisibilité des dispositions que nous prenons au fil des ans.

Je suis donc d'avis d'accompagner le compromis qui a été trouvé localement, mais en restant vigilant. Je ne trouve pas la mesure inintéressante, mais le travail ne semble pas complètement abouti.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement, sous réserve de l'adoption du sous-amendement ; à défaut, il y sera défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Monsieur le rapporteur général, j'entends ce que vous dites, mais il me semble tout de même abusif de parler de proposition à chaud. Nous avons débattu de la même disposition pour la région Île-de-France dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2024. À l'époque, vous aviez émis un avis favorable.

Madame la ministre, l'Île-de-France accueille certes de nombreux touristes, mais le pays ne se limite pas à cette région. Les besoins de mobilité sont tout aussi importants ailleurs. Nous mettons les moyens pour développer le ferroviaire – je parle de centaines de millions d'euros.

Vous invoquez la lisibilité de la mesure pour nos concitoyens. Ceux-ci attendent simplement que l'offre de transports soit renforcée ; or, pour ce faire, il faut des moyens – il n'y a pas de secret.

J'en profite pour signaler, madame la ministre, que les estimations fournies par les services de l'État en ce qui concerne le versement mobilité régional et rural ont changé du tout au tout. Pour le sérieux des prévisions budgétaires, on repassera !

Monsieur le rapporteur général, vous évoquez les CPER et les crédits européens. Ils sont très loin de répondre aux besoins de financement : pour la seule région Bretagne, 2,5 milliards d'euros sont nécessaires.

Notre chambre a adopté la disposition pour l'Île-de-France, sur laquelle la commission avait émis un avis favorable ; il n'y a pas de raison de ne pas offrir cette faculté – car ce n'est qu'une faculté – aux autres régions.

Par ailleurs, le VMRR, qui est optionnel, est un impôt de production. Nous cherchons d'autres voies de financement. Cela vaut pour la Bretagne, mais aussi pour d'autres régions.

Du reste, nous ne faisons que reprendre une recommandation de la Conférence Ambition France Transports, alors présidée par Dominique Bussereau. Ce dernier est d'ailleurs venu présenter les conclusions de cette conférence devant notre commission et a évoqué ce levier comme un dispositif de court terme.

Je le répète, le sujet n'est absolument pas nouveau. Mon amendement a été déposé en temps et en heure et le dispositif existe déjà par ailleurs. Nous appelons régulièrement à décentraliser et à faire confiance aux territoires. Les élus sauront très bien déterminer quel dispositif est le plus approprié et à quel niveau il convient de le mobiliser.

Monsieur le rapporteur général, vous parlez souvent de cohérence, de paniers de recettes et de compétences : nous sommes en plein dans le sujet !

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Au-delà de cet amendement et de ce sous-amendement, il est important de débattre de tous les leviers envisageables pour financer les mobilités.

Mme la ministre des comptes publics est très compétente, mais il aurait été souhaitable que le ministre des transports, qui connaît bien la maison, soit également présent pour ajouter de la cohérence au débat.

Plusieurs annonces sont intervenues à l'échelle nationale à propos du besoin de renforcer les réseaux de mobilité ferroviaire, notamment la création des Serm, mais elles n'étaient assorties d'aucun financement pour les territoires qui doivent les mettre en œuvre. Ainsi, nous cherchons tous des leviers de financement.

De plus, comme l'a souligné Simon Uzenat, il ne s'agit que de donner aux territoires la faculté de lever ou non telle ou telle contribution. Dans cet hémicycle, nous pouvons tout de même faire confiance aux territoires pour savoir s'il vaut mieux augmenter le versement mobilité ou trouver d'autres leviers de financement.

Les présidents de région et les autres acteurs du domaine des transports peuvent, en connaissance de cause, consulter les entreprises pour choisir d'activer ou non ces leviers, mais il est nécessaire pour nos territoires de diversifier les moyens de financement.

Il est déjà problématique que l'Île-de-France soit en mesure de moduler son versement mobilité et pas les autres régions. Chaque année, nous essayons de mettre le débat sur la table. Là encore, nous ne faisons que proposer un dispositif qui existe déjà pour l'Île-de-France. De nombreux autres territoires reçoivent des touristes – la Bretagne n'est pas un désert touristique.

En termes de lisibilité, ces impôts qui sont fléchés directement pour financer les transports en commun sont des impôts utiles.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. Monsieur le rapporteur général, vous nous dites être quelque peu déboussolé. Permettez-moi de vous rappeler qu'Île-de-France Mobilités a renforcé le financement de son offre de transports par un bouquet de solutions. Le Grand Paris Express a notamment obtenu le déplafonnement du versement mobilité et la taxe additionnelle à la taxe de séjour, qui vise en particulier l'hôtellerie haut de gamme.

La conférence Ambition France Transports a bien défini les enjeux. Elle a relevé et classé les différentes ressources mobilisables, dont les mises à contribution de ceux qui profitent de l'attractivité d'un territoire résultant du développement de son offre de transports.

Dire que le sujet est encore confus, peu clair, pas mûr, revient en quelque sorte à dire que la conférence Ambition France Transports n'a pas servi à grand-chose… Les conclusions de cette conférence recommandent de donner aux territoires la possibilité d'actionner le levier d'une taxe additionnelle à la taxe de séjour à court terme, c'est-à-dire maintenant.

Si nous attendons la future loi-cadre sur les transports, puis l'éventuelle loi de programmation qui suivra, nous reporterons la décision aux calendes grecques.

Il convient d'entendre l'avis de sagesse du Gouvernement et d'adopter cette disposition pour montrer que nous avançons significativement.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, je suis obligé de vous dire que nous ne pouvons pas passer la nuit là-dessus… Nous avons fixé des règles. Dans un débat de cette nature, il me semble raisonnable de nous en tenir à une prise de parole par groupe. Nous ne pouvons passer une demi-heure sur un seul amendement. Sinon, nous ne disposerons plus que de quelques secondes pour examiner chaque amendement restant mercredi.

Mme Ghislaine Senée. Le message est passé !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Le débat a eu lieu, la ministre a émis un avis de sagesse, il est temps de passer au vote ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Pascal Savoldelli et Michel Masset applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Mes chers collègues, je regrette de faire entendre une voix quelque peu réticente sur cet amendement.

Vous voulez faire peser sur le tourisme le financement des transports. En réalité, il existe bien d'autres outils. Surtout, le tourisme tricolore, même s'il fait « cocorico » et si nous sommes encore les premiers, fait face à une compétition féroce à l'échelle européenne. Il faut donc faire attention à l'empilement de taxes additionnelles.

D'ailleurs, Michel Canévet le précise dans l'objet de son sous-amendement, en signalant qu'il y a déjà six taxes additionnelles à la taxe de séjour. Et l'on en ajouterait une septième !

En outre, tenez-vous bien, l'amendement de M. Uzenat dispose qu'il s'agirait d'une taxe additionnelle de 200 % : la taxe de séjour deviendrait additionnelle à la taxe bretonne, si je comprends bien ! Il faut savoir de quoi l'on parle : une taxe additionnelle ne peut pas constituer 200 % de la taxe initiale.

C'est le pouvoir d'achat des Français qui serait affecté par ce type de mesure. Ainsi, quand René prend sa caravane pour se rendre au camping des Dunes, il emprunte l'autoroute et paie les péages autoroutiers ; il n'y va pas en TGV et n'utilise pas les infrastructures de transport régionales. Et il devrait en plus se prendre la taxe additionnelle de 200 % sur l'emplacement de camping qu'il loue. L'enjeu est donc aussi celui du pouvoir d'achat des Français.

Il faut le dire clairement, car un certain nombre de nos concitoyens ne partent pas en vacances. Par conséquent, arrêtons de réduire la taxe de séjour à l'équivalent d'un café par jour. Celle-ci s'applique par personne et par nuitée. Faites le compte sur sept jours pour une famille de quatre ou cinq personnes : le chiffre grimpe rapidement.

Pour toutes ces raisons, je voterai contre cet amendement. (M. Olivier Rietmann approuve.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. J'essaierai d'être aussi bref que possible.

Pour rebondir sur les propos de M. Lemoyne, il faudrait rappeler sur quoi porte le pourcentage de cette taxe additionnelle. En effet, nos collègues avancent un taux de 200 %, mais nous savons très bien que cela représente quelques centimes et que ce n'est pas déterminant pour ceux qui la paient. (On le conteste sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Rietmann. Bien sûr, ce n'est pas votre argent !

M. Michaël Weber. En revanche, ce l'est pour les régions.

Monsieur le rapporteur général, je vous interpelle, car nous sommes tous deux conseillers régionaux par ailleurs. Nous avons déjà eu ce débat au sujet de situations spécifiques, notamment sur l'écotaxe qui concerne le Grand Est.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous en avons débattu pendant des mois, voire des années, on ne va pas régler ce problème en dix minutes !

M. Michaël Weber. Nous avons tous le même souci, dans les régions, de trouver des financements supplémentaires, en particulier pour la mobilité.

Par cet amendement, nos collègues offrent, ou du moins proposent, une solution aux régions. Il serait donc incompréhensible que nous ne soutenions pas cette disposition.

Je précise que le groupe socialiste votera également le sous-amendement de M. Canévet.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.

M. Olivier Rietmann. L'année dernière déjà, avec M. le rapporteur général, nous étions les deux seuls à nous élever contre la taxe sur les mobilités. Nous savons très bien que l'on ne peut pas répondre à chaque problème par une taxe nouvelle : cela ne fonctionne pas. Et il faudrait encore en créer une énième l'année prochaine !

Je souscris à ce que vient de dire notre collègue Jean-Baptiste Lemoyne. Cette surtaxe concernerait non seulement les touristes français, mais aussi tous les salariés qui dorment à l'hôtel chaque soir, parce qu'ils sont en déplacement, parce qu'ils sont VRP, etc. En définitive, qui devra payer ? Ce seront encore les entreprises !

La taxe n'est pas la seule solution pour régler les problèmes ; il y a aussi celle qui consiste à faire des économies. (Protestations sur les travées du groupe GEST.) Allez donc demander aux entreprises ce qu'elles pensent du versement mobilité ! Pour citer l'exemple de la région Bourgogne-Franche-Comté, les entreprises étaient toutes vent debout contre cette taxe, mais celle-ci a quand même été instituée et mise en place à son taux maximal. Arrêtons donc d'ajouter des taxes !

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. Nous rouvrons un débat que nous avons eu il y a deux ans, lorsque nous avons traité la question de la région Île-de-France.

À l'époque, j'avais soulevé un certain nombre de difficultés liées à la taxe de séjour. Je vous rappelle qu'elle est au forfait dans certaines communes, au réel dans d'autres et qu'elle n'est pas obligatoire. (M. Jean-Baptiste Lemoyne approuve.) Certaines communes n'appliquent donc pas la taxe de séjour, car elles ne souhaitent pas mettre en place une comptabilité spécifique pour le tourisme.

Par ailleurs, l'ajout de montants proportionnels peut avoir pour conséquence de payer la taxe de séjour plus cher que le prix de la chambre !. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Michaël Weber. N'importe quoi !

Mme Christine Lavarde. Mes chers collègues, vous ne pouvez pas me contredire : nous avons eu ce débat voilà deux ans.

À l'époque, nous étions tous convenus qu'il serait temps de repenser la définition de la taxe de séjour avant d'y ajouter de nouveaux éléments. Mais je constate que nous continuons d'avancer sans avoir réfléchi au socle de cette taxe.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Encore une fois, mes chers collègues, pour que la situation soit claire, je comprends le problème que vous soulevez, mais nous ne nous sommes jamais retrouvés à devoir voter une mesure de cette importance en termes d'enjeux globaux, y compris financiers, sur la base d'un document qui vient seulement de nous être communiqué. Je ne souhaite pas que nous votions ainsi à l'aveugle.

En conscience, et à titre personnel, je demande donc le retrait du sous-amendement n° I-2765.

Monsieur Canévet, je ne veux pas vous mettre en difficulté, car je devine que, dans votre région, il y a des pressions qui s'exercent, ou des demandes qui vous sont faites, mais je vous opposerai deux exemples.

Premièrement, il a fallu des mois de concertation pour faire approuver le financement de la LGV Sud-Ouest ; nous l'avons voté, ici, au Sénat, il y a quatre ans, mais encore aujourd'hui, des contestations se font entendre – je m'en tiens aux faits.

Deuxièmement, notre collègue Weber nous parle d'une nouvelle écotaxe. Mais pour la première écotaxe, rappelez-vous, alors que le Parlement l'avait votée quasiment à l'unanimité, il y a eu un mouvement de mécontentement en région Bretagne et la ministre de l'époque l'a retirée. Dans la région Grand Est, où nous avons repris la démarche, après plus de trois ans de débat au conseil régional, le sujet n'est toujours pas expurgé de certaines difficultés. (M. Michaël Weber approuve.) Nous sommes toutefois parvenus à un compromis et nous allons voter après plus de trois ans.

Je préfère que l'on me reproche une position de prudence et de réserve sur une mesure, qui me semble procéder d'une logique un peu éparpillée. (M. Simon Uzenat proteste.) C'est un choix de raison, car les conséquences d'une telle mesure ou les moyens de la financer n'ont pas été clairement étudiés.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° I-2765.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Monsieur le rapporteur général, je ne comprends pas.

Vous voulez essayer de nous faire croire que ce dont nous discutons ce soir est sorti de nulle part, sans aucun travail préparatoire, alors que cela fait deux ans que le sujet est sur la table !

En outre, l'objet du sous-amendement n'est pas d'augmenter la taxe, mais de la réduire. Vous vous prononcez donc contre une réduction de taxe : comment pourriez-vous justifier cela ?

Enfin, cette mesure viendrait remplacer un impôt de production qui frappe les entreprises.

Je le redis, vous avez voté en faveur de ce dispositif pour la région Île-de-France. Certes, Mme Pécresse est votre amie,…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Oh là là !

M. Simon Uzenat. – … ce qui a sans doute joué dans votre positionnement… Celui-ci n'en reste pas moins incompréhensible, alors que, dans les jours qui viennent, vous nous expliquerez à l'envi que l'État, impécunieux, ne peut pas financer ses ambitions en matière de transport.

Les bras m'en tombent et je vous retourne bien volontiers tous les qualificatifs que vous avez employés sur notre proposition, en laissant entendre qu'elle était incompréhensible.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-1647.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° I-1215 rectifié est présenté par MM. J.M. Arnaud et Levi, Mmes Devésa, Antoine et Patru, MM. Capo-Canellas, Courtial, Parigi et Pillefer, Mme Billon, M. Mizzon et Mmes Sollogoub et Saint-Pé.

L'amendement n° I-1852 rectifié est présenté par MM. Somon et Pernot, Mmes Imbert et P. Martin, MM. Genet et Saury, Mme Gruny, M. Piednoir, Mme Dumont, MM. H. Leroy, Bruyen, Belin, Sol, Sido, Perrin et Milon, Mme Canayer et MM. Pointereau, de Legge et Séné.

L'amendement n° I-2537 rectifié quater est présenté par M. Delcros, Mme Vermeillet, M. Dhersin et Mme Bourguignon.

L'amendement n° I-2608 rectifié quater est présenté par Mme L. Darcos, M. Capus, Mme Bourcier, MM. Chasseing, Grand et Laménie, Mme Paoli-Gagin, MM. L. Vogel, Wattebled et Chaize et Mme Lermytte.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 3333-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « de 10 % » sont remplacés par les mots : « , comprise entre 10 % et 30 %, ».

La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour présenter l'amendement n° I-1215 rectifié.

M. Pierre-Antoine Levi. Cet amendement de mon collègue Jean-Michel Arnaud vise à préserver la capacité d'action des départements face à la dégradation continue de leurs marges financières.

Destinée à promouvoir le développement touristique des départements, la part additionnelle à la taxe de séjour est une faculté offerte aux conseils départementaux, à hauteur de 10 % de celle qui est perçue par les communes. Les départements ont pleinement pris leurs responsabilités en matière de développement touristique en assurant la maîtrise d'ouvrage des véloroutes, en cofinançant les infrastructures nécessaires, en assurant le lien indispensable avec les porteurs de projets en étant des têtes de réseau, ou encore en organisant le tourisme de pleine nature.

Afin de conforter cette compétence, nous proposons de relever le taux de la taxe additionnelle entre 10 % et 30 % de la taxe de séjour communale ou intercommunale.

Mme la présidente. L'amendement n° I-1852 rectifié, n'est pas soutenu.

La parole est à M. Delcros, pour présenter l'amendement n° I-2537 rectifié quater.

M. Bernard Delcros. Tous les départements n'ont pas la même capacité de développement touristique. Nous souhaitons donc leur donner des marges de manœuvre en leur permettant de majorer légèrement la taxe de séjour de 10 % à 30 % pour adapter leur politique.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l'amendement n° I-2608 rectifié quater.

M. Marc Laménie. Cet amendement de notre collègue Laure Darcos a été parfaitement défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, vos amendements s'inscrivent dans la même logique que les précédents, mais vous nous donnez davantage d'éléments.

Cette année, nous avons pris le temps de recevoir à plusieurs reprises les représentants des départements. Dans les mesures que nous nous préparons à voter figure notamment la création d'un fonds de sauvegarde, initialement prévu à hauteur de 300 millions d'euros, mais que le Sénat, comme le Gouvernement, de porter à 600 millions d'euros. Il devrait permettre de faire face, pendant une année, aux besoins liés au financement des allocations individuelles de solidarité (AIS), répondant ainsi à une demande formulée dans le passé.

Par ailleurs, je rappelle que, dans la copie du Gouvernement, il était prévu un prélèvement de 280 millions d'euros au titre du dispositif de lissage conjoncturel (Dilico). Là encore, la commission en a diminué le montant de moitié, de sorte qu'il n'est plus que de 140 millions d'euros.

Par conséquent, si nous calculons le solde net de ce qui figure pour l'instant dans le projet de loi de finances, il représenterait un bonus de plus de 500 millions d'euros pour les départements. Cela vaut avant le travail que nous ferons, me semble-t-il, dans le cadre de la réflexion que nous mènerons sur une petite étape de décentralisation. Nous devrions ainsi pouvoir répondre aux besoins des départements sur le solde de 2025 pour l'année 2026.

D'où l'avis défavorable de la commission sur ces amendements identiques.