DROITPEN 4
du 01/07/1999
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 29/05/2000
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 30/08/1999Examen : 26/11/1999 (délégation pour l'Union européenne)
Justice et affaires intérieures
Protection contre le
faux-monnayage
Proposition E 1287
(Procédure écrite du 26 novembre 1999)
Le règlement du Conseil du 3 mai 1998, qui fixe au 1er janvier 2002 le début de la mise en circulation de l'euro, fait obligation aux Etats membres participants d'assurer la protection pénale de l'euro contre la fausse monnaie.
Ce projet de décision-cadre, qui résulte d'une initiative de l'Allemagne, vise à renforcer le cadre pénal pour la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro.
Le texte propose de renforcer les dispositions de la Convention internationale du 20 avril 1929 pour la répression du faux-monnayage et d'en faciliter l'application par les Etats membres. Ceux-ci s'engagent à adhérer à la Convention si cela n'a pas déjà été fait. La Suède, seul pays européen concerné, a annoncé qu'une loi de ratification sera bientôt présentée au Parlement.
La convention de 1929 qualifie les comportements suivants d'infractions :
« 1. les faits frauduleux de fabrication ou d'altération de monnaie ;
2. la mise en circulation frauduleuse de fausse monnaie ;
3. les faits, dans le but de la mettre en circulation, d'introduire dans les pays, de recevoir ou de se procurer de la fausse monnaie sachant qu'elle est fausse ;
4. les tentatives de ces infractions et les faits de participation intentionnelles ;
5. les faits frauduleux de fabriquer, de recevoir ou de se procurer des instruments ou d'autres objets destinés par leur retour à la fabrication de fausse monnaie ou à l'altération des monnaies. »
Le projet de décision-cadre complète ces dispositions en ajoutant :
- au troisième point, le transfert, l'exportation, le transfert à un tiers ainsi que l'acquisition pour le compte d'un tiers ;
- au cinquième point, les hologrammes et autres éléments constitutifs qui servent à sécuriser la monnaie contre la falsification ainsi que les programmes d'ordinateurs et autres procédés destinés à la contrefaçon de la monnaie.
Les Etats membres sont chargés de s'assurer que tous ces comportements sont passibles de « sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives incluant des peines privatives de liberté susceptibles de donner lieu à extradition » qui s'appliqueront aussi aux devises qui seront mises en circulation à l'avenir (euro).
Le texte prévoit par ailleurs que les Etats membres prennent les mesures nécessaires :
- pour établir leur compétence à l'égard des infractions énumérées ci-dessus lorsqu'elles ont été commises sur leur territoire, ou commises en dehors de leur territoire à l'égard de l'euro par des personnes qu'ils n'ont pas extradées ;
- pour déterminer quel Etat membre poursuivra l'auteur d'une infraction lorsque celle-ci relève de la compétence de plusieurs Etats.
Une évaluation sur l'application de ce texte est prévue pour le 31 décembre 2004 au plus tard.
La situation actuelle justifie l'adoption de cette décision-cadre. En effet, les sanctions contre la falsification des billets prévues dans le droit pénal des Etats membres sont très hétérogènes. Par exemple, pour la production de faux billets, les peines varient de 8 à 10 ans en Espagne contre 30 ans en France. De même, pour la fabrication ou l'achat de matériel pour produire des faux billets (comportement non punissable en Suède), les peines vont de un an en France à 15 ans en Belgique.
Le Gouvernement français était à l'origine favorable à l'édiction d'une convention sur le sujet. Le Conseil a préféré opter pour une décision-cadre car l'entrée en vigueur d'une convention aurait pu être retardée par les processus de ratification des Parlements nationaux. En outre, le Gouvernement aurait préféré que le champ d'application de ce texte soit limité à l'euro. Sous ces réserves générales, il a globalement estimé le texte insuffisant et a fait de nombreuses propositions destinées à étoffer certains articles du texte et notamment :
- celui sur les sanctions pénales qui devraient, selon lui, être harmonisées, notamment par la fixation d'une peine plancher ;
- celui sur la détermination de compétences de l'Etat qui doit assurer les poursuites : certains critères devraient être pris en compte comme l'ampleur de la contrefaçon, le lieu de mise en circulation, le lieu d'arrestation des auteurs, la nationalité des auteurs et l'antériorité des poursuites.
Par ailleurs, le Gouvernement souhaitait que soient ajoutés de nouveaux articles sur la récidive, la responsabilité des personnes morales et la coopération :
· la récidive : il lui paraît nécessaire de faire admettre par les Etats membres que les condamnations prononcées par un autre Etat membre soient considérées comme génératrices d'une récidive ;
· la responsabilité des personnes morales : elles devraient être tenues pour responsables lorsque l'infraction a été commise par toute personne agissant pour leur compte ;
· la coopération : il devrait être prévu que les Etats membres coopèrent avec la Banque centrale européenne, les banques centrales nationales et Europol, afin d'échanger des informations permettant de lutter contre la contrefaçon de l'euro.
Les négociations sur ce texte sont actuellement en cours, les propositions françaises visant à ajouter de nouveaux articles ont été écartées car les délégations souhaitent ne pas retarder l'adoption de cette décision-cadre par l'ajout de nouveaux articles et ont manifesté leur préférence pour que ces propositions soient discutées séparément.
Au vu des divergences de législation des Etats membres, ce texte doit être adopté rapidement. Aussi il n'a pas paru nécessaire que la délégation intervienne à son propos, même s'il convient de rester attentif aux initiatives prises en la matière.