du 02/03/2009
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 11/03/2009Examen : 03/06/2009 (commission des affaires européennes)
Justice et affaires intérieures
Accords entre l'Union
européenne et les États-Unis
en matière d'extradition
et d'entraide judiciaire
Texte E 4333
(Procédure écrite du 3 juin 2009)
A la suite des attentats du 11 septembre 2001, les États membres sont convenus que l'Union européenne examinerait avec les États-Unis les moyens de faciliter l'entraide judiciaire pénale pour lutter contre le terrorisme et l'extradition des personnes soupçonnées de liens avec le terrorisme. A cette fin, un mandat de négociation a été formellement adopté par le Conseil en avril 2002. A la suite de ces négociations, les accords ont été signés au nom de l'Union européenne le 25 juin 2003.
Depuis la signature des accords, conformément à leur article 3, les États membres ont échangé des instruments écrits avec les États-Unis sur les modalités d'application des dispositions des accords au niveau bilatéral. Pour la France, il s'agit du traité d'entraide judiciaire en matière pénale du 10 décembre 1998 et du traité d'extradition du 23 avril 1996. Les États-Unis ont achevé leur procédure de ratification pour les deux accords et pour les 54 accords bilatéraux. Les accords doivent désormais être approuvés. C'est l'objet du texte E 4333.
Saisi des projets d'accord, le Sénat, dans une résolution en date du 23 avril 2003 avait considéré, sur le rapport de Pierre Fauchon, que le nécessaire renforcement de la coopération judiciaire entre l'Union européenne et les États-Unis devait prendre en compte le processus d'édification de l'espace judiciaire européen. Il avait, en conséquence, soutenu la volonté du Gouvernement de ménager la possibilité de faire prévaloir le mandat d'arrêt européen sur les demandes d'extradition présentées par des pays tiers. Il avait par ailleurs partagé le souci du Gouvernement d'inclure une référence aux droits fondamentaux parmi les motifs de refus d'extradition. Le Sénat s'était également interrogé sur la possibilité de conclure de tels accords au nom de l'Union seule et avait estimé qu'ils devaient être soumis à un débat et à un vote du Parlement conditionnant leur approbation.
Le compromis atteint au cours des négociations n'a pas remis en cause l'assimilation entre un mandat d'arrêt européen et une demande d'extradition des États-Unis. Cependant, par le biais d'une procédure de consultation renforcée, une révision de l'accord pourrait être envisagée si l'Union décidait, à l'avenir, de conférer au mandat d'arrêt européen une priorité d'exécution. S'agissant des motifs de refus d'extradition, le compromis a porté sur une référence aux décisions judiciaires définitives et contraignantes, ce qui pour la France inclut les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme.
Sur la procédure à suivre, un avis du service juridique du Conseil a considéré que l'accord envisagé entrait dans les compétences de l'Union européenne en vertu du titre VI du traité sur l'Union européenne et qu'il lierait les États membres dès son entrée en vigueur. Il a exclu l'adoption par le Conseil d'un accord international qui serait conclu au nom des États membres. Sollicité par le Gouvernement, le Conseil d'État a estimé, dans un avis du 7 mai 2003, que l'article 24 du traité sur l'Union européenne devait être interprété comme reconnaissant au Conseil la possibilité de recevoir le mandat de négocier et de conclure des accords qui lient les institutions de l'Union et les États membres. Il a en outre considéré que ces accords pouvaient entrer en vigueur sans autorisation préalable de ratification par le Parlement en application de l'article 53 de la Constitution. On ne peut que déplorer cette situation qui conduit à ce que le Parlement ne soit appelé à connaître d'accords de ce type que dans le cadre de la procédure de l'article 88-4 de la Constitution ou d'une éventuelle révision constitutionnelle préalable, alors même que sont en cause des questions intéressant la procédure pénale et la garantie des droits fondamentaux qui relèvent directement de la compétence du législateur.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires européennes n'a pas jugé utile d'intervenir plus avant. Toutefois, à la demande de Bernard Frimat, le président de la commission a adressé au Gouvernement une lettre rappelant les positions antérieures du Sénat déplorant cette mise à l'écart du Parlement dans un domaine essentiel.