COM(2010) 240 final
du 12/05/2010
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 13/07/2010
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 20/05/2010Examen : 23/06/2010 (commission des affaires européennes)
Économie, finances et fiscalité
Textes E 5337 et E 5338
Adoption par l'Estonie de la monnaie unique
européenne
COM (2010) 239 final et COM (2010) 240 final
(Procédure écrite du 23 juin 2010)
Aux termes de l'article 4 de l'Acte d'adhésion, les États ayant rejoint l'Union européenne le 1er mai 2004 participent à l'Union Économique et Monétaire sans pour autant adhérer directement à la zone euro. Conformément à l'article 138 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), ils font en effet l'objet d'une dérogation temporaire destinée à permettre à leurs économies de converger avec celles des pays membres de la zone euro. Tous les deux ans ou à la demande d'un État membre à statut dérogatoire, deux rapports distincts de la Commission et de la Banque Centrale Européenne (BCE) sont présentés au Conseil afin d'évaluer les progrès réalisés en vue de l'adoption de la monnaie unique. Sur la base de ces documents et après consultation du Parlement européen et discussion au sein du Conseil européen, le Conseil ECOFIN statue à la majorité qualifiée. Depuis 2006, il a ainsi permis à la Slovénie (2007), à Chypre, Malte (2008) et à la Slovaquie (2009) d'adopter l'euro.
Les rapports de la Commission et de la Banque Centrale Européenne analysent la convergence des économies des États faisant l'objet d'une dérogation avec celles de la zone euro à la lumière d'une série d'indicateurs, au nombre desquels les critères dits de Maastricht occupent une place prééminente. Exposés à l'article 140 du TFUE, ces critères sont les suivants :
- stabilité des prix : le taux d'inflation de l'État membre évalué ne doit pas dépasser de plus de 1,5 % celui des trois États membres présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité des prix, qu'ils appartiennent ou non à la zone euro (le Portugal et la Belgique font ainsi partie de ce trio avec l'Estonie) ;
- discipline budgétaire : deux valeurs de référence sont utilisées afin d'évaluer le caractère soutenable de la situation des finances publiques : l'endettement public doit ainsi être inférieur à 60 % du Produit Intérieur Brut (PIB) et le déficit budgétaire ne peut atteindre plus de 3 % du PIB ;
- stabilité des taux de change : l'État membre doit avoir participé au mécanisme de taux de change du système monétaire européen (MCE II ou « SME bis ») sans discontinuer pendant les deux années précédant l'examen de sa situation, sans connaître de tensions graves. En outre, l'État membre ne doit pas avoir dévalué sa monnaie de sa propre initiative pendant cette même période ;
- niveau des taux d'intérêts à long terme : les taux d'intérêt nominaux à long terme ne doivent pas excéder de plus de 2 % ceux des trois États membres présentant les meilleurs résultats en matière de stabilité des prix.
Au-delà, les États souhaitant adopter la monnaie unique doivent également établir la compatibilité des statuts de leurs banques centrales avec ceux du système européen de banques centrales (SEBC). Par ailleurs, l'attention est également portée sur le degré d'intégration des marchés, l'évolution des balances des paiements courants, des coûts salariaux unitaires et des indices des prix.
Au terme de son rapport publié le 12 mai 2010, la Commission souligne que l'Estonie est le seul des États à statut dérogatoire à remplir les conditions requises pour l'adoption de l'euro. Les critères de convergence sont, en effet, respectés. L'inflation s'établit à -0,7 % annuel, soit un niveau inférieur à la valeur de référence (1 %). De plus, contrairement à de nombreux États membres, l'Estonie ne fait pas l'objet d'une décision du Conseil concernant l'existence d'un déficit public excessif. Le déficit budgétaire s'élève ainsi à 1,7 % du PIB, soit en dessous de la barre de 3 % fixée par le protocole (n°12) sur la procédure concernant les déficits excessifs, annexé aux traités. La dette publique atteint, pour sa part, 7,2 % du PIB en 2009.
Le critère des taux d'intérêt à long terme n'est pas applicable dans le cas de l'Estonie. En effet, pour évaluer la convergence des taux d'intérêt, on utilise des taux d'intérêts comparables sur des obligations d'État de référence à dix ans. Or l'Estonie ne dispose pas de telles obligations de référence à long terme ou de titres comparables car sa dette publique se trouve à un niveau très faible (en raison des excédents budgétaires du pays de 2002 à 2007).
Enfin, en ce qui concerne le critère du taux de change, l'Estonie participe au mécanisme de change européen (MCE II) depuis le 28 juin 2004. Sur la période de deux ans qui a précédée, la couronne estonienne n'a pas connu de graves tensions et ne s'est pas écartée du taux pivot du MCE II depuis son entrée dans le mécanisme.
La Banque centrale européenne a exprimé quelques réserves sur le caractère durable de la convergence de l'Estonie en matière d'inflation. Elle estime que la valeur de -0,7 % est à mettre au compte de facteurs temporaires, liés au processus sévère d'ajustement mené par les autorités du pays, qui a conduit à une contraction de 14,1 % du Produit intérieur brut réel en 2009. Selon elle, l'inflation est appelée à augmenter dans les mois à venir. L'Estonie a en effet réussi à maintenir les prix, les salaires et les dépenses publiques sous contrôle dans un contexte très difficile. Lorsque le processus d'ajustement de son économie sera réalisé, « maintenir des taux d'inflation bas sera très difficile étant donné la marge de manoeuvre limitée pour la politique monétaire » dans le cadre de la zone euro, prévient la BCE.
Les ministres des finances de l'Union devraient valider la proposition de la Commission visant à abroger la dérogation applicable à l'Estonie au cours du Conseil ECOFIN du 13 juillet 2010. L'Estonie pourra alors adopter l'euro à compter du 1er janvier 2011.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission a décidé de ne pas intervenir davantage sur ces textes.