COM (2013) 824 final  du 27/11/2013

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)

Examen : 09/01/2014 (commission des affaires européennes)


Les textes COM (2013) 821, COM (2013) 822 et COM (2013) 824 font partie d'un paquet concernant les garanties dans les procédures pénales.

Ces trois propositions de directive tendent à mettre en oeuvre le programme de Stockholm, adopté par le Conseil européen en 2010, qui a mis en particulier l'accent sur le renforcement des droits des personnes dans le cadre des procédures pénales. Ce programme a retenu le principe d'une approche progressive par l'établissement de normes minimales communes pour assurer le droit à un procès équitable.

D'ores et déjà trois directives ont été adoptées : l'une sur le droit à l'interprétation et à la traduction ; l'autre sur le droit à l'information ; la dernière sur le droit d'accès à un avocat, sur laquelle la commission des affaires européennes avait adopté une proposition de résolution européenne sur le rapport de Jean-René Lecerf.

Avec ces trois nouveaux textes, la Commission européenne poursuit la mise en oeuvre de l'approche progressive voulue par le Conseil européen. Il s'agit, en premier lieu, d'assurer un niveau minimal de protection du principe de présomption d'innocence ; en deuxième lieu, des règles minimales concerneraient les droits des personnes soupçonnées ou poursuivies qui sont des enfants ; enfin, sont traités les aspects de l'aide juridictionnelle qui apparaissent nécessaires pour donner un caractère effectif au droit d'accès à un avocat dans les procédures pénales.

La Commission européenne fait valoir qu'il s'agit de promouvoir la confiance mutuelle entre les systèmes judiciaires des États membres, notamment pour faciliter le bon fonctionnement de la reconnaissance mutuelle, et d'établir des normes minimales pour renforcer les garanties dans le cadre des procédures pénales. Ces textes s'inscrivent dans le cadre d'une approche progressive dont nous avons déjà approuvé le principe et qui permettra d'élever le niveau des droits des personnes dans les procédures pénales.

Dans ce contexte, il ne paraît pas opportun de se saisir de ces textes au titre de l'article 88 6 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 17/12/2013
Examen : 27/03/2014 (commission des affaires européennes)


Justice et affaires intérieures

Texte E 8946

Proposition de directive concernant l'aide juridictionnelle provisoire pour les suspects et les personnes poursuivies privés
de liberté, ainsi que l'aide juridictionnelle dans le cadre
des procédures relatives au mandat d'arrêt européen

COM (2013) 824 final

(Procédure écrite du 27 mars 2014)

Le texte E 8946 vise à définir des normes minimales communes régissant le droit à l'aide juridictionnelle provisoire conféré aux suspects et aux personnes poursuivies dans le cadre de procédures pénales lorsqu'ils sont privés de liberté, ainsi que le droit à l'aide juridictionnelle provisoire et à l'aide juridictionnelle conféré aux personnes faisant l'objet d'une procédure en application de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil relative au mandat d'arrêt européen.

Il s'agit surtout de mettre en oeuvre la directive 2013/48/UE relative au droit d'accès à un avocat en permettant que ledit droit puisse s'exercer dès les premiers stades de la procédure pour les suspects et les personnes poursuivies privés de liberté. La proposition de directive a également pour objet de garantir que les personnes dont la remise est demandée dans le cadre de procédures relatives au mandat d'arrêt européen aient accès à l'aide juridictionnelle afin de garantir leur droit d'accès à un avocat tant dans l'État membre d'exécution que dans celui d'émission.

Au sens du texte E 8946, l'aide juridictionnelle provisoire désigne l'aide juridictionnelle accordée à une personne privée de liberté en attendant l'adoption d'une décision relative à l'aide juridictionnelle.

Selon l'article 4, l'aide juridictionnelle provisoire est accordée sans retard indu après la privation de liberté et, en tout état de cause, avant tout interrogatoire. Cette aide est garantie jusqu'à l'adoption et la prise d'effet de la décision définitive relative à l'aide juridictionnelle, ou, si les suspects ou les personnes poursuivies se voient accorder l'aide juridictionnelle, jusqu'à la prise d'effet de la désignation de l'avocat.

Les États membres veillent à ce que l'aide juridictionnelle provisoire soit fournie dans la mesure nécessaire à l'exercice effectif du droit d'accès à un avocat consacré par la directive 2013/48/UE relative au droit d'accès à un avocat. Le texte ajoute que les États membres peuvent prévoir que le remboursement des frais relatifs à l'aide juridictionnelle sera réclamé aux suspects et aux personnes poursuivies ainsi qu'aux personnes dont la remise est demandée dans le cadre du mandat d'arrêt européen qui ne remplissent pas les critères d'admission au bénéfice de cette aide en vertu du droit national.

S'agissant de l'aide juridictionnelle pour les personnes dont la remise est demandée, l'article 5 du texte E 8946 dispose que l'État membre d'exécution s'assurera que les personnes dont la remise est demandée dans le cadre du mandat d'arrêt européen ont droit à l'aide juridictionnelle dès leur arrestation en vertu d'un mandat d'arrêt européen et ce jusqu'à leur remise, ou, en cas de non-remise, jusqu'à ce que la décision sur la remise soit devenue définitive.

L'État membre d'émission du mandat veillera à ce que les personnes dont la remise est demandée qui exercent leur droit de désigner un avocat dans l'État membre d'émission, chargé d'assister l'avocat désigné dans l'État membre d'exécution, conformément à l'article 10 de la directive 2013/48/UE, aient droit à l'aide juridictionnelle dans cet État membre aux fins de la procédure relative au mandat d'arrêt européen dans l'État membre d'exécution.

Le droit à cette aide juridictionnelle pourra être subordonné à une évaluation des ressources de la personne dont la remise est demandée ou à une appréciation du point de savoir s'il est ou non dans l'intérêt de la justice de fournir une telle aide, au regard des critères d'admissibilité applicables dans l'État membre en question.

Il faut relever, ici, que la directive 2013/48/UE relative au droit d'accès à un avocat dans les procédures pénales et dont la transposition doit être achevée le 27 novembre 2016, prévoit, dans sa version définitive, le droit d'accès effectif à un avocat dans tous les cas où une personne est suspectée ou accusée, qu'elle soit libre ou détenue, durant toute la phase d'enquête, d'instruction et de jugement des affaires pénales.

Dans une note datée du 22 septembre 2011, le Gouvernement français avait fait part au Conseil de ses réserves en soulignant en particulier un risque de « difficultés substantielles pour la mise en oeuvre effective des enquêtes et des procédures pénales ». Le Gouvernement français contestait également le choix fait par la Commission européenne de délier la question de la place de l'avocat dans la procédure pénale de celle de l'aide juridictionnelle.

À l'initiative de notre collègue Jean-René Lecerf, le Sénat a, pour sa part, adopté le 28 janvier 2012 une résolution européenne où il était notamment précisé que l'harmonisation des règles relatives au droit d'accès à un avocat devait être « indissociable d'une harmonisation des règles relatives à l'aide juridictionnelle afin d'assurer l'effectivité des droits ».

Le Sénat relevait également que « ce droit d'accès à un avocat doit s'exercer dans des conditions permettant d'assurer la nécessaire conciliation entre le respect des droits de la défense et la recherche des auteurs d'infractions, tout en évitant une confusion entre la phase policière et la phase judiciaire de l'enquête ».

Le Sénat a ainsi estimé que certaines dispositions prévues par la proposition de directive (droit de l'avocat d'être présent lors de toute mesure d'enquête ou de collecte de preuves, par exemple) excédaient sans doute l'objectif tendant à établir des « règles minimales permettant d'assurer un exercice effectif des droits de la défense ».

Comme le rappelait, dans son rapport, le rapporteur pour la commission des lois du projet de loi portant transposition de la directive 2012/13/UE du 22 mai 2012 relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales (débat, première lecture, au Sénat le 24 février dernier), M. Jean-Pierre Michel, « les préventions françaises n'ont été que marginalement prises en compte dans la version finale de la directive 2013/48/UE » avec pour conséquence probable « un bouleversement considérable, avec des impacts certainement très significatifs sur l'aide juridictionnelle », ainsi que le souligne l'étude d'impact annexée au projet de loi précité.

On sait, par ailleurs, que le projet de loi précité de transposition a anticipé sur un point la transposition de la directive 2013/48/UE relative au droit d'accès à un avocat en ouvrant à la personne suspecte entendue librement par les services de police ou de gendarmerie le droit d'être assistée par un avocat lors de son audition par les enquêteurs.

Pour l'heure, le texte E 8946 ne traite de l'aide juridictionnelle provisoire (conséquence du droit d'accès à un avocat) que pour les suspects et les personnes poursuivies privés de liberté (garde à vue, détention provisoire). Il ne remet pas en cause notre législation puisque depuis la réforme de la garde à vue du 15 avril 2011 (art. 63-3-1 et suivants du code de procédure pénale), toute personne gardée à vue peut désigner un avocat.

La commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte concernant l'aide juridictionnelle provisoire pour les suspects et les personnes poursuivies privés de liberté ainsi que l'aide juridictionnelle dans le cadre du mandat d'arrêt européen.