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Question de M. Alain Duran (Ariège - SOCR) publiée le 19/12/2019

M. Alain Duran attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la stratégie française de ré-industrialisation et plus particulièrement sur les recherches minières dans le Salat en Ariège.

Il rappelle la présence de tungstène, un métal rare et nécessaire à la production des objets numériques et industriel, dans les Pyrénées ariègeoises. Il explique également que la Chine a le monopole de ce produit sur le marché international. La mine de Salau aurait donc un potentiel industriel important pour la stratégie économique du pays.

Il rappelle qu'en novembre 2014 un permis exclusif de recherche minière a été déposé par une société. En effet, si un avis favorable avait été déposé par la préfète en 2015, puis en 2016 par le secrétaire d'État en charge de l'industrie pour permettre ces recherches, le tribunal administratif de Toulouse l'a annulé le 28 juin 2019. Le ministère de l'économie a fait appel de la décision. Cependant, le 24 octobre 2019, la société « Mines du Salat » qui portait le projet de recherche minière a demandé sa liquidation judiciaire, ce qui met en péril les recherches de minerais. Si cette procédure est arrêtée, on ne pourra pas connaitre la richesse véritable du sol, ni même les risques potentiels liés à son exploitation.

Il évoque également le contexte social et économique national et mondial, les enjeux d'emploi, de protection de l'environnement et de dynamique territoriale. Et il insiste sur le besoin que les riverains, qu'ils soient en accord ou non avec la réouverture de la mine, ont de connaître la composition du sol.

Il conclut en l'interrogeant sur la capacité de la puissance publique à lancer une étude sur la faisabilité et la viabilité d'une exploitation minière comme celle du Salat.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique publiée le 04/03/2020

Réponse apportée en séance publique le 03/03/2020

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, auteur de la question n° 1062, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Alain Duran. Ma question porte sur la stratégie française en matière de réindustrialisation, plus précisément sur la recherche minière en Ariège.

Située dans les Pyrénées ariégeoises, la mine de Salau a été très active dans les années 1970 et 1980. Le sol de la vallée du Couserans était exploité pour en extraire un métal rare : le tungstène. Las, le 24 décembre 1986, la mine a fermé, victime d'un effondrement des cours du tungstène orchestré par la Chine. La Chine qui, aujourd'hui, a le monopole de l'extraction et de la mise sur le marché de ce matériau rare, qui constitue un des éléments de fabrication essentiels pour les objets des nouvelles technologies.

Si la mine de Salau renfermait encore un gisement important de tungstène, cela constituerait un enjeu stratégique pour l'économie française, plus particulièrement pour l'économie ariégeoise.

En novembre 2014, la société Variscan Mines a déposé une demande de permis exclusif de recherche minière, accordé le 21 octobre 2016 par le secrétaire d'État chargé de l'industrie. Toutefois, le 28 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ce permis pour vice de forme. Très rapidement, le ministère de l'économie a fait appel de cette décision et demandé le sursis à exécution du jugement. Dernier rebondissement en date : le 24 octobre dernier, la société Variscan Mines, qui soutenait le projet de recherche minière, a demandé sa liquidation judiciaire.

Compte tenu du contexte économique national et mondial, bousculé aujourd'hui par la crise sanitaire du coronavirus, la reprise des recherches sur le site de la mine de tungstène de Salau permettrait de connaître l'exact potentiel de cette zone minière, mais aussi de mesurer les risques éventuels pour l'environnement. Les riverains, qu'ils soient pour ou contre la réouverture de la mine, ont besoin de savoir.

Plus largement, cette mine pose les questions de l'orientation stratégique de la France en matière de réindustrialisation, de l'indépendance de notre pays et de la réforme de notre industrie minière – sans oublier les enjeux environnementaux.

Arnaud Montebourg, alors ministre de l'économie, disait : « Je me refuse à voir les ressources minières françaises dormir. » Alors, considérant l'implication du Gouvernement dans le dossier des mines du Salat, notamment l'appel fait de la décision du tribunal administratif de Toulouse, la force publique peut-elle lancer une étude sur la faisabilité et la viabilité d'une exploitation minière stratégique comme celle de Salau, dans l'Ariège ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence du ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire.

L'exploration minière est l'étape préalable à tout projet d'exploitation ; sans elle, il est impossible de mettre en évidence l'existence d'un gisement exploitable, sur les plans tant technique et économique que de la préservation de l'environnement.

Aujourd'hui, le domaine minier métropolitain n'est plus que très faiblement valorisé, et son potentiel reste insuffisamment connu au-delà de 300 mètres de profondeur. Néanmoins, les travaux antérieurs du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) permettent d'affirmer que le potentiel en tungstène du sous-sol français, notamment dans la région Occitanie, est de classe mondiale.

La faisabilité de son exploitation reste à évaluer. Cette opération doit être menée par les opérateurs miniers, qui disposent des connaissances, des compétences et des moyens nécessaires pour évaluer le potentiel du gisement et affiner les paramètres technico-économiques qui permettront le développement et le dimensionnement d'un projet minier et métallurgique pertinent sur les plans environnemental, économique et social. Il revient à l'État de garantir la préservation de l'environnement et les retombées socio-économiques pour le territoire.

Par la réforme du code minier, nous entendons favoriser l'émergence de projets mieux concertés et prenant mieux en compte, notamment, les enjeux environnementaux, économiques et sociaux.

Vous avez rappelé l'importance stratégique du tungstène pour notre industrie et les risques d'approvisionnement pesant sur cette ressource du fait de la position monopolistique chinoise. Le Gouvernement est pleinement conscient de ces enjeux. D'ailleurs, le Premier ministre a mis en place un groupe de travail de haut niveau, sous l'égide du Conseil national de l'industrie, afin d'élaborer un plan d'action sur la sécurisation de nos approvisionnements en métaux critiques pour les batteries, les énergies renouvelables et les alliages spéciaux utilisés par l'aéronautique et la défense. Le tungstène entrant dans la composition de ces derniers, l'ensemble des exploitations, dont celle que vous avez mentionnée, feront partie de la discussion.

Pour le ministère de l'économie et des finances, il demeure essentiel que la France n'obère pas sa capacité à exploiter les ressources de son propre sous-sol, afin de réduire sa dépendance et de consolider le tissu industriel national consommateur de tungstène.

Nous souhaitons aussi définir clairement une politique nationale des ressources et des usages du sous-sol, en accord avec la stratégie nationale de transition vers l'économie circulaire et le plan de programmation des ressources.

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, pour la réplique.

M. Alain Duran. Je retiens ce que vous avez dit, monsieur le secrétaire d'État, sur le potentiel de l'Occitanie en matière de tungstène : il est de classe mondiale. Dans l'attente de la réforme du code minier, si l'épisode sanitaire que nous traversons peut nous inciter à penser relocalisation, ce sera très bien !

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