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Question de M. Mathieu Darnaud (Ardèche - Les Républicains) publiée le 21/11/2024
Question posée en séance publique le 20/11/2024
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Mathieu Darnaud. Monsieur le Premier ministre, depuis votre nomination, vous n'avez jamais cessé de faire preuve de courage et d'audace. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. - Marques d'ironie sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Vous avez rendu de nouveau facultatif le transfert des compétences eau et assainissement, vous vous êtes attelé au statut de l'élu, vous avez annoncé la baisse de la participation des collectivités territoriales au budget pour 2025. Je souhaite vous interroger sur le « zéro artificialisation nette », qui se heurte aujourd'hui à un contexte sans précédent de crise du logement et à la volonté sans faille des élus de nos territoires d'accueillir dans leurs communes de l'activité économique.
Ceux-ci nous alertent sur la désespérance qu'ils éprouvent de ne plus être des élus bâtisseurs qui maîtrisent le destin de leur commune.
Prompt à trouver des solutions, le Sénat a lancé un travail collégial sur la question, et nos collègues Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier ont déposé une proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux (Trace). (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Ce texte comporte des dispositions opérationnelles pour régler les difficultés de nos communes (M. Akli Mellouli s'exclame.) tout en respectant l'effort de sobriété foncière et, bien sûr, la nécessité de prendre des mesures de prévention des risques climatiques.
Ce texte, monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt à le soutenir ? Pouvons-nous espérer, avant son examen, une pause dans l'application du ZAN ? Bref, préférez-vous le chemin tortueux du ZAN ? Nous, nous préférons la Trace sénatoriale ! (Sourires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, et INDEP.)
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Réponse du Premier ministre publiée le 21/11/2024
Réponse apportée en séance publique le 20/11/2024
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Barnier, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président Darnaud, j'aime les mots de chemin, de trace... Dans mon pays de Savoie, on sait ce que c'est qu'une trace durable. Et on aime les chemins, même escarpés ! Je ne parle pas du travail du Premier ministre... (Sourires.)
Au cours de mon long parcours - vous voyez mes cheveux blancs -, j'ai été pendant très longtemps président d'un département. J'ai été aussi ministre de l'environnement et de la prévention des risques naturels.
Par conséquent, monsieur le président, je vous dirai d'emblée, sans ambiguïté, que nous ne renoncerons pas à l'objectif de sobriété foncière. Nous devons maîtriser les risques d'une excessive artificialisation des sols. (Marques de satisfaction sur les travées des groupes SER et GEST.) Je n'ai pas oublié les catastrophes auxquelles nous avons dû faire face. Il y en a eu un certain nombre au cours des dernières années. Je ne parle pas seulement de ce qui s'est passé à Valence, dans un pays voisin et ami. N'ayons pas la mémoire courte, soyons prudents !
C'est l'objectif du travail que nous allons mener, comme je le disais tout à l'heure, avec les maires. Ils sont sur le terrain, en première ligne quand il y a une catastrophe, face à un risque ou pour résoudre des problèmes de cette nature.
J'ai appris aussi, lorsque j'étais ministre ou président de département, que les espaces naturels et les ressources naturelles ne sont ni gratuits ni inépuisables. Nous devons faire attention. Je sais que vous partagez cet état d'esprit aussi, monsieur le président Darnaud, et vous l'avez montré dans votre région. (Marques d'incrédulité sur les travées du groupe GEST.)
En même temps, on constate que la législation, la réglementation, enserre les maires dans un carcan. Or ceux-ci doivent pouvoir exercer leur mission, qui est aussi d'être des maires bâtisseurs, pour reprendre vos mots. On observe qu'on ne sait plus où construire certaines infrastructures ou installer certaines usines, certaines entreprises.
Je pense qu'il est possible de trouver un chemin - une trace - pour atteindre en même temps ces deux objectifs, qui ne sont pas incompatibles. Nous allons y travailler avec vous, avec l'Assemblée nationale et avec les élus locaux.
Je remercie sincèrement à mon tour les sénateurs Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier de leur proposition de loi, que nous allons soutenir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.) Son examen sera l'occasion d'introduire des ajustements, des assouplissements, toujours avec pragmatisme, dans l'application du ZAN. Dans ce travail, il faudra aussi nous assurer, monsieur le président Darnaud, que l'objectif puisse toujours être atteint, comme je vous l'ai dit, mais nous devons aussi construire le ZAN en partant davantage de la réalité des besoins et du dialogue avec chaque territoire. (Marques d'ironie sur les travées du groupe GEST.)
En attendant, nous allons prendre, sous l'impulsion de Catherine Vautrin, plusieurs dispositions pour apporter de la souplesse, avant même le vote de ce texte, là où c'est possible et nécessaire. Nous inviterons les préfets à se saisir de la circulaire dite des 20 %, afin de donner des marges supplémentaires aux collectivités territoriales qui en ont besoin immédiatement. (M. Guillaume Gontard s'exclame.)
De plus, nous allons modifier les décrets pour que les jardins pavillonnaires ne soient plus considérés comme des surfaces artificialisées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous prendrons aussi en compte les nouveaux projets au titre des projets d'envergure nationale et européenne. Je veillerai à ce que les préfets soient informés de notre volonté de changer bientôt la loi pour que les décisions futures soient prises en bonne intelligence avec les maires et en préfigurant, en quelque sorte, ce qui sera dans la loi.
M. Guy Benarroche. Sera-t-elle rétroactive ?
M. Michel Barnier, Premier ministre. Je me réserve aussi, monsieur le président Darnaud, la possibilité de prendre toutes les mesures réglementaires nécessaires pour atteindre de manière intelligente, ambitieuse et souple cet objectif de protection de l'environnement.
Enfin, comme vous l'avez suggéré, nous pourrions peut-être changer le nom du dispositif : ce serait la trace du Sénat ! Ce changement serait le symbole d'un nouvel état d'esprit, d'une nouvelle confiance partagée en faveur de ce double objectif : construire, aménager, mais aussi faire attention à l'environnement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour la réplique.
M. Mathieu Darnaud. Suivre cette trace, c'est redonner aux maires des capacités d'agir. C'est tout simplement redonner à la France communale du souffle : elle en a grand besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et INDEP.)
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