Sécurité
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité ».
Orateurs inscrits
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la commission des finances. - La mission « Sécurité » constitue, depuis la mise en oeuvre de la Lolf, l'un des exemples les plus aboutis de travail interministériel. La création des groupes d'intervention régionaux (GIR), composés à parité de policiers et de gendarmes, représente probablement l'une des réussites les plus probantes sur le terrain. Les soutiens croisés police-gendarmerie sont de plus en plus fréquents, ainsi que la passation de marchés publics communs. Les progrès réalisés dans cette voie respectent les spécificités des deux forces.
La mission « Sécurité » est dotée de 15,9 milliards d'euros de crédits de paiement, en augmentation de 1,8 %. Les dépenses en personnel en représentent l'essentiel, avec 13,4 milliards d'euros, soit 84,6 % des crédits de paiement. Toutefois, les moyens supplémentaires ne se conçoivent que dans un souci de performance et d'efficacité. La baisse de la délinquance constitue certainement le premier objectif de la mission. En 2007, elle régresse de 1 à 2 %, en zone police comme en gendarmerie. Le nombre de crimes et délits a diminué de 50 250 entre 2005 et 2006, pour atteindre 3 725 588 faits constatés. Parallèlement, le taux d'élucidation a enregistré une progression sensible en 2006 pour atteindre 31,6 % en zone police et 41,4 % en gendarmerie.
Les récents épisodes de violences urbaines à Villiers-le-Bel rappellent toutefois l'importance d'une réflexion pragmatique sur la police de proximité. La police, qui s'est tenue longtemps à une vision trop dogmatique, a dû s'adapter pour mieux répondre aux attentes des populations et des élus, et surtout des maires. L'expérience a démontré que la police ne peut se confondre avec l'animation sociale ni se réduire à un îlotage passif, comme ce fut le cas jusqu'en 2002.
Le coût en personnel des escortes et des gardes de détenus par la police et la gendarmerie doit, cette année encore, être signalé. Celles-ci devraient être assurées par l'administration pénitentiaire ou lui être facturées.
La dimension internationale, via le Service de coopération technique internationale de police (SCTIP), est essentielle. Le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent un atout à valoriser dans le contexte international. La coopération dans ce domaine permet souvent de traiter certains problèmes en amont. Elle vise également à inciter des pays dont les méthodes de maintien de l'ordre sont d'une autre époque à suivre les pratiques des démocraties, ce qui améliore leur image et leurs relations internationales.
Le programme « Police nationale » comporte 8,4 milliards d'euros en crédits de paiement, en hausse de 2,3 %. La création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement s'est accompagnée du transfert des crédits relatifs à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière et à la rétention administrative vers le programme « Immigration et asile » de la nouvelle mission « Immigration, asile et intégration », dont les crédits sont de 65,4 millions d'euros. Le plafond d'emploi de ce programme est de 148 565 équivalents temps plein travaillé en 2008, soit une réduction de 1 253 emplois par rapport à 2007. Au regard des effectifs, le taux de réalisation de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (Lopsi) est satisfaisant. Il atteint 95,4 %, avec 6 200 emplois créés, dont 4 200 de fonctionnaires actifs. On constate une sur-réalisation de la Lopsi de 163 % pour les crédits de fonctionnement et d'équipement, et une sous-réalisation pour les dépenses d'investissement, pour lesquelles le taux de réalisation est de 80 %. Une enveloppe de 18,8 millions d'euros vise à couvrir les aspects indemnitaires de la réforme des corps et des carrières de la police nationale, et notamment à accompagner le passage des officiers à un régime de cadre. L'apurement du stock des heures supplémentaires, évalué à 5,2 millions d'heures, s'intègre dans la politique définie par le Président de la République. 47 % des officiers ont opté pour leur paiement, dans une limite de 100 heures en 2007 et 2008, plutôt que pour une récupération du temps de travail.
L'année 2008 sera marquée par la fusion de la Direction de la surveillance du territoire (DST) et de la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG) dans une Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Cette rationalisation est souhaitée depuis longtemps.
On ne peut qu'approuver le développement de la vidéosurveillance envisagé par le ministère de l'intérieur. Cette technologie, qui doit naturellement être déployée dans le respect des droits et des libertés individuelles, a joué un rôle majeur dans l'élucidation des attentats commis à Londres en 2005 et dans la réactivité des forces de police anglaises face à de tels risques.
Le programme « Gendarmerie nationale » comporte 7,4 milliards d'euros de crédits de paiement, en léger recul de 0,58 %. Le plafond d'emploi s'élève à 101 136 équivalents temps plein travaillé, en diminution de 965 emplois par rapport à 2007, conformément à la politique générale de maîtrise des dépenses de l'État. Si l'on s'interroge parfois sur le maintien du statut militaire de la gendarmerie, celui-ci n'est pas remis en cause et semble préserver son attractivité. Un équilibre relativement satisfaisant a été atteint entre les statuts de la police et de la gendarmerie, comme en témoigne le retour dans leur corps d'origine de six gendarmes sur les sept partis l'année dernière dans la police nationale.
Pour autant, il conviendra d'être vigilant sur la situation morale des gendarmes, en dégradation sensible en dépit des efforts budgétaires réalisés au cours des dernières années, ce qui s'explique certainement par leur disponibilité permanente.
Des logements de qualité contribuent à atténuer ces tensions.
La Lopsi a permis une remise à niveau, avec un taux de réalisation de 86,4 % en matière d'emplois. Le fonctionnement courant -dépenses d'informatique, uniformes, armes- a toutefois été privilégié au détriment de l'investissement : il a notamment fallu apurer des dettes relatives au paiement des loyers des casernes.
Le parc domanial particulièrement vétuste de la gendarmerie doit être remis à niveau. Le développement et la modernisation du parc sont financés par des partenariats public-privé, via des opérations sur bail emphytéotique administratif, ce qui induit toutefois un surcoût lié à la prime de l'opérateur privé.
Enfin, l'exercice des missions militaires hors du territoire pèse sur la disponibilité de la gendarmerie mobile : au 1er juillet 2007, cinq cent deux gendarmes mobiles étaient déployés en opérations extérieures, dont un escadron au Kosovo, pour un coût de 7,8 millions, et deux en République de Côte-d'Ivoire, pour 6,6 millions.
Considérant ce bilan plutôt satisfaisant, la commission des finances propose d'adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre).
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois. - Ce budget de transition entre la Lopsi et la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite Loppsi 2, est sans doute le dernier budget de la gendarmerie nationale à être placé sous la responsabilité du ministre de la défense, le décret du 31 mai 2007 ayant confié conjointement aux ministres de l'intérieur et de la défense la définition et le suivi de ses moyens budgétaires.
Le budget pour 2008 est aussi un budget de consolidation de la Lopsi, dont il prolonge les grandes orientations, comme la réforme des corps et carrières ou le projet Acropol. Dans un contexte budgétaire contraint, il donne à la police et à la gendarmerie les moyens d'assumer leurs missions tout en les invitant à faire mieux à moyens quasi constants.
La mission « Sécurité » connaît une augmentation modérée de 1,8 %, l'essentiel de la hausse portant sur le programme « police nationale », avec toutefois une baisse de 1 253 emplois équivalent temps plein par rapport à 2007, portant essentiellement sur les adjoints de sécurité, catégorie qui a du mal à recruter. Madame le ministre, comptez-vous rendre ce dispositif plus attractif ? Combien d'adjoints de sécurité peut-on supprimer sans gêner le fonctionnement des services ?
La révision générale des politiques publiques devrait offrir de nouvelles pistes de réforme. Toutefois, il ne faut pas laisser les personnels trop longtemps dans l'incertitude, car les rumeurs permanentes sont déstabilisantes.
Ce budget, ainsi que les réformes annoncées dans le cadre de la future Loppsi 2, permettront de poursuivre la baisse de la délinquance pour la sixième année consécutive. Avec 3 725 588 faits constatés, 2006 marque un recul de 1,33 % ; au premier semestre 2007, la baisse atteint 2,53 %. En outre, la tendance s'infléchit pour les crimes et délits contre les personnes. Au seuil de la future LOPPSI 2, quels sont les nouveaux défis ?
Les effectifs de la police et de la gendarmerie sont satisfaisants, et doivent désormais être employés au mieux. Outre le développement de la police scientifique et technique, il faut recentrer les policiers et les gendarmes sur le coeur des missions de sécurité, en recrutant plus de personnels administratifs et en réduisant le volume des tâches indues. Appliquons le principe prescripteur-payeur. La rémunération d'un policier actif occupant un emploi administratif, à grade équivalent, est 30 % supérieure à celle d'un administratif... Le budget pour 2008 prévoit sept cents recrutements de personnels administratifs, mais qui incluent des psychologues ou des infirmières. Quelles sont les prévisions de recrutement de personnels purement administratifs ? Combien de policiers actifs pourraient être redéployés sur le terrain ?
Depuis 2002, le métier des CRS et des gendarmes mobiles a beaucoup évolué, à tel point que le maintien de l'ordre public représente moins de la moitié de l'activité des CRS. Faut-il réduire les forces mobiles, renforcer le rapprochement entre CRS et gendarmes mobiles ? Pour de petites manifestations sur la voie publique, le nombre d'hommes déployés est souvent excessif. La création d'une vingtaine de compagnies d'intervention à compétence zonale pourrait aboutir à prélever des personnels des CRS. Comment cette réforme sera-t-elle mise en oeuvre ? Quelles pistes de rapprochement sont envisagées, notamment pour mutualiser les matériels ? Enfin, comment comptez-vous maîtriser les coûts d'hébergement des forces mobiles ?
La commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean Faure, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. - Le budget de la gendarmerie pour 2008 est marqué par une légère diminution des autorisations d'engagement ; les dépenses de personnel et de fonctionnement progressent légèrement, tandis que les crédits d'investissement reculent de 30 %. Les objectifs de la Lopsi ne seront que partiellement atteints, avec un taux de réalisation inférieur à celui de la police nationale. Les 728 millions de crédits de paiement alloués auront permis de réaliser plusieurs programmes d'investissement, comme l'achat de nouvelles tenues et de pistolets automatiques ou le remplacement des hélicoptères, mais l'acquisition de nouveaux véhicules blindés est une nouvelle fois reportée, de même que l'achat de fusils mitrailleurs et de caméras thermiques.
En matière de rémunération, le Haut comité d'évaluation de la condition militaire a relevé un décalage récurrent et une différence de traitement entre gendarmes et policiers, pourtant amenés à faire le même métier. Enfin, l'état général des casernes de la gendarmerie demeure préoccupant, et pèse sur les conditions de travail et la qualité de vie des militaires, et donc sur leur moral. Dans ce contexte, la proposition de M. Mongin de supprimer huit à dix mille emplois de policiers et de gendarmes et de dissoudre de la moitié des brigades de gendarmerie a provoqué un certain émoi. Que pensez-vous de ces suggestions, madame le ministre ?
La police et la gendarmerie ont développé de nombreuses synergies, notamment via les groupes d'intervention régionaux. Depuis 2002, la gendarmerie est placée auprès du ministre de l'intérieur pour l'exercice des missions de sécurité intérieure et, depuis mai 2007, la définition de l'utilisation des moyens budgétaires relève de la responsabilité conjointe des ministères de la défense et de l'intérieur. La mutualisation des moyens doit toutefois être améliorée. Alors que la gendarmerie dispose du réseau de radiocommunication Rubis, la police nationale développe son propre réseau Acropol, or ces deux réseaux, qui ont coûté environ 600 millions, ne sont pas directement interopérables...
Ce rapprochement ne signifie pas qu'il faille fusionner les deux forces, auxquelles nous sommes très attachés. En sa qualité de force de police à statut militaire, la gendarmerie apporte ainsi une contribution significative aux Opex, notamment dans le contact avec les populations.
Dans son intervention du 29 novembre devant les policiers et les gendarmes, le Président de la République a fixé de nouvelles orientations en matière de sécurité intérieure. Il a notamment annoncé le rattachement prochain de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, tout en conservant son statut militaire, ce qui a été apprécié. Une loi relative à la gendarmerie devrait être présentée au Parlement avant la fin du premier semestre 2008. Compte tenu de l'importance de la gendarmerie, qui assure la sécurité de 50 % de la population et de 95 % du territoire national, la commission des affaires étrangères et de la défense a décidé de constituer un groupe de travail pour réfléchir à l'organisation et aux missions de cette arme. Ce groupe de travail, que j'ai l'honneur de présider, a commencé à procéder à des auditions et il devrait effectuer prochainement plusieurs déplacements auprès des brigades de gendarmerie, l'objectif étant de présenter un rapport d'information avant la fin du premier semestre afin que nos propositions puissent vous être utiles dans la préparation du texte sur la gendarmerie.
Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements à droite)
M. André Rouvière. - Dans un temps trop court, je vais évoquer les problèmes de sécurité ainsi que la situation de la gendarmerie.
Vous affirmez, madame la ministre, que l'insécurité régresse : ce n'est pas le sentiment de la population. Le décalage s'accroit entre vos statistiques, votre satisfaction, et le vécu dans les banlieues et ailleurs. Malgré les affirmations du Président de la République, le tout répressif est un échec. Pire, il forge le sentiment de haine vis-à-vis des forces de l'ordre qui, désormais, subissent des tirs d'armes à feu, escalade que je condamne...
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - C'est déjà ça...
M. André Rouvière. - ...mais que je constate. Aujourd'hui, la répression ne suffit pas à assurer la sécurité. Il nous faut donc rétablir le lien de confiance entre les forces de l'ordre et les jeunes.
Depuis la suppression du service militaire, il n'y a plus de lieu de formation du citoyen. Il serait donc indispensable de mettre en place un service civique obligatoire, ce qui n'exclut pas la présence permanente des forces de l'ordre sur le terrain. Une relation de confiance complèterait utilement les actions répressives.
Les promesses de M. Sarkozy et ce budget ne suffiront pas à gommer le réel malaise de la gendarmerie. Certes, je me réjouis que la commission des affaires étrangères ait créé un groupe de travail sur la gendarmerie dont le budget est en baisse alors que les prix des carburants et des logements augmente et que le matériel vétuste ne peut être remplacé. La Lopsi, adoptée en 2002, ne sera pas respectée.
A ce budget insuffisant s'ajoutent des interrogations sur le rapprochement entre la gendarmerie et la police car il manque de clarté et de précision. Il n'y aura pas de fusion, mais où s'arrêtera le rapprochement ? S'il reste partiel, il sera source de difficultés en multipliant les comparaisons entre la situation des uns et des autres. Pourquoi ne pas avoir harmonisé le matériel et les équipements tout en conservant la situation actuelle ? La place de la gendarmerie ne sera pas facile à trouver tant vis-à-vis des armées que de la police. Nous souhaiterions donc avoir plus de précisions sur ce rapprochement programmé. J'espère que vous n'aurez pas les mêmes réticences que pour le bilan d'étape des communautés de brigades que je vous ai demandé à plusieurs reprises depuis plus de deux ans. J'ai enfin obtenu hier le rapport d'octobre 2007 mais ce n'était pas celui que je vous demandais. C'est d'ailleurs votre successeur qui l'a transmis à la commission. Je ne comprends pas ce refus d'informer le Parlement. Si le Gouvernement cache la vérité aux parlementaires, comment leur demander de lui accorder leur confiance ?
Pour cette raison, et pour d'autres, nous ne voterons pas cette mission. (Applaudissements à gauche)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Il fallait commencer par là plutôt que de dire des contrevérités !
M. Hugues Portelli. - Le budget de la sécurité s'accroit de 1,8 %, ce dont nous nous félicitons. La mission « sécurité » comprend les programmes « police nationale » dont les crédits augmentent de 2,3 % et « gendarmerie nationale » dont les crédits sont en léger recul de 0,58 %.
L'importante hausse du budget de la justice lui permet de rattraper un retard historique et de lui donner une efficacité sans laquelle celle de la police serait inutile. Il est en effet primordial que tous les maillons de la chaîne pénale fonctionnent correctement ce qui passe par plus de moyens pour les tribunaux, les magistrats et les greffes.
Ce budget doit également permettre de réaliser vos quatre grandes priorités, madame le ministre : consolidation de la baisse de la délinquance générale, intensification de la lutte contre le terrorisme, accroissement de la sécurité routière, lutte contre le travail illégal et l'immigration clandestine.
L'effort constant entrepris dans la lutte contre la délinquance a porté ses fruits car elle a encore reculé. En 2006, le taux d'élucidation global a progressé de 31,61 % en zone police et de 41,47 % en zone gendarmerie. Ces progrès ne doivent pas masquer les difficultés persistantes, notamment l'accroissement des violences contre les personnes ou des dégradations contre les biens en zones urbaines, qui perturbent énormément la tranquillité publique et nourrissent le sentiment d'insécurité des habitants des périphéries urbaines.
En 2008, vous regrouperez les forces de police et de gendarmerie. Cette mutualisation des services ne peut être que bénéfique. En outre, dans la perspective de la présidence française de l'Union européenne, la gendarmerie française s'est fortement impliquée dans la collaboration policière européenne et internationale avec, notamment, la coopération Schengen, la coopération transfrontalière et l'Office européen de police Europol. A l'aube d'une éventuelle communautarisation de la politique de sécurité, la gendarmerie nationale pourrait être une référence et nous tenons à lui rendre hommage.
S'agissant du cadre de la révision générale des politiques publiques annoncée par le Chef de l'État, ce budget respecte l'esprit de la Lopsi tout en maîtrisant les dépenses publiques.
Les crédits affectés au personnel représentent 84,6 % du total, ce qui traduit l'attention que le Gouvernement accorde à ses services. En ce qui concerne la qualification des personnels et la récompense de la performance individuelle et collective, le Gouvernement respecte la quatrième tranche du protocole du 17 juin 2004 relatif aux corps et carrières de la police. Afin de permettre aux policiers et aux gendarmes de se recentrer sur la sécurité et le maintien de l'ordre, ce budget prévoit d'augmenter le nombre de personnels administratifs chargés des tâches de soutien technique et de gestion quotidienne.
La sécurité est un enjeu fondamental. Elle n'est pas une idéologie, comme ont pu le dire des irresponsables politiques. Le Président de la République a rappelé le 29 novembre que « la sécurité a été de tout temps un enjeu fondamental pour l'équilibre de nos sociétés » et qu'il faut la placer « au premier rang des préoccupations de rétablissement de l'autorité de l'État » afin de garantir le respect des principes républicains et de rétablir la paix sociale. L'insécurité est un drame qui touche d'ailleurs davantage les Français les plus défavorisés, ceux qui vivent dans les quartiers populaires et qui sont souvent condamnés à y rester.
Dans certaines agglomérations, et notamment dans le Val-d'Oise, la situation est parfois explosive. Pour autant, rien n'est irréversible. Si la fermeté la plus totale est impérative en matière d'ordre public, car tirer sur des policiers, agresser des personnes vulnérables, ou encore incendier des véhicules ou des bâtiments publics, ne saurait être toléré et encore moins excusé, une réponse plus adaptée aux réalités du terrain doit être apportée. Ainsi, pourquoi ne pas revoir les conditions d'attribution de la prime de fidélisation, aujourd'hui saupoudrée dans les différents services ? S'il leur est difficile d'habiter dans une ville où ils exercent leur métier en raison des pressions auxquelles ils sont souvent confrontés, ne pourrait-on pas inciter les policiers, par des constructions de bâtiments plus importantes et l'attribution de places de crèche supplémentaires, à résider au niveau de la circonscription ou de l'intercommunalité dans le ressort de laquelle ils travaillent ?
De même, l'effort demandé à tous les fonctionnaires en matière de retraite ou de durée du travail effectif doit concerner tous les corps de métier, y compris la police et la gendarmerie. Il serait hautement souhaitable que la durée hebdomadaire du travail y soit appliquée strictement. Les sous-effectifs structurels dans de nombreux commissariats sont souvent aggravés par un absentéisme légal dont les motifs sont les plus divers, à commencer par les décharges syndicales. Il est d'ailleurs regrettable que les polices municipales aient souvent hérité de ce travers qui pèse lourdement sur la qualité du service public de sécurité, notamment en fin de semaine.
Le budget de la mission « Sécurité » est conforme aux engagements pris par le Chef de l'État, son Gouvernement et sa majorité. Le groupe UMP le votera avec détermination et il vous fait confiance pour rendre encore plus efficace le travail de la police et de la gendarmerie et faire respecter l'ordre républicain sur l'ensemble du territoire national. (Applaudissements à droite)
Mme Éliane Assassi. - Cette mission traduit bien la politique du tout sécuritaire, éloignée de toute réflexion sur les causes et de toute prévention de la délinquance ! L'actualité démontre que cette politique n'est pas efficace : combien faudra-t-il de blessés et de morts, à Villiers-le-Bel comme lors des émeutes d'il y a deux ans, pour que vous le reconnaissiez ? (Exclamations indignées à droite)
M. Henri de Raincourt. - Un peu de retenue !
Mme Éliane Assassi. - Malgré toutes les promesses faites en 2005, rien n'a changé dans les quartiers « sensibles » : en matière de sécurité, d'éducation, de transports, la situation des populations est la même qu'alors, le taux de chômage y est toujours deux fois plus élevé que la moyenne. Tous les voyants sont au rouge : précarité, chômage, misère, violence, économie parallèle...
Après le plan Borloo qui tient toujours du mirage, on nous annonce un « plan banlieues » requalifié de « plan anti-glandouille » par la secrétaire d'État, qui, à défaut de parler depuis les événements à Villiers-le-Bel, veut classer les quartiers populaires avec des petites pastilles de couleurs...
Les caisses de l'État sont vides : où prendre l'argent, sinon là où il est ? Or, la dotation de solidarité urbaine perd 30 millions dans cette loi de finances, quand M. Borloo annonçait une hausse de 120 millions par an jusqu'en 2009 !
Nous avons besoin de plus d'État, pour plus de régulation, le Gouvernement va dans le sens inverse. Votre prédécesseur, madame la ministre, a passé cinq ans à ressasser les mêmes slogans sécuritaires, pour quels résultats ? Il a fait voter des lois toujours plus répressives, il a provoqué les jeunes des cités, il a multiplié les cadeaux fiscaux à ses amis du grand patronat, au détriment des caisses de l'État, mais a-t-il fait autre chose ? La droite récolte aujourd'hui ce qu'elle a semé : accentuation de la fracture sociale, multiplication des lois répressives, hausse des injustices, stigmatisation des jeunes, en particulier ceux issus de l'immigration et vivant dans les cités, discriminations à leur égard, provocations en tout genre !
Alors que M. Sarkozy s'est toujours vanté de faire reculer la délinquance, l'Office national de la délinquance montre que les statistiques du ministère sont imparfaites et qu'on ne tient aucun compte des violences au sein de la famille.
Malgré l'échec de l'arsenal législatif installé depuis 2002, nous allons bientôt légiférer encore sur la rétention de sûreté, comme s'il n'y avait pas d'autre solution que l'enfermement à vie ! Vous devez l'admettre : vous avez échoué contre la délinquance et la récidive !
Au lendemain des émeutes de 2005, tout le monde, y compris à l'UMP, était pour rétablir la police de proximité, vous-même, madame la ministre, parliez d'une police « localisée » ou « territorialisée ». Rien n'est venu depuis, les relations entre la population et la police se sont encore détériorées ! Nous déplorons la logique de confrontation entre la police et les jeunes, il est temps de passer d'une police d'ordre au service de l'État, à une police au service du citoyen, car elle est un service public qui garantit la liberté de chaque citoyen !
Je suis profondément indignée de la prime offerte par la police pour les témoignages dans l'affaire de Villiers-le-Bel. Le témoignage sous X est instauré depuis 2002, pourquoi ajouter une prime à la délation, qui risque de mettre de l'huile sur le feu et de multiplier les témoignages « bidons » ? Le respect de règles déontologiques est dans l'intérêt du citoyen et des policiers !
Vous prévoyez de redéployer des effectifs de CRS dans des compagnies zonales de sécurité, où est la nouveauté ? Quant à la vidéo surveillance ou aux drones, ils ne sauraient remplacer la présence humaine ! Vous voulez tripler le nombre de caméras sur la voie publique, vous pourriez commencer par évaluer leur efficacité !
M. Éric Doligé. - Elles fonctionnent très bien !
Mme Éliane Assassi. - Le programme d'installation coûterait 5 à 6 milliards, l'État prélèverait 800 000 euros au Fonds interministériel de prévention de la délinquance : où allez-vous trouver les financements ?
Mme Gisèle Printz. - Les communes !
Mme Éliane Assassi. - Madame la ministre, les discours sécuritaires ne suffisent plus, la répression est inefficace sur des jeunes qui n'ont plus rien à perdre. L'État doit plutôt donner des signes d'espoir à cette jeunesse dont l'avenir est sombre, proposer des solutions pour l'éducation, la formation, le travail. « Travailler plus pour gagner plus » ? Mais ils n'ont pas de travail ! Il faut rétablir un climat de confiance et de justice !
Le malaise est profond au sein même de la police et de la gendarmerie : heures supplémentaires non payées, problème de passage au statut de cadre des officiers de police; hausse de la charge de travail, baisse du niveau de vie, conditions de casernement difficiles... S'y ajoute la réticence exprimée vis-à-vis du rôle que le Gouvernement fait jouer aux forces de l'ordre dans la traque aux étrangers sans papiers !
Quelques mots, enfin, sur les pistolets « Taser », dont vous voulez équiper les policiers municipaux. Aux États-Unis et au Canada, ces armes sont à l'origine de plusieurs dizaines de décès, le comité de l'ONU contre la torture estime que la douleur aiguë provoquée par ces armes, constitue une « forme de torture » ! (Exclamations à droite)
M. Christian Cambon. - Et les balles réelles tirées à Villiers-le-Bel sur les policiers ?
Mme Éliane Assassi. - Ce comité a recommandé de ne pas utiliser de telles armes : madame la ministre, quelle suite comptez-vous donner à une telle recommandation ? (Mêmes mouvements)
Le groupe CRC votera contre ce budget ! (Applaudissements à gauche)
M. Éric Doligé. - Tant mieux ! (Exclamations à gauche)
M. Robert Bret. - La droite est réactionnaire, ce n'est pas d'aujourd'hui !
M. Charles Gautier. - En juin 2002, devenant ministre de l'intérieur, M. Sarkozy nous expliquait combien la gauche avait été laxiste, faible et naïve en matière de sécurité et comment, lui, il résoudrait tout en un temps record avec des méthodes fortes. Devenu Président de la République, il continue d'expliquer aux Français comment il faut agir : la situation, pourtant, est loin d'avoir changé !
Pour 2007, les chiffres établissent une baisse de la délinquance de voie publique de 1,3 %, et une évolution plutôt inquiétante des crimes et délits contre les personnes. La Cour des comptes observe, cependant, que l'état 4001 ne fournit qu'une mesure partielle et hétérogène de la délinquance et que les catégories ne sont pas informées de la même manière par tous les services de police et de gendarmerie.
Chaque année, je dénonce les choix politiques depuis 2002, chaque année la violence dans nos banlieues s'accroît. La semaine dernière, à Villiers-le-Bel, des jeunes gens ont même tiré à balles réelles sur les forces de l'ordre.
Madame la ministre, vous soulignez la nécessité d'investissements, pour doter nos forces de l'ordre d'outils modernes. Les caméras de vidéosurveillance ont certes des qualités, elles sont utiles, mais elles n'empêchent pas le fossé de se creuser entre les habitants de certains quartiers et les forces de l'ordre. Depuis 2002, vous avez brisé net le lien rétabli grâce à la police de proximité. Vous me répondrez encore que la police n'est pas faite pour jouer au foot avec les jeunes de banlieue ! Mais cette réponse vous sert surtout à nier que la police de proximité avait humanisé les liens entre la police et les quartiers, qu'elle avait donné à l'État et à ses représentants, un visage humain !
Les nouvelles répartitions des effectifs de police ne privilégient pas les quartiers qui en ont le plus besoin. Au contraire ! Lorsque s'y produit un nouvel événement, vous y envoyez les CRS, qui n'en connaissent ni le terrain ni les habitants. De cette manière, vous creusez encore le fossé entre les plus faibles et l'État. L'escalade des violences depuis 2002 montre bien l'échec de votre politique de sécurité, et même le danger que cette politique fait courir : aux quartiers riches, les rondes policières nocturnes ; aux pauvres, les CRS.
Loin de moi l'idée de jeter le discrédit sur les compagnies républicaines de sécurité ou les gendarmes mobiles. Ils remplissent toujours de façon efficace et courageuse leur mission de maintien de l'ordre public. Mais la réorientation de leurs missions vers la lutte contre la délinquance et contre l'insécurité semble douteuse. C'est une mesure de gestion des effectifs destinée à réaliser des économies d'échelle. Ces forces mobiles sont devenues des forces d'appoint pérennes, et non plus ponctuelles, aux unités de base de la police et de la gendarmerie. La dernière expérience est un échec. À Villiers-le-Bel, ils ont fait l'objet d'un véritable traquenard et ont dû se replier pour protéger leur matériel contre le vol !
Au vu des résultats et de la tension permanente qui règne dans les quartiers difficiles, le débat sur le format et la formation des forces mobiles apparaît d'actualité : l'intervention des forces mobiles dans ces conditions ne poserait-elle pas plus de problèmes qu'elle n'est censée en résoudre ?
Ces violences sont le résultat des inégalités qui s'accroissent, et vous refusez d'y répondre. Vous préférez dépenser en investissement plutôt qu'en présence humaine et supprimez 1 253 emplois de policier. Et la frénésie législative continue. Après les lois contre la récidive, l'immigration et pour la prévention de la délinquance, le Gouvernement annonce encore un projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale. Toutes mesures qui ne sont que d'affichage. Certaines ne sont même pas effectives, faute de décret d'application. Vous annoncez une loi post-Lopsi, alors même que les objectifs de celle-ci ne sont pas atteints.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - C'est faux.
M. Charles Gautier. - Vous promettez la mise en place de nouvelles technologies permettant de « démultiplier l'efficacité de la présence sur la voie publique, de réduire les délais moyens d'intervention ». Permettez-moi d'être sceptique. Je ne conteste pas l'efficacité de la vidéosurveillance en termes de prévention de la délinquance ou d'élucidation des actes commis, mais il faut quelqu'un pour regarder les écrans de contrôle !
Les objectifs de la Lopsi ne sont pas atteints non plus en ce qui concerne les tâches indues. Policiers et gendarmes continuent d'effectuer des tâches d'assistance pénitentiaire, d'éloignement des personnes en situation irrégulière, ou d'administration.
Vous l'aurez compris, nous sommes très fermement opposés à vos choix politiques et budgétaires. Les faits sont d'ailleurs là pour nous conforter dans nos propos. (Applaudissements à gauche)
M. Marc Laménie. - Je rends hommage aux policiers et gendarmes, qui tous les jours, assurent la tranquillité publique et la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements à droite) Comme vous le soulignez avec force, madame la ministre, « la sécurité est la première préoccupation des Français, elle est un droit de l'Homme, qui conditionne tous les autres ».
Votre budget montre que la sécurité reste une priorité de l'action gouvernementale puisque près de 16 milliards sont destinés à la mission « Sécurité ». La répartition équilibrée entre les programmes « police nationale » et « gendarmerie nationale » montre votre volonté de ne pas faire de différences entre ces deux corps. La création, en 2002, des groupes d'intervention régionaux (GIR) prouve que policiers et gendarmes travaillent en partenariat étroit. Le bilan qui peut en être tiré est tout à fait positif.
Ce budget est le premier après l'exécution de la Lopsi du 29 août 2002. On ne peut que se réjouir de son bilan très satisfaisant. Elle a refondé les principes régissant l'organisation de la sécurité intérieure sur le territoire national. Les objectifs fixés ont été quasiment atteints, les taux de réalisation des créations d'emplois sont de l'ordre de 95,4 % pour la police nationale et de 86,4 % dans la gendarmerie. Les moyens alloués à la sécurité se sont concrétisés sur le terrain par une réussite incontestable sur le plan de la lutte contre la délinquance. Les indicateurs de performance font état d'une baisse sensible de toutes les formes de délinquance, d'une amélioration des taux d'élucidation, et d'une diminution du nombre de blessés et de tués sur la route. Entre 2002 et 2006, la délinquance a diminué de 9,6 %.
Ces chiffres ne sont pas le fruit du hasard mais bel et bien le résultat de la politique efficace et courageuse engagée par le précédent gouvernement et qui se poursuit grâce à votre ferme détermination, madame la ministre. Depuis votre prise de fonctions, ce mouvement s'est, en effet, poursuivi et même amplifié. En septembre 2007, les faits constatés par les services de police et de gendarmerie ont baissé d'environ 7,65 % par rapport à ceux de septembre 2006. Le taux d'élucidation était de 36,2 % en septembre 2007, soit une hausse de près de 10 points en cinq ans.
Ce budget doit consolider les résultats de la Lopsi I et amorcer les évolutions envisagées dans le cadre de la Loppsi II. C'est donc un budget intermédiaire. Les objectifs quantitatifs ayant été remplis, il est légitime qu'ils cèdent désormais place à des objectifs plus qualitatifs dans le cadre de la Loppsi II. Nous nous réjouissons de la présentation prochaine de cette nouvelle loi d'orientation et de programmation qui mettra l'accent sur la modernisation, la mutualisation et le management.
Ce budget est bon car il vous donne les moyens de mettre en oeuvre l'ambition affichée lors de votre prise de fonctions, madame la ministre : doter la France d'un grand ministère moderne de la sécurité intérieure. Un milliard ira à la modernisation de nos systèmes de sécurité, soit un doublement des moyens actuels. L'UMP se félicite du recours intensif aux nouvelles technologies qui renforcera l'efficacité des forces de sécurité face aux performances croissantes des criminels. La délinquance change de nature et les forces de police et de gendarmerie doivent s'adapter à ses formes nouvelles, voire anticiper les défis.
Nous nous félicitons du développement accéléré de la vidéosurveillance qui apporte une pierre supplémentaire à un édifice majeur pour la sécurité de nos concitoyens. Son efficacité pour améliorer de façon significative la sécurité quotidienne n'est plus à démontrer. Des expériences étrangères l'ont largement prouvé, notamment au Royaume-Uni. Des expériences locales en France le montrent quotidiennement. L'opinion publique y est prête, d'autant plus que de nombreux progrès ont été accomplis pour protéger la vie privée. C'est pourquoi nous approuvons votre objectif de tripler en deux ans le nombre de caméras de vidéosurveillance sur la voie publique.
Nous nous félicitons également des efforts engagés pour poursuivre la modernisation de la police technique et scientifique qui constitue l'une de vos priorités. Les fichiers automatisés des empreintes digitales et des empreintes génétiques ont largement prouvé leur utilité. Ils doivent être adaptés à l'accroissement considérable du volume de données.
Autre ambition de ce budget : le regroupement des moyens humains qui agissent pour la protection des Français et le renforcement des coopérations entre la police et la gendarmerie. Le travail en commun de la police et de la gendarmerie nationale doit s'approfondir afin de mieux s'adapter aux nouveaux enjeux de la délinquance. Pour des raisons d'efficacité mais aussi de bonne utilisation de l'argent public, des synergies doivent être recherchées, dans le respect des spécificités de ces deux corps.
Les nombreuses rumeurs qui courent sur la fermeture de brigades de gendarmerie, pourtant organisées en communautés de brigades, sèment l'inquiétude parmi les gendarmes et les élus. Sont-elles fondées et quelles sont vos propositions pour une répartition plus claire des tâches de la gendarmerie et de la police ?
Votre budget est un bon budget, attentif à la formation, au déroulement des carrières et au recentrage sur les tâches qui ne peuvent être assurées que par des hommes en uniforme. Leur dévouement et leur courage assurent notre sécurité. Reste que trop d'entre eux sont affectés à des tâches administratives qui les détournent de leur vraie mission alors que les récents événements dans le Val-d'Oise montrent qu'il faut renforcer leur présence sur le terrain. S'il leur revient d'interpeller et de mettre les délinquants à la disposition de la justice, ils ont également une mission de prévention.
M. André Rouvière. - Très bien !
M. Marc Laménie. - Le groupe UMP votera les crédits de la mission sécurité. (Applaudissements sur les bancs de l'UMP)
M. Philippe Madrelle. - Le budget de la gendarmerie n'échappe pas à la règle d'une forte contrainte. Il recherche un équilibre entre deux priorités, le maintien de l'effort pour la sécurité et la réduction du déficit budgétaire. Hélas !, la réalité est toute autre et nous sommes en pleine année de transition budgétaire entre une Lopsi qui s'achève et une autre qui se prépare, si bien que les autorisations d'engagement régressent de 2,52 % et les crédits de paiement de 0,58 %. Il n'y a pas de quoi pavoiser, d'autant que les effectifs diminuent car les 475 emplois prévus par la Lopsi sont contrebalancés par autant de départs en retraite non remplacés.
L'éditorialiste et philosophe Jean-Claude Gillebaud l'a souligné, « une société qui croit pouvoir régler les problèmes en évacuant l'humain, devient folle ». L'assassinat récent d'une jeune femme dans un train en plein jour en apporte une tragique confirmation. Les concours aux collectivités diminuent...
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. - Ce n'est pas ce budget !
M. Philippe Madrelle. - Je persiste à souhaiter avec André Rouvière la création d'une mission d'information sur le malaise de la gendarmerie car cela intéresse tous les élus. Les gendarmes ne peuvent accepter le décalage croissant avec la police et l'affaire ne tient pas seulement à la grille indiciaire : ils se demandent comment assurer leurs missions à l'avenir.
Après les déclarations de M. Sarkozy sur le projet de rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, nous nous interrogeons sur la possible coexistence au sein d'une même force de personnel sous deux statuts différents. Les gendarmes sont attachés au leur, sera-t--il préservé ? La mutualisation des moyens risque de faire disparaître leur singularité. Si vous cherchez une force de sécurité de proximité, vous l'avez déjà, et c'est la gendarmerie. Il ne faudrait donc pas que de mutualisation en regroupements, on déshabille Pierre pour habiller Paul.
Le redéploiement annoncé ne prélude-t-il pas à des fermetures de gendarmeries et n'êtes-vous pas plus à la recherche d'économie que d'une amélioration de la sécurité ?
Je veux rendre hommage à ceux qui accomplissent sur le terrain des missions chaque jour plus dangereuses. Ce budget n'est pas à la hauteur du malaise qui s'exprime et le groupe socialiste ne le votera pas. (Applaudissements à gauche)
M. Christian Cambon. - (Marques de satisfaction à droite) Le président de la République a placé au premier rang de ses priorités la restauration de l'autorité de l'État, d'un État qui assure la sécurité de tous et au premier chef des plus faibles. La sécurité est une des valeurs de la République. Police et gendarmerie sont les garants des principes républicains, de la liberté, de la paix publique et de l'ordre. J'en veux pour exemple le comportement admirable des policiers à Villiers-le-Bel. Malgré les violentes agressions -jusqu'à des tirs à balles réelles !-, ils ont fait honneur à la République. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Ce budget établit un équilibre entre le maintien de l'effort entrepris avec la Lopsi et la maîtrise des dépenses et la réduction des déficits. Vous nous avez expliqué vos priorités : accroître la sécurité, réaffirmer l'autorité et l'impartialité de l'État, rétablir le lien de confiance entre les citoyens, l'État et les collectivités locales. Nous approuvons vos objectifs : réduction de la délinquance de 5 %, et de 10 % pour la délinquance de voie publique ; augmentation de 40 % du taux d'élucidation. Celle-ci est une façon de rendre justice aux victimes et un élément fort de dissuasion.
S'il faut tenir ces objectifs ambitieux, nous devons aussi adapter les moyens aux nouveaux comportements, moderniser, mutualiser les moyens et reconnaître le travail accompli. Un milliard sera consacré à la modernisation des outils et au développement de la vidéo-protection. Je me félicite à mon tour de cette décision car l'expérience de ma commune me permet de rassurer Mme Assassi : nous avons eu des résultats spectaculaires tant en taux d'élucidation qu'en termes de dissuasion.
Les GIR généralisent la coopération entre les services de l'État pour frapper plus efficacement au coeur de l'économie souterraine et les trafiquants. Les résultats sont là mais il faut passer à une autre étape en repensant les modes d'organisation en fonction des agglomérations et des plaques urbaines. La seule coopération ne suffit plus en région parisienne car il n'y a pas de frontière entre Paris et la banlieue et que les délinquants sont très mobiles. Il faut donc aboutir à une organisation plus intégrée de Paris et de la petite couronne.
Nous partageons vos propositions pour de meilleures performances mais je souhaite relayer l'inquiétude de nombreux élus sur l'avenir de la gendarmerie : vous savez que beaucoup de rumeurs circulent. Le Val-de-Marne avait un bon maillage de gendarmeries bien intégrées et efficaces ; nous avons dû nous résoudre à en voir partir et l'on comprend mal que de nombreux gendarmes soient affectés à des tâches administratives ou de police judiciaire. Prendrez-vous des initiatives pour les réaffecter au travail de terrain dans lequel ils excellent ?
Police et gendarmerie ont chacune leur histoire, leurs succès et leurs drames, bref ce qui soude une identité. Il n'y aura pas de fusion a assuré le Président de la République mais il faut renforcer les coopérations et développer la mutualisation. Vous avez souhaité poursuivre l'actualisation de la carte territoriale et développer la polyvalence des forces. Quelles seront les grandes lignes de la future loi sur la gendarmerie nationale qui devrait assurer l'unicité de commandement des deux forces ?
Ce budget ambitieux et courageux répond concrètement à la demande de sécurité des Français, demande qu'ils ont exprimée clairement lors des élections présidentielles. Madame la ministre, vous pouvez compter sur le soutien du groupe UMP pour vous accompagner dans les réformes à venir. Nos concitoyens doivent jouir du droit essentiel de vivre en sécurité ! (Applaudissements sur les bancs UMP).
M. Henri de Raincourt. - Quel talent !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je remercie chacun des orateurs d'avoir étudié ce budget dont l'importance n'est plus à démontrer avec les événements survenus à Villiers-le-Bel ces derniers jours. La sécurité, c'est la première des libertés, car elle conditionne toutes les autres libertés. La sécurité, c'est une chaîne : famille, école, collectivités, justice, associations y concourent. Pour autant, madame Assassi, il ne faut pas tout mélanger !
M. Henri de Raincourt. - Juste !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - A chacun sa compétence, à chacun sa responsabilité. La mienne est de lutter contre la délinquance. N'en déplaise à certains, nous avons accompli des progrès très substantiels depuis 2002 (On approuve à droite). Bien sûr, celui ou celle qui vient de se faire voler son sac ou de se faire agresser ne se sent pas davantage en sécurité qu'hier. Mais les résultats sont là : la délinquance, en augmentation entre 1997 et 2002, recule. Ce mouvement se poursuit : de mai à octobre, la délinquance générale a diminué de 3,57 % et celle de voie publique de 7,49 % Le taux d'élucidation, si important pour les victimes, est passé de moins de 25 % en 2001 à 34,3 % en 2006. Je vous annonce qu'il a passé la barre des 39 % en octobre !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis. - Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Ces résultats sont mesurés avec des indicateurs inchangés -j'y insiste. Pour autant, l'action contre la délinquance doit continuer d'être soutenue, car les Français les plus fragiles sont les premières victimes des violences. Ces violences se rappellent trop souvent à nous.
Violences urbaines, avec les événements de Villiers-le-Bel ne sont nullement le fruit de notre politique (On le conteste vivement sur les bancs socialistes.)
Mme Éliane Assassi. - C'est faux !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Nous avons réglé le problème en quarante-huit heures, ce qui n'a pas été le cas des violences urbaines survenues à la Courneuve suite à un décès accidentel et à Pau en 2000...
Mme Éliane Assassi. - Et le social ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - ... ou encore celles de 2001 à la Défense, Nice et Strasbourg où les jeunes, en novembre, avaient organisé une véritable chasse aux policiers ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Éliane Assassi. - Que voulez-vous montrer avec cette énumération... ?
M. Charles Gautier. - ...dans laquelle ne figurent pas les émeutes de 2005 !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Madame Assassi, ces faits montrent clairement que nous ne créons pas les violences. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Violences à l'égard des policiers et des sapeurs-pompiers. D'ailleurs, il est scandaleux que des pompiers dont la tâche est de secourir les victimes soient agressés. Et l'on ne peut pas dire que ces agressions sont la conséquence des prétendues mauvaises relations que la police entretient avec les jeunes ! (On approuve à droite.) Qu'il me soit permis de leur rendre une nouvelle fois hommage. Ils ont fait preuve d'une grande maîtrise de soi face à des individus qui n'hésitaient pas à leur tirer dessus à quelques mètres de distance (Applaudissements sur les bancs UMP). Aux policiers et pompiers blessés que je recevrai bientôt, comme je l'ai fait pour les deux personnes agressées pour avoir témoigné devant les magistrats, je dirai notre reconnaissance. Durant les événements, je me suis rendue à cinq reprises à Villiers-le-Bel, de jour comme de nuit. A chaque fois, les habitants m'ont dit combien ils étaient heureux que la police soit là. Dans les quartiers, ce que désirent 99 % des habitants, c'est d'abord la tranquillité et la sécurité !
M. Charles Gautier. - C'est une évidence...
Mme Éliane Assassi. - Peut-être, mais vous faites le contraire de ce qu'il faudrait !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Violences sexuelles aussi. Mes pensées vont naturellement à cette jeune fille tuée sauvagement dans le RER par un pervers récidiviste.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis. - Pourquoi était-il dehors ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Violences accompagnant un vol. Qui a oublié ce convoyeur de fonds abattu porte de Bagnolet il y a une semaine ?
Mme Éliane Assassi. - C'est récurrent à Paris !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Violences intrafamiliales, avec le drame quotidien des femmes et enfants battus contre lequel nous devons redoubler d'efforts.
Violences terroristes qui menacent notre démocratie. Nous en avons eu, hélas, un exemple ces jours derniers avec le meurtre de deux gardes civils espagnols à Capbreton.
Ces violences rappellent malheureusement chaque jour que la sécurité est une responsabilité majeure des gouvernants. La France a besoin d'un grand ministère moderne de la sécurité intérieure. Je veux le construire en mettant des moyens performants au service de l'efficacité des hommes.
Dans la course à la modernité qui oppose délinquants et criminels aux forces de l'ordre, je veux que gendarmes et policiers disposent des outils, de demain et d'après-demain. Depuis mon arrivée au ministère, l'adaptation aux technologies du futur est une priorité avec 1 milliard d'investissement. 12 millions sont consacrés au regroupement, trop longtemps retardé, des laboratoires de police technique et scientifique en Ile-de-France. La technologie des fichiers automatisés des empreintes digitales et des empreintes génétiques sera adaptée à l'accroissement considérable du volume de données traitées.
J'ai également lancé un plan d'action d'envergure sur la vidéoprotection dont l'efficacité n'est plus à démontrer ! Selon une enquête récente, elle fait baisser de 40 % la délinquance.
M. Christian Cambon. - C'est évident !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Pourquoi faudrait-il en priver nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs UMP ; protestations à gauche)
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis. - Il n'y a aucune raison !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - En la matière, notre retard est considérable. Mon objectif est de tripler le nombre de caméras sur la voie publique en deux ans et de permettre aux communes et institutions qui le souhaitent de se raccorder au commissariat et à la gendarmerie. Des crédits ont été dégagés à cette fin dans le précédent budget, celui-ci ainsi que la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. La vidéoprotection permet d'intervenir de manière plus précoce, d'élucider plus rapidement les affaires -nous le devons aux victimes- et, enfin, elle est fortement dissuasive.
M. Philippe Madrelle. - Et la présence humaine ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Parce que policiers et gendarmes sont désormais pris pour cibles, nous devons améliorer les matériels de protection et généraliser les armes non létales. Les dotations consacrées aux lanceurs de 40, lesquels donnent un rayon de riposte large aux forces de l'ordre, et aux pistolets à impulsion électrique, qui évitent l'emploi d'arme à feu, vont augmenter très sensiblement. Pour vous répondre, madame Assassi, (Mme Éliane Assassi montre des signes d'agacement), l'utilisation de ces armes non létales a permis de réduire d'un tiers l'usage des armes à feu dans la gendarmerie, ce qui représente un avantage considérable. Je les développerai donc, que cela plaise ou non (applaudissements sur les bancs UMP) pour éviter des morts inutiles !
Les centres d'information et de commandement seront modernisés à partir de six départements l'an prochain. La première version d'Ariane sera généralisée sur le territoire, Acropol sera implanté outre-mer. Je précise que le système Rubis, créé avant Acropol, est techniquement analogue. Par ailleurs, Ariane fonctionne aussi en milieu rural.
Ce budget permettra la surveillance aérienne de grands rassemblements, au moyen de drones, moins coûteux que les hélicoptères.
L'anticipation est indispensable pour que la sécurité s'adapte rapidement à la délinquance. C'est pourquoi j'ai doté le ministère de l'intérieur d'une direction de la prospective et de la réflexion stratégique en liaison avec les universités et les instituts de recherche afin que nous ayons toujours une longueur d'avance sur les délinquants.
À l'ère de la mondialisation, la délinquance est de plus en plus transfrontalière, ce qui exige une approche internationale. C'est pourquoi la présidence française de l'Union européenne me donnera l'occasion de faire avancer l'Europe de la sécurité que j'appelle de mes voeux, comme je l'ai fait dans d'autres fonctions pour l'Europe de la défense. Je souhaite par exemple une formation partagée des cadres policiers, l'échange de renseignements, l'harmonisation des matériels et de la réglementation. Au-delà de l'Europe, nous pouvons promouvoir nos marques d'excellence dans le respect des personnes. Voilà pour la technologie de pointe que nous devons à tous ceux qui veillent chaque jour sur notre sécurité.
Vous avez beaucoup parlé des rapports entre policiers et gendarmes. Ma conviction est que nous devons avoir deux forces de police à statuts différents. (On approuve à droite.) Je défendrai toujours cette opinion avec vigueur ! Mais l'efficacité des missions passe avant la spécificité des structures. C'est tout l'enjeu de la mutualisation. Il faut donc améliorer la répartition des missions.
Le premier domaine concerné est le renseignement. J'ai créé la direction centrale du renseignement intérieur pour rationaliser à la fois le contre-espionnage, la contre-ingérence, le contre-terrorisme, la protection du patrimoine et la maîtrise des contestations potentiellement violentes. Cette action s'appuiera sur une structure centrale forte et un maillage territorial fin.
La réorganisation territoriale de la police est en cours. On a beaucoup évoqué la police de proximité. Je préfère mentionner la territorialité, car l'expression « police de proximité » a été utilisée dans d'autres contextes et à d'autres fins. Pour que policiers et gendarmes soient présents sur le terrain, nous avons créé 2 000 postes depuis 2002, alors qu'auparavant leur nombre tendait à diminuer. (On le confirme à droite) Mais la territorialité n'empêche pas la meilleure utilisation des moyens humains : des caméras permettant d'intervenir sans délai sont plus utiles qu'une garde statique surveillant dans un rayon de 100 mètres. En fait, nous avons besoin de trois niveaux : des gens présents sur place, des personnes plus mobiles et des CRS. Chacun peut être utilisé en fonction de son savoir-faire, de son implantation et de sa capacité de mouvement.
Selon la direction générale de la police nationale, il est souhaitable d'avoir une vingtaine d'unités de sécurisation, comptant 60 à 100 policiers selon les cas. Elles seraient installées dans les départements où les besoins sont récurrents, mais avec une compétence territoriale plus large. Je souhaite créer trois unités dès 2008, mais il n'est pas question de dissoudre les CRS, dont l'évolution s'accompagnera d'une réflexion sur l'implantation des unités, car elles n'ont pas vocation à garder, par exemple, les centres de rétention administrative.
M. Christian Cambon. - C'est vrai.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - J'ai redéfini la coopération au sein de la région parisienne. À Villiers-le-Bel, la compagnie de sécurisation de la préfecture de police a été employée avec l'efficacité que chacun a pu mesurer.
M. de Montesquiou a souligné que les groupes d'intervention régionaux (GIR) constituaient des moyens efficaces pour combattre les trafics locaux. En ce domaine, je veux renforcer aussi la coopération avec le fisc et la douane.
La mutualisation des moyens de la police et la gendarmerie trace la troisième voie d'une meilleure efficacité. Elle est facilitée par mes nouvelles attributions, même si gendarmerie et police ont chacune leur culture propre. Je le répète et le répéterai autant qu'il le faudra ! Nul ne remet en cause cette dualité. Si ma parole ne suffit pas, je rappelle que cette position a été confirmée par le Président de la République ! (Très bien ! à droite)
Le redéploiement territorial de la police et de la gendarmerie aboutit à un résultat cohérent, même si certains ont ressenti un regret compréhensible lors du départ. Il n'est pas question de procéder à un génocide des brigades de gendarmerie !
M. Rémy Pointereau. - Bonne nouvelle !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Des bruits sortent, on ne sait comment. Mais sur le terrain, on connaît la réalité, toujours plus forte que la technocratie ou l'imagination débridée ! (On se gausse sur les bancs socialistes)
La future loi sur la gendarmerie réaffirmera son statut militaire et le commandement opérationnel par le ministère de l'intérieur, ce qui est logique. Elle définira les moyens d'investissement, de logistique et de fonctionnement. J'ai rassuré les gendarmes quant à la parité de traitement avec les policiers. Je pense que toute inquiétude a disparu, mais un groupe de travail vérifiera que l'équité est réelle, car les conditions de travail sont très différentes.
Donnant la priorité au renforcement opérationnel, je me réjouis que les responsables de la police et la gendarmerie aient proposé des formes de mutualisation extrêmement intéressantes portant sur les marchés publics, l'entretien et la réparation des véhicules ou l'utilisation commune du matériel très coûteux rarement utilisé. Ainsi, certains engins spécifiques au maintien de l'ordre seront utilisés indifféremment par les CRS ou les gendarmes mobiles.
Comme il est normal, le parc automobile des forces mobiles sera entretenu dans l'atelier de la police à Limoges.
Le recrutement et la formation s'enrichiront d'un échange sur les pratiques actuelles, notamment pour les personnels de soutien. Le futur centre de formation des agents techniques et administratifs de Lognes sera ouvert aux collaborateurs des deux directions générales, de même que certaines formations spécialisées : plongeurs, équipes cynophiles ou formation au maintien de l'ordre. Des stages communs aux CRS et aux gendarmes mobiles sont à l'étude.
Cet effort de mutualisation concerne également le soutien opérationnel, comme en témoigne le très important chantier de regroupement des fichiers de police criminelle dans l'application Ariane.
Ces moyens nouveaux sont au service de l'efficacité des personnels. La qualité des femmes et des hommes qui la servent constitue le premier atout de la police. Nous avons besoin d'eux. Je vous déconseille, à ce sujet, de prêter l'oreille à certains chiffres sans fondement, donnés à droite et à gauche dans des cadres non autorisés.
L'optimisation des effectifs passe par le recentrage de chacun sur son coeur de métier. Les policiers et les gendarmes n'ont pas à effectuer des tâches administratives. Pour répondre à M. Courtois, je vais relancer un plan de recrutement dès 2008 : 700 postes de personnel administratif, technique et scientifique seront créés dans la police nationale, dont 475 administratifs. Ces évolutions seront amplifiées par la nouvelle loi d'orientation, pour laquelle nous prévoyons la création de 5 000 postes administratifs, scientifiques et techniques. Cela renforcera l'intérêt et l'efficacité de ces métiers.
Je ne peux laisser dire que nous ne faisons rien pour que les policiers ne soient pas mieux utilisés pour remplir leur mission. Ainsi, le Président de la République s'est engagé à ce que les escortes et les transfèrements soient refacturés à la justice. Une révision complète des modalités de transfèrement est prévue.
Les renforts de personnels administratifs sont d'autant plus importants que le nombre d'adjoints de sécurité a beaucoup baissé ces dernières années, du fait notamment de difficultés de recrutement. Ce recrutement doit cependant se poursuivre, comme le souhaite M. Courtois, car ces postes donnent à des jeunes issus de milieux assez défavorisés la possibilité de passer dans de meilleures conditions les concours pour devenir gardien de la paix.
Si la règle du non-remplacement des agents partant à la retraite a été respectée, il n'y a eu aucune suppression d'emplois de gardien de la paix dans la police nationale, monsieur Madrelle. Le retour des économies ainsi dégagées doit être plus important qu'à l'habitude afin de profiter directement au personnel. Je tiens à ce que la vie professionnelle comme la vie personnelle des agents permette de reconnaître la qualité du travail accompli.
Pour cette raison, je porte une attention particulière à la formation et au déroulement des carrières. Il faut renforcer la formation, initiale et permanente, qui permet une promotion professionnelle et sociale. Pour tenir compte des difficultés du terrain, de nouveaux logements seront réservés en Région parisienne en 2008, ainsi que des places de crèche supplémentaires.
La fidélisation est une des problématiques majeures en Ile-de-France. Un groupe de travail, dont la dernière réunion a eu lieu ce matin, m'a fait des propositions que je vous soumettrai prochainement. C'est ainsi que nous répondrons aux attentes de ces personnels.
Ces chantiers importants sont le gage d'une police moderne, efficace, proche des citoyens et ouverte aux problématiques du futur. Je sais pouvoir compter sur vous pour donner aux policiers et aux gendarmes les moyens nécessaires à leur action au profit des Français et au bénéfice de la France. (Vifs applaudissements à droite et au centre.)
Examen des crédits
Article 33
Les crédits de la mission sont adoptés.
Article rattaché
Article 48 octies
Les opérations de construction liées aux besoins de la gendarmerie nationale, dont le principe a été approuvé avant le 31 décembre 2007 par décision du ministre de la défense, peuvent faire l'objet d'un bail emphytéotique administratif, dans les conditions prévues à l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales, jusqu'au 31 décembre 2008.
M. le président. - Amendement n°II-161, présenté par le Gouvernement.
Modifier ainsi cet article :
I - Après les mots :
de la gendarmerie nationale
insérer les mots :
et de la police nationale
II - Remplacer les mots :
du ministre de la défense
par les mots :
des ministres compétents
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Il s'agit d'étendre à la police le dispositif de bail emphytéotique administratif qui permet d'accélérer la reconstruction des locaux professionnels de la gendarmerie, et qui a donné des résultats très positifs. Les commissariats, notamment, pourraient ainsi en bénéficier.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial. - Avis favorable. La police tirerait profit de ce dispositif.
M. Henri de Raincourt. - Je suis favorable à l'amendement du Gouvernement, mais le bail emphytéotique pose un problème car il ne permet pas de récupérer la TVA. La question mérite d'être examinée, car cela risque de freiner la réalisation de certains projets.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Nous avons saisi les ministères des finances et du budget pour qu'ils trouvent une solution à ce problème que connaissent bien les élus locaux.
L'amendement n°II-161 est adopté.
L'article 48 octies, modifié, est adopté.