SÉANCE

du mercredi 2 novembre 2022

12e séance de la session ordinaire 2022-2023

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et du temps de parole.

Manifestation illégale de Sainte-Soline (I)

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, sur plusieurs travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Martin Lévrier applaudit également.) Une fois de plus, les agriculteurs ont subi violences, saccages et harcèlements de la part de casseurs, black blocs et fichés S, soutenus par les idéologues de la décroissance et des parlementaires qui se déshonorent en participant à des manifestations interdites. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur de nombreuses travées des groupes UC et Les Républicains)

Soixante-et-un gendarmes blessés, des conduites d'eau détruites, des champs ravagés, mais rien de nouveau : c'est la cinquième bassine attaquée en deux ans... Pourtant, celle de Sainte-Soline a donné lieu à une concertation exemplaire ; même France Nature Environnement a validé ce projet d'économie sociale et solidaire. Mais les casseurs s'en fichent.

Au moment où Poutine coupe le gaz, on s'avise que, par leur faute, nous n'avons plus assez d'énergie nucléaire, et les Allemands plus du tout. Au moment où il bloque les bateaux qui partent d'Ukraine, les mêmes veulent mettre notre agriculture à genoux, alors que l'Afrique attend le blé français.

Combien de temps va durer le délire antisystème d'une minorité de contestataires gavés ? Ils achètent leur salade en sachet sans comprendre qu'il faut de l'eau pour la produire ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC ; MM. Philippe Mouiller et Yves Bouloux applaudissent également.)

Depuis des années, ce vandalisme sévit dans l'indifférence : une seule condamnation pour trente-cinq destructions d'installation de recherche végétale. En 2020, des juges de Perpignan ont même retenu l'« état de nécessité » pour relaxer les casseurs...

Nos agriculteurs, nos éleveurs, nos chercheurs n'en peuvent plus. L'immense majorité des Français les soutient, mais ils ont l'impression que personne ne les défend. Madame la Première ministre, pouvez-vous les rassurer en faisant de la fin de l'impunité une priorité ? (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC et sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains)

M. Emmanuel Capus.  - Très bien !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - Comme vous et comme de nombreux Français, j'ai été choquée par les violences du week-end dernier à Sainte-Soline. Je rends hommage aux forces de l'ordre, contre lesquelles aucune violence n'est acceptable ; le Gouvernement sera toujours à leur côté. (M. Philippe Mouiller s'en félicite.)

Le projet de bassine de Sainte-Soline, attendu par les agriculteurs du territoire, a fait l'objet de concertations longues et approfondies, dont il est sorti fortement modifié - en tant qu'ancienne préfète de la région Poitou-Charentes, je puis en témoigner.

Le projet de territoire pour la gestion de l'eau a été approuvé en 2019 à la quasi-unanimité des collectivités territoriales et des associations de protection de l'environnement.

La bassine en construction réduira les prélèvements dans les milieux naturels. C'est un projet responsable, associé à des engagements environnementaux pris par les agriculteurs. Il est nécessaire pour faire face aux sécheresses et mieux réguler l'usage de l'eau.

Écologiquement vertueux, comme l'a montré le Bureau de recherches géologiques et minières, ce projet a été mené dans le respect des règles de l'État de droit ; les recours formés par les opposants n'ont pas abouti.

Les manifestations du week-end dernier, interdites, ont vu plusieurs centaines d'individus violents prendre à partie les gendarmes. Le bilan est lourd : du matériel détruit et une soixantaine de militaires blessés. C'est inacceptable et profondément choquant.

Les gendarmes ont tenu, et maintenu l'ordre républicain ; je leur rends à nouveau hommage. L'opposition à un projet ne justifie jamais la violence. La justice est saisie, et il n'y aura aucune impunité pour les auteurs de violences. (Applaudissements sur les travées du RDPI et des groupes INDEP et UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Manifestation illégale de Sainte-Soline (II)

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains) J'associe à cette question mon collègue des Deux-Sèvres, Gilbert Favreau.

Sainte-Soline vient de connaître un week-end terrible. Dans cette commune de 350 habitants, près de 4 000 personnes ont déferlé pour participer à une manifestation interdite contre la construction d'une réserve de substitution. Comme il était prévisible, 400 extrémistes violents se trouvaient parmi eux.

Par leur présence, des élus de la République ont cautionné ce rassemblement...

Une voix à droite. - Scandaleux !

M. Philippe Mouiller.  - ... qui a donné lieu à des scènes d'une violence inouïe. Je salue l'action des forces de l'ordre et de la préfète. (Applaudissements sur de nombreuses travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

Alors que le projet de réserve est légal, financé et approuvé par tous les acteurs, y compris les associations environnementales, cette manifestation a été orchestrée, sous prétexte d'écologie, pour instituer un système de violence et d'anarchie.

Sainte-Soline a retrouvé un peu de calme : quoi qu'en disent les médias, il n'y a pas de ZAD. Après avoir été harcelés, agriculteurs et habitants aspirent à la tranquillité.

Monsieur le ministre de l'intérieur, comment comptez-vous répondre à ce type d'événements, inquiétants pour notre société ? Comment s'assurer qu'un projet démocratiquement autorisé puisse être mené à bien sereinement ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Je remercie à mon tour les 1 700 gendarmes mobilisés, dont plus de 60 ont été blessés, parfois très gravement. Nous ne parlons pas de petite délinquance, mais d'attaques graves contre les garants de l'ordre public, dans le cadre d'une manifestation interdite.

Je remercie également la préfète, qui a été courageuse et a communiqué à bon escient.

C'est aussi l'outil de travail des agriculteurs qu'on a voulu casser. Le Gouvernement se tient à leur côté.

Extrêmement violentes, ces « manifestations » - j'insiste sur les guillemets - ne sont pas nouvelles. Bernard Cazeneuve, en particulier, a eu à y faire face. Si nous pouvons ficher S un certain nombre de personnes de l'ultragauche, c'est parce que nos prédécesseurs ont considéré que cette ultraviolence menaçait l'ordre républicain.

Les moyens mis en oeuvre ont empêché la formation d'une ZAD. Le chantier de la bassine va reprendre, et nous continuerons d'assurer l'ordre public nouvelle formule, si je puis dire, contre ces manifestations spontanées et violentes. Je vous remercie de nous en avoir donné les moyens en votant la loi de programmation du ministère de l'intérieur. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP ; M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Philippe Mouiller.  - Nous ne voulons pas revivre Notre-Dame-des-Landes. Chacun doit se mobiliser, à commencer par l'État ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Blocage des céréales ukrainiennes

Mme Évelyne Perrot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La Russie a annoncé revenir à l'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes. Saluons la nouvelle : le monde respire à nouveau.

Après la suspension de l'accord, nous n'étions pas loin de la catastrophe économique et humanitaire. Avant-hier, un navire chargé de 30 000 tonnes de céréales à destination de Djibouti est resté à quai. La Russie fait peser une épée de Damoclès sur la sécurité alimentaire mondiale : une suspension durable de l'accord, et c'est la famine en Afrique.

Y sommes-nous préparés ? Sur le plan intérieur, comment préserver l'élevage de l'envolée des cours mondiaux des céréales ? La présidente de la FNSEA exprime les plus grandes inquiétudes. Sur le plan international, pourrait-on, en cas de crise, débloquer une aide alimentaire exceptionnelle avec les Européens et les Américains ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe INDEP ; M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger .  - La Russie a annoncé aujourd'hui son retour dans l'accord ; nous la prenons au mot. Par un cynisme dramatique, elle fait du chantage alimentaire et utilise la faim comme arme de guerre.

Grâce aux Nations unies, neuf millions de tonnes de céréales et produits alimentaires ont été exportées depuis le 22 juillet, faisant baisser le prix du blé. Voilà le meilleur moyen de préserver notre sécurité alimentaire.

La Russie est plus isolée que jamais. La dernière résolution de l'Assemblée générale des Nations unies, votée par 143 États, en atteste. Même la Chine a vivement regretté la décision du Kremlin de suspendre sa participation à cet accord.

La France est à l'oeuvre pour endiguer la crise alimentaire. La solidarité européenne a déjà permis l'exportation de près de treize millions de tonnes de denrées alimentaires. Nous soutenons un nouveau mécanisme d'achats groupés d'engrais pour l'Afrique, et nous travaillons à ce que les prix restent contrôlés. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Pierre Louault applaudit également.)

Mme Évelyne Perrot.  - Nous ne pouvons que nous réjouir de la fin du blocus, mais nous avons tous en tête les visages atroces de la famine en Éthiopie : plus jamais ça ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Frédéric Marchand applaudit également.)

Dégradation des transports en commun

M. Fabien Gay .  - Partout en France, les réseaux de transports en commun se dégradent, et c'est la galère quotidienne pour les usagers.

Avec l'ouverture à la concurrence, les recrutements sont de plus en plus difficiles et les démissions sont légion. Résultat : le service se dégrade, et les rames de TER ou de RER sont bondées.

La situation est critique sur le réseau de bus francilien, en grande souffrance. Des bus sont annulés sans raison ni solution de report. On attend 80 minutes le bus 545 à Noisy-le-Sec et plus d'une heure le bus 322 à Montreuil ! Se rendre à l'école ou au travail est devenu un parcours du combattant.

Le pire, c'est que les régions, qui refusent d'augmenter le versement transport des entreprises, envisagent de faire payer davantage les usagers. En Île-de-France, le passe Navigo pourrait passer de 75 à 100 euros par mois : c'est insupportable !

Quels moyens supplémentaires prévoyez-vous pour rétablir des transports en commun fonctionnels, partout dans le pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST, ainsi que sur de nombreuses travées du groupe SER)

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - En Île-de-France, les transports publics ne sont pas à la hauteur de la plus grande métropole d'Europe. La galère est aggravée par une pénurie de conducteurs, qui n'a pas grand-chose à voir avec l'ouverture à la concurrence.

Mme Éliane Assassi.  - Si !

M. Clément Beaune, ministre délégué.  - Cette ouverture n'est que très partiellement effective, et les secteurs ouverts connaissent les mêmes difficultés que les autres.

Il faut de la responsabilité et de la coopération.

C'est Île-de-France Mobilités qui est responsable de l'offre de transport dans la région, ainsi que de la fixation des prix. Il n'appartient pas au Gouvernement de fixer le prix du passe Navigo.

M. Rachid Temal.  - C'est la droite !

Mme Sophie Primas.  - Et les 700 millions d'euros ?

M. Clément Beaune, ministre délégué.  - La coopération aussi est nécessaire. Pendant la crise de la covid, l'État a consenti un effort exceptionnel pour l'Île-de-France, à hauteur de 1,3 milliard d'euros : 150 millions d'euros en subvention, le reste en avances remboursables.

Les grands opérateurs, SNCF et RATP, doivent améliorer la situation, notamment avec des primes pour le personnel - que la région Île-de-France soutient, enfin. Un plan de recrutement de 1 500 chauffeurs a été lancé.

Nous devons aussi investir pour l'avenir : dans le futur contrat de plan État-région, nous serons au rendez-vous. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit 1 milliard d'euros d'investissements pour l'amélioration des transports publics à travers la Société du Grand Paris. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Pierre Louault applaudit également.)

Mme Sophie Primas.  - Rendez les 700 millions !

M. Fabien Gay.  - C'est tout un modèle économique qu'il faut changer : les usagers n'ont pas à payer l'ouverture à la concurrence. Vous voulez recruter des chauffeurs ? Augmentez les salaires, augmentez le versement transport des entreprises et donnez à l'Île-de-France les 700 millions d'euros qui lui manquent. (Marques d'approbation sur quelques travées à droite) C'est une urgence sociale et écologique ! Le 10 novembre prochain, nous serons aux côtés des salariés de la SNCF et de la RATP. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER ; protestations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Très bien !

Titre de séjour « métiers en tension »

M. Martin Lévrier .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Aides à domicile, agents d'entretien, serveurs, plombiers, employés de libre-service : autant de métiers sous tension, un phénomène accentué par la forte reprise post-covid.

On ne compte plus les secteurs confrontés à la pénurie de main-d'oeuvre. Nous sommes nombreux à être saisis par des employeurs en manque de solutions concrètes.

Le Gouvernement a pris des premières mesures : bonus-malus, alternance, apprentissage. Une autre piste pourrait être envisagée : le recours à la main-d'oeuvre étrangère déjà présente sur le territoire national. Un grand nombre de ces personnes, dont le taux de chômage avoisine les 15 %, ne demandent qu'à s'intégrer par le travail.

Comment encourager l'insertion par le travail dans le cadre du futur projet de loi Asile et immigration ? (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) La création d'un titre de séjour « métiers en tension » est envisagée par les ministres du travail et de l'intérieur : quels en seraient les contours ? (M. Roger Karoutchi s'exclame.)

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion .  - M. Darmanin et moi-même avons rendues publiques des premières pistes de travail, dont le Parlement débattra avant la fin de l'année puis dans le cadre du futur projet de loi Immigration.

Nous voulons faire mieux respecter les règles et assurer l'application des décisions de justice, mais aussi faciliter l'intégration des étrangers présents en France. Le travail doit redevenir un vecteur d'intégration.

Des trappes à inactivités existent : des demandeurs d'asile en provenance de pays dangereux doivent attendre longtemps pour pouvoir travailler, des immigrés bénéficiant d'un titre de séjour pour raison professionnelle doivent solliciter une autorisation administrative à chaque contrat de travail.

Nous le savons, il y a aussi des travailleurs en situation irrégulière qui oeuvrent, parfois depuis longtemps, dans des métiers en tension. Nous avons procédé à des régularisations, en application de la circulaire prise par Manuel Valls. Elles s'accompagnent d'engagements de l'employeur. Il ne s'agit pas d'une régularisation massive : les dossiers seront étudiés au cas par cas, pour répondre aux besoins de l'économie et faciliter l'intégration de ces femmes et de ces hommes qui travaillent et vivent avec nous. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Gaspillage alimentaire

M. Christian Redon-Sarrazy .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe SER) La précarité contraint un nombre croissant de nos concitoyens à recourir à l'aide alimentaire. En Haute-Vienne, le nombre de bénéficiaires de la Banque alimentaire a augmenté de 5 % en un an : ils sont 42 000, 10 % de la population du département.

L'aide alimentaire se professionnalise mais fait face à une pénurie de produits en raison d'un scandaleux gaspillage. La loi Garot n'est pas respectée. De fait, de nombreux acteurs agroalimentaires préfèrent vendre leurs surplus à des destockeurs, qui peinent à revendre tous les produits récupérés.

En outre, les producteurs locaux ne sont pas fiscalement incités à donner leurs excédents aux associations.

Comptez-vous faire appliquer la loi Garot et, plus largement, soutenir l'aide alimentaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale et solidaire et de la vie associative .  - La loi Garot interdit de rendre impropres à la consommation les denrées alimentaires et oblige les acteurs à conclure une convention de don avec une association habilitée.

Je rends hommage aux associations et structures de l'économie sociale et solidaire qui oeuvrent contre le gaspillage alimentaire. Nous avons engagé cette lutte dans le cadre des lois EGalim et Agec. Nous renforçons les exigences pour atteindre l'objectif de réduire le gaspillage de 50 % d'ici à 2030.

Je lancerai prochainement un label national antigaspillage, avec Marc Fesneau et Christophe Béchu. (Marques d'ironie à droite) Selon Phenix, une entreprise de l'économie sociale et solidaire, 84 % des Français préféreraient un supermarché disposant un label de ce type.

La Première ministre visitera demain une Banque alimentaire, accompagnée de Jean-Christophe Combe et moi-même. (Nouvelles marques d'ironie à droite ; applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Votre réponse n'en est pas vraiment une. D'autant que vous vous gardez bien de mentionner l'aggravation de la précarité liée à vos choix politiques.

Parce que le gaspillage est intolérable, nous proposerons, dans le projet de loi de finances, des mesures immédiates et concrètes pour faire face à l'inflation record et assurer la solidarité alimentaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE)

MaPrimeRénov'

M. Éric Gold .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur des travées du groupe INDEP) Douze millions de Français sont victimes de précarité énergétique, qu'ils vivent dans une passoire thermique ou n'aient pas les moyens de se chauffer. Avec la crise énergétique, le phénomène va s'aggraver.

Dans ce contexte, la rénovation massive des logements doit être une priorité. En particulier, l'efficacité de MaPrimeRénov' doit être renforcée, car la France compte encore plus de cinq millions de passoires thermiques. L'enjeu est aussi écologique, car le logement représente 23 % de nos émissions de gaz à effet de serre.

Après que la Défenseure des droits a pointé de nombreux dysfonctionnements dans le traitement des dossiers, la Cour des comptes a jugé MaPrimeRénov' peu lisible et efficace. Nombre de collectivités territoriales dénoncent des procédures trop complexes, des retards dans le versement des primes. Des problèmes techniques récurrents affectent la plateforme, et la dématérialisation totale de la procédure exclut les quatorze millions de Français qui souffrent d'illectronisme -  sujet cher à mon groupe. (M. Jean-Claude Requier renchérit.)

Alors que le coût de l'énergie explose, comment améliorer le dispositif pour ne laisser personne au bord du chemin ? (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Pierre Louault et Mme Frédérique Puissat applaudissent également.)

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - MaPrimeRénov' est essentielle pour la transition écologique ; elle doit être accessible au plus grand nombre.

Oui, ce dispositif est perfectible, et nous travaillons d'arrache-pied à l'améliorer. Reste que 1,5 million de chantiers ont été lancés en deux ans, soit plus que l'objectif, fixé par le Président de la République, de 700 000 logements par an.

Au-delà de la massification, il faut aller plus loin dans la performance des chantiers. L'accueil par un conseiller France Rénov' sera renforcé, et des accompagnateurs seront mis en place. Le budget de MaPrimeRénov' sera porté à 2,6 milliards d'euros en 2023.

Ce dispositif bénéficie à l'ensemble du territoire : 49 % des chantiers sont en zone rurale. Dans les zones denses, nous travaillons à développer MaPrimeRénov' Copropriétés.

Nous lisons, comme vous, les rapports qui font état de dysfonctionnements. Mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain : 1,5 million de chantiers, c'est une économie équivalente à la consommation d'énergie de Lyon, pour le portefeuille comme pour la planète ! (Applaudissements sur des travées du RDPI)

Mégabassines

M. Daniel Salmon .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Revenons dans les Deux-Sèvres... (Exclamations à droite)

Concentrons-nous sur le fond : la nécessité d'une réflexion globale et scientifique sur les usages de l'eau. (Murmures à droite)

Les mégabassines ne visent pas à récupérer directement les eaux de pluie. Elles sont principalement remplies par pompage dans les cours d'eau et les nappes phréatiques, qui peinent à se reconstituer.

Mme Sophie Primas.  - Les nappes débordent !

M. Philippe Mouiller.  - Vous déformez la réalité !

M. Daniel Salmon.  - L'agriculture et la biodiversité sont ainsi mises en danger. C'est une logique d'accaparement d'un bien commun par une minorité ! (Protestations à droite ; M. Rémy Pointereau s'indigne.)

Nous dénonçons le déni démocratique et le court-termisme : les implantations de mégabassines sont révélatrices de l'absence de gouvernance partagée sur les orientations agricoles. D'autres solutions paysannes, innovantes, existent pour l'irrigation.

Quand allez-vous stopper ces projets non pensés, qui sont autant de rustines sur un schéma sans avenir ? À quand une gestion de l'eau démocratique et profitable à toutes et tous ? Agiter le mot « écoterrorisme », c'est la stratégie de l'écran de fumée ! (Applaudissement sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER ; M. Fabien Gay applaudit également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - La question de l'eau mérite mieux que des postures et, surtout, que des cassages en règle. (« Bravo ! » et applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains)

Vous avez soutenu Yannick Jadot parce qu'il incarnait une écologie politique respectable. Nous avons vu, ce week-end, comment l'écologie politique respectable était accueillie par une minorité de manifestants. (Protestations sur les travées du GEST ; MM. François Patriat, Pierre Louault et Olivier Cadic applaudissent.)

Les bassines sont des réserves de substitution.

Mme Sophie Primas.  - Exactement !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Ce projet vise à baisser les prélèvements de 70 %. Vous invoquez la science, mais le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a démontré que le niveau des nappes en été serait préservé, de même que la biodiversité. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du RDSE et des groupes UC et Les Républicains)

Vous parlez d'accaparement pour l'agrobusiness, mais il s'agit de 300 agriculteurs en coopérative qui, pour la plupart, pratiquent la polyculture élevage... Ce projet est soutenu par les élus locaux de tous bords. Quand un agriculteur fait une réserve, ce n'est pas un accaparement personnel : il le fait pour nous nourrir. En condamnant les adaptations de notre modèle agricole, nous ne ferions qu'augmenter nos importations ! (« Bravo ! » et applaudissements prolongés sur les travées du RDPI, du RDSE et des groupes INDEP, UC et Les Républicains)

M. Daniel Salmon.  - Nous avons vécu une année de sécheresse dramatique. (Huées sur certaines travées à droite) Or les études du BRGM ne prennent pas en compte ces nouvelles réalités. La politique du bulldozer au secours d'un système obsolète n'a pas d'avenir ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

Organisation des jeux Olympiques

M. François-Noël Buffet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Dominique Vérien applaudit également.) Nous venons de vivre un week-end dramatique, au cours duquel la violence a atteint des sommets à Sainte-Soline. Saluons le travail des forces de l'ordre, dont de nombreux membres ont été blessés, ainsi que de la préfète.

Des violences ont aussi été perpétrées ailleurs. On a dégradé des oeuvres d'art, bloqué la circulation...

Dans deux ans, la France accueillera les jeux Olympiques ; l'an prochain, la Coupe du monde de rugby.

Monsieur le ministre de l'intérieur, vous êtes venus expliquer devant les commissions des lois et de la culture que vous prépariez ces deux événements. Au regard de ce que nous vivons et de cette montée inacceptable de la violence, comment et avec quels moyens les préparez-vous ? Déposerez-vous un texte pour que le Parlement légifère au plus vite ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC et INDEP)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer .  - Les grands événements sont le lieu des contestations les plus violentes, en France comme ailleurs. À l'approche de la Coupe du monde de rugby et des jeux Olympiques de Paris, j'ai détaillé devant les sénateurs les mesures que nous prendrons pour garantir l'ordre public, avec une mobilisation de 45 000 policiers et gendarmes chaque jour, ce qui est sans précédent.

Vous me demandez un texte de loi : c'est la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), qui crée onze nouvelles unités de forces mobiles et renforce considérablement le renseignement - grâce auquel, à Sainte-Soline, nous avons pu empêcher la constitution d'une ZAD.

Nous allons voir, avec la ministre des sports, ce qu'il convient de faire en complément.

Nous sommes très mobilisés pour nous assurer que la fête du sport, que ce soit la Coupe du monde de rugby ou les jeux Olympiques, ne devienne pas le lieu de l'ultraviolence, d'où qu'elle vienne. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. François-Noël Buffet.  - On attend 600 000 personnes sur les quais de Seine lors des jeux Olympiques. Après les événements du Stade de France, Laurent Lafon et moi-même avons formulé une quinzaine de propositions, dont l'association du Parlement aux travaux préparatoires du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Réduction du trafic des TGV en France

M. Hussein Bourgi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le 15 décembre 2013, la ligne à grande vitesse entre Paris et Barcelone effectuait sa première liaison, dans une ambiance de joie. Le rythme s'est établi à quatre trajets par jour, desservant également Valence, Nîmes, Montpellier et Perpignan.

Des chefs d'entreprise, des étudiants, des scolaires, des touristes ont pu voyager dans les deux sens, entre le Languedoc-Roussillon et la Catalogne.

Or nous venons d'apprendre la réduction des liaisons journalières de quatre à deux, en raison de l'ouverture à la concurrence et des accords commerciaux entre la SNCF et la Renfe, ainsi que l'arrêt des liaisons à grande vitesse entre Lyon et Barcelone et Marseille et Madrid.

Tous les élus d'Occitanie en appellent à votre responsabilité dans l'intérêt des territoires pour faire revenir les deux entreprises à la raison. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE ; MM. François Calvet et Jean Sol applaudissent également.)

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Cette liaison est d'importance stratégique. L'effondrement du trafic à la suite de la covid a provoqué l'arrêt du partenariat entre la SNCF et l'opérateur espagnol. Mais cela ne signifie pas la fin de cette liaison : la SNCF reprendra seule deux allers-retours par jour, à compter du 11 décembre, entre Paris et Barcelone, desservant également Montpellier, Sète et Agde.

Nous continuons à encourager la coopération entre la SNCF et la Renfe, et je m'engage à en discuter avec mon homologue espagnole, dans la continuité de notre entretien du 21 octobre dernier.

Les liaisons entre Barcelone et Lyon et Madrid et Marseille seront reconduites, même si les fréquences doivent encore faire l'objet de discussions. Elles seront opérées par la Renfe.

Les deux opérateurs doivent également trouver une solution pour la liaison entre Perpignan et Figueras, dont le cadre s'arrête en fin d'année, pour que les utilisateurs ne soient pas pénalisés.

Enfin, rappelons que la SNCF est présente sur le marché espagnol, dans son bon intérêt et dans celui de millions d'usagers. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

M. Hussein Bourgi.  - Monsieur le ministre, vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question. L'offre dégradée rendra impossible l'aller-retour dans la journée, ce qui pénalisera les chefs d'entreprise. En outre, rien n'est acquis à ce jour.

Vous avez évoqué la covid, mais nous ne sommes pas revenus à la situation antérieure : que ce soit sur Bordeaux-Paris ou Brest-Paris, les trains sont rares et pleins, et les prix augmentent !

M. Roger Karoutchi.  - Il a raison !

M. Hussein Bourgi.  - Ce n'est pas satisfaisant. Il faut une stratégie pour la France en matière de lignes à grande vitesse. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du RDSE et des groupes UC et Les Républicains ; M. Julien Bargeton et Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudissent également.)

Violences sexuelles en République démocratique du Congo

Mme Catherine Deroche .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le 14 septembre dernier, le président Larcher a reçu le docteur Denis Mukwege, prix Nobel de la paix 2018. Ce gynécologue obstétricien soigne chaque jour des victimes de violences sexuelles perpétrées dans l'Est de la République démocratique du Congo.

Ces violences sont connues depuis vingt ans ; en 2010, un rapport de l'ONU les dénonçait déjà. Mais rien ne change, sur fond d'enjeux économiques importants dans cette zone productrice de cobalt et de coltan.

Que fait la France pour défendre ces populations martyrisées, qui méritent justice et réparation ? (Applaudissements)

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger .  - En effet, la reprise des violences dans cette région est préoccupante. Nous appelons toutes les parties à déposer les armes et à prendre part au processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Il est nécessaire qu'elles mettent en oeuvre rapidement leurs engagements, notamment ceux pris le 21 septembre dernier lors d'une réunion initiée par le Président de la République à New York.

La France joue un rôle moteur au Conseil de sécurité des Nations unies pour que la Monusco continue son action.

Nous soutenons depuis de nombreuses années l'action du docteur Denis Mukwege et son hôpital à Bukavu, ainsi que sa fondation. La France a mobilisé 6 millions d'euros en faveur du Fonds mondial pour les survivantes, créé par le docteur Mukwege et Nadia Murad. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Catherine Deroche.  - En effet, le docteur Mukwege compte sur la France.

Lorsqu'il a reçu le prix Sakharov, en 2014, il a déclaré : « Chaque femme violée, je l'identifie à ma femme ; chaque mère violée, à ma mère ; et chaque enfant violé, à mes enfants. Comment pouvons-nous nous taire ? Quel être humain doué de conscience se tairait lorsqu'on lui emmène un bébé de six mois dont le vagin a été détruit par la pénétration brutale, des objets contondants ou des produits chimiques ? »

C'était il y a huit ans. La France ne peut pas se taire. (Applaudissements nourris)

Dumping social sur la ligne transmanche

M. Michel Canévet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La France est un grand pays maritime et doit le rester.

À l'approche des 4e rencontres du transmanche et des assises de l'économie de la mer, je souhaite interroger le Gouvernement sur la concurrence illégale à laquelle nos armateurs sont confrontés dans la Manche et en Méditerranée, avec l'emploi par certaines compagnies d'une main-d'oeuvre extra-européenne à bas coût.

Comment le Gouvernement compte-t-il assainir la situation ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer .  - Vous posez la question du modèle social de notre économie maritime. P&O a brutalement licencié 800 personnes par visioconférence cet été : c'est inacceptable. La lutte contre le dumping social étant une priorité, nous cherchons des solutions avec les Britanniques. J'ai rencontré le directeur de Brittany Ferries et les organisations syndicales.

Le Gouvernement suit trois orientations.

D'abord, nous allons renforcer les contrôles sur le trafic transmanche.

Ensuite, en août, j'ai mandaté une mission de l'inspection des affaires maritimes pour envisager différentes options, dont l'interdiction d'accès aux ports français aux navires ne respectant pas des normes sociales élevées.

Enfin, le projet de loi sur les énergies renouvelables prévoit des mesures renforçant notre modèle social en matière de renouvelable marin.

Je salue tous les parlementaires mobilisés. Je rencontrerai mon homologue britannique dès qu'il sera en fonction pour évoquer notre politique contre les pratiques déloyales. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Pierre Louault et Mme Nassimah Dindar applaudissent également.)

M. Michel Canévet.  - L'enjeu est de faire respecter les conditions de la concurrence. Il faut se coordonner avec les autorités britanniques, espagnoles et italiennes. Nous devons être aussi exigeants vis-à-vis de ceux que nous accueillons dans nos ports que vis-à-vis des entreprises françaises, pour que la France reste un grand pays maritime. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Relation franco-allemande

M. Jean-François Rapin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) « La guerre entre la France et l'Allemagne redevient possible ». Les mots de Jacques Attali interpellent, dans sa tribune des Échos publiée après la rencontre entre MM. Macron et Scholz, qualifiée de « constructive » mais qui n'a même pas donné lieu à une déclaration commune. Qu'en est-il sorti ? Des groupes de travail ! Ce n'est pas rassurant.

La guerre en Ukraine signifie un changement d'époque, mais l'Allemagne continue de faire cavalier seul en sortant de son chapeau 200 milliards d'euros pour la crise énergétique, en s'opposant au plafonnement européen des prix du gaz, en recourant à SpaceX pour lancer ses satellites, en achetant des équipements militaires américains et en se rendant seule à Pékin, à qui elle vend le port de Hambourg.

La confiance est-elle en berne avec l'Allemagne ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP)

M. Bruno Sido.  - La Première ministre devrait répondre !

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger .  - Le couple franco-allemand, qui a été à la fondation des communautés européennes, est un moteur essentiel.

La rencontre entre MM. Macron et Scholz a réaffirmé l'ambition commune de définir une méthode de travail (on ironise à droite), de construire des perspectives communes dans tous les domaines.

Mme Sophie Primas.  - Trêve de blabla !

M. Olivier Becht, ministre délégué.  - Plusieurs chantiers ont été lancés : fonds franco-allemand pour l'innovation, réseau entre les futures élites de nos deux pays...

M. Bruno Retailleau.  - C'est décisif !

M. Olivier Becht, ministre délégué.  - Nous approfondissons le dialogue sur l'énergie, la défense et le spatial (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER). Nous travaillons avec nos amis allemands (marques d'ironie sur les mêmes travées) pour que cela se matérialise en janvier prochain lors du conseil des ministres franco-allemand, à l'occasion du 60e anniversaire du Traité de l'Élysée.

Mme Colonna rencontrera Mme Baerbock au G7 de Münster. Nous souhaitons travailler en commun sur l'Ukraine, le renforcement de l'autonomie stratégique de l'Union européenne ou encore le Sahel.

Le couple franco-allemand est solide et bien décidé à relever les défis de notre temps. (L'ironie redouble à droite et à gauche.)

M. Jean-François Rapin.  - Vous avez parlé de couple et moi de relation. Les temps ont changé : l'Allemagne ne s'excuse plus, elle s'affirme, et la France est à sa remorque. Nous risquons le déclassement diplomatique.

L'élargissement de l'Union européenne recentre géopolitiquement l'Allemagne. Est-elle capable de défendre, au-delà de son intérêt propre, notre intérêt stratégique supérieur : l'Europe de la paix et de la liberté ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

Stratégie de développement de la filière hydrogène

M. Sebastien Pla .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Alors que la souveraineté énergétique française est mise à mal, les énergies décarbonées produites localement apparaissent comme une solution. L'hydrogène, en particulier, présente de nombreux atouts.

Le plan d'action REPowerEU prône la création d'un réseau de distribution d'hydrogène européen dans 21 pays, qui alimenterait notamment un hub d'éolien offshore à Port-la-Nouvelle. C'est dans ce contexte que nous avons appris, avec une grande surprise, le projet de gazoduc sous-marin entre Barcelone et Fos-sur-Mer, baptisé BarMar.

On ne peut balayer d'un revers de main le développement en Occitanie d'une filière d'hydrogène décarboné, déjà en phase opérationnelle ! De plus, nous n'avons aucune information sur l'impact économique et écologique du projet BarMar.

La région Occitanie sera-t-elle connectée à ce gazoduc via Port-la-Nouvelle ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique .  - L'engagement de la France à soutenir une filière d'hydrogène bas carbone est fort. Dans le cadre de France 2030, nous investissons 9 milliards d'euros pour faire émerger toutes les briques technologiques nécessaires, dont un projet de production d'hydrogène décarboné à Port-la-Nouvelle pour la filière transport. Je pense aussi au projet de train à hydrogène vert soutenu par plusieurs régions, dont l'Occitanie.

Le Président de la République a pris deux décisions fortes avec ses homologues espagnol et portugais : augmenter les interconnexions entre la péninsule ibérique et la France et remplacer le projet MidCat, qu'il était difficile de mener à terme, par une infrastructure sous-marine entre Barcelone et Marseille.

L'Occitanie a pris des engagements forts en matière d'hydrogène vert et nous continuerons à les soutenir. Nous souhaitons faire de la France un des leaders mondiaux de l'hydrogène. (Applaudissements sur des travées du RDPI)

M. Sebastien Pla.  - Le Gouvernement a effectivement prévu des moyens colossaux. Mais la méthode nous dérange : BarMar sort du chapeau du Président de la République sans concertation. Si l'on ne connecte pas ce projet à celui de Port-la-Nouvelle, ce dernier ne fonctionnera pas. Nous remercions M. Castex, qui a défendu ce projet dont l'Occitanie a besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Zones à faibles émissions

M. Philippe Tabarot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre des transports, cessez de laisser entendre que vous allez investir 12 milliards d'euros dans le réseau ferroviaire : c'est faux. Comme vous le diriez vous-même : c'est de l'esbroufe ! Nous sommes au dernier rang européen avec la Lituanie en matière de modernisation du réseau. Nos lignes ferroviaires vont être ralenties, voire fermées les unes après les autres, faute d'investissements, si vous ne réagissez pas fortement.

Le Gouvernement devrait écouter plus souvent le Sénat concernant les zones à faibles émissions (ZFE), pour obtenir l'adhésion de nos concitoyens.

Oui, il est urgent de décarboner nos transports, mais pour faire accepter une réforme qui affecte 40 % du parc automobile, il faut informer, écouter et accompagner.

Enfin, la semaine dernière, vous avez repris des apports du Sénat rejetés en son temps par la ministre Pompili, comme le prêt à taux zéro ou la révision du schéma de restriction. Mais il faut surtout développer massivement l'offre de transports entre zones périphériques et centres-villes.

N'est-il pas temps de revoir le dispositif des ZFE ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Monsieur Tabarot, votre introduction était abrupte et imméritée. M. Beaune n'est pas dans l'esbroufe. (Mme Frédérique Puissat proteste.) Nous travaillons à vous présenter des investissements massifs. Pour cela, nous attendons le rapport du Conseil d'orientation des infrastructures, qui a auditionné tous les territoires, pour déterminer une feuille de route. Notre méthode est de se mettre d'accord sur les projets avant de débourser l'argent.

Nous ne pouvons pas continuer à constater les morts de la pollution atmosphérique - 47 000 en 2021 - sans réagir. Mais si l'on mène une politique écologique contre les plus fragiles, on perd leur adhésion. Il faut rendre l'écologie désirable, et non en faire une guerre.

D'où un comité interministériel tous les six mois, le Fonds vert, la possibilité pour les voitures hors critères d'accéder à certains moments en centre-ville... autant de possibilités d'améliorer le dispositif sans détricoter l'ambition. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)

M. Philippe Tabarot.  - Redonnez la main aux élus - sinon les ZFE deviendront des zones à forte exclusion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Nomination du directeur du Mucem

M. Stéphane Le Rudulier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le monde de la culture est en émoi après la nomination par le Président de la République de Pierre-Olivier Costa à la tête du Mucem.

Plusieurs hauts fonctionnaires spécialistes de l'art et de la culture ont dénoncé cette nomination, qui relèverait du pur copinage. Pierre-Olivier Costa, ancien directeur de cabinet de Mme Brigitte Macron et ancien chef de cabinet du Président de la République, ne répondrait pas aux qualifications nécessaires pour le poste. Quels ont été les critères retenus pour sa nomination ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Laurence Rossignol applaudit également.)

M. Olivier Véran, ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme la ministre de la culture, qui assiste à la cérémonie en hommage à Pierre Soulages.

Il n'y a pas eu d'appel à candidatures, car beaucoup de candidats souhaitent garder la confidentialité. (Marques d'ironie à droite et à gauche) Pour le musée du Louvre et le Théâtre national de Strasbourg, le processus a été le même. Mme la ministre confirme qu'elle a reçu plusieurs candidats.

M. Costa a eu des responsabilités au Centre Pompidou, à la Réunion des musées nationaux, au Centre national de la cinématographie (CNC), avant de rejoindre la Ville de Paris puis la présidence de la République. M. Costa a 54 ans. Ne résumez pas sa carrière aux cinq dernières années !

Il a toutes les compétences pour apporter une vision stratégique ; son projet a été jugé le plus solide et le plus innovant (marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains) pour renforcer l'ancrage territorial du musée, avec une vraie politique éducative. (M. François Patriat applaudit.)

M. Stéphane Le Rudulier.  - Où s'arrête la compétence et où commence la récompense ? Vos méthodes interpellent : pas d'annonce de vacance de poste, pas d'appel à candidatures. Je fais un parallèle avec la situation de Christophe Castaner, pressenti pour diriger le Grand port maritime de Marseille. M. Mitterrand avait nommé son fils Jean-Christophe aux affaires africaines, en 1986, parce qu'il aimait les voyages. En est-il de même avec M. Castaner, parce qu'il aimerait les effluves du Vieux-Port, à moins que ce ne soit l'odeur des merguez syndicales ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. David Assouline.  - Ce n'est pas clair !

La séance est suspendue à 16 h 15.

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 30.