SÉANCE

du jeudi 9 février 2023

55e séance de la session ordinaire 2022-2023

Présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président

Secrétaires : Mme Martine Filleul, M. Jacques Grosperrin.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Rénovation énergétique des établissements scolaires

M. Pierre-Antoine Levi .  - L'État souhaite réduire de 40 % la consommation énergétique des bâtiments publics, chantier évalué à près de 40 milliards d'euros. Les collectivités locales souscrivent à cet objectif, pour des raisons écologiques comme financières. Écoles, collèges et lycées sont souvent en haut de la liste, mais les collectivités n'ont pas les moyens de ces rénovations. En hiver, les élèves gardent leur manteau en cours, et, en été, les classes sont des étuves. Ce n'est plus acceptable.

Les collectivités locales doivent être soutenues pour mener les travaux, alors que le reste à charge de 20 % du montant des chantiers est encore trop lourd. L'augmentation du prix des matières premières pousse les maires à renoncer à leurs projets.

L'État doit aider davantage les collectivités territoriales pour la rénovation énergétique de leurs établissements scolaires. La transition énergétique ne peut être réservée aux communes les plus aisées.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Les petites communes doivent effectivement faire l'objet d'une attention particulière. L'État offre déjà un soutien important aux projets éligibles à la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), dont les montants sont à un niveau historique. S'ajoutent les aides du plan de relance : 950 millions d'euros en 2021, et 950 millions d'euros de DSIL exceptionnelle.

Les collectivités locales cofinancent les projets à hauteur de 20 %, mais des exceptions existent, par exemple pour les monuments protégés. S'ajoute l'aide au titre du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA). En 2023, le fonds vert aidera aussi.

Nous étudions des modes nouveaux de financement, grâce à la proposition de loi adoptée à l'Assemblée nationale sur le tiers financement pour la rénovation thermique. En rénovant les écoles, nous enclencherons un cercle vertueux.

M. Pierre-Antoine Levi.  - Les maires veulent mener à bien ces rénovations. Envisageriez-vous de porter le cofinancement de l'État de 80 à 90 % ?

Projet de zone spéciale de carrières dans la vallée de la Maurienne

Mme Martine Berthet .  - Je vous alerte sur les conséquences du projet de zone spéciale de carrières (ZSC) de gypse et d'anhydride dans la vallée de la Maurienne. Le périmètre de la zone est très vaste, notamment en Maurienne, alors que la vallée contribue déjà à l'effort national avec la ligne à grande vitesse (LGV) Lyon-Turin. Cette vallée, au patrimoine naturel et culturel si riche, ne peut être sacrifiée. Ne remettons pas en question tous les efforts d'attractivité réalisés.

Quelles sont vos intentions réelles ? Quel dimensionnement prévoyez-vous ? Quels seront les impacts du projet ? Avez-vous étudié des solutions alternatives dans d'autres régions ?

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Ce projet relève d'une nécessité économique : sécuriser l'approvisionnement en gypse du fleuron industriel qu'est l'usine Placoplatre de Chambéry. À ce titre, la Maurienne dispose d'atouts majeurs, et ce projet de ZSC permettra de pérenniser l'activité.

Il sera mené dans le respect des exigences environnementales ; le public sera associé via une concertation préalable, sous le contrôle de la Commission nationale du débat public (CNDP). Ce n'est qu'après l'obtention des autorisations environnementales et à l'issue de la concertation que le périmètre sera affiné. L'Autorité environnementale veillera à concilier intérêts économiques et protection de la biodiversité.

Mme Martine Berthet.  - Il faudra être à l'écoute. Une pétition a déjà recueilli dix mille signatures, et les élus, soutenus par le département de la Savoie, s'opposent à ce projet surdimensionné.

Dispositif « argent de poche » en milieu rural

M. Jean-Marie Mizzon .  - À Peltre, en Moselle, le dispositif dit « argent de poche » n'est plus d'actualité. Le maire ne peut plus proposer à des jeunes de sa commune de participer à des chantiers, dans l'intérêt de la collectivité, contre gratification.

En Moselle, les chantiers ont été recentrés sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ils bénéficient, à ce titre, d'un régime d'exonération des cotisations sociales, dès lors qu'ils sont portés par des EPCI ; de fait, les communes rurales sont exclues du dispositif.

Ainsi, les jeunes mosellans ne bénéficient pas tous des mêmes droits ; cette rupture d'égalité n'est pas admissible. Il faut préciser le cadre juridique du dispositif, pour qu'il s'applique à l'ensemble d'un territoire, et à tous. Voilà une requête bien légitime !

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Ce dispositif doit être clarifié. Dans les QPV, les chantiers sont mis en oeuvre à l'initiative des communes et des associations, pour des jeunes de 14 à 26 ans. Les sommes versées sont assimilées à des gratifications de stage et donc exonérées de cotisations.

Une extension aux territoires ruraux a été annoncée lors du comité interministériel aux ruralités en septembre 2021, sous réserve que les chantiers bénéficient d'un agrément : ils doivent répondre à une visée civique, culturelle, éducative, sociale ou environnementale. Une instruction a été diffusée auprès des Urssaf et des caisses générales de sécurité sociale (CGSS) dans les départements et les régions.

M. Jean-Marie Mizzon.  - L'instruction ne semble pas encore être arrivée en Moselle, mais je vous remercie pour votre réponse.

Explosion des tarifs d'énergie pour l'institution intercommunale des Wateringues

M. Frédéric Marchand .  - L'institution intercommunale des Wateringues du littoral nord de la France, qui gère les grands ouvrages d'évacuation des crues des Wateringues, notamment les stations de pompage de grande capacité du polder, voit ses tarifs de fourniture d'énergie exploser.

Ces installations consomment de grandes quantités d'énergie, surtout en hiver. Les dépenses, très variables d'une année à l'autre, sont très lourdes. En 2022, la dépense est la même qu'en 2021, mais en n'ayant pompé que 30 % du volume de l'année précédente ! À volume égal, elles se seraient élevées à plus de 2 millions d'euros, pour un budget de fonctionnement de 3,8 millions.

Or l'institution doit investir pour réaliser le programme d'actions de prévention des inondations (Papi) du delta de l'Aa et s'adapter au changement climatique. Par ailleurs, la réforme de la compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) a alourdi la fiscalité.

Il faut urgemment trouver une solution. Des mesures exceptionnelles sont nécessaires : l'institution devrait bénéficier d'un bouclier tarifaire.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - L'institution intercommunale des Wateringues bénéficie de plusieurs dispositifs de soutien. En 2023, le niveau de la part d'accise sur l'électricité est maintenu au minimum communautaire : la baisse de 0,50 euro par mégawattheure (MWh) est ainsi prolongée.

L'institution n'est pas éligible au bouclier tarifaire, mais elle l'est à l'amortisseur électricité, mis en place au 1er janvier. L'État prend en charge 50 % du coût de la part énergie du contrat au-delà d'un prix de référence de 180 euros par MWh. Il suffit de remplir l'attestation d'éligibilité.

Si l'institution rencontre une autre difficulté, nos services sont à votre disposition.

Sous-occupation des logements sociaux

Mme Laurence Muller-Bronn .  - Les maires rencontrent des difficultés pour attribuer les logements sociaux car les rotations sont insuffisantes. Certains locataires, qui ont obtenu un logement de grande taille en raison de leurs revenus et de leur situation familiale, conservent leur logement alors qu'ils ne sont plus éligibles.

La pénurie de logements s'aggrave. À Obernai, pour 756 logements sociaux, 400 dossiers sont en attente, et seuls 40 appartements sont libérés par an. Les pertes financières sont importantes car les loyers ne sont pas réactualisés. Certains locataires sont eux-mêmes propriétaires de logements loués sur le marché privé...

La loi doit évoluer. L'expulsion n'est pas une solution. Soit les locataires dépassant le barème libèrent leurs logements, soit ils acceptent que leur loyer se rapproche du marché privé. Il est urgent de lutter contre ces abus.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - La sous-occupation du parc social concerne 46 % des logements sociaux, ce qui est très important. Sur l'ensemble du parc locatif, c'est 71 % des logements.

La production et l'attribution des logements sociaux s'inscrivent dans le long terme. Le plan de relance a adapté près de 50 000 logements au marché local de l'habitat. De plus, le développement de produits intermédiaires comme le bail réel solidaire améliore les parcours résidentiels.

Depuis la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), en cas de sous-occupation, le bailleur doit proposer au locataire une offre de relogement. Si ce dernier refuse trois offres, qu'il n'a pas plus de 65 ans ou des difficultés particulières, il perd son droit au maintien dans les lieux.

La gestion en flux des logements sociaux permet aux bailleurs de s'affranchir des périmètres de programme et de contingents.

Gouvernement et Parlement pourront proposer des évolutions législatives : nous sommes prêts à aborder ce chantier avec vous.

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Ces problématiques concernent entre 1 % et 2 % du logement social. Les maires pourraient mieux accueillir les primo-accédants.

Contrôle technique des deux-roues motorisés

M. Olivier Cigolotti .  - La directive européenne relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur laisse à chaque pays libre d'introduire ou non un tel contrôle pour les deux-roues.

En France, des mesures alternatives sont proposées : permis, renforcement des plans départementaux d'actions de sécurité routière, respect des normes de bruits, limitations de vitesse ou encore zones à faible émission, proposées par le Gouvernement en collaboration avec les fédérations de motards. Pourtant, le 31 octobre 2022, le Conseil d'État a remis en cause cette orientation, arguant que son ambition environnementale était insuffisante.

Sachant que moins de 0,5 % des accidents de deux-roues motorisés sont liés à un problème sur le véhicule, le contrôle technique obligatoire ne semble pas être pertinent. La mortalité a baissé de 19% en dix ans. Comment le Gouvernement compte-t-il poursuivre le travail engagé, sans imposer un contrôle technique obligatoire ?

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Le sujet est sensible. Une directive de 2014 prévoit un contrôle technique ou des mesures alternatives pour la sécurité routière. Un nouveau projet de directive sera prochainement proposé, qui imposera certainement un contrôle technique pour les deux-roues.

Dans le cadre juridique actuel, le Gouvernement a développé des mesures alternatives au contrôle technique. Un décret de 2021 imposant le contrôle technique a été abrogé. Le 31 octobre dernier, le Conseil d'État a indiqué que les mesures alternatives proposées étaient insuffisantes et trop ponctuelles, imposant de fait un contrôle technique. Dans cette optique, j'ai engagé une concertation avec les associations, dont je présenterai les résultats. Nous devrons mettre en place un contrôle technique, mais je souhaite qu'il soit le plus équilibré possible.

M. Olivier Cigolotti.  - Si contrôle technique il y a, il devra privilégier le contrôle du niveau des émissions polluantes et sonores, plus particulièrement pour les cyclomoteurs de moins de 50 cm3.

Indemnités kilométriques des infirmiers libéraux de Haute-Savoie

Mme Sylviane Noël .  - La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Haute-Savoie a récemment modifié les modalités de remboursement des indemnités kilométriques des infirmiers libéraux. Ceux exerçant en zone rurale et en montagne, dans des secteurs difficiles d'accès, sont particulièrement pénalisés. À Passy, la perte de revenus s'élève à 23 %, au Grand-Bornand à 15 % et à Taninges à 22,6 % ! Et ce dans un contexte d'inflation, qui touche en particulier les carburants.

Ces infirmiers libéraux réalisent un travail exceptionnel au plus près des patients, leur permettent de rester à domicile et contribuent au désengorgement de nos établissements de santé. Comment comptez-vous remédier à cette injustice ?

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports .  - Le coût des transports est au coeur des préoccupations de nos concitoyens, en particulier des infirmiers libéraux. En 2019, les partenaires conventionnels étaient convenus d'un abattement du remboursement des indemnités kilométriques pour limiter les indus et facturer en étoile, sans mesurer à chaque fois la distance entre domicile du patient et cabinet de l'infirmier. Les modalités de facturation peuvent être adaptées aux réalités locales.

En Haute-Savoie, les nouveaux modes de calcul sont plus avantageux, avec une prise en compte des kilomètres effectués dans une même commune et une valorisation des indemnités au titre de la zone montagne dans tout le département.

Le Gouvernement soutient l'implication des infirmiers libéraux dans la prise en charge des patients à domicile. Un avenant prévoit le doublement des nouvelles rémunérations sur le bilan de soins infirmiers jusqu'en 2024 ; en 2019, un avenant améliorait déjà la prise en charge des patients. Enfin, le PLFSS pour 2023 confie de nouvelles missions aux infirmiers, ce qui améliorera aussi leur pouvoir d'achat. Nous sommes prêts à regarder chaque situation.

Mme Sylviane Noël.  - Sur le terrain, les infirmières ont une autre vision : 0,60 euro d'indemnité kilométrique en moyenne, cela ne permet pas de survivre. Ces économies de bout de chandelle ne conduiront qu'à la réhospitalisation de patients. Il y a urgence.

Conseils pour les droits et devoirs des familles

Mme Victoire Jasmin .  - Les conseils pour les droits et devoirs des familles (CDDF), dispositifs d'aide à la parentalité fondés sur l'action sociale et éducative, ont été rendus facultatifs pour toutes les communes depuis la loi Engagement et proximité.

Le CDDF, qui s'adresse aux parents de mineurs en difficultés, peut être saisi par le maire lorsque le comportement de l'enfant entraîne des troubles à l'ordre public.

Les élus ultramarins s'inquiètent d'une insécurité croissante dans leurs territoires. Les départements d'outre-mer sont parmi les plus criminogènes de France. Vols, violences volontaires, infractions en matière de sécurité routière, stupéfiants, violences intrafamiliales... Cette délinquance concerne aussi les mineurs, avec des phénomènes de bandes organisées.

La prévention est fondamentale pour impliquer et aider les familles en difficulté. Les élus locaux doivent pouvoir activer tous les leviers à leur disposition, y compris les CDDF. Ces derniers pourraient-ils être généralisés en outre-mer, et plus particulièrement en Guadeloupe ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - Le maire, dont les fonctions sont essentielles en matière de prévention de la délinquance, participe à la dynamique locale impulsée par le préfet dans le cadre du plan départemental de prévention de la délinquance. Il peut utiliser de nombreux outils réglementaires, dont le rappel à l'ordre, la transaction et le CDDF.

Il doit agir à l'égard des mineurs fragiles comme pour ceux qui sont passés à l'acte et risquent de basculer dans la délinquance. Le CDDF est un espace de dialogue et d'alerte où chacun prend conscience de ses droits et de ses devoirs : en présence des parents, l'autorité républicaine incarnée par le maire reçoit le jeune, revient sur les faits, rappelle le rôle éducatif des parents, sans qu'une réponse judiciaire, limitée par la minorité des auteurs, soit nécessaire. Responsabilisés, les parents sont confortés dans leur rôle ; écouté, le jeune se sent considéré, et le maire joue son rôle de proximité.

Il faut encourager les maires à utiliser les CDDF. Je saisirai les préfets pour qu'ils impulsent une dynamique. Par ailleurs, le ministère de l'intérieur a sollicité le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation pour qu'il se rapproche de l'Association des maires de France afin de promouvoir les CDDF.

Barème de référence pour le calcul de la pension alimentaire

M. Yves Détraigne .  - Je n'ai jamais eu de réponse du Gouvernement à ma question du 1er avril 2021, sur un sujet néanmoins très sérieux.

L'affichage, sur le site de la Chancellerie, d'un barème de référence pour le calcul de la pension alimentaire est une mesure de simplification bienvenue, mais il serait bon de préciser clairement que ce barème n'est qu'indicatif. D'autant qu'il propose un montant de pension à verser en cas de résidence alternée, alors que dans 75 % de ces cas, aucune contribution alimentaire n'est prévue... Même indicatif, ce barème officiel, sans notice explicative, peut induire en erreur.

Plus étonnant, il laisse penser que les ressources du parent bénéficiaire ne sont pas prises en compte dans le calcul de la pension, ce qui est contraire aux dispositions du code civil.

Ne sacrifions pas la justice familiale sur l'autel de la simplification, voire de la déjudiciarisation du contentieux familial ! Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter les éclaircissements utiles ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - Le Gouvernement lutte contre les retards et impayés de pension alimentaire. Preuve en est la récente systématisation de l'intermédiation financière des pensions alimentaires par la caisse d'allocations familiales (CAF).

Le caractère indicatif du barème est mentionné à deux reprises sur le site internet : dans la fiche « Tout savoir sur la pension alimentaire », qui précise en outre que le montant en est fixé par le juge, et dans le mode d'emploi du simulateur.

La résidence alternée n'exclut pas, par principe, le versement d'une pension alimentaire -  si les parents ne s'entendent pas pour partager les frais d'éducation et d'entretien de l'enfant, en fonction de leurs ressources, ou si l'un ne peut assumer la charge financière de la résidence alternée. Elle ne peut donc être exclue du barème qui, je le rappelle, est indicatif.

La pension est déterminée par le juge qui prend en compte les revenus et les charges de chacun des parents, en corrélation avec les besoins de l'enfant.

En outre, ainsi que le précise la circulaire du 12 avril 2010, cette table de référence est déterminée selon la méthode dite du pourcentage des revenus, qui applique au revenu du parent débiteur un coefficient correspondant au coût relatif de l'enfant. Pour les revenus inférieurs à 5 000 euros, les résultats sont identiques à la méthode dite du partage des revenus, fondée explicitement sur les revenus des deux parents. Ainsi, les informations diffusées sur le site internet ne méconnaissent pas les règles du code civil sur la détermination des pensions alimentaires.

Régime juridique des colocations de seniors

Mme Sonia de La Provôté .  - Selon le code de l'action sociale et des familles, « les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale » sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, dont la création est soumise à une autorisation délivrée par le président du conseil départemental, par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) ou conjointement.

Les colocations de seniors qui se développent comme alternative à l'Ehpad répondent à une vraie demande. Elles apportent un cadre de vie sécurisant, avec une présence permanente de personnel et des espaces de vie commune. Elles proposent ou imposent des prestations hôtelières facturées forfaitairement : restauration, ménage, gardiennage, coordination des démarches administratives ou gestion des auxiliaires de vie.

Bref, ces résidences ressemblent fort à des établissements médico-sociaux et devraient donc être soumises à autorisation, ou du moins encadrées. Or plusieurs ont ouvert leurs portes sans autorisation préalable des autorités compétentes ni vérification de leur conformité.

De quel régime juridique relèvent ces structures ? Quelles sont leurs obligations pour obtenir une autorisation de création ? Des évolutions réglementaires sont-elles envisagées pour clarifier leur statut et contrôler d'éventuels débordements ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - La loi du 6 juillet 1989 définit la colocation de droit commun. Les colocations s'adressant aux personnes âgées en perte d'autonomie et proposant différents services s'apparentent davantage à des résidences services seniors. Comme elles, elles ne font pas l'objet d'autorisation médico-sociale et car elles ne proposent, outre le logement, que des prestations hôtelières et d'aide administrative : ce ne sont pas des établissements médico-sociaux.

Cependant, bien que la réglementation ne permette pas de contrôler les logements en colocation, des inspections sont envisageables dans certains cas. Les services départementaux comme les ARS assurent un contrôle auprès des services d'aide et d'accompagnement ou de soins infirmiers à domicile, qui eux font l'objet d'autorisation. Le préfet peut mobiliser les agents de contrôle de l'ARS et de l'État pour contrôler les services sociaux ou médico-sociaux intervenant auprès des colocataires. Enfin, les services des directions départementales de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP) peuvent intervenir dans le champ de la protection des consommateurs par rapport aux prestations facturées aux colocataires.

Vous le voyez, le développement d'alternatives à l'Ehpad ne se fait donc pas hors de tout contrôle, et le ministère des solidarités est mobilisé pour garantir la plus grande qualité d'accueil et d'accompagnement à toutes les personnes âgées.

Soutien de l'État aux projets de résidences de répit partagé

Mme Monique Lubin .  - Mon amendement au projet de loi de finances pour 2023 visant à accompagner le développement de dix résidences de répit partagé sur tout le territoire, adopté à l'unanimité, a été balayé par le Gouvernement dans le 49.3.

Ces résidences associant prestations hôtelières et présence de professionnels médico-sociaux sont pourtant essentielles. La France compte plus de onze millions d'aidants familiaux, et sept sur dix refusent le placement définitif de leur proche. Ils aspirent à un droit au répit partagé.

Une dizaine de territoires sont porteurs de tels projets, singulièrement dans les Landes. Cofinancées par l'État et les départements, ces résidences nécessitent un engagement de l'État au titre des crédits médico-sociaux. Au regard du bénéfice retiré, le coût est minime.

M. Jean-Christophe Combe a considéré que des crédits du PLFSS pouvaient bénéficier aux porteurs de projets de cette nature, mais aucun crédit n'est fléché vers ces dispositifs pour les ARS. Quels moyens votre Gouvernement compte-t-il déployer pour accompagner le développement des résidences de répit partagé ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - La stratégie Agir pour les aidants 2020-2022 comprenait, parmi ses six priorités, celle d'accroître et diversifier les solutions de répit, soutenue par un budget cumulé de 105 millions d'euros.

Le Gouvernement poursuit dans cette voie et une deuxième stratégie aidants sera élaborée en 2023. Une concertation des acteurs est en cours. Le Gouvernement s'appuie notamment sur le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le cadre juridique et le financement du répit. En parallèle, la Haute Autorité de santé a été saisie sur la définition du répit et l'élaboration de bonnes pratiques professionnelles.

Les auteurs recommandent de diversifier les solutions de répit, notamment en adaptant l'offre d'accueil temporaire et en améliorant l'accès au relais à domicile et aux séjours vacances-répit. Leurs recommandations ne vont pas dans le sens d'un déploiement généralisé de maisons de répit ou de résidences de répit partagé. Les modèles existants doivent être complétés par une offre diversifiée et de proximité, accessible notamment le soir et le week-end. Il s'agit à la fois de renforcer les plateformes de répit existantes et de développer une meilleure suppléance au domicile des personnes aidées.

C'est le modèle que nous déployons par exemple à Mont-de-Marsan, avec une maison d'accueil pour personnes âgées qui permet un hébergement temporaire, dans la limite de 90 jours par an, mais aussi des prises en charge ponctuelles via l'accueil de jour.

C'est en proposant des solutions adaptées et diversifiées que nous assurerons un meilleur soutien aux aidants, si essentiels dans notre politique de solidarité.

Mme Monique Lubin. - Bref, vous me dites qu'il y a assez de maisons de répit partagé, et que ce n'est pas la solution ? J'espère avoir mal compris ! (M. le ministre fait mine de vouloir reprendre la parole.)

M. le président.  - Vous ne pouvez pas répondre, monsieur le ministre. Ici, ce n'est pas le bazar : c'est le Sénat. (Sourires)

Jours fériés dans la fonction publique territoriale en Alsace-Moselle

M. Christian Klinger .  - L'Alsace et la Moselle sont, en partie, régies par un droit local issu de leur histoire mouvementée, devenu modèle de différenciation territoriale et, depuis 2011, principe fondamental reconnu par les lois de la République. Nos concitoyens sont attachés à ce droit qui règle de nombreux aspects de leur vie quotidienne.

Il semblerait pourtant que l'administration centrale oublie parfois ces particularités. La durée annuelle du temps de travail des fonctionnaires territoriaux a été fixée à 1 607 heures. Or le code général de la fonction publique prévoit que le Vendredi saint et la Saint-Étienne sont fériés et chômés pour les agents de la fonction publique territoriale de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, fixe donc un temps de travail annuel de 1 593 heures. Les agents n'ont pas à rattraper ces jours fériés.

Monsieur le ministre, votre réponse est attendue par l'ensemble des agents des collectivités territoriales d'Alsace et de Moselle et par les élus locaux.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - L'article 47 de la loi de transformation de la fonction publique, applicable à l'Alsace-Moselle, a supprimé les régimes de travail dérogatoires mis en place avant 2001 dans les collectivités territoriales.

Dans les délais prévus par le législateur, les collectivités concernées sont tenues de définir, dans la limite d'un an à compter du renouvellement général de leurs assemblées délibérantes, de nouvelles règles relatives au temps de travail de leurs agents.

Le code du travail prévoit que dans ces départements le Vendredi saint et le 26 décembre sont chômés, mais cela ne fait pas obstacle aux 1 607 heures, cette durée légale de travail s'appliquant en effet uniformément et indépendamment du nombre de jours chômés.

M. Christian Klinger.  - Je ne partage pas votre interprétation. En tant que ministre des outre-mer, vous devriez savoir qu'il faut respecter les spécificités. Modifiez les textes réglementaires !

Conséquences de l'orage du 20 juin 2022 en Dordogne

Mme Marie-Claude Varaillas .  - Dans la nuit du 20 au 21 juin, une tempête de grêle exceptionnelle dévastait 46 communes du Ribéracois, en Dordogne. Le ministre de l'agriculture a dépêché deux inspecteurs pour constater les dégâts, d'une ampleur démesurée. Mardi 24 janvier, dans une large unité syndicale, 300 agriculteurs ont exprimé leur désespoir devant la préfecture de la Dordogne et demandé la reconnaissance du régime de calamités agricoles.

La chambre d'agriculture a évalué les pertes de cultures à 25 millions d'euros, montant que les aides publiques ne couvrent qu'à 13 %. À ce jour, 189 exploitants ont bénéficié de 1,74 million d'euros d'aide, soit 9 200 euros par exploitant en moyenne ; c'est insuffisant, car il faut ajouter aux pertes les frais de remise en culture, l'achat de fourrage, d'aliments pour leurs élevages et la remise en état des bâtiments et du matériel agricole.

Depuis huit mois, c'est un territoire meurtri qui se sent abandonné. Il faut avoir entendu les témoignages et vu ces paysages dévastés pour mesurer sa détresse. J'invite le ministre de l'agriculture en Dordogne pour qu'il constate lui-même l'ampleur de la catastrophe.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Le ministre de l'agriculture est bien conscient de la détresse du Ribéracois : je lui transmettrai votre invitation.

Ces intempéries dramatiques ne sont pas éligibles au régime de calamité agricole mais des mesures de soutien ont été annoncées : dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB), report de cotisations sociales et prolongation de six mois des prêts garantis par l'État (PGE).

Un fonds d'urgence doté de 40 millions d'euros a également été créé à la main des préfets, qui versent des aides plafonnées à 5 000 euros ou au plafond de minimis de 20 000 euros pour les exploitations les plus touchées. Une étude approfondie est faite de chaque situation.

Soutien au transport routier

M. Jean-Pierre Moga .  - L'augmentation du gazole de 36 % en un an et la hausse cumulée de 6,7 % des tarifs de péage en 2022 et 2023 mettent le secteur du transport routier en grande difficulté. Vous me rétorquerez que les prix du pétrole ont baissé ces derniers mois, ce qui est vrai, mais ils se sont stabilisés à des niveaux bien supérieurs à ceux qui prévalaient à l'aube du conflit en Ukraine.

Nos voisins maintiennent des dispositifs d'aide pour ce secteur. Le Gouvernement pourrait prévoir des aides ponctuelles et exceptionnelles ; si tel était le cas, quelles en seraient les modalités, les montants budgétaires ainsi que les critères de ciblage ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - En effet, les prix du carburant sont trop volatils pour que l'on puisse se contenter de la baisse récente. Le Gouvernement n'a pas attendu pour réagir via une aide forfaitaire aux entreprises de transport public routier - marchandises, voyageurs, sanitaire ou négoce d'animaux vivants. Le téléservice permettait de s'inscrire entre le 8 avril et le 31 mai 2022, les demandes en recours pouvant être déposées jusqu'au 31 août : les premiers paiements interviendront jusqu'à la fin du premier trimestre 2023. Variable selon le nombre et le tonnage de véhicules de l'entreprise, elle peut atteindre 1 300 euros par véhicule.

De plus, une entreprise de transport de marchandises ou de transport public de voyageurs peut demander le remboursement partiel de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE) si elle remplit les conditions détaillées sur le site entreprendre.service-public.fr. Le remboursement est calculé à partir de sa consommation réelle de gazole, d'essence ou de biocarburants sur un trimestre. Le montant remboursé est calculé sur un taux forfaitaire ou régional. Les montants de la TICPE pour l'année 2023 n'étant pas encore communiqués, les montants des années précédentes sont toujours en vigueur.

Situation alarmante des artisans boulangers

M. Patrice Joly .  - La baguette française, récemment inscrite au patrimoine immatériel de l'Unesco, pourrait désormais être en voie d'extinction dans nos villes et villages !

Affaiblis par la concurrence des grandes surfaces et par la hausse des prix du beurre ou de la farine, nos artisans sont frappés de plein fouet par l'explosion de leurs factures de gaz et d'électricité, parfois multipliées par dix depuis l'automne. Plusieurs boulangers ont déjà été contraints de fermer boutique - je connais un cas dans la Nièvre.

Certes, les TPE de moins de dix salariés avec un chiffre d'affaires annuel de moins de 2 millions d'euros et un compteur électrique d'une puissance inférieure à 36  kVA ont droit à un bouclier tarifaire. Mais de nombreuses boulangeries en sont exclues car elles consomment plus.

Les fournisseurs ont par ailleurs accepté que les TPE ayant signé un contrat d'électricité au cours du second semestre 2022 ne paient pas plus de 280 euros le mégawattheure (MWh) en moyenne sur 2023. C'est bien, mais quid des autres ? Il y va de l'attractivité de nos villages.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Je suis à votre disposition pour examiner tout cas particulier.

Non, la baguette ne disparaîtra pas des 33 000 boulangeries françaises. Les difficultés ont surtout concerné le tiers d'entre elles qui avaient renouvelé leur contrat au deuxième semestre 2022, et qui ont été confrontées à des tarifs aberrants. Il est vrai que nombre d'entre elles ne sont pas éligibles au tarif TPE, car elles consomment souvent 70, voire 90 kVA.

Fin 2022, nous avons donc réuni les fournisseurs pour fixer un prix proche du tarif réglementé de 280 euros le MWh. L'amortisseur s'appliquera également. Les moyens sont là : 12 milliards d'euros. Il faut les mobiliser. Sur le site impots.gouv.fr figurent les coordonnées des conseillers départementaux qui sont là pour aider nos boulangers.

Nouvelles obligations de déclaration des propriétaires immobiliers

Mme Catherine Procaccia .  - La loi de finances pour 2020 oblige 34 millions de Français à déclarer chacun de leurs locaux d'ici le 30 juin.

Je m'étonne de l'absence de communication sur cette nouvelle obligation, sanctionnée par une amende de 150 euros par local oublié, d'autant que caves et parkings apparaissent comme des biens indépendants, et que l'administration affecte automatiquement un pourcentage de partie commune qui ne semble pas en rapport avec les tantièmes de copropriété.

Enfin, le calcul des pièces ne correspond pas aux pratiques habituelles, puisque cuisines et salles de bains sont considérées comme telles. En cas d'erreur, impossible de corriger soi-même.

Quels sont les moyens prévus pour accompagner les Français, notamment ceux qui continuent à faire des déclarations sur papier ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Effectivement, les propriétaires doivent déclarer à l'administration fiscale, avant le 1er juillet, à quel titre ils occupent les locaux, ou, sinon, l'identité des occupants.

Parmi les actions de communication, un message a été affiché en première page des avis de taxes foncières et de taxe sur les logements vacants à l'automne 2022. Un encart apparaît sur le site « Gérer mes biens immobiliers ». Des campagnes de presse, radio et télévision sont en cours et des campagnes ciblées seront réalisées par mail et courrier papier.

Je comprends votre agacement. Ces campagnes sont en retard, mais doivent commencer.

La déclaration de revenus de 2022 sera aussi l'occasion de communiquer.

Comme pour toute réforme d'envergure, l'administration fiscale fera preuve de bienveillance.

Espérons que la communication, qui s'accroîtra ce mois-ci, soit suffisante.

Mme Catherine Procaccia.  - La communication et la bienveillance sont indispensables. Ces éléments étaient gérés par l'administration et sont reportés sur les particuliers.

Qui va régulièrement sur le site des impôts ?

Qu'une salle de bains d'un mètre carré soit une pièce, mais pas une entrée de 18 mètres carrés, c'est aberrant ! En outre, il est impossible de corriger.

Aide aux boulangers

M. Didier Marie .  - Les boulangers de Seine-Maritime sont en plein désarroi : 60 % d'entre eux, au tarif jaune, voient leur facture d'électricité augmenter. Ceux qui renouvellent leur contrat subissent des hausses considérables.

Les aides n'apaisent pas leurs craintes ; pire, elles suscitent leur colère. Certes, le bouclier tarifaire limite à 15 % la hausse du prix de l'électricité, mais son bénéfice est subordonné au nombre de salariés et à la puissance du compteur électrique. Or 80 % des boulangers n'y sont pas éligibles. Les autres solutions, tels que l'amortisseur électricité, ne répondent pas aux difficultés.

Ces aides ne sont pas à la hauteur, alors que les boulangers sont également soumis à une envolée des prix des matières premières. Le prix de la baguette augmentera, frappant le pouvoir d'achat des ménages. Des emplois seront supprimés. Des commerces disparaîtront.

Que faire pour sauver la baguette, patrimoine mondial de l'Unesco ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Je ne suis pas la ministre du commerce de la peur. Cela fait plusieurs mois que nous nous attelons à trouver des solutions. Notre devoir n'est pas d'expliquer à nos boulangers comment ils vont mourir, comme le font certains, mais plutôt comment ils peuvent s'en sortir.

Le Gouvernement répond à la crise avec 12 milliards d'euros : c'est inégalé en Europe.

Le bouclier tarifaire, c'est 110 milliards d'euros pour protéger le pouvoir d'achat des Français. En outre, les consommateurs peuvent supporter une hausse de 3 à 5 % du prix de la baguette.

L'État assume près de 60 % des hausses de prix de l'énergie.

Allez sur la page d'accueil du site impots.gouv.fr : vous y trouverez l'amortisseur, le guichet, les coordonnées directes des conseillers.

Les aides existent. Elles doivent être sollicitées. Je suis prête à me battre au-delà de tout, mais une fois que les 12 milliards d'euros prévus seront décaissés.

M. Didier Marie.  - Il y a un écart entre ce que vous dites et ce que vivent les boulangers. Le représentant des boulangers de Seine-Maritime me dit que beaucoup de ses confrères sont en grande difficulté. Les aides ne sont pas suffisantes.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée.  - Elles ne sont pas décaissées !

Difficultés administratives et financières des soldats blessés

Mme Jocelyne Guidez .  - Pour un blessé du fait de son engagement militaire, il devrait exister une présomption de bonne foi. Le Président de la République, le 13 juillet 2022, a déclaré qu'il fallait neutraliser la charge de la preuve et garantir aux soldats et à leurs familles « une prise en charge immédiate, durable, adaptée et bienveillante ».

Or nos soldats blessés ont de grandes difficultés dans leur parcours médico-administratif ; certains sont même contraints de saisir le tribunal administratif pour faire valoir leurs droits. Lassés, ils abandonnent souvent. Une simplification des démarches ne ferait que reconnaître leurs sacrifices et leur engagement sans faille.

Ils ne demandent qu'une chose : pouvoir conserver leur dignité et subvenir aux besoins de leur famille.

Savez-vous quelle est la pensée malheureuse de nombreux soldats blessés ? Mieux vaut mourir que d'être blessé, le décès de l'individu débloquant toutes les instances.

N'est-il pas temps de les prendre réellement en compte ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Votre question me touche car je connais très bien le handicap.

La prise en charge des blessés dépasse le simple devoir moral. Nos militaires doivent pouvoir conduire leurs missions sans avoir à redouter un deuxième parcours du combattant en cas de blessure.

C'est pourquoi il est important de faire émerger la présomption de bonne foi et d'instaurer un accompagnement individualisé et bienveillant.

La prise en charge doit être simplifiée rapidement. Un nouveau plan ministériel, prêt à être déployé, améliorera l'accompagnement des soldats blessés. Il réduira notamment les démarches administratives.

Les délais de traitement des dossiers ont été réduits ces dernières années mais il faut encore simplifier les procédures.

Mme Jocelyne Guidez.  - Merci pour cette réponse. Je me bats sur la simplification depuis plus de deux ans. J'aurais aimé que les parlementaires soient impliqués dans le travail réalisé actuellement par le ministère.

Conséquences de l'accord avec la Nouvelle-Zélande sur la filière ovine

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Le 30 juin 2022, la Commission européenne a acté la signature de l'accord entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande, qui octroie un quota de 38 000 tonnes équivalent-carcasse (TEC), en plus des contingents déjà accordés historiquement à la Nouvelle-Zélande.

La quasi-totalité de la viande ovine néo-zélandaise est importée en frais, au détriment des éleveurs français, soumis à plus de normes. Ces animaux sont abattus en janvier pour être vendus à Pâques. Cela interroge sur la notion de « vendu en frais »...

Comment préserver les revenus des éleveurs ovins français et rendre plus cohérentes les politiques européennes, qui tout en prônant la décarbonation, encouragent les échanges commerciaux avec l'autre côté de la planète pour des produits disponibles en France ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Dans cette négociation commerciale, la France a particulièrement défendu ses filières agricoles. L'ouverture de 38 000 tonnes se fera progressivement sur sept ans. Nous avons limité la viande fraîche à 13 500 tonnes.

Le risque que cet accord augmente les importations de Nouvelle-Zélande est faible.

La France défend le rééquilibrage de la politique commerciale européenne pour mieux y intégrer le développement durable. Sous sa présidence de l'Union européenne, le concept de mesure miroir a commencé à se généraliser. La Commission a enfin présenté en décembre dernier le projet d'acte interdisant l'import de viande produite avec des antibiotiques de croissance.

L'accord avec la Nouvelle-Zélande intègre l'Accord de Paris ainsi que la possibilité de sanctions commerciales en cas de violation de ce dernier ou des droits fondamentaux des travailleurs.

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Nos éleveurs connaissent des situations catastrophiques et ne parviennent plus à vivre de leur production, ce qui menace notre souveraineté alimentaire.

Binômes d'élus dans les établissements scolaires

M. Henri Cabanel .  - Je propose de mener dans l'Hérault une expérimentation : des binômes d'élus, parlementaires ou élus locaux, interviendraient dans les écoles, collèges et lycées. Le même discours serait tenu partout, sans prosélytisme, dans un seul but d'information institutionnelle.

Dans mon rapport d'information Jeunesse et citoyenneté : une culture à réinventer, j'ai montré que l'éducation morale et civique ne remplissait pas totalement ce rôle, son champ ayant été élargi alors que les horaires restaient très réduits. Des enquêtes auprès des jeunes le confirment. Par ailleurs, des élus interviennent déjà dans les établissements, mais de façon spontanée, sur des contenus laissés à leur discrétion : il est primordial d'encadrer ces actions.

Le Gouvernement peut-il valider cette expérimentation, qui sera évaluée après une année scolaire ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La transmission des valeurs de la République est essentielle. Tout au long de la scolarité, l'enseignement moral et civique vise à faire comprendre le bien-fondé de nos règles et accepter le pluralisme des opinions et des modes de vie. Dans ce cadre comme lors d'actions éducatives plus larges, des élus interviennent déjà auprès des enseignants - et c'est heureux !

Je partage l'attention que vous portez au contenu et au bon déroulement de ces interventions, qui doivent être préservées de tout prosélytisme et respecter strictement la neutralité de l'enseignement. Il est important qu'elles s'inscrivent dans le cadre du projet d'établissement et s'appuient sur les équipes éducatives, comme c'est déjà le cas.

Je vous remercie pour votre proposition. Comme vous, nous continuerons de veiller à ce que ces interventions s'inscrivent dans un cadre pédagogique adapté et respectent la neutralité absolue de l'enseignement.

M. Henri Cabanel.  - Je m'attendais à une telle réponse, mais un travail important a été mené dans l'Hérault avec la rectrice d'académie et l'association des maires. Définir un cadre précis pour, justement, prévenir tout prosélytisme, c'est le sens de l'expérimentation que je souhaite mener et qui bénéficierait à toutes les écoles du département.

Fermetures de classes et d'écoles dans les territoires ruraux

Mme Annick Billon .  - Ma question devait porter sur la suppression de l'enseignement technologique en sixième, mais ce sujet a été largement abordé la semaine dernière. Je resterai vigilante sur les mesures qui émergeront des concertations en cours.

J'aborderai ce matin un autre sujet d'importance : les décisions unilatérales de fermeture de classe ou d'école dans plusieurs départements, alors que le Gouvernement présente le soutien à la ruralité comme l'une de ses priorités. Ces mesures ont des conséquences sur l'aménagement du territoire et les projets d'investissement.

L'État propose, certes, d'abaisser le seuil de fermeture. Mais il ne serait pas acceptable que la baisse du nombre de postes inscrite en loi de finances pénalise d'abord les zones rurales, où les difficultés liées à la mobilité sont fortes. Dans le cadre des mesures 73 et 74 de l'Agenda rural, l'État s'est engagé à prendre en compte un indice d'éloignement et les spécificités des classes multi-âges.

Quand allez-vous appliquer ces mesures et cesser d'imposer des regroupements aux élus et aux familles des territoires ruraux ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Nous pensions que votre question porterait sur l'enseignement de technologie. Avec audace - heureusement que les parlementaires en ont ! -, vous m'avez interrogée sur la question, tout aussi légitime, des fermetures de classes. Je n'ai pas de réponse satisfaisante à vous apporter. Comme parlementaire, je détestais qu'on me réponde à côté de la plaque... Je vous propose donc de transmettre votre question au ministre de l'éducation nationale, qui vous répondra précisément et rapidement.

Mme Annick Billon.  - C'est tout à votre honneur, madame la ministre. Les questions se multiplient sur ce sujet, tant les problèmes sont récurrents. L'Association des maires ruraux de France demande un moratoire. Voilà quelques années, notre ancien collègue Alain Duran proposait de mieux anticiper les évolutions, pour éviter le couperet annuel.

Conséquences des fermetures d'école pour les communes

Mme Christine Herzog .  - Je regrette, moi aussi, l'absence du ministre de l'éducation nationale.

La suppression d'une classe de primaire à Landroff, en Moselle, vient d'être décidée par le directeur académique des services de l'éducation nationale, le Dasen. Comme toute commune, celle-ci a l'obligation d'ouvrir et d'entretenir une école en vertu de l'article L. 212-2 du code de l'éducation, ce qui implique des engagements financiers de long terme. Le seuil minimal d'élèves pour ouvrir une école étant fixé à quinze, je m'étonne de la fermeture d'une classe de vingt et un élèves...

Dans le cadre des regroupements pédagogiques intercommunaux, des départs d'élèves sans dérogation se produisent - à Landroff, on recense cinq cas. Ces départs pèsent sur les décisions de fermeture.

Une autre commune mosellane, Charly-Oradour, m'a interpellée sur la fermeture d'une classe de maternelle, alors qu'elle vient de viabiliser 93 terrains à bâtir.

Ces fermetures ne sont pas sans conséquence sur les projets des familles et, surtout, les finances des communes. Elles contribuent à la désertification d'élèves dans des communes rurales qui, souvent, ont encore des engagements financiers pour leur école.

Allez-vous suspendre ces fermetures ? Pouvez-vous différencier le seuil minimal d'élèves en zone urbaine et en zone rurale, annuler les prises en charge d'élèves déplacés et durcir les transferts non motivés ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - En Moselle, le taux d'encadrement a continué de s'améliorer : il est passé de vingt et un élèves par classe en 2019 à moins de vingt en 2022. À cette aune, les quinze élèves par classe que vous demandez en zone rurale sont un objectif que nous pourrions atteindre d'ici trois ou quatre ans.

Les maires de Bourgaltroff et Guébling mettent en place un regroupement pédagogique intercommunal, avec une école à classe unique. Ils envisagent de fermer cette école et de scolariser leurs élèves dans la commune de Bénestroff.

Le conseil municipal de Bourgaltroff a entériné la fermeture de son école le 2 février dernier. Celui de Guébling n'a pas encore statué sur la question. Dans ces conditions, les deux retraits d'emploi n'ont pas été actés par le Dasen.

La situation est suivie de près par l'inspectrice de la circonscription de Château-Salins. Le ministère de l'éducation nationale vous tiendra informée.

Présidence de M. Pierre Laurent, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.