Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Mystère du recensement des voies communales

Mme Nathalie Goulet .  - La longueur des voies communales, que l'assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (Atesat) permettait autrefois de connaître, est extrêmement importante, puisqu'elle contribue au calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF), par exemple. La commune nouvelle de Val-au-Perche a ainsi reçu une DGF de 509 000 euros, dont 23 000 euros au titre de la voirie. Pour recenser la longueur des voies communales, elle s'est adressée à la préfecture, mais celle-ci n'a pas d'historique. Par quel moyen les communes, notamment les communes nouvelles, peuvent-elles connaître avec précision la longueur de leurs voies ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Chaque année, pour préparer la répartition de la DGF et des fonds de péréquation, la direction générale des collectivités locales (DGCL) procède à un recensement des données physiques et financières des collectivités. Les fractions péréquation et cible de la dotation de solidarité rurale (DSR) sont réparties pour 30 % de leur montant proportionnellement à la longueur de la voirie communale classée dans le domaine public communal -  l'ancien maire que je suis ne l'a pas oublié !

Mais ce travail se fait sur une base déclarative : il appartient aux conseils municipaux de délibérer pour classer ou déclasser dans le domaine public communal les voies et de transmettre leurs délibérations aux préfectures, lesquelles en informent ensuite la DGCL. L'État publie chaque année les données utilisées pour le calcul de la DGF en format ouvert et réutilisable, y compris les longueurs de voirie déclarées.

Mme Nathalie Goulet.  - Je connais ces éléments de réponse, mais sans Atesat et en l'absence d'archives, selon le sous-préfet de Mortagne, il faut aider les communes, notamment les communes nouvelles, dans cette tâche de recensement. J'espère que vos services trouveront une solution : il y va du montant de la DGF.

Centre d'exploitation et d'intervention de Murat (Cantal)

M. Bernard Delcros .  - Le centre d'exploitation et d'intervention (CEI) de Murat, dans le Cantal, est classé en niveau 2, ce qui interdit aux agents de bénéficier de la prime technique de l'entretien des travaux et de l'exploitation déplafonnée prévue par l'arrêté du 30 octobre 2008 pour les services ayant la charge de tunnels de plus d'un kilomètre, ce qui est le cas de celui du Lioran, long de plus de 1 500 mètres. Ce tunnel, à plus de 1 000 mètres d'altitude, dessert la station de Super-Lioran et permet d'éviter un col particulièrement sinueux et difficile. Lorsqu'un incident s'y produit, les agents doivent assurer la gestion du trafic par ce col situé en coeur de station de ski.

Seriez-vous favorable à revoir ce classement du CEI de Murat afin d'ouvrir aux agents de ce centre le bénéfice de cette prime ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - L'engagement des agents des directions interdépartementales des routes, à pied d'oeuvre jour et nuit pour que les Français puissent circuler en toute sécurité, mérite respect et considération. Cinq morts depuis 2020 nous rappellent cruellement les dangers de ce métier.

Selon le décret du 16 avril 2002, cette prime est fixée au sein de chaque service, en tenant compte notamment de la pénibilité, du caractère dangereux, insalubre ou salissant de certaines tâches et de la technicité des missions. Les agents affectés sur certains postes dont les particularités sont fixées par arrêté conjoint - notamment l'exploitation et l'entretien des voies routières à fort trafic et la gestion des tunnels routiers - peuvent bénéficier de son déplafonnement. Le CEI de Murat est donc bien éligible et ses agents bénéficient d'un montant de prime déplafonné, c'est-à-dire supérieur à deux fois le montant minimal fixé par l'arrêté du 16 avril 2002, sans toutefois atteindre les montants maximaux.

Une révision du classement des centres est prévue courant 2023 ; celui de Murat fera l'objet d'un examen extrêmement attentif.

M. Bernard Delcros.  - Merci pour cette réponse qui ouvre des perspectives.

Gare de triage de Saint-Jean-de-Maurienne

M. Jacques Fernique .  - Début mai, à Saint-Jean-de-Maurienne, a débuté le démantèlement de la gare de triage fret, censée déménager à Saint-Avre, ce qui n'est pas sans impact sur le report modal et sur l'emploi. Les 45 agents du fret et la trentaine d'agents au poste d'aiguillage sont menacés. Alors que Saint-Jean-de-Maurienne compte une quarantaine de voies, celle de Saint-Avre n'en a que treize, dont trois seulement seront dédiées au fret ; le triage ne pourra donc plus se faire comme aujourd'hui.

Cette suppression est motivée par la situation de la gare, sur le tracé des accès au tunnel du Lyon-Turin en projet, mais dont les travaux n'ont pas commencé. Et le choix du scénario dit de planification écologique du Conseil d'orientation des infrastructures n'indique pas une volonté d'accélération...

Ce projet ne permettra pas de rattraper la perte de report modal, car la Maurienne ne serait qu'un point de transit, ce qui nie son potentiel. Quelle est l'urgence d'une telle décision en 2023 pour une mise en service théorique du Lyon-Turin après 2040, sinon aux calendes grecques ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Je comprends votre préoccupation. Cette fermeture est effectivement liée au raccordement du nouveau tunnel de base au réseau ferré national, qui nécessite la construction d'ouvrages occupant toutes les emprises ferroviaires de la gare. Le déménagement de l'activité fret a été préparé depuis 2015. La capacité disponible en gare de Saint-Avre a été dimensionnée en conséquence pour absorber le trafic existant, mais pourrait être augmentée en cas de besoin. Le Lyon-Turin a notamment pour objectif un report modal du trafic poids lourds transalpin vers le rail.

Clément Beaune l'a annoncé cette semaine, l'État portera les aides à l'exploitation à près de 330 millions d'euros de 2025 à 2030, contre moins de 100 millions avant 2020, et mènera un programme d'investissement spécifique de 4 milliards d'euros d'ici 2032.

M. Jacques Fernique.  - Je crains la dégradation, voire la destruction d'un outil de transport décarboné. C'est le maillage territorial du fret ferroviaire qui est en jeu.

Réduction de la part des projets autoroutiers

M. Daniel Gueret .  - Les récentes déclarations du ministre Clément Beaune laissent entrevoir la possibilité d'une réduction de la part de projets routiers pour donner une priorité aux transports publics et au ferroviaire. Une étude d'opportunité environnementale a semble-t-il été programmée pour donner un nouvel avis sur une cinquantaine de projets d'infrastructures d'ici l'été, dont sept projets autoroutiers en cours.

Le projet d'aménagement autoroutier de la RN154, dont la mise en concession a été lancée il y a un an et demi par Jean Castex, est structurant pour le département d'Eure-et-Loir et notamment pour l'Agglo du Pays de Dreux et Chartres Métropole. Pouvez-vous nous rassurer sur son sort ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le projet de liaison autoroutière A154-A120 a été déclaré d'utilité publique en juillet 2018 pour différents motifs : renforcement de la cohésion de la région Centre-Val de Loire et de sa connexion avec le port de Rouen, soutien à l'économie agricole, amélioration de la sécurité et du cadre de vie des habitants, réduction des nuisances et de la congestion en entrée et en traversée d'agglomération.

Cette liaison fait partie de la revue des projets autoroutiers en cours, qui vise à réexaminer avec soin l'ensemble des projets à l'aune de leur cohérence avec les engagements environnementaux du Gouvernement et de tenir compte des spécificités locales et des bénéfices attendus de la réalisation de ces infrastructures, notamment en matière de désenclavement et de développement des territoires ruraux. Les décisions seront annoncées avant l'été.

M. Daniel Gueret.  - Merci. La semaine dernière, les présidents du département d'Eure-et-Loir, de Chartres Métropole et de l'Agglo du Pays de Dreux, des chambres consulaires d'Eure-et-Loir ont rappelé à Mme Borne leur attente. Ne laissez pas tomber l'Eure-et-Loir ! (Applaudissement sur les travées du groupe Les Républicains)

Maintien des logements en zone touristique

Mme Sylviane Noël .  - Les zones touristiques à forte pression foncière sont la proie des promoteurs pour la construction de résidences secondaires. Pour lutter contre cette attrition du logement permanent, certains élus imposent des zonages d'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) prévoyant la construction de 30 à 50 % de logements sociaux.

Malheureusement, l'efficacité est limitée faute d'une inscription au stade du permis de construire. Aucun acte garantissant l'intervention d'un bailleur social n'est prévu. Ainsi, de nombreuses communes se retrouvent sans recours face à des promoteurs peu scrupuleux qui n'ont pas tenu leurs engagements.

Imposer cette formalité dès le stade du permis de construire serait une garantie de la construction de logements sociaux car sans ce document, l'outil de servitude de mixité sociale est incontrôlable. Le Gouvernement envisage-t-il d'ajouter cet engagement aux pièces exigées lors du dépôt de permis de construire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Nous avons formé un groupe de travail sur l'attrition du logement avec Olivia Grégoire et Dominique Faure. Les maires doivent pouvoir agir via les plans locaux d'urbanisme, dont les OAP déterminent les secteurs d'implantation des logements locatifs sociaux.

Cet outil conforte la mixité sociale. Les services instructeurs vérifient l'obligation dès la demande d'autorisation d'urbanisme. Le code de l'urbanisme prévoit un tableau indiquant les surfaces planchers de logements créés, y compris les logements sociaux. Il est annexé au permis de construire.

Pour ne pas alourdir davantage ces dossiers, une nouvelle pièce ne nous semble pas nécessaire. Nous continuerons à lutter contre l'attrition du logement.

Mme Sylviane Noël.  - Ce tableau n'a pas empêché la non-réalisation des logements à Megève. Une convention ou un acte clair garantirait le respect de ces engagements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. François Bonneau applaudit également.)

Réquisition des logements des Crous pour les jeux Olympiques

M. Pierre-Antoine Levi .  - Plus de 3 000 logements des résidences universitaires du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (Crous) d'Île-de-France seraient réquisitionnés pour accueillir le personnel lié à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024. Cette nouvelle a créé une onde de choc parmi les étudiants, en particulier ceux qui avaient prévu de rester en région parisienne pour des raisons professionnelles ou personnelles.

Bien que le Crous ait promis relogements et exemptions de loyer pendant cette période, avec la garantie de retrouver leur logement à la rentrée, les organisations étudiantes expriment des doutes.

Quelles actions concrètes le Gouvernement prévoit-il pour minimiser les nuisances pour les étudiants et garantir leur relogement adéquat ? L'occasion unique de célébrer le sport et l'esprit d'équipe que sont les JOP ne doit pas nous faire oublier les droits et les besoins des étudiants.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - En effet, des résidents de Crous ont bien reçu ce message. Chaque été, 30 % d'entre eux quittent définitivement leur hébergement, ce qui permet de le proposer à d'autres. Ainsi, 7 000 places sont libérées de juin à septembre.

Seules 3 000 de ces places, dans douze des 155 résidences franciliennes, seront mobilisables. Un étudiant qui le souhaite aura la garantie de rester dans son logement pour le même loyer. Les autres n'auront pas à l'acquitter et auront la garantie d'un logement à la rentrée suivante. Les douze résidences font l'objet d'une mention spéciale sur le site de candidature à un logement du Crous.

Enfin, les JOP sont une opportunité pour nos étudiants, avec des missions rémunérées et 20 000 billets offerts, en particulier à ceux qui auront libéré une chambre. Nous nous engageons à ne pas mettre en péril les étudiants et leurs études.

Création d'un Crous en Guyane

M. Georges Patient .  - La Guyane et Mayotte sont les deux seules académies, sur trente, à ne pas disposer de centre régional des oeuvres sociales (Crous). N'existe en Guyane qu'une antenne locale dépendant des Antilles, alors que les effectifs étudiants ont doublé en dix ans pour atteindre 6 000.

La demande est unanime, alors que la Guyane n'est représentée qu'un an sur trois dans la gouvernance en Guadeloupe, et n'a qu'un seul des sept représentants étudiants.

Avec un PIB par habitant de 16 000 euros, contre 25 000 euros pour les Antilles, et 53 % d'étudiants précaires, il y a une plus grande demande d'aides, avec 2 000 étudiants boursiers, dont 80 % à l'échelon 7. Seul un Crous, à l'instar de celui créé en 1977 pour la Corse alors qu'elle compte moins d'étudiants, assurera le suivi approprié.

Ne manque que le feu vert du Gouvernement.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Nous voulons allouer plus de moyens aux étudiants guyanais, mais le coût d'une nouvelle structure ne serait pas corrélé à une évolution positive pour les usagers.

Le service social bénéfice d'une seconde assistante sociale, et la Guyane a déjà un centre local des oeuvres universitaires et scolaires (Clous) dont le directeur dispose d'une délégation de signature pour les aides d'urgence. De plus, chaque semaine, la commission d'aide ponctuelle alloue des aides aux étudiants en difficulté.

La résidence universitaire de Kourou compte de nombreux logements vacants dès le début de l'année scolaire. Toutes les résidences universitaires, dès la prochaine rentrée, seront équipées de bornes wifi raccordées à la fibre.

Depuis la livraison du nouveau bâtiment, des malfaçons entravent le bon fonctionnement du restaurant universitaire de Cayenne. Toutefois, les difficultés sont identifiées, et 75 000 repas par an pour 460 places sont assurés.

M. Georges Patient.  - Malgré les dysfonctionnements, je relève que vous concluez à la non-autonomie du Crous.

Jours fériés en Alsace-Moselle

Mme Elsa Schalck .  - Le Vendredi saint et la Saint-Étienne sont fériés et chômés en Alsace-Moselle. Cette spécificité historique est reconnue par les lois de la République depuis 2011 et inscrite dans le code général de la fonction publique.

Or l'annualisation du temps de travail de la fonction publique territoriale à 1 607 heures, prévue en 2019 par la loi de transformation de la fonction publique et mise en application le 1er janvier 2022, ne tient pas compte de ces deux jours fériés. Ce sont ainsi 14 heures qui ne sont plus chômées ni rémunérées pour les fonctionnaires territoriaux d'Alsace-Moselle. Cela a été décidé sans aucune concertation.

Je me fais donc l'écho des motions et délibérations votées par de très nombreuses communes alsaciennes pour demander que la durée annuelle de travail soit ramenée à 1 593 heures. Le conseil représentatif pour le droit local alsacien-mosellan a lui aussi manifesté son opposition à cette annualisation, menace inacceptable pour le droit local auquel les Alsaciens sont très attachés.

Confirmez-vous que la loi de 2019 ne modifie en rien les dispositions du droit local ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Jacques Fernique applaudit également.)

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Pour harmoniser la durée du temps de travail au sein de la fonction publique, l'article 47 de la loi de transformation de la fonction publique a supprimé les régimes dérogatoires mis en place avant 2001 dans les collectivités territoriales. Celles-ci devaient définir dans un délai d'un an à compter du renouvellement de leur assemblée délibérante les nouvelles règles relatives au temps de travail de leurs agents.

Dans les départements de Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, le Vendredi saint et le 26 décembre sont des jours chômés, mais cela ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de la durée du travail annuelle de 1 607 heures, qui s'applique uniformément et indépendamment des jours chômés. La question de la rémunération de ces deux jours est sans effet.

Formations de secrétaire de mairie en Haute-Vienne

Mme Isabelle Briquet .  - Les secrétaires de mairie sont indispensables au fonctionnement de nos communes rurales. Ils doivent être polyvalents, réactifs et répondre à des exigences d'expertise croissantes. Beaucoup de maires peinent à pourvoir ces emplois, d'autant que de nombreux départs en retraite sont attendus dans les prochaines années.

Le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Haute-Vienne a, comme beaucoup d'autres, mis en place des formations de secrétaire de mairie, en partenariat avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et la région. Jusqu'à une date récente, Pôle emploi apportait une contribution qui permettait d'organiser une à deux sessions par an. Or son désengagement remet en question ces formations très appréciées.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour consolider la participation financière de Pôle emploi ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le centre de gestion de la fonction publique de la Haute-Vienne organise des sessions de formation pour les demandeurs d'emploi souhaitant rejoindre son service « missions temporaires », dans le cadre de la mission facultative de mise à disposition d'agents territoriaux prévue par le code général de la fonction publique.

La formation en question, d'une durée de 29 jours, se décline en une partie théorique de quinze jours, dans les domaines comme l'état civil, l'urbanisme ou la commande publique, et en un stage au sein d'une mairie du département, encadré par un tuteur.

Selon la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG), le taux de retour à l'emploi après ces formations est de 90 %. Les centres de gestion n'étant pas des organismes de formation, la question du financement se pose. Le cabinet du ministre de la transformation et de la fonction publiques mène en ce moment des discussions en vue d'une convention nationale entre la FNCDG et Pôle emploi.

Mme Isabelle Briquet.  - Je vous remercie. On peut donc s'attendre à une pérennisation du financement de ces formations, ce qui est une très bonne chose compte tenu des tensions sur ce métier. C'est essentiel pour préserver l'emploi public dans nos communes.

Fouilles archéologiques préventives

M. François Bonneau .  - Dans le cadre de leurs projets d'aménagement, les collectivités doivent procéder à des fouilles archéologiques préventives. Conformément à la convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique, cette obligation vise à concilier la recherche scientifique, la conservation du patrimoine et le développement socio-économique. Or le coût de ces fouilles contraint souvent les petites collectivités à renoncer à leurs projets.

Bien que le Fonds national pour l'archéologie préventive (Fnap) subventionne les fouilles dont le coût pourrait compromettre l'équilibre financier des projets d'aménagement, les critères d'éligibilité sont trop restrictifs. Il faudrait élargir le périmètre des subventions, et une mutualisation des dépenses pourrait être envisagée pour faire face à ces coûts.

Comment le Gouvernement compte-t-il soutenir les petites collectivités afin de surmonter ces difficultés ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Dans le cadre du dispositif d'archéologie préventive, lors de l'instruction des projets d'aménagement, les services de l'État chargés de l'archéologie peuvent prendre des mesures de détection et de sauvegarde. Leurs prescriptions s'appuient sur les avis des commissions territoriales de la recherche archéologique. Les petites communes peuvent consulter en amont les directions régionales de l'action culturelle (Drac) sur la sensibilité archéologique des terrains concernés par un projet.

L'aménageur peut bénéficier des aides financières du Fnap, sous la forme de prises en charge ou de subventions. L'impact du coût de la fouille sur l'équilibre financier du projet fait partie des critères d'éligibilité.

Ce fonds est accessible, puisque sur la période 2016-2022, 44 % des fouilles ont reçu un soutien financier ; 53 millions d'euros ont été accordés à ce titre en 2022. L'archéologie préventive dispose donc d'un cadre juridique et financier adapté.

M. François Bonneau.  - Voilà pour la théorie. La pratique, c'est que les montants alloués ne permettent pas de faire émerger les projets à des prix acceptables. Une mutualisation, appuyée sur une cotisation répartie dans un ensemble plus large, faciliterait le financement et éviterait aux communes de renoncer à certains projets.

Biogaz et mobilité lourde

M. Sebastien Pla .  - À Narbonne, l'État investit depuis plus de trente ans, au sein de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), dans le biogaz, première source d'énergie renouvelable locale. Mais la dynamique est en panne.

La proposition de règlement carbone de la Commission européenne ne retient, pour le renouvellement du parc de véhicules de transport lourd, que les technologies électrique et hydrogène. Or ces énergies dépendent de matières premières critiques, importées de pays hors Union européenne. Quelle erreur stratégique, alors que le biométhane est disponible sur le territoire national ! Si l'on considère l'ensemble du cycle de vie, les véhicules fonctionnant au biogaz sont aussi vertueux que les véhicules électriques.

Certes, il faut sortir des énergies fossiles, mais sans obérer notre autonomie énergétique et notre avance technologique. Dans le cadre plan national rétrofit, le Gouvernement prévoit-il d'inclure le bioGNV ? Quelle position comptez-vous adopter vis-à-vis de la Commission européenne pour que le cycle de vie complet soit pris en compte dans le calcul des émissions de gaz à effet de serre (GES) ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La décarbonation des transports est cruciale pour limiter leur impact sur la santé et sur l'environnement et atteindre nos objectifs climatiques. Les transports sont le premier émetteur de carbone. Au niveau européen, c'est le seul secteur dont les émissions ont augmenté.

Le 14 février dernier, la Commission européenne a proposé une révision du règlement sur les émissions des véhicules lourds neufs. Il nous faut réduire de 55 % les émissions de GES d'ici à 2030 par rapport à 1990, et atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050. Les négociations ne font que débuter. Le calcul se fait au niveau des émissions au pot d'échappement, et le choix des technologies appartient aux constructeurs pour atteindre les objectifs fixés. Le Gouvernement accordera un soutien de 100 millions d'euros en faveur de la décarbonation des transports lourds.

M. Sebastien Pla.  - Vous n'avez pas parlé de biogaz ! Nous faisons une erreur stratégique.

Fonds national de garantie individuelle de ressources

M. Bruno Belin .  - En 2010, on a supprimé la taxe professionnelle (TP) et inventé un mécanisme de compensation, le fonds national de garantie individuelle de ressources (FNGIR). 2010... une éternité ! Il s'est passé plein de choses depuis : suppression de la taxe d'habitation (TH), loi NOTRe. Les dotations générales de fonctionnement (DGF) se sont effondrées pour les communes qui ont intégré de grands EPCI à fiscalité propre. Or ce sont ces communes qui contribuent au FNGIR.

Il est temps de revoir le financement des collectivités territoriales. Leurs finances sont asséchées ! Personne ici n'est capable d'expliquer le FNGIR. Le calcul est un mystère, or certaines communes rurales sont impactées à 10 %. Les raisons remontent à la préhistoire.

Le Gouvernement doit revoir la distribution des fonds de l'État, dont la DGF, et supprimer le FNGIR pour les communes contributrices. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le FNGIR est un mécanisme d'équilibrage des recettes fiscales, institué à la suite de la suppression de la TP. Les collectivités dites gagnantes sont prélevées au profit des collectivités dites perdantes. Les prélèvements sont figés, au titre de la neutralité financière décidée à l'époque.

M. Bruno Belin.  - Pourquoi ?

M. Olivier Klein, ministre délégué.  - Souvent, payer le FNGIR est un avantage : cela signifie que la commune a reçu plus de recettes fiscales à la suite de la suppression de certaines taxes. Depuis 2011, les prélèvements sont restés figés, alors que les compensations, elles, ont augmenté.

Cependant, des entreprises ont quitté certaines communes contributrices. Ainsi, le Gouvernement a prévu dès 2021 un prélèvement sur recettes : il permet aux communes, pour qui le prélèvement au titre du FNGIR représente plus de 2 % de leurs recettes réelles de fonctionnement, et qui ont connu depuis 2012 une baisse de plus de 70 % de leurs bases de cotisation foncière des entreprises, de percevoir annuellement une dotation de l'État égale au tiers de leur contribution au FNGIR.

Au titre de 2022, 273 communes sont éligibles, ce qui représente une somme de 246 millions d'euros. Le Gouvernement ne souhaite donc pas revenir sur ce principe.

Effectifs de police dans le Cher

M. Rémy Pointereau .  - Dans le Cher, j'ai rencontré les syndicats de police. Le constat est inquiétant.

Vierzon n'a pas de brigade anti-criminalité et risque de ne plus avoir de groupe de sécurité de proximité. Il n'y a plus d'officiers. À Bourges, on compte trois départs pour une seule arrivée dans les mouvements profilés. Ainsi, l'unité canine et l'unité anti-stupéfiants risquent de fermer, alors que les services estiment qu'il faudrait quinze postes supplémentaires.

Vous avez annoncé neuf postes : huit à Bourges et un à Vierzon. Je reconnais l'avancée - on ne tire plus sur le pianiste -, mais je m'inquiète de l'épuisement des effectifs de police. Il manque toujours dix-sept policiers. Que faites-vous pour endiguer la situation, qui expose les habitants du Cher à davantage d'impunité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La question des effectifs est centrale. Un effort exceptionnel a été engagé depuis 2017 avec le plan « 10 000 jeunes ». Le mouvement est amplifié par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), qui prévoit une montée en puissance des réserves opérationnelles de la police et de la gendarmerie, le recrutement de plus de 7 000 policiers et gendarmes et la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie.

La circonscription de sécurité publique de Bourges compte 100 gradés et gardiens de la paix, contre 108 en 2016 et 105 en 2020. La circonscription de police de Vierzon compte 50 gradés et gardiens de la paix, chiffre stable par rapport à 2016, mais en hausse par rapport à 2020.

Nous serons très attentifs à la situation de ce département. Nous prévoyons d'affecter douze policiers supplémentaires dans ces deux circonscriptions. La police bénéficie de l'appui des unités départementales de la direction départementale de la sécurité publique (DDSP), dont les effectifs sont passés de 22 à 24 policiers depuis 2016. Dans le Cher, comme partout en France, nous voulons déployer plus de forces sur le terrain, pour faire reculer la délinquance et répondre aux attentes légitimes des citoyens.

M. Rémy Pointereau.  - Il faut réformer les règles de mutation. Une seule vague par an ne suffit pas. Il est anormal de dire aux victimes que l'on ne peut pas traiter leurs dossiers par manque d'effectifs.

Nombre de conseillers municipaux dans les petites communes

Mme Annick Jacquemet .  - J'associe M. Longeot à ma question. Les communes de 3 000 habitants comptent 23 conseillers municipaux, soit un élu pour 130 habitants. À Besançon, qui compte 117 000 habitants, il y a 55 conseillers, soit un élu pour 2 127 habitants. Il est plus aisé de constituer une équipe municipale dans une grande ville que dans une petite commune rurale. De plus, de moins en moins de concitoyens souhaitent s'engager pour six ans. Les personnes recrutées sont parfois moins motivées, ce qui explique l'absentéisme et les démissions. Le scrutin de liste paritaire complexifie l'affaire.

Plusieurs maires de mon département, dont la maire du Russey, souhaitent ouvrir une réflexion sur la réduction du nombre de conseillers municipaux dans les petites communes. Selon eux, cela améliorerait la vie démocratique locale -  à condition de renforcer la formation  - sans dégrader la qualité du lien entre le conseil municipal et la population. Une diminution du nombre de conseillers municipaux dans les petites communes est-elle envisageable pour les élections municipales de 2026 ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le nombre de conseillers municipaux est un sujet complexe : il y va d'enjeux de représentation démographique, de participation à la vie publique et de bon fonctionnement des conseils municipaux.

Le législateur a tenu compte des difficultés des communes les moins peuplées. En 2013, le nombre de conseillers est passé de sept à cinq pour les communes de moins de 100 habitants. Il faut neuf conseillers pour les communes de 100 à 499 habitants. En cas de démission, le conseil municipal peut continuer de fonctionner, sans qu'il soit nécessaire, dans certains cas, de convoquer de nouvelles élections. Le Gouvernement n'envisage donc pas de réduire le nombre de conseillers municipaux, qui sont essentiels pour faire vivre la démocratie locale.

Concernant la formation, le Gouvernement est attentif au fait de proposer aux élus une offre de qualité et adaptée, en particulier dans les petites communes. L'offre proposée aux élus fait désormais l'objet d'une régulation renforcée, sur le modèle de la formation professionnelle.

Gens du voyage

M. Cyril Pellevat .  - S'il est possible de vivre paisiblement avec la majorité des gens du voyage, certains groupes posent problème, en particulier en Haute-Savoie.

Des élus font état d'incivilités incessantes : malpropreté menaçant la salubrité publique, dégradations, installations illégales, raccordements sauvages à l'eau ou à l'électricité. Ils parlent de groupes entravant le fonctionnement de commerces ou d'individus déféquant devant des écoles, dont certaines ont même dû être fermées.

Ces groupes de gens du voyage ne sont jamais en contact avec le reste de la société. Les enfants ne sont pas scolarisés, et des fillettes deviennent mères, contribuant à une augmentation exponentielle de la population. Les délits y sont monnaie courante : vol, détention illégale d'armes, braconnage... L'impunité est totale, car ils sont si menaçants qu'il devient dangereux pour les maires, et même pour les forces de l'ordre, d'intervenir. L'obligation de respecter en toutes circonstances le sacro-saint schéma départemental d'accueil pour pouvoir les expulser ne fait que renforcer leur sentiment d'impunité.

Considérez-vous que ces comportements respectent les principes de la République ? Ne pourraient-ils s'apparenter à des dérives sectaires, et la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a-t-elle déjà été saisie à ce sujet ? Envisagez-vous des dérogations au respect obligatoire du schéma départemental pour procéder à des expulsions lorsque l'ordre public est menacé ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le régime applicable en matière de stationnement des gens du voyage est prévu par la loi du 5 juillet 2000. Le maire, le président de l'EPCI ou le propriétaire d'un terrain peut demander au préfet de mettre des occupants en demeure de quitter les lieux, lorsqu'ils violent un arrêté interdisant le stationnement en dehors des aires dédiées. L'édiction d'un tel arrêté est possible même lorsque la commune ou l'EPCI ne remplit pas les prescriptions du schéma départemental, notamment si l'EPCI dispose d'un emplacement provisoire agréé par le préfet.

La loi du 7 novembre 2018 a étendu l'amende forfaitaire au délit d'installation illicite et en réunion sur un terrain. Cette procédure a été expérimentée dans plusieurs parquets, dont Créteil, Foix et Lille. L'opportunité d'une généralisation est en cours d'examen.

Les délits et incivilités commis par ces personnes ne constituent pas en eux-mêmes une dérive sectaire. Il appartient au maire qui constaterait de telles dérives de solliciter la Miviludes en lien avec le préfet et, le cas échéant, de saisir le procureur de la République.

Lorsque des enfants sont en danger, il revient aux élus de faire un signalement au procureur ou aux cellules de recueil des informations préoccupantes mises en place par les conseils départementaux.

M. Cyril Pellevat.  - Dans les faits, il est très difficile pour les collectivités d'agir, les mesures prises étant souvent déjugées par le tribunal administratif. Si je parle de dimension sectaire, c'est notamment parce que, je le répète, des filles de 12 ou 13 ans ne sont pas scolarisées. Je vous demande d'intervenir sur ce sujet.

Conséquences de la nouvelle convention fiscale franco-belge

Mme Véronique Guillotin .  - La région Grand Est compte 165 000 travailleurs frontaliers. Dans le nord de la Meurthe-et-Moselle, le fait transfrontalier est quotidien ; certaines communes sont voisines à la fois de la Belgique et du Luxembourg.

Afin d'éviter les doubles impositions sur le revenu, la France et la Belgique ont signé une nouvelle convention fiscale le 9 novembre 2021. Dans l'attente de sa ratification, je vous alerte sur les inquiétudes de certains frontaliers, dont l'impôt pourrait augmenter brutalement.

La nouvelle convention fixe, pour les rémunérations de source publique, le principe de l'imposition par l'État qui verse les revenus. Ainsi, les résidents français travaillant dans le secteur public belge seront désormais imposés en Belgique, où le taux est bien plus élevé. Pour certains, la perte de revenus pourrait atteindre 30 %, remettant en question certains choix de vie.

Le gouvernement belge, tout dernièrement, se serait déclaré favorable à un statu quo pour les infirmières jusqu'en 2034. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ?

Par ailleurs, le statut dérogatoire des frontaliers salariés du privé prendra fin dans une dizaine d'années : ne serait-il pas judicieux de négocier dès maintenant un nouveau statut général des frontaliers, avec un accord sur le télétravail, pour lequel aucune tolérance n'est prévue pour les salariés du privé vivant entre la France et la Belgique ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - En novembre 2021, une nouvelle convention fiscale a été signée entre la France et la Belgique ; l'actuelle remonte à 1964. Cette convention comporte de nombreuses avancées favorables à la France, dont l'une visant à limiter l'exil fiscal des personnes physiques disposant d'un patrimoine important. Elle préserve aussi le régime spécifique des frontaliers.

Le projet de loi de ratification sera déposé dans les mois à venir.

Le traitement fiscal des rémunérations de source publique sera simplifié selon le principe d'imposition par l'État qui verse les revenus. La convention est conforme sur ce sujet au modèle de l'OCDE. C'est une disposition courante dans notre réseau conventionnel, en particulier dans des accords récemment négociés.

La nouvelle convention n'entraînera de changements que pour les résidents français possédant la seule nationalité française, percevant des traitements publics de source belge et exerçant leur activité en Belgique, dont les revenus seront désormais imposables dans ce pays. Nous continuons d'échanger avec le gouvernement belge pour nous assurer de la neutralité de ces évolutions.

Je transmettrai votre question à Gabriel Attal, s'agissant notamment du calendrier de dépôt du projet de loi.

Mme Véronique Guillotin.  - La convention franco-luxembourgeoise a instauré le même système, or elle est gelée compte tenu des effets dont je parle. Essayons de nous y prendre à l'avance pour le cas des Français travaillant en Belgique.

Taux du Livret A

Mme Catherine Procaccia .  - Le 15 juillet, la Banque de France calculera le taux actualisé du Livret A, qui devrait être revalorisé.

Le Livret A est l'outil d'épargne préféré des Français, avec 55 millions de détenteurs pour qui une hausse de taux serait l'une des rares éclaircies dans un contexte difficile pour le pouvoir d'achat.

Pourtant, de nombreux acteurs se mobilisent pour éviter une hausse, alors que le taux du Livret A ne suit plus l'inflation depuis de nombreuses années. Le taux actuel correspond ainsi à une dérogation défavorable aux épargnants, qui ont donc déjà consenti des efforts.

Le ministre de l'économie saura-t-il résister aux pressions pour protéger le pouvoir d'achat des ménages ? Bercy prendra-t-il ses responsabilités en augmentant le taux du Livret A ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Le taux du Livret A a été multiplié par six en un peu plus d'un an. À 3 %, il est très supérieur à ceux des produits non réglementés comme l'assurance vie en euros, dont le rendement moyen était de 2 % l'année dernière, ou les livrets ordinaires, à 0,5 % en mars.

Les taux sont aussi plus rémunérateurs que ceux des autres pays européens, pour des volumes d'épargne inégalés, sans compter les autres avantages : liquidité totale, intérêts garantis, revenus exonérés.

C'est pourquoi il est très attractif pour les Français : la collecte nette sur les livrets A et livret de développement durable et solidaire (LDDS) a dépassé 25 milliards d'euros au premier trimestre de cette année.

La variation du taux du Livret A affecte directement d'autres acteurs, comme les bailleurs sociaux et les collectivités territoriales, dont la dette contractée auprès de la Caisse des dépôts et consignations est souvent indexée sur ce taux. Une hausse de celui-ci renchérit donc la dette de ces acteurs, qui font face à des besoins d'investissement importants.

Il s'agit donc de déterminer une juste rémunération pour les épargnants tout en assurant de bonnes conditions de financement aux autres acteurs. La situation sera appréciée le moment venu.

Enfin, près de la moitié des Français peuvent recourir au Livret d'épargne populaire, qui, avec un taux de 6,1 %, protège intégralement de l'inflation. Nous avons mené des actions de simplification et de promotion de ce dispositif, avec succès : l'encours total a augmenté de 44 %. Cet été, Bercy prendra ses responsabilités.

Mme Catherine Procaccia.  - En effet, le taux du Livret d'épargne populaire correspond à peu près à l'inflation, mais ce n'est pas du tout le cas de celui du Livret A. Par le passé, il a été beaucoup plus haut que 50 % du taux d'inflation... Le Livret A est un pacte entre plusieurs acteurs, dont ceux du logement social, qui bénéficient de conditions d'emprunt privilégiées. Si les Français font de l'épargne de précaution, c'est parce qu'ils sont inquiets pour l'avenir.

Financement du nucléaire par le Livret A

M. Daniel Breuiller .  - L'article L. 518-2 du code monétaire et financier dispose que la Caisse des dépôts et consignations et ses filiales constituent un groupe public au service de l'intérêt général et du développement économique du pays. Placé sous la surveillance du Parlement, il est chargé de la protection de l'épargne populaire, du financement du logement social et de la gestion d'organismes de retraite.

En février dernier, Les Échos annonçaient que le Livret A était en lice pour financer les nouveaux réacteurs nucléaires. Or lors des débats sur le projet de loi relatif à l'accélération du nucléaire, cette hypothèse n'a jamais été évoquée. Après les fusions de bailleurs à marche forcée et les effets de la hausse du taux du Livret A sur les capacités d'investissement des offices d'HLM, ce serait un coup supplémentaire porté au secteur du logement social.

Fin 2021, la Caisse des dépôts et consignations a affecté 170 milliards d'euros au financement du logement social et de la politique de la ville. Plus de 160 000 logements sociaux ont ainsi été construits ou réhabilités. Le logement social est la chance de notre pays, a déclaré le ministre Olivier Klein : il a raison !

Dans ces conditions, il serait inconcevable d'altérer le financement du logement social pour payer plus de 52 milliards d'euros d'EPR. Oui ou non, le Gouvernement entend-il financer l'accélération du nucléaire par le Livret A ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La mission historique du Livret A est de financer le logement social. Sur 12,8 milliards d'euros de prêts versés par le fonds d'épargne l'an dernier, 11,2 milliards ont bénéficié au logement social et à la politique de la ville. Ce fonds détient un encours de prêts au logement social de 174 milliards d'euros, soit 89 % du total de ses prêts. Il est, de très loin, le premier financeur du secteur HLM.

La collecte sur les livrets réglementés est très supérieure aux besoins de financement du logement social. Le fonds d'épargne finance déjà d'autres projets d'intérêt général, quand le financement privé est inexistant ou insuffisant. Dans ce cadre, les projets du secteur public local bénéficient d'une enveloppe de prêts de 28 milliards d'euros, ouverte jusqu'en 2027.

Pour rémunérer l'épargne des particuliers, le fonds d'épargne doit dégager du rendement sur ses actifs. Il doit obtenir un rendement moyen supérieur au coût de sa ressource : cet enjeu revêt une acuité particulière dans un contexte de forte collecte et de taux élevé du Livret A. Une diversification des emplois du fonds d'épargne paraît donc de bonne gestion.

Le Gouvernement doit s'assurer que l'excès de liquidités sur le fonds d'épargne serve le collectif, à travers le financement de projets d'intérêt public et une rémunération attractive des épargnants. S'agissant du financement de l'accélération du nucléaire, il ne m'appartient pas d'évoquer des sujets qui n'ont pas encore été arbitrés ni rendus publics.

M. Daniel Breuiller.  - S'il s'agit de dégager des rendements élevés, le nucléaire n'est certainement pas la bonne solution : il arrivera trop tard pour la crise climatique et sera trop cher. Non, le logement n'a pas les financements indispensables à son développement. Cette mission de l'épargne réglementée doit donc rester la priorité absolue !

Conséquences de la suppression de la CVAE sur la présence postale

Mme Gisèle Jourda .  - Le contrat de présence postale, créé par la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, permet à La Poste de contribuer à la mission d'aménagement et de développement du territoire et répond au besoin vital de maintien d'une présence postale partout. Il participe notamment à la mise en place des maisons France Services et concourt au renforcement de l'inclusion numérique.

Il est financé par le fonds postal national de péréquation territoriale, alimenté par un abattement de taxes locales dues par La Poste, principalement la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Or la loi de finances pour 2023 supprime la CVAE sur deux ans, en 2023 et 2024. L'engagement du Gouvernement de compenser cette suppression à l'euro près est loin d'être tenu.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour garantir le financement du fonds de péréquation et l'exercice par La Poste de ses missions de service public ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Le Gouvernement soutient La Poste dans sa mission de service public d'aménagement du territoire. Depuis 2021, la baisse de rendement de la CVAE avait déjà entraîné un risque de baisse du montant du fonds de péréquation, auquel l'État a répondu en versant 74 millions d'euros sous forme d'une dotation votée en loi de finances. Le fonds de péréquation avait pu être maintenu à hauteur du montant maximal fixé par le contrat de présence postale -  174 millions d'euros. Pour 2023, la dotation a tenu compte de la disparition de ce rendement d'abattement sur la CVAE, estimé fin 2022 à 31 millions d'euros : cette somme s'est ajoutée au montant initial de la dotation, pour un total de 105 millions d'euros.

Les rendements d'abattements des taxes locales sont prévisionnels au moment du vote de la loi de finances, les montants définitifs n'étant connus qu'au début de l'année N+1. Le montant supplémentaire de la dotation pour 2023 correspond donc bien aux estimations de rendement si cette première part de CVAE avait été maintenue. Certes, un écart limité est possible, mais un réajustement peut intervenir lors de la fixation de la dotation annuelle suivante par le Parlement.

Mme Gisèle Jourda.  - Nous veillerons à ce que la compensation soit au rendez-vous. Avec la présence postale, il en va de la survie des territoires ruraux.

Parkings payants des centres hospitaliers universitaires

Mme Véronique Del Fabro .  - Quel est le point commun entre Nancy, Bordeaux, Caen, Lorient, Épinal, Cambrai, Le Mans, Amiens, Toulouse, Le Havre, Lyon, Avignon, et La Roche-sur-Yon ? Les hôpitaux publics de toutes ces villes ont rendu leurs parkings payants pour les patients, leur famille, et dans certains cas pour le personnel. Désormais, à Nancy, au-delà des 30 premières minutes gratuites, il faut débourser 6 euros pour la première heure et 30 euros pour 3 heures ! C'est un problème pour le personnel de santé, qui a des horaires irréguliers et travaille souvent tard le soir ou tôt le matin, mais aussi pour les patients et leur famille : de nombreux patients doivent se rendre plusieurs fois par mois, voire quotidiennement à l'hôpital ; les coûts de stationnement peuvent devenir un frein à l'accès aux soins.

Le ministre de la santé a récemment reconnu ce problème dans une interview, tout en bottant en touche sur les solutions, estimant que sa priorité est de redresser l'hôpital public, et non les parkings. Or si l'on ferme les yeux sur la dérive obligée par les coûts prohibitifs du privé, à savoir le bon de transport et la consultation chez le médecin, les comptes de la sécurité sociale vont forcément s'en ressentir.

Le Gouvernement remettra-t-il en place l'accès gratuit aux parkings des hôpitaux ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La gestion du stationnement ne fait pas partie des missions de l'hôpital public. Elle est propre à chaque établissement, qui peut la confier à des opérateurs privés, et varie en fonction des besoins des hôpitaux et de leurs possibilités financières. Les tarifs doivent cependant être affichés et des emplacements dédiés aux personnes à mobilité réduite sur chaque site -  il faudrait aussi prévoir des places pour les femmes enceintes.

Ce sujet peut être inscrit à l'ordre du jour de la commission des usagers. L'instauration d'un parking payant peut également servir à entretenir et à améliorer les installations de stationnement, ainsi qu'à assurer la sécurité des véhicules. Il faut garantir la rotation des véhicules pour que tous ceux qui en ont besoin puissent y accéder. Le ministère relaiera ce sujet auprès des agences régionales de santé (ARS), s'il s'avère que l'accès au service public de la santé est menacé.

Mme Véronique Del Fabro.  - N'oubliez pas les dommages collatéraux pour les riverains, bloqués par des véhicules les empêchant de rentrer chez eux.

Projets « Territoires zéro chômeur longue durée »

M. Christian Klinger .  - En 2020, la loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique a permis l'expérimentation des « Territoires zéro chômeur de longue durée », démarche intéressante et louable mais dont la méthode et le modèle économique et financier interrogent. Le caractère obligatoire de la dépense pour les départements soulève deux problèmes : l'élargissement de facto des compétences du département, et l'ingénierie financière puisque pour qu'un projet soit validé, le département doit financer 15 % du montant de la participation de l'État, sans limitation de durée. Comme d'habitude, l'État se défausse sur les collectivités.

Pour seulement trois projets, la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) serait engagée, en 2023, à hauteur de 108 000 euros pour 36 ETP ; en 2024, de 217 000 euros pour 72 ETP ; en 2025, de 435 000 euros pour 144 ETP. Dans un contexte économique contraint, la CEA, comme la plupart des départements, n'a pas donné une suite favorable à ces projets. Les départements souhaitent jouer leur rôle, mais ce public relève de l'État. Comment permettre ces expérimentations sans faire les poches des départements ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Cette expérimentation est soutenue et financée par l'État depuis la loi du 29 février 2016. Elle a été prolongée pour cinq ans par la loi du 14 décembre 2020 afin qu'au moins cinquante territoires supplémentaires puissent être habilités, en plus des dix territoires historiques.

L'expérimentation bénéficie du concours financier de l'État, des collectivités territoriales, en particulier des départements, des EPCI et des organismes publics et privés volontaires.

L'État verse la contribution au développement de l'emploi - pour chaque ETP, entre 53 % et 102 % du Smic brut. Il accompagne la croissance du nombre de territoires concernés grâce à un budget qui augmente en 2023 de 25 %, passant de 36 millions à 44,94 millions d'euros, qui financera 2 480 emplois au 31 décembre 2023.

La loi prévoit que les départements contribuent, pour chaque ETP, pour 15 % du montant de la participation de l'État, et qu'un territoire ne peut être candidat à l'expérimentation qu'avec l'accord du président du conseil départemental. Il appartient au partenariat local de susciter des mobilisations financières supplémentaires.

Le coût de l'expérimentation sera évalué dès 2023. Le comité scientifique est en cours d'installation.

M. Christian Klinger.  - L'augmentation du budget tient aussi à l'augmentation du nombre de bénéficiaires. Si le problème du reste à charge pour les départements est réglé, ce peut être un succès.

Situation éducative dans le Val-d'Oise

M. Rachid Temal .  - Hier, nous étions nombreux à manifester, à Magny-en-Vexin, à l'appel de l'association des élus de la communauté de communes de Vexin-Val-de-Seine, pour demander, comme depuis trente ans, la création d'un lycée. Les élèves font trois heures de trajet pour se rendre au lycée de Cergy-Pontoise, ce qui a des impacts importants sur leur niveau scolaire, leur santé, la vie des familles et l'attractivité du territoire.

L'ensemble des élus et des parents d'élèves réclament ce lycée ; la région Île-de-France y est favorable. Ne manque que l'accord de l'État : quand l'obtiendrons-nous ? Le terrain appartient déjà à la commune, et la construction de ce lycée ne pose aucun problème. La soutenez-vous ?

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - La construction d'un lycée relève de la compétence des régions : le Conseil régional définit la localisation des établissements.

Toutefois, l'implantation d'un lycée dans ce secteur concerne également les Hauts-de-France et le secteur de Chaumont-en-Vexin, ainsi que la zone du lycée de Gisors, en Normandie. La réflexion doit donc être conduite de manière coordonnée. Les trois académies franciliennes prennent en compte les évolutions démographiques dans les effectifs de lycée pour les années à venir, afin que la région priorise ses investissements et que l'État propose une offre adaptée aux territoires en croissance démographique.

Les services de l'État et de la région expertisent les besoins ; le travail commun des trois académies de Versailles, d'Amiens et de Normandie sera partagé avec les collectivités régionales. Mais l'État ne peut intervenir en la matière sans porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, cher aux sénateurs. Si ma réponse vous semble incomplète, le ministre Pap Ndiaye reste à votre disposition.

M. Rachid Temal.  - Cela fait des mois, voire des années, que l'on écrit au ministre ; les parlementaires de la circonscription lui demanderont un rendez-vous. L'État évoque maintenant une solution sur plusieurs académies, mais cela n'est pas sérieux : dans une même famille, les élèves de collège et de lycée seraient en vacances à des dates différentes ? Le Val-d'Oise est le plus jeune département de France, et ses effectifs scolaires augmentent de 1 400 élèves à la prochaine rentrée. L'argument démographique n'a pas de sens. Nous continuerons le combat : la région a voté le projet, le terrain existe, il ne manque plus que la décision du Gouvernement.

Avenir de la culture de la lavande

M. Jean-Yves Roux .  - « La lavande est l'âme de la Provence », disait Jean Giono, mais cette filière agricole et industrielle de 3 000 exploitations est fragilisée depuis un an par les intempéries, la cécidomyie, la concurrence déloyale et la crise énergétique.

En juillet 2022, le Sénat avait adopté une aide exceptionnelle à la filière de 10 millions d'euros, récemment autorisée par la Commission européenne. Mais les lavandiculteurs doivent se préparer au règlement Reach et au règlement relatif à la classification, l'étiquetage et l'emballage des substances et des mélanges, dit CLP, qui prévoient une évaluation de la dangerosité des composants des huiles essentielles, pouvant conduire à classer ces dernières comme substances chimiques.

Il est possible de protéger les consommateurs et d'assurer la pérennité de la production de la lavande dans des conditions optimales de sécurité. La filière lavandière est suspendue à des décisions dont nous devons anticiper les conséquences. Quelle position est défendue par la France dans la révision du CLP ? Des mesures dérogatoires ou des analyses supplémentaires sont-elles prévues afin de protéger la filière ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - La position de la France sur les règlements Reach et CLP est constante : nous voulons que la spécificité des huiles essentielles soit prise en compte, et que des adaptations soient prévues. Nous défendons une approche par constituants, en relayant les inquiétudes des professionnels au sujet de la confusion possible entre perturbateurs endocriniens et substances entraînant une activité endocrinienne.

L'enjeu de la révision de la réglementation reste l'application de la règle des mélanges à l'ensemble des substances de plus d'un constituant, dites Mocs. La France défend une dérogation à cette règle pour tenir compte des spécificités de certaines substances complexes comme les huiles essentielles naturelles. Les secteurs concernés devront ensuite justifier d'une exemption, les dossiers devant être évalués dans un délai raisonnable.

Par ailleurs, nous tenons notre engagement budgétaire pour un plan de filière. Le risque de disparition était important, notamment dans votre région. Une partie des pertes de chiffre d'affaires des producteurs traditionnels sera prise en charge sur la base d'un régime d'aide d'État notifié à la Commission européenne. De plus, plus d'un million d'euros seront alloués pour trouver des solutions alternatives à la suppression de produits phytosanitaires.

Création d'une école vétérinaire à Limoges

M. Christian Redon-Sarrazy .  - La création à Limoges d'une cinquième école nationale vétérinaire, soutenue par le président de Nouvelle-Aquitaine, vise à répondre à la déprise vétérinaire en zone rurale. Première région agricole française et européenne, la Nouvelle-Aquitaine souffre d'une chute de 20 % en cinq ans du nombre de vétérinaires spécialisés en animaux de rente.

L'implantation de cette école à Limoges, où se trouvent des universités de médecine et de pharmacie, permettrait d'ouvrir un pôle de recherche unique en France cohérent avec la stratégie One Health, fédérant les praticiens vétérinaires, les formations universitaires, les laboratoires de recherche et les entreprises du secteur. École publique avec des classes préparatoires intégrées, recrutant de nouveaux profils issus du monde rural, cet établissement permettrait des innovations pédagogiques et pratiques.

La région, prête à financer une partie de son implantation, a besoin du soutien de l'État pour concrétiser ce projet, mais celui-ci reste hélas au point mort. L'État s'engagera-t-il clairement ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Au niveau national, l'ouverture d'un concours post-bac permet à davantage de jeunes d'accéder aux études vétérinaires. Un plan renforce les quatre écoles nationales existantes, auquel s'ajoute la création d'une école vétérinaire privée en 2022. Les stages en milieu rural constituent un élément d'attractivité, et nous sommes prêts à développer le plan de soutien à l'installation des vétérinaires en zone rurale.

En 2030, 840 vétérinaires seront formés en France, soit 75 % de plus qu'en 2017. D'ici la fin de l'année, une mission du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) établira si la création de cette école répond aux besoins démographiques, à la sécurisation de l'installation des jeunes diplômés dans les territoires concernés, et expertisera financièrement la création de cette école.

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Nous sommes impatients. Vous n'avez pas mentionné le lien avec la recherche et les laboratoires de l'université de Limoges, pourtant important. La situation est préoccupante : seuls 19% des vétérinaires exercent auprès des animaux de production. Les délais d'intervention sont allongés, ce qui a un impact sur la situation sanitaire et économique. Les écoles existantes sont saturées, et de nombreux étudiants se forment à l'étranger, où les études sont moins onéreuses, ce qui est problématique pour le premier pays agricole d'Europe... Lorsque les collectivités locales proposent un projet innovant, l'État doit les soutenir.

Indexation des contrats en matière d'agrivoltaïsme

M. Philippe Bonnecarrère .  - Dans le projet de loi relatif à l'industrie verte, aucune réponse sur l'artificialisation des sols : le développement du photovoltaïque et de l'agrivoltaïsme est bloqué, tant que nous n'avons pas de réponse sur sa prise en compte ou non dans le « zéro artificialisation nette » (ZAN).

Il reste étonnant que la fixation des modalités d'indexation entre bailleurs et locataires soit effectuée par l'État. Je ne conteste pas l'idée que l'État maîtrise le coût de l'énergie, mais il me semble curieux que la relation de droit privé entre l'agriculteur et l'exploitant énergétique soit soumise au contrôle de l'État. Si l'État tient vraiment à intervenir dans la relation entre propriétaire et bailleur, qu'il tienne au moins compte de l'évolution des prix de l'énergie !

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Je réponds à la place de Christophe Béchu, au coeur de ces questions. Même si je n'ignore pas le sujet de l'agrivoltaïsme, la fixation du tarif de l'électricité ainsi produite ne relève pas totalement de mon périmètre.

L'indexation permet de faire évoluer, au cours de la durée de vie du contrat d'achat ou de complément de rémunération, les tarifs de l'électricité produite par l'installation agrivoltaïque. Ces tarifs sont initialement fixés par contrat entre EDF Obligation d'Achat et l'exploitant du parc photovoltaïque. Le loyer versé à l'agriculteur par l'exploitant du parc, fixé par un contrat entre personnes privées, ne dépend donc pas directement du tarif dont bénéficie l'exploitant.

L'État apporte un complément de rémunération par rapport aux prix de marché pour garantir l'équilibre des projets ; son intervention dans les contrats n'est donc pas illégitime. Néanmoins, face aux difficultés rencontrées, le ministère de la transition énergétique a décidé de mesures d'urgence pour prendre en compte l'augmentation des coûts des matières premières des panneaux photovoltaïques, selon une formule d'indexation du tarif avant activation du contrat. Le Gouvernement souhaite renforcer la résilience des projets photovoltaïques, afin de limiter les risques d'externalités négatives sur les parties tierces, dont les agriculteurs. Cette indexation pourra évoluer en fonction des discussions à venir portant sur l'agrivoltaïsme, pour que sa formule reflète au mieux la réalité des projets.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Monsieur le ministre, je n'adhère pas totalement à vos propos, car les sujets agricoles sont liés aux sujets environnementaux : tant pour l'agrivoltaïsme que pour l'eau, votre ministère est directement concerné. Je vous demande à nouveau de vous investir dans le dossier de la retenue de Sivens.

La séance est suspendue à 12 h 30.

Présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.