Instaurer une majorité numérique (Conclusions de la CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne.

Mme Alexandra Borchio Fontimp, rapporteure pour le Sénat de la CMP .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions) Nous voilà arrivés à la fin des travaux sur ce texte. C'est forte de votre soutien sans faille que j'ai défendu les apports du Sénat lors de la CMP, qui s'est conclue par un accord. Lorsqu'il s'agit de protéger nos enfants, le consensus s'impose et les postures politiques ont disparu sur ce sujet fondamental.

Je vous remercie pour votre engagement et pour votre confiance, notamment mes collègues de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, sous la bienveillante présidence de Laurent Lafon et l'oeil avisé de Max Brisson.

Cette proposition de loi est le fruit d'un constat alarmant : internet et les réseaux sociaux peuvent tuer. Il faut protéger les victimes, des couloirs des établissements scolaires aux messages sur les réseaux devenus antisociaux. Le masque est utile aux agresseurs et les réseaux sociaux autorisent, grâce à l'anonymat, l'impunité.

Cela dit, les écrans font partie de notre vie : les tablettes remplacent maintenant les hochets et les prescriptions des ophtalmologistes épuisent les stocks de larmes artificielles. Internet est le quotidien de la génération Z, et certaines plateformes vont jusqu'à créer une identité numérique aux enfants dès leur naissance. Une double vie, réelle et fictive, se crée. Nous ne pouvons pas bannir les réseaux sociaux, il faut donc les adapter.

Ce texte n'a pas pour objet de priver les jeunes d'un réseau social, mais de les protéger lorsqu'ils les utilisent. La première inscription aux réseaux sociaux a lieu en moyenne à 8 ans et demi, sans que les parents en soient informés.

Le texte veut protéger les plus jeunes, en créant une majorité numérique. En dessous de 15 ans, l'autorisation parentale sera nécessaire.

L'autorité parentale est au coeur du texte. Par faiblesse et par facilité, nous avons tendance à incriminer les plateformes : mais en mère de famille, je le dis, les parents sont aussi responsables ! Nous nous leurrons si nous nions cette réalité. Beaucoup de parents sont dépassés, et abandonnent. Ne baissez pas les bras : la meilleure protection de vos enfants, c'est vous !

À l'avenir, nous devrons être attentifs à la bonne application des dispositions de cette proposition de loi. Dès la semaine prochaine, nous examinerons le projet de loi Espace numérique. Le présent texte est une première pierre : je vous invite à le voter. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions)

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Je félicite la rapporteure pour la qualité et la rapidité de nos travaux. Nos enfants ne pouvaient plus attendre : ils sont les premières victimes des addictions aux réseaux sociaux, du cyberharcèlement, de l'exposition à des contenus inappropriés et des violences psychologiques. Pour ne pas sacrifier cette génération, il faut agir.

Depuis plusieurs années, la France a montré la voie, tant au niveau national qu'international. Des initiatives parlementaires ont porté sur le contrôle parental ou le cyberharcèlement scolaire. Le ministère de l'éducation nationale et le ministère de l'économie ont favorisé l'adoption d'un passeport numérique pour les élèves de sixième. Je salue l'action de Charlotte Caubel avec notamment le site jeprotegemonenfant.gouv.fr. Nous avons lancé une campagne de communication à ce sujet.

Lors de la présidence française du Conseil de l'Union européenne (PFUE), notre pays a défendu l'idée du règlement sur les services numériques, dit DSA (Digital Services Act), qui fait entrer les plateformes dans l'ère de la responsabilité. Ces dernières devront modérer les contenus publiés ; des audits seront menés. Elles devront publier les conditions générales d'utilisation de façon compréhensible pour les enfants et assurer un haut niveau de protection pour la vie privée des enfants. La publicité ciblée sur les mineurs sera interdite. Des amendes pouvant aller jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires mondial et un bannissement en cas de manquements répétés sont prévus.

Le projet de loi Espace numérique sera examiné au Sénat lors de la séance publique de la semaine prochaine. Il tire les leçons d'un certain nombre de travaux sénatoriaux, notamment sur l'exposition des mineurs à la pornographie et sur la souveraineté numérique et l'équité commerciale sur le marché informatique.

Cette proposition de loi permet d'avancer encore. Elle tend à obliger les plateformes à vérifier l'âge de leurs utilisateurs. En dessous de 15 ans, une autorité parentale sera nécessaire. Après une quasi-unanimité à l'Assemblée nationale et l'unanimité au Sénat, le texte de la CMP a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale : sur un tel sujet, le Parlement sait trouver les voies du consensus.

Charlotte Caubel et moi-même veillerons à ce que l'application de ce texte soit rapide. (Mme Alexandra Borchio Fontimp applaudit.)

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Je suis très heureuse d'être avec vous aujourd'hui pour adresser un message clair aux enfants, aux parents, et aux plateformes : oui, internet est un espace de découverte et d'émancipation, mais c'est aussi un lieu de menaces potentielles pour les enfants.

Avant 15 ans, les enfants sont trop jeunes pour évoluer seuls dans l'espace numérique : telle est la philosophie de ce texte, qui est une pierre supplémentaire à l'édifice.

Le Gouvernement est pleinement mobilisé. Lors du comité interministériel de l'enfance, la Première ministre a fixé comme priorité la lutte contre les dangers numériques. Jean-Noël Barrot et moi-même travaillons depuis sans relâche pour retirer les contenus illicites et protéger les enfants.

Cette mobilisation est aussi le fruit du travail du Sénat. Je salue les débats consensuels, ainsi que votre travail, madame la rapporteure.

Ce combat, nous ne pouvons pas le mener sans les parents. Or ils sont perdus et inquiets, notamment en raison des drames récents : Lucas, Dinah, Lindsay se sont donné la mort à cause du cyberharcèlement et du harcèlement scolaire, sujets intimement liés.

Les réseaux sociaux ont donné un nouvel écho à cette violence, ne laissant aucun répit aux victimes. Chacun le constate : le téléphone et le numérique sont très présents dans les familles. C'est pourquoi Bruno Studer les a placés au coeur de l'autorité parentale - je préfère parler de responsabilité parentale.

Grâce à ce texte, nous complétons le dispositif : les parents doivent être accompagnés, notamment par le biais des ateliers de la parentalité numérique, lancés avec Meta la semaine dernière.

Cette proposition de loi traduit notre mobilisation collective pour protéger nos enfants. Elle crée plusieurs dynamiques : premièrement, ouvrir un dialogue entre les enfants et les parents, alors que huit parents sur dix ne savent pas ce que font leurs enfants sur internet ; deuxièmement, améliorer la prévention à l'école, en lien avec les collectivités territoriales ; troisièmement, favoriser une dynamique collective et sociétale. Nous devons réfléchir à nos propres pratiques et accompagner les enfants, pour mieux les protéger.

Mme Annick Billon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions) Je félicite la rapporteure pour la qualité de son travail. En trois mois, nous avons examiné trois textes : la proposition de loi visant à lutter contre les dérives des influenceurs, la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants et le présent texte. Cette multiplication de textes illustre bien l'urgence du sujet : 80 % des 10-14 ans consultent internet sans leurs parents.

La proposition de loi poursuit deux objectifs : la régulation de l'accès des mineurs aux réseaux sociaux et la lutte contre la haine en ligne. La commission a su simplifier des dispositifs, et les mesures de prévention ont été renforcées en séance. Je me réjouis de ces avancées, mais leur application est loin d'être acquise.

Le contrôle de l'âge est mis en échec par des difficultés techniques. Grâce à l'action de Marie Mercier, la loi interdit l'accès à des contenus pornographiques aux mineurs. Mais un simple clic suffit, malheureusement. L'éducation à la sexualité, trop souvent défaillante, ne doit pas être remplacée par ces images violentes et dégradantes.

Avec Catherine Morin-Desailly, nous avions proposé que les producteurs de logiciels procèdent eux-mêmes au blocage du téléchargement des applications pour lesquelles les mineurs n'ont pas l'âge requis. Monsieur le ministre, vous vous étiez engagé à faire aboutir le projet de loi Espace numérique : nous vous en remercions.

Les lois précédentes ont conduit à l'adoption d'un bouclier qui protège les enfants. Nous devons donc sécuriser les dispositifs existants, et compléter les règles prévues par la loi Studer, notamment sur les profils d'âge ou le filtrage des informations qu'un enfant pourrait envoyer à un tiers.

Le groupe UC votera ce texte nécessaire qui appelle d'autres évolutions. Ce texte est une étape bienvenue et utile. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions ; M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. Bernard Fialaire .  - Le groupe RDSE est satisfait par l'accord trouvé en CMP. Je m'en réjouis en tant qu'élu, médecin et parent. Le législateur a fixé un âge de majorité pour les réseaux sociaux : c'est une bonne chose. Je suis heureux que nous ayons pu écouter la parole des enfants en souffrance. Je me réjouis également que la place des parents ait été confortée. Je me réjouis enfin que l'Assemblée nationale et le Sénat aient pu trouver un accord.

Les réseaux sociaux peuvent être un lieu de rencontres comme de solitude, d'opportunités comme de dangers. Ensemble, nous avons décidé de lutter contre l'addiction, la dépression et le cyberharcèlement.

Le Sénat et l'Assemblée nationale ont fait preuve d'adaptation, notamment pour les familles monoparentales - l'autorisation d'un seul parent sera suffisante -, et oeuvre de simplification, en supprimant les réseaux sociaux labellisés.

Je salue également la mobilisation de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). La qualité de leur expertise sera mise au service de la défense de nos libertés. Toutefois, je regrette que le rapprochement entre les plateformes 3018 et 3020 n'ait pas été approfondi.

La validation par la Commission européenne nous assurera de la conformité au droit européen et donnera une force juridique à ce texte concret, humain et protecteur. Le groupe RDSE le votera.

Mme Toine Bourrat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions) La CMP est parvenue sans difficulté à un accord. Hormis quelques modifications rédactionnelles, c'est le texte issu des travaux du Sénat qui a été adopté, avec la reconnaissance de la majorité numérique à 15 ans et l'introduction de mesures pédagogiques, tant envers les enfants que les parents.

Le message est clair : aucun enfant de moins de 15 ans ne pourra s'inscrire sur un réseau social sans accord parental. Lors de la CMP, je suis intervenue pour lutter contre la labellisation des réseaux sociaux pouvant être consultés par les enfants de moins de 13 ans. Certes, je comprends l'intention, mais quels critères retenir ? En outre, le message en serait brouillé. La majorité numérique et la majorité civique ne peuvent varier : une règle doit rester de portée générale pour garantir l'universalité de la loi.

Nous avons exclu du champ d'application de l'article 2 les encyclopédies en ligne ou les sites tels que Wikipédia.

Notre rapporteure s'est montrée pragmatique : l'accord d'un seul parent suffira pour s'inscrire sur un réseau social. Cette disposition est cohérente, car l'accord des deux parents est réservé aux moments les plus importants de la vie de l'enfant. Avec cette simplification, un éditeur de contenus ne pourra pas invoquer la difficulté à recueillir l'accord des deux parents pour s'affranchir de ses responsabilités.

Le texte prévoit que la Cnil sera garante des données personnelles et qu'elle rendra un avis sur le projet de décret d'application.

Deux mesures me semblent particulièrement importantes. Les réseaux sociaux auront l'obligation d'informer les mineurs de moins de 15 ans et les parents sur les risques de l'utilisation d'internet et des données. Chaque parent l'a observé : les enfants sur internet perdent la notion du temps. Les réseaux sociaux devront envoyer des notifications régulières, premier pas de la lutte contre l'addiction.

Certes, cette proposition de loi n'est qu'une étape, mais nous aurons fixé un nouveau cadre pour protéger nos jeunes, appelés à vivre avec ces outils. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. Claude Malhuret .  - Les réseaux sociaux sont devenus une des principales menaces contre nos démocraties, disait Barack Obama dans The Atlantic. Cette phrase peut sembler grandiloquente, elle ne l'est pas.

Le rêve de quelques geeks californiens est devenu une réalité plus prosaïque : fake news, discours de haine, fermes à trolls sont quelques exemples de ces dérapages de plateformes qui deviennent des succès mondiaux pour de mauvaises raisons. Tout le monde en est victime, mais certains plus que d'autres, tels les adolescents. Le terme n'est d'ailleurs pas adéquat, puisque la première inscription intervient maintenant vers 8 ans et demi, sans contrôle ou presque - vous l'avez souligné, madame la ministre.

Dans cette course à l'échalote de l'assuétude, un nouveau venu a rejoint Twitter, Facebook et Instagram. Les heures passées devant l'écran, qui garantissent des profits maximums, c'est ce qui compte désormais. Voici l'internet des années 2020, tel que le décrit la commission d'enquête sur TikTok.

Ce texte ne sera suffisant que s'il est vraiment mis en oeuvre. Le Règlement général sur la protection des données (RGPD), le règlement sur les marchés numériques (DMA) et le règlement sur les services numériques (DSA) témoignent de cette préoccupation. Faire une loi et ne pas la faire appliquer, c'est autoriser ce que l'on veut interdire, disait Richelieu.

Le législateur fait son travail ; aux exécutifs d'agir. Je suis un Européen convaincu, mais si l'application de ces textes était confiée à des organismes insuffisamment dotés, si les voies de recours devaient prendre des années, si chaque pays ne pouvait sanctionner les fautes, les Gafam et autres auraient gagné la bataille, avec leurs armées de lobbyistes, leurs milliards qui mettent à distance les amendes, couvertes par des provisions pour imprévu.

Madame la ministre, monsieur le ministre, si vous parveniez à faire appliquer ce texte, vous laisseriez votre nom à cette entreprise. Si les États ne contrôlent pas la bonne application des mesures contre les plateformes, si les enfants de 8 ans voient la formation de leur psychisme condamnée par le crétinisme digital, alors nous aurons perdu la bataille de l'éducation, qui est déjà bien mal engagée.

Barack Obama le disait, c'est l'un des défis auxquels sont confrontées nos démocraties. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI)

M. Thomas Dossus .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Ce n'est pas la première fois que notre assemblée se penche sur les enjeux du numérique et sur la protection des enfants. Ce texte contient des mesures phares, comme la majorité numérique ou l'obligation des réseaux sociaux de diffuser des messages de prévention contre le harcèlement. La navette a enrichi ces dispositions et le texte va dans le bon sens.

Mais je reste dubitatif sur le contrôle de l'âge selon le référentiel établi par l'Arcom, qui occupera nos débats la semaine prochaine. Le contrôle de majorité est aussi vieux ou presque qu'internet. Il faut dire les choses comme elles sont : il n'y a pas de réponse technique - c'est la Cnil qui le dit dans un rapport de 2021. Les solutions envisagées sont soit intrusives soit inefficaces. Aucun pays du monde n'a trouvé de solution efficace et qui respecte les libertés publiques, et les contournements sont toujours possibles. Je me souviens de Cédric O faisant la preuve, dans cet hémicycle, qu'on pouvait changer de VPN très facilement.

Les intentions du référentiel sont louables, mais je crains qu'il ne soit qu'un voeu pieux. Nous en débattrons plus à fond la semaine prochaine.

En fixant cet âge, nous fixons une limite, utile au dialogue entre générations, la pédagogie restant un point clef de la protection des mineurs. Le GEST votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Julien Bargeton .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Notre groupe se réjouit de l'accord trouvé en CMP sur la majorité numérique, constitutive d'une régulation progressive du numérique. Les parents devront donner leur accord à l'inscription de leur enfant de moins de 15 ans sur les réseaux sociaux, et ils pourront la suspendre. L'information aux familles sur les risques du cyberharcèlement sera améliorée. Ces mesures sont utiles.

Deux points ont suscité le débat : premièrement, l'interdiction totale en dessous de 13 ans - ce texte s'est heureusement concentré sur le dialogue avec les parents - ; deuxièmement, cette loi ne doit pas empiéter sur ce qui relève du droit européen, notamment le DMA et le DSA. Nous devons porter ce combat à Bruxelles pour imposer plus d'obligations aux plateformes et nous assurer que le cadre est réellement appliqué.

La loi doit constamment innover pour s'adapter aux évolutions du secteur. Comme l'hydre de Lerne, si on coupe une tête au numérique, une autre repousse... Dès 2018, au tout début du précédent quinquennat, nous avons interdit le portable au collège ; nous avons ensuite encadré l'activité des enfants influenceurs, ou encore protégé leur droit à l'image. Cette proposition de loi est une étape, avant le projet de loi qui nous occupera la semaine prochaine.

Je salue notre esprit consensuel sur ce texte. Il est essentiel face à des acteurs aussi puissants que les Gafam. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Sylvie Robert .  - Je suis très satisfaite de l'accord en CMP sur la version du Sénat, qui souligne la qualité des travaux de notre Assemblée et de sa rapporteure.

L'article 1er propose une définition des réseaux sociaux en ligne, et donne ainsi une base légale à la protection des enfants face aux risques de l'internet. La surexposition aux réseaux sociaux a de nombreux effets néfastes, tels que le harcèlement et la désinformation.

Un consentement parental sera requis pour les moins de 15 ans, prévu à l'article 2, et recueilli sur la base d'un référentiel de l'Arcom. Je me réjouis que la CMP ait abandonné la notion de label, vraie usine à gaz.

L'article 3 prévoit des sanctions pour les manquements des plateformes à leurs obligations, ce que je salue.

Cette proposition de loi a été enrichie par des mesures contre le harcèlement, par le biais de messages de prévention. L'article 1er bis élargit la liste d'infractions contre lesquelles les fournisseurs d'accès de services en ligne doivent lutter. La prévention a été renforcée, en reprenant les recommandations du rapport de la mission sénatoriale sur le harcèlement scolaire et le cyber harcèlement de septembre 2021, sous l'impulsion de Sabine Van Heghe.

La délivrance d'une information claire et adaptée aux mineurs, la mise en place d'un dispositif permettant de contrôler le temps d'utilisation, l'exclusion des encyclopédies en ligne sont bienvenues.

J'approuve également la suppression de l'article 5, qui prévoyait la fusion des plateformes 3020 et 3018. Les équipes sont spécialisées, il faut conserver la distinction.

Le groupe SER approuve donc ce texte, malgré quelques réserves sur le caractère pratique de certaines mesures - je pense au référentiel de l'Arcom, mais nous en parlerons la semaine prochaine.

Ce texte ne pourra pas tout résoudre. Nous faisons face à un problème d'éducation : il faut mieux former les parents et les enfants.

C'est donc en toute lucidité que notre groupe approuve les conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST, et du groupe UC ; M. Bernard Buis applaudit également.)

Mme Éliane Assassi .  - Ce texte est une réponse à une tendance lourde : les enfants s'inscrivent sur les réseaux sociaux en moyenne à 8 ans et demi, et un quart des 7-10 ans les fréquentent. Les réseaux sociaux font partie du quotidien de nos petits-enfants et de nos adolescents, alors que les multinationales mercantiles organisent méticuleusement l'addiction aux plateformes.

Selon une étude de novembre 2022, plus de 60 % des enfants disent avoir été victimes de cyberharcèlement. Sachant qu'un enfant victime sur deux a pensé au suicide, c'est un enjeu national de santé publique.

Plus de la moitié des enfants de 13 ans sont déjà inscrits sur un réseau social. L'exposition croissante des jeunes aux smartphones n'aide pas.

La responsabilité des fournisseurs de réseaux sociaux doit être engagée. Il faut mieux les encadrer. Ni le texte du Sénat ni les conclusions de la CMP ne répondent convenablement à cette question : la sanction n'est pas en adéquation avec le chiffre d'affaires de ces plateformes. C'est un manque notable. À l'origine, les auteurs de la proposition de loi prévoyaient une amende d'un montant maximum de 1 % du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise.

Il est prévu une réquisition judiciaire dans les 8 heures pour les cas urgents et de 10 jours pour les autres cas - nous aurions préféré 48 heures.

Le rapport prévu à l'article 4 nous permettra de mieux connaître les effets des réseaux sociaux sur les jeunes.

Malgré ces remarques, nous considérons que ce texte est une première étape ; le CRCE le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et du GEST ; Mme Annick Billon applaudit également.)

La proposition de loi est définitivement adoptée.

Mme la présidente.  - Félicitations pour cette adoption unanime. (Applaudissements)

La séance est suspendue quelques instants.