Négociations commerciales dans la grande distribution (Conclusions de la CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la CMP chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant mesures d'urgence pour lutter contre l'inflation concernant les produits de grande consommation.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour le Sénat de la CMP .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Bernard Buis applaudit également.) Bien que sceptique, voire inquiet, le Sénat avait amendé ce projet de loi pour protéger les PME et les ETI. Il a ainsi confirmé le principe d'une négociation anticipée pour les plus petites entreprises.

La CMP a suivi le Sénat en retenant comme dates butoir le 15 janvier pour les PME et le 31 janvier pour les grandes entreprises. Cela évite de bâcler les négociations pendant la période des fêtes, où les PME réalisent une large part de leur chiffre d'affaires.

Sénat et Assemblée nationale avaient fixé le seuil de chiffre d'affaires à 350 millions d'euros. Le Sénat a précisé qu'il s'agit du chiffre consolidé, pour éviter que des filiales de multinationales ne s'immiscent dans les négociations réservées aux PME.

La CMP a exclu les outre-mer du dispositif, à l'initiative du Sénat, et retiré la mention des pharmacies, étant donné la diversité du secteur.

Elle a fixé les dates limites d'envoi des conditions générales de vente (CGV) au 21 novembre et au 5 décembre, au lieu des 15 et 30 novembre, pour tenir compte du délai de promulgation. 

Depuis le début, nous rappelons que ce texte modeste ne répond pas au vrai problème des marges et pratiques abusives des centrales d'achat. Il faudra en traiter lors de la future refonte du cadre des négociations commerciales.

En utilisant les négociations commerciales contre l'inflation, le Gouvernement contrecarre la logique des lois Égalim, à savoir la construction du prix en partant de l'amont agricole. Nous serons attentifs aux effets collatéraux sur la rémunération des producteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI ; Mme Dominique Estrosi Sassone applaudit également.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme .  - Je salue l'accord trouvé en CMP. Vous avez avancé les négociations à janvier 2024 afin de répercuter des baisses de prix de nombreux produits de grande consommation. Sur un an, la baisse des prix agricoles à la production et des prix industriels a atteint 7 %.

Si notre cadre des négociations commerciales a permis d'atténuer la hausse des coûts en 2022, l'annualité limite aujourd'hui la baisse. Il faut desserrer cet étau.

L'inflation alimentaire a baissé de plus de huit points depuis mars dernier, mais nous ne pourrons attendre mars 2024 alors que le début de l'année, comme la rentrée scolaire, est souvent une période difficile pour le pouvoir d'achat.

Le Gouvernement voulait avancer les négociations commerciales de six semaines tout en préservant les PME, essentielles à notre souveraineté. C'est pourquoi j'ai porté le pacte de solidarité commerciale, pour limiter l'effet de la hausse des coûts de l'énergie pour les PME. Nous n'avons eu de cesse d'écouter leur voix, même polyphonique.

Le Parlement a préféré fixer deux dates butoirs distinctes. J'en prends acte et appelle solennellement les fournisseurs à envoyer le plus rapidement possible leurs CGV pour que les négociations se passent au mieux -  une cinquantaine d'entre eux l'ont déjà fait.

La CMP a acté l'exclusion des distributeurs d'outre-mer du dispositif. Je veux accélérer les négociations autour du bouclier qualité prix (BQP) pour les outre-mer. Une circulaire est en cours de rédaction avec le ministère des outre-mer.

Pour protéger le pouvoir d'achat des Français, chaque jour compte. Nous voulons anticiper les baisses. Je remercie la présidente de la commission des affaires économiques et la rapporteure pour nos échanges constructifs, malgré des avis parfois différents. (Mmes Dominique Estrosi Sassone et Anne-Catherine Loisier marquent leur approbation ; M. Bernard Buis applaudit.)

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Vincent Louault applaudit également.) Sous l'impulsion d'Anne-Catherine Loisier et de Dominique Estrosi Sassone, que je remercie, les principaux acquis sénatoriaux ont été préservés.

Compte tenu de la conjoncture, l'objectif d'une baisse rapide des prix au consommateur est hypothétique : nous n'en sommes qu'à un ralentissement de l'inflation. Un texte qui avait tout d'une opération de communication constituait un risque pour les relations commerciales. La date butoir du 31 décembre était inadaptée aux réalités de terrain et aurait mis sous pression les PME et les producteurs agricoles dès la fin décembre, en pleine période d'activité soutenue.

Je relève trois avancées : un calendrier différencié de clôture des négociations commerciales pour les TPE et PME ; un seuil de chiffre d'affaires consolidé ; la date butoir du 15 janvier pour les PME et du 31 janvier pour les grandes entreprises, car nos entreprises ont besoin de stabilité.

Ce nouvel Égalim est le quatrième en quelques années, alors qu'Égalim 3 entre à peine en vigueur et que Bruno Le Maire annonce déjà dans les médias un Égalim 5 ! (Mme la ministre s'agace.) Assez d'instabilité législative : évaluons avant de légiférer à nouveau.

Attaquons-nous à la hausse des coûts de revient : énergie, transport. Il faut rendre plus opérantes les clauses de renégociation prévues par le Sénat dans Égalim 3. Nous devons aussi revoir la loi de modernisation de l'économie (LME) et réguler l'hyperconcentration des centrales d'achat. Nous soutenons votre initiative, madame la ministre, sur la refonte des négociations commerciales.

Gare à ne pas dénaturer les lois Égalim, qui ont consacré la non-négociabilité des matières premières agricoles, et agissons pour garantir une juste rémunération aux agriculteurs, notamment en encadrant mieux les marges des marques distributeurs.

Le groupe UC votera ce texte même si son effet sera modeste pour le pouvoir d'achat des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI ; Mme Dominique Estrosi Sassone et M. Vincent Louault applaudissent également.)

Mme Antoinette Guhl .  - Hausse de 56 % pour le sucre, de 42 % pour les spaghettis, de 34 % pour le lait : les prix explosent depuis deux ans, alors que cinq millions de personnes ont du mal à se nourrir. La précarité alimentaire explose. Il faut agir vite : c'est ce que ce projet de loi aurait dû faire.

Quels seront les effets de ce texte sur les prix ? Seront-ils bénéfiques, négatifs, ou nuls ?

Seul point positif, les PME auront quinze jours d'avance sur les grands groupes. Peut-être auront-elles ainsi quelques mètres de linéaire supplémentaires dans les grandes surfaces. Nous soutenons les PME, bio notamment, mais aussi celles qui produisent sous signe de qualité.

Sur les marges, en revanche, le débat reste entier. Celles de la grande distribution contribuent pour la moitié de l'inflation, notamment sur les produits bio. Ainsi, pour un kilo de pommes classiques, la marge pour les distributeurs est de 87 centimes ; pour un kilo de pommes bio, elle est de 2,17 euros. C'est inadmissible.

J'attends les conclusions de la mission gouvernementale sur les négociations commerciales.

Ces surmarges expliquent pour beaucoup le ralentissement des ventes des produits bio. Comment protéger nos agriculteurs, mieux respecter les sols, la consommation d'eau, si les produits bio sont perçus comme trop chers ? Notre alimentation est un enjeu fondamental de santé publique. Diabète, obésité : la mauvaise alimentation coûte, in fine, plus cher à l'État que si le problème était traité en amont.

Nous débattrons, la semaine prochaine, du PLFSS 2024, mais je vous le dis déjà : l'absence de maîtrise des marges et des prix coûtera très cher pour le budget et pour la santé de nos concitoyennes et concitoyens.

Changez de paradigme, madame la ministre : encadrez fermement les marges des distributeurs, favorisez une alimentation saine, protégez l'agriculture, luttez contre la précarité alimentaire et soutenez les expériences de sécurité sociale alimentaire. (Mme la ministre manifeste sa désapprobation.)

Nous voterons contre ce texte.

Mme Marianne Margaté .  - La méthode du Gouvernement ne permettra pas de lutter contre la vie chère. D'ailleurs, est-ce l'objectif poursuivi ? Nous ne retrouverons pas les prix de 2021 : vous ne faites que ralentir la hausse des prix, qui atteint 25 % depuis janvier 2022.

Cinq millions de personnes sont en précarité alimentaire ; pour eux, la fin du mois commence le 10. Vu l'évolution du cours des matières premières, comment se contenter d'un ajustement à la marge. On sait que les prix de l'énergie ne reviendront pas au niveau de 2021 : la hausse du prix de l'électricité, c'est 400 euros de plus par an pour des millions de foyers. Les mesurettes comme le trimestre anti-inflation seront sans effet, Bruno Le Maire l'a lui-même reconnu.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée.  - Où ça ?

Mme Marianne Margaté.  - Encore une fois, vous faites porter l'effort sur les ménages, alors que toutes les dépenses contraintes ont explosé. Manger, se chauffer ou s'habiller, il faudra désormais choisir, dans la septième puissance mondiale - mais aucun effort n'est demandé à la grande distribution ou à l'industrie agroalimentaire. Rien sur les marges et les superprofits. Pourtant, 50 % de la hausse des prix leur est imputable, selon le FMI. Avec la LME et la concentration de la grande distribution, un modèle oligarchique s'est mis en place. Déplacer les dates de négociation ne changera rien. Le libre jeu de la concurrence ne baissera pas les prix. Il faut s'attaquer aux marges et améliorer le pouvoir d'achat, la vraie urgence.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée.  - Attaquons les entreprises, c'est la solution...

Mme Marianne Margaté.  - Une nouvelle fois, le CRCE-K votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et du GEST)

M. Henri Cabanel .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) « Victimes de l'inflation, les Français se nourrissent de moins en moins », titrait Capital en août. Les achats alimentaires ont chuté de 11,4 % en volume depuis la fin 2022.

La CMP a abouti, je m'en réjouis. Quand les Français s'imposent de manger moins, nous devons prendre nos responsabilités.

En juin, Bruno Le Maire annonçait des baisses de prix sur une centaine de produits dès juillet. Un mois après, Michel Biero, directeur achats de Lidl, accusait les multinationales de ne pas jouer le jeu.

Alors ce projet de loi, qui avance de six semaines les négociations commerciales, semble bien dérisoire. C'est le marché qui fait la loi. En 2015 au Sénat, en pleine crise du porc, le représentant de Bigard jugeait qu'un prix minimum imposé ne serait tenable au mieux que quelques semaines, en raison de la concurrence mondiale ; l'autre principal abatteur, la Cooperl, réclamait le retour à un prix de marché libre, pointant le risque de revente à perte pour les abatteurs. Telle est la réalité de notre marché libéral. Nous ne sommes pas seuls au monde !

Dans un contexte de crise sanitaire et géopolitique, certains en ont profité pour augmenter les prix. Les deux maillons de la chaîne qui subissent de plein fouet l'inflation sont les agriculteurs et les consommateurs. Les importations augmentent : plus 11,7 % pour la viande en 2022, dont 22,9 % pour le boeuf... Les exploitations disparaissent et la souveraineté alimentaire s'étiole. Si transformateurs et distributeurs ne soutiennent pas nos agriculteurs, nous n'aurons plus que des produits importés. Que voulons-nous manger demain ?

Certes, le problème est complexe : assurer un prix rémunérateur au producteur tout en préservant le pouvoir d'achat des Français n'est pas chose facile. Madame la ministre, je vous remercie de déployer autant d'énergie. Ne faudrait-il pas réunir à nouveau les états généraux de l'alimentation pour évaluer les récentes réformes ? On verrait ainsi qui ne joue pas le jeu.

Sans grande conviction, nous voterons ce texte, malgré tout. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe UC)

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Merci.

M. Frédéric Buval .  - La CMP a abouti, c'est toujours une victoire pour le Parlement. Nous avons su répondre présents. Personne ne pouvait se satisfaire du statu quo : il était urgent d'agir pour le pouvoir d'achat des Français.

Ce texte est une réponse simple et rapide pour limiter la hausse des prix alimentaires. Dans une économie mondialisée, la France n'échappe pas à l'inflation. Crise sanitaire, surchauffe de l'économie, guerre en Ukraine entraînant une flambée des prix de l'énergie et des matières premières : ces facteurs exogènes se sont traduits par une inflation record de 5,2 % en 2022, et de 8,3 % pour l'alimentation. Les ménages les plus modestes sont les plus touchés, car ils consacrent une part plus importante de leur budget aux dépenses essentielles.

Le Gouvernement a pris des mesures volontaristes, et la France résiste mieux que la plupart de ses voisins. La mesure temporaire proposée ici vise à répercuter plus rapidement les baisses de prix du gros sur le prix payé par le consommateur final, sachant que le coût de certaines matières premières baisse depuis plusieurs mois. Selon l'Insee, les prix à la consommation n'augmentent que de 4 % en octobre 2023. C'est le moment d'actionner un levier supplémentaire contre l'inflation et pour le pouvoir d'achat des Français.

La CMP a acté des dates de négociation différentes selon la taille des entreprises, reporté les dates butoir, renforcé les pénalités en cas de non-respect et exclu les territoires d'outre-mer du dispositif. La vie chère y est un problème structurel, qui entrave leur développement : le coût de la vie y est en moyenne 20 % supérieur à l'Hexagone. L'inflation est pour nous aussi une priorité absolue. Je me réjouis que la ministre ait annoncé une renégociation rapide des prix dans les outre-mer ainsi qu'une mission gouvernementale pour revoir le cadre juridique régissant les négociations commerciales - à laquelle je souhaite être associé. Le RDPI votera ce texte. (M. Bernard Buis applaudit.)

M. Christian Redon-Sarrazy .  - Doux euphémisme que de dire que ce projet de loi, adopté dans la douleur, aura une portée limitée. Les parlementaires de tout bord ont exprimé leur scepticisme.

Nous ne croyons pas au pari hasardeux du Gouvernement, qui espère de manière incantatoire que la baisse des prix des matières premières se répercutera sur le prix du caddie. Bien sûr, nous serions ravis d'avoir tort, mais les analystes disent tous que les prix de produits de base comme le beurre et le sucre augmenteront dès 2024...

Ce texte d'urgence, surnommé Égalim 4, illustre l'échec du Gouvernement à rééquilibrer les rapports de force au sein de la chaîne de production agroalimentaire et à mettre fin à la guerre des prix entre industriels et grande distribution, dont agriculteurs et consommateurs sont les victimes.

Malgré ces faiblesses, la CMP a été conclusive : nous nous réjouissons que les principaux apports du Sénat aient été conservés. Les PME et ETI ne passeront pas après les grands groupes, plus offensifs et puissants dans la discussion.

Hélas, la philosophie de ce texte boiteux n'aura pas évolué durant la navette. L'accélération du calendrier des négociations ne résoudra pas les problèmes structurels de baisse généralisée du niveau de vie de nos concitoyens et de revenu agricole.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - C'est sûr.

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Les textes Égalim successifs ne les ont pas réglés. Le Gouvernement a annoncé une mission transpartisane en vue de réformer le cadre global des négociations commerciales. Réforme structurelle ou nouvel Égalim ?

L'État doit cesser d'être un simple spectateur de la guerre des prix entre industriels et grande distribution et enfin endosser son rôle de régulateur pour protéger les consommateurs et les agriculteurs

Ce texte manque d'ambition, mais nous ne voulons pas laisser nos concitoyens croire que le groupe SER est indifférent à l'inflation : c'est pourquoi nous nous abstiendrons.

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - (Mme Anne-Catherine Loisier applaudit.) Malgré notre scepticisme sur l'efficacité de ce texte, nous nous réjouissons que les apports du Sénat aient été préservés en CMP. Ce projet de loi préparé à la hâte ne devait pas pénaliser nos PME et ETI : ce fut notre boussole.

Les dates butoir des négociations commerciales fixées par le Sénat ont été retenues, c'est une grande avancée. Les PME et ETI pourront négocier avant les grands groupes pour obtenir un bon référencement. Nous leur avons évité des négociations difficiles en fin d'année en retenant les dates du 15 janvier pour les PME et du 31 janvier pour les grandes entreprises.

Autre avancée, le seuil du chiffre d'affaires choisi pour distinguer les entreprises. Retenir le chiffre d'affaires consolidé évitera que des filiales de multinationales ne s'immiscent dans la phase de négociations anticipée réservée aux PME et ETI. Sans cette précision, le principe de différenciation serait amoindri.

Nous avons été guidés par la volonté de protéger les PME et les ETI dans nos territoires. Reste que ce projet de loi ne sera pas à la hauteur pour lutter réellement contre l'inflation. Au moins ne nuira-t-il pas aux PME et aux ETI face aux multinationales et à la grande distribution.

L'esprit constructif du Sénat ne saurait être interprété comme un blanc-seing pour la méthode du Gouvernement. Avancer les négociations pour lutter contre l'inflation est un renversement de la philosophie des lois Égalim et des efforts du Sénat pour construire les prix en fonction de l'amont. J'espère que ce principe ne sera pas remis en cause. Cessons l'instabilité juridique en la matière : depuis 2018, nous avons légiféré quatre fois !

J'espère que la mission annoncée, madame la ministre, défendra une position ambitieuse et réfléchie en vue de résoudre les problèmes persistants des négociations commerciales. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDSE ; Mme Antoinette Guhl applaudit également.)

M. Vincent Louault .  - Toute mesure d'urgence pour lutter contre l'inflation est louable. Je me réjouis que les apports du Sénat aient été préservés en CMP, et je salue le travail de notre rapporteur.

La guerre d'agression russe contre l'Ukraine a provoqué une inflation mondiale d'une rare intensité. L'Europe et la zone euro ont été percutées de plein fouet, même si la France a plutôt mieux résisté que d'autres.

Hélas, ce texte ne changera rien. Pire, nous redoutons de nouvelles hausses. En avançant les négociations, nous allons anticiper les hausses, car le poison du prix de l'énergie empêche une réelle désinflation. Quant au critère du chiffre d'affaires, espérons qu'il ne générera pas de conflits ou effets de seuils.

Tout ça pour ça ? Nous avons besoin de flexibilité. Les cours du blé et des matières premières évoluent chaque seconde. Le calcul trimestriel prévu par la circulaire du 30 mars 2022 a permis d'être plus agile : nos collectivités ont pu accorder les hausses nécessaires à la survie de nos prestataires, et les baisses ont également été rapidement répercutées.

Utilisons l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Les données existent : il faut nous en emparer pour trouver des mécanismes efficaces, au bénéfice des Français.

Le groupe Les Indépendants s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et Les Républicains ; M. Franck Menonville applaudit également.)

À la demande de la commission des affaires économiques, le projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°30 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 260
Pour l'adoption 225
Contre   35

Le projet de loi est adopté.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques.  - Je remercie notre rapporteure pour son travail, effectué dans l'urgence, mais avec engagement et détermination. Nous connaissons son expertise.

Madame la ministre, vous avez salué la qualité de nos échanges, je vous en remercie. Malgré nos désaccords, nous avons su avancer de façon constructive et aboutir à un accord en CMP ; je sais que vous y avez largement contribué. Continuons ainsi, car nous aurons de nombreuses occasions de travailler ensemble, notamment sur la réforme du cadre des négociations commerciales, très attendue.

Sans renoncer à nos convictions, nous serons à vos côtés pour échanger et coconstruire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI ; Mme Antoinette Guhl applaudit également.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée.  - Je salue ce premier texte placé sous votre responsabilité, madame la présidente. Malgré quelques divergences, nous avons eu des échanges apaisés et constructifs.

J'ai entendu certains ce matin prédire des hausses de prix ; je suis convaincue pour ma part qu'il y aura aussi des baisses. La stabilité normative est importante dans tous les domaines, mais plus encore dans les domaines économique et fiscal. Avant toute éventuelle loi Égalim 4 ou 5, nous aurons une mission gouvernementale, associant les parlementaires.

Ne soyons pas trop durs avec nous-mêmes : pendant dix ans, le système a fonctionné, dans un contexte de déflation. Mais la donne a changé : la rigidité naguère protectrice est plus délétère en période d'inflation. Nous devons revoir les règles du jeu.

J'ai été frappée de voir certains acteurs économiques changer de pied tout au long de nos travaux, dire vert le lundi et rouge le vendredi... Ce sujet sérieux mérite mieux que des postures. (M. Henri Cabanel le confirme.) Pour faire de bonnes lois, encore faut-il que les acteurs économiques décrivent la situation économique de manière sincère.

Je n'ai cessé de me battre contre l'inflation galopante. Mais - je le dis avec des moufles plutôt que des pincettes - il semblerait que nous abordions plutôt une spirale descendante. Je ne doute pas qu'il y aura des baisses de prix.

Merci pour votre engagement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, INDEP et RDPI)

La séance est suspendue à 13 heures.

Présidence de M. Alain Marc, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.