Contribution des Ehpad privés (Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Marie-Laure Phinera-Horth .  - Je reconnais que cette proposition de loi paraît séduisante. Dans Les Fossoyeurs, Victor Castanet a mis en évidence les défaillances importantes des Ehpad privés à but lucratif, pris dans une recherche effrénée du profit au détriment du bien-être des patients. Le prix moyen de séjour y est de 40 % supérieur au secteur public.

Cependant, le secteur des Ehpad connaît des difficultés inédites : crise de recrutement, perte de confiance. Ils sont pris dans un effet ciseau entre la hausse des coûts et la baisse de la rentabilité. La part des Ehpad déficitaires, tous secteurs confondus, est passée de 27 à 66 % entre 2020 et 2023. Or les besoins de ce secteur vont croissant au vu du vieillissement de la population.

Selon le rapport d'information sur la situation des Ehpad, dont Solanges Nadille a été corapporteure, les Ehpad lucratifs ont vu leur résultat net baisser de 8,8 % à 4,7 %. La mise en liquidation judiciaire de Medicharme et la restructuration d'Orpea illustrent ces difficultés.

Aussi, cette proposition de loi apparaît peu opportune. En Guadeloupe, l'offre d'Ehpad est à 50 % pourvue par le privé lucratif. Y taxer ce secteur serait contre-productif, alors que les places manquent pour répondre au vieillissement de la population.

Pour la pérennité du secteur, mieux vaudrait mettre en application les recommandations du rapport d'information de Mmes Nadille, Souyris et Deseyne, telles que la création d'une deuxième journée de solidarité, la revalorisation du tarif plancher ou l'intégration dans le périmètre de la section soins des dépenses qui relèvent de la section hébergement.

Le groupe RDPI votera contre cette proposition de loi. Cependant, nous ne voulons pas signer de chèque en blanc aux Ephad privés à but lucratif. Il faut mettre en oeuvre les mesures d'encadrement prévues par la majorité présidentielle. Pour poursuivre le plan de contrôle des 7 500 Ephad français, quelque 50 000 postes ont été prévus d'ici à 2030 dans le PLF 2024. Il faut en outre faire respecter les obligations de transparence et évaluer les mesures de lutte contre la maltraitance.

Plutôt que taxer un secteur en crise, nous préférons améliorer la qualité de l'accueil et des soins et regagner la confiance des citoyens grâce à des mesures d'encadrement. C'est aussi en repensant le modèle économique du secteur que nous assurerons sa pérennité. (M. Vincent Capo-Canellas applaudit.)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Je salue l'initiative de Jean-Luc Fichet. D'ici à 2050, la France comptera plus de cinq millions de personnes âgées de plus de 85 ans. Il est crucial de préparer l'avenir en renforçant nos Ehpad et en adaptant leur modèle économique.

Le rapport d'information du Sénat rappelle combien la situation financière des établissements s'est dégradée. Les conditions de travail sont éprouvantes. Le coût est exorbitant pour les familles. La dignité de nos aînés est éprouvée. Les agents sont en sous-effectif, et les soins assurés aux résidents ne sont pas à la hauteur des besoins.

Les scandales récents tels qu'Orpea ont mis en lumière des dérives inacceptables qui, bien que minoritaires, doivent être combattues. La qualité des soins doit être une priorité ; il faut renforcer les contrôles.

Les soignants sont le coeur battant de nos Ehpad ; pourtant, ils travaillent dans des conditions souvent épuisantes, sont sous-payés et souffrent d'un manque de reconnaissance.

Des investissements massifs sont nécessaires. Il faut améliorer le ratio personnels-résidents et veiller à ce que le coût demeure soutenable pour les familles.

Selon le ministre des finances, les mesures proposées seraient peu efficaces. On risque surtout de voir la hausse de taxation compensée par une hausse des prix ou une baisse des charges.

Nous aurons également à aborder le sujet des résidences autonomie et des résidences seniors privées.

Le Gouvernement doit se saisir du dossier du vieillissement. Nous attendons beaucoup de vous, monsieur le ministre. Les Ehpad publics sont à la peine, et les départements font des efforts considérables.

Le RDSE soutiendra majoritairement l'appel que constitue cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe SER ; M. Akli Mellouli applaudit également.)

M. Vincent Capo-Canellas .  - Merci à Jean-Luc pour sa contribution sur un sujet qui nous touche tous, celui du grand âge. Le secteur des Ehpad privé était quasi absent il y a vingt ans ; il représente aujourd'hui un quart des places.

Les révélations de Victor Castanet puis les conclusions des travaux du Sénat nous ont tous choqués. La financiarisation du secteur et la piètre qualité des soins et des services fournis aux personnes âgées sont d'autant plus insupportables qu'ils sont le résultat de la rationalisation des coûts et de la recherche du profit.

Certains établissements sont dans une situation financière très dégradée. Or les Ehpad sont indispensables à la prise en charge de la perte d'autonomie. Si le maintien à domicile doit se développer, le nombre de nos aînés en Ehpad va continuer à croître. Les pouvoirs publics ont sans doute été pris de court par la financiarisation du secteur. Le secteur privé reste nécessaire, mais il doit apporter des garanties sur la qualité d'accueil de nos aînés.

Impossible de réduire les dépenses n'est pas possible, sauf à réduire les effectifs et donc la qualité des soins. Augmenter les tarifs n'est pas non plus envisageable. La génération du baby-boom entrant dans la dépendance, il faudra augmenter le nombre de places en Ehpad. Les postes et formations à créer n'ont pas été suffisamment planifiés.

Une nouvelle taxation ne ferait que réduire les marges de manoeuvre d'un secteur déjà affaibli. Les causes sont connues : revalorisations salariales insuffisamment compensées, crise sanitaire doublée d'une crise médiatique ayant engendré une perte de confiance, inflation des prix de l'alimentation et de l'énergie, manque de personnel.

Alors que le secteur cherche à stabiliser son modèle économique, cette proposition sera inefficace. Mettons plutôt en oeuvre les recommandations du rapport d'information du Sénat. Il est impératif de renforcer la réglementation du secteur. Les droits des résidents doivent être protégés et les ARS pouvoir mieux contrôler les établissements.

Le vieillissement de la population se traduira par un besoin d'investissement de 7 milliards d'euros d'ici à 2030. Le ministre de la santé estime qu'il faut doubler le nombre de places d'ici à 2050. De moindres investissements dans le secteur privé lucratif ne feraient qu'accroître la pression sur le privé non lucratif et le public.

Le groupe UC ne votera pas ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - La commission des affaires sociales du Sénat a achevé sa mission d'information fin septembre sur la situation des Ehpad. Alors que 85 % des Ehpad publics sont en déficit, une loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge est plus attendue que jamais. L'État doit prendre ses responsabilités, y compris vis-à-vis des départements, qui ne peuvent pas suivre.

Les rates avancées sont le fait de propositions de loi parcellaires, s'empilant les unes sur les autres. Il y a urgence à revoir l'organisation et le financement des Ehpad.

Le présent texte instaure une contribution de 20 % pour les établissements dépassant 10 % de rentabilité financière. C'est la moindre des choses, au regard des dérives de la financiarisation de la santé et des bénéfices réalisés sur le dos de nos aînés.

Finalement, la question n'est pas celle du niveau de profit, mais celle de l'existence même d'un secteur privé lucratif dans la santé et le médico-social. Dans Les Fossoyeurs, Victor Castanet a montré la contradiction indépassable entre les missions de service public et la recherche du profit.

À nos yeux, ce texte n'est qu'une étape. Il faudra réfléchir aux conditions d'installation du secteur privé lucratif. Nous proposons de supprimer les niches fiscales pour les investissements immobiliers en Ehpad et d'instaurer une redevance sur les Ehpad commerciaux.

Cette proposition de loi est un petit pas sur le long chemin de la création d'un véritable service public de la perte d'autonomie. Le groupe CRCE-K votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Akli Mellouli.  - Très bien !

Mme Anne Souyris .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Les Ehpad font face à une crise sans précédent. Avec Solanges Nadille et Chantal Deseyne, nous l'avons écrit dans notre rapport d'information. Tous les Ehpad sont à bout de souffle. Tous... pas tout à fait. Les Ehpad privés commerciaux se maintiennent dans une relative bonne santé financière : leur résultat net est de 4,7 % en 2023.

Le taux d'excédent se maintient à 8,2 % cette année. L'activité profitable des grands groupes privés lucratifs se fait au détriment de la sécurité sociale, des départements et de la justice fiscale. Les groupes privés optimisent leurs profits par la spéculation immobilière, comme l'a montré Raymonde Poncet Monge à l'occasion d'une mission de contrôle.

Les Ehpad privés commerciaux fonctionnent grâce à de l'argent public, il est donc normal qu'ils participent à l'effort collectif. Seulement 13 % des places en Ehpad privés commerciaux sont habilitées à l'aide sociale, contre 96 % pour les Ehpad publics. Les Ehpad privés commerciaux prennent en charge les hébergements les moins médicalisés, donc les plus rentables.

Nous avons proposé la création d'un cahier des charges, pour qu'ils prennent toute leur part.

Les travaux de Victor Castanet et les travaux parlementaires ont montré l'opacité du fonctionnement de ces établissements. L'article 32 de la loi Bien vieillir prévoyait la publication d'indicateurs, mais le décret d'application n'a toujours pas été publié. Cela devient urgent.

Les Ehpad privés commerciaux réalisent des profits, bénéficient du soutien financier public, mais ne contribuent pas justement à l'effort de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Aussi, le GEST soutient pleinement cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe SER)

Mme Corinne Féret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi prévoit la création d'un nouveau prélèvement obligatoire dont les recettes seraient versées à la CNSA, assis sur le montant d'impôt sur les sociétés acquitté par les gestionnaires d'Ehpad commerciaux. Son taux serait de 20 % en cas de rentabilité financière entre 10 et 15 %, et de 30 % lorsque la rentabilité dépasse 15 % - autan dire des résultats tout à fait appréciables...

La population française vieillit. L'investissement nécessaire dans les Ehpad est estimé à plus de 7 milliards euros d'ici à 2030.

Cela fait plus de six ans que nous attendons du Président de la République qu'il présente enfin un projet de loi pour répondre au défi du vieillissement. Les écrans de fumée suscitent frustration et colère.

Nous attendions la loi de programmation Grand Âge d'ici au 31 décembre 2024. Élisabeth Borne s'était engagée à déposer un texte à l'été 2024. Énième promesse non tenue ! Monsieur le ministre, je vous demande solennellement d'inscrire une telle loi à l'ordre du jour.

Il y a urgence à préparer la société à la massification du vieillissement et à répondre à la grave crise des Ehpad publics, alors que huit établissements sur dix sont en déficit.

Que répond le Sénat, chambre des collectivités territoriales, à tous ces maires qui n'ont plus les moyens d'héberger des personnes âgées dépendantes dans de bonnes conditions ?

La majorité sénatoriale ne formule aucune solution alternative, alors même qu'elle reconnaît le problème. Les projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), les propositions de loi se suivent, et rien ne se passe, alors que nous pourrions trouver un équilibre entre Ehpad publics et privés grâce à une planification méthodique.

Nos aînés ont besoin d'un encadrement adapté pour vieillir dignement. Tous, nous serons un jour des personnes âgées -  je vous le souhaite ! Je vous invite à voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Daniel Salmon applaudit également.)

M. Alain Marc .  - Le vieillissement de la population française est un fait de société dont nos politiques publiques n'ont pas pris la mesure. S'occuper avec dignité et respect de nos aînés et des personnes souffrant de handicap est un devoir. Or nous manquons de places en Ehpad, faute d'anticipation.

Je suis président bénévole d'un Ehpad associatif privé à but non lucratif. En Aveyron, nous nous sommes toujours refusés à voir des Ehpad privés à but lucratif s'installer.

Cette proposition de loi intervient après la retentissante et scandaleuse affaire qui a secoué ce secteur. Certes, il faudrait plus d'investissements publics pour augmenter les capacités d'accueil des établissements, et plus de contrôle pour détecter les comportements condamnables. Mais la taxation des Ehpad privés à but lucratif, qui aura pour seul effet une réduction des investissements et l'augmentation des tarifs, n'est pas une solution.

Décider d'une rentabilité financière de 10 % est franchement honteux. Pour autant, faut-il taxer ? Ce ne sera jamais une bonne solution.

M. Daniel Salmon.  - Alors comment fait-on ?

M. Alain Marc.  - Parlons plutôt de la formation du personnel, du coût d'hébergement et de l'isolement des résidents.

Les sénateurs du groupe Les Indépendants, qui comprennent l'émoi suscité par le scandale des Ehpad privés, ne voteront pas ce texte.

M. Stéphane Sautarel .  - Cette proposition de loi s'inscrit dans une actualité humainement douloureuse et financièrement tendue. Notre commission des finances, sur proposition du rapporteur Belin, s'est opposée à la taxe proposée, l'estimant contre-productive. Le groupe Les Républicains partage cette position et rejettera le texte.

Le nombre de résidents en Ehpad va passer de 600 000 à 700 000 en 2030 et peut-être 900 000 en 2050. Les Ehpad à but lucratif, comme tous les autres, joueront un rôle majeur pour répondre aux besoins. Nous devons assurer la qualité de la prise en charge des bénéficiaires, en réalisant des contrôles.

L'investissement public est déjà bien en peine. Une nouvelle taxe affecterait l'investissement privé, ce qui accentuerait les difficultés actuelles. Les Ehpad sont confrontés à des charges en hausse - de plus de 57 % pour l'alimentation et l'énergie depuis 2019 - tandis que les recettes baissent. D'où un effet ciseau qui limite l'utilité de la taxe proposée.

La situation de tous les Ehpad est plus que préoccupante. Il faut des moyens, que seule une réforme en profondeur de la dépendance est en mesure de traiter. La démographie est têtue, et notre procrastination est une faute. (M. Bruno Belin applaudit.)

Discussion de l'article unique

M. Daniel Salmon .  - Ce sujet est éminemment sérieux. Dans mon département, j'ai été alerté, comme vous, par des maires en extrême difficulté face au déficit de leurs Ehpad publics -  145 000 euros en moyenne. C'est colossal !

Les Ehpad privés à but lucratif accueillent les patients les plus rentables, quand les Ehpad publics doivent assumer les soins les plus coûteux. C'est toujours pareil : aux cliniques privées, les bénéfices, aux hôpitaux publics, les déficits. Or on creuse cette dette en permanence.

La proposition de loi va dans le bon sens, car il s'agit de créer une contribution de ceux qui engrangent des profits éhontés. Comment peut-on dire qu'il est contre-productif de faire oeuvre de justice et de solidarité ? Nous voterons cette proposition de loi, qui n'est qu'une première marche. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Émilienne Poumirol .  - La faiblesse des contrôles effectués est patente. La financiarisation va croissant dans les domaines de la santé et du médico-social, comme dans tant d'autres. Des établissements peuvent présenter des comptes en déficit, alors qu'ils bénéficient de nombreux financements publics, de la sécurité sociale ou des départements. Certains organismes montent des sociétés civiles immobilières (SCI) simplement pour percevoir des loyers exorbitants.

Une réforme structurelle est nécessaire. Il faut contrôler les Ehpad privés à but lucratif. S'ils sont toujours plus nombreux, c'est bien qu'ils y trouvent des avantages, contrairement à ce qu'ils affirment ! Ces grands groupes ne sont pas des philanthropes. La santé n'est pas un commerce !

Nous sommes évidemment favorables à cette proposition de loi de notre groupe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

M. Jean-Luc Fichet, auteur de la proposition de loi .  - Je suis surpris. Cette proposition de loi met en évidence l'appel au secours des élus locaux, qui n'ont plus les moyens de faire fonctionner leurs établissements. Les personnes âgées sont en souffrance, alors qu'elles devraient y être heureuses. Par manque de personnels et d'activités, elles sont abandonnées à elles-mêmes.

J'aurais voulu que notre débat porte sur la qualité des soins et sur les moyens de compenser les déficits budgétaires.

Mon texte laisse aux établissements privés lucratifs une marge de 10 % ! Soit quelques possibilités d'investissement...

Je suis étonné d'entendre dire que des places restent libres dans ces établissements. Beaucoup de familles, dans mon territoire, n'osent pas même critiquer de telles structures, car il est très difficile d'y obtenir une place !

Il faudra créer 100 000 places dans les années à venir. Le privé investit massivement, il a créé 85 % des nouvelles places réalisées : pas de quoi s'inquiéter concernant la bonne santé des groupes privés.

Nous attendons tous la loi Grand Âge ; et oui, le privé peut venir au secours du public.

M. Pierre Jean Rochette .  - Je ne participerai pas au vote. Les financements des Ehpad sont définis sur la même base de calcul pour tous les établissements. Aussi comment se fait-il que certains parviennent à fonctionner et d'autres non ?

Le texte ne me choque pas, mais nous ne regardons pas le problème sous le bon angle.

L'Ehpad est une nécessité dans l'organisation de nos territoires. En cas de nouvel appel à projets lancé par les ARS ou les départements, il faudrait consolider les Ehpad existants, en souffrance, plutôt que de confier des missions à de nouvelles structures.

L'Ehpad doit être renforcé. Il doit sortir de ses murs, pour être en contact avec son territoire : par l'accompagnement social à domicile, l'hospitalisation à domicile (HAD), ou des soins palliatifs plus poussés. Le problème se pose particulièrement en zone rurale.

La situation actuelle est liée à un problème de base, qui doit être plus solide : à nous de revoir le modèle pour pérenniser l'activité.

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Je voterai cette proposition de loi des deux mains. Elle ne fait pas la révolution ! Elle laisse 10 % de marge aux Ehpad privés, ce n'est pas rien !

J'ai entendu citer plusieurs fois Castanet, le scandale Orpea, la maltraitance, les prix excessifs. Et de nous dire qu'on ne peut pas voter ce texte, sous prétexte qu'on ne pourrait rien prendre aux Ehpad privés. Mais quelle solution proposez-vous ?

Ces établissements perçoivent des fonds publics. Tout ce qu'ils font, ils le font avec des fonds publics ! A contrario, 85 % des Ehpad publics sont en déficit. Que proposez-vous à la place ? Rien. Et quid du Gouvernement ? Nous attendons toujours le projet de loi Grand Âge. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST ; Mme Maryse Carrère applaudit également.)

M. Bruno Belin, rapporteur.  - L'ARS, c'est de l'argent public.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Exactement !

M. Bruno Belin, rapporteur de la commission des finances .  - Comment donner des moyens aux départements qui ont de moins en moins de recettes fiscales ? On pourrait augmenter d'un point les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et les flécher sur les compétences sociales des départements.

Mais on ne peut pas avoir le privé honteux ! (M. Daniel Salmon proteste.) La LGV Tours-Bordeaux s'est bien faite avec un partenariat public-privé ! Idem pour l'immobilier des gendarmeries.

Dans les collectivités en difficulté, il faut trouver des solutions. On nous dit qu'il faut taxer des superprofits, mais où sont-ils en 2024 ? Ne nous intéressons pas à hier, mais à aujourd'hui. Voyez la liquidation judiciaire de Médicharme !

Des propositions ont été faites : nouvelle journée de solidarité, par exemple. Je salue ici le courage, en son temps, de Jean-Pierre Raffarin (Protestations sur les travées du GEST et du groupe SER). Cette journée rapporte 2,4 milliards d'euros à la CNSA.

Une nouvelle taxe est une mauvaise idée, au moment où on a besoin de tous. On a besoin de 100 000 places dans les cinq ans à venir ; cela représente un manque de plus de 60 000 salariés. Il faut se préoccuper de leur formation.

J'en appelle au bon sens du ministre : il faut un fonds de soutien aux établissements. J'espère que nous pourrons en reparler dans les semaines à venir.

M. Paul Christophe, ministre.  - Ministre depuis trois semaines, je me suis attaché à l'urgence.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - On sait que cela va arriver !

M. Paul Christophe, ministre.  - La première urgence est de répondre à la crise financière des Ehpad. Mes services vous apporteront des éléments dans quelques semaines, monsieur le rapporteur.

La seconde urgence est le PLFSS. Je serai très à l'écoute de vos propositions, car je sais combien vous maîtrisez ce sujet. Votre expérience locale en la matière est très précieuse.

Le rapporteur pointe les taux de remplissage disparates. Cette réalité varie selon les territoires.

Depuis 2019, l'État a augmenté sa participation sur le volet sanitaire de 50 % -  ce n'est pas neutre.

Nous devons apporter des réponses adaptées aux besoins des territoires. Certains besoins sont connexes : personnes âgées vieillissantes, étudiants, structures de répit... Repartons d'une vision horizontale, et non plus verticale, pour transformer l'offre.

J'entends parler du bien vieillir ; je préfère pour ma part le bien vivre. (Murmures sur les travées du groupe SER) C'est l'axe de travail sur lequel je veux m'engager.

Nous allons prévoir au PLFSS 6 500 places supplémentaires. Il faudra trouver des prétendants, avec une communication de presse d'ici à la fin de l'année, pour redorer le blason de ces métiers. Donnons aux jeunes des perspectives plus intéressantes, en leur permettant de passer du domicile à l'Ehpad, à la crèche... Pragmatique, je préfère me fixer des objectifs atteignables à court terme.

Mme Émilienne Poumirol.  - Oui, mais il faut des moyens !

M. Paul Christophe, ministre.  - Bien sûr. N'oublions pas non plus la trajectoire du domiciliaire, car nous devons avoir une vision globale.

Mme Émilienne Poumirol.  - Là aussi, il faut des moyens !

M. Paul Christophe, ministre.  - On est d'accord. Il faut des moyens, redonner de l'attractivité aux métiers et parler de bien vivre. Je suis heureux d'avoir pu vous écouter. Nous aurons d'autres rendez-vous.

À la demande du groupe Les Républicains, l'article unique de la proposition de loi est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°16 :

Nombre de votants 330
Nombre de suffrages exprimés 328
Pour l'adoption 111
Contre 217

L'article unique n'est pas adopté.En conséquence, la proposition de loi n'est pas adoptée.

La séance est suspendue quelques instants.