SÉANCE
du mardi 3 décembre 2024
33e séance de la session ordinaire 2024-2025
Présidence de M. Alain Marc, vice-président
Secrétaires : Mme Alexandra Borchio Fontimp, Mme Véronique Guillotin.
La séance est ouverte à 9 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
Violences d'extrême droite à l'université
Mme Mathilde Ollivier . - Le 27 septembre dernier, un étudiant de l'université Panthéon-Assas a été violemment agressé par des militants d'extrême droite aux portes de son établissement. Bilan : huit jours d'incapacité totale.
Depuis plusieurs années, la violence d'extrême droite gagne du terrain dans l'enseignement supérieur. Le sentiment d'impunité est total au sein de collectifs ouvertement radicaux, hélas en pleine recrudescence. Les propos et actes racistes, homophobes et sexistes se banalisent. De Paris à Besançon, en passant par Lorient et Bordeaux, les signalements se multiplient. On voit même apparaître des symboles néofascistes...
Monsieur le ministre, avez-vous conscience de la dangerosité de ces groupes ? Volontaire ou non, votre silence est très problématique. Les étudiantes et étudiants doivent se sentir protégés, quels que soient leur origine sociale, leur orientation sexuelle et leur genre. Nous devons mieux reconnaître ce phénomène et mettre en oeuvre des mesures de prévention spécifiques. Ce combat doit être mené en front commun et républicain. Comment comptez-vous agir ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Ma position est constante et conforme à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui garantit la libre communication des pensées et opinions dans les limites prévues par la loi. L'université est par essence le lieu de la liberté d'expression, dans un cadre permettant le débat contradictoire. J'assume qu'elle est libérale au sens classique : les libertés de s'exprimer, d'enseigner et d'étudier y sont garanties.
En revanche, je ne tolère aucune atteinte aux personnes ou aux biens. Les auteurs de violences doivent être sanctionnés aux plans administratif et pénal. Aucune violence n'est tolérable, d'où qu'elle vienne.
La circulaire du 4 octobre dernier rappelle aux dirigeants d'établissement les pouvoirs à leur disposition pour garantir des conditions d'enseignement et d'études sereines. Les chefs d'établissement peuvent saisir le procureur de la République et je les soutiendrai systématiquement. En début d'année, le ministère diffusera une boîte à outils opérationnelle. Enfin, une veille permanente est assurée, ainsi qu'un suivi des événements signalés, et les fonctionnaires de défense et de sécurité diffusent une culture de la sécurité au sein des établissements.
Mme Mathilde Ollivier. - Je constate que vous ne m'avez pas répondu spécifiquement sur la violence d'extrême droite, qui était l'objet de ma question.
Prévention des risques liés à l'alcool et aux stupéfiants lors des soirées étudiantes
M. Fabien Genet . - À quelques semaines du Dry January - comme l'on dit en bon français... -, je souhaite attirer votre attention sur les accidents liés à l'alcool et aux stupéfiants lors des soirées organisées dans les locaux des universités et établissements d'enseignement supérieur.
La diffusion du modèle américain des soirées de promotion et la radicalisation des soirées d'intégration entraînent des accidents dramatiques, parfois mortels. La Saône-et-Loire a, hélas, connu un tel deuil. À l'origine de ces tragédies, on trouve bien souvent des rituels alcoolisés, parfois accompagnés de consommation de drogues.
L'État ne peut se désintéresser du sujet, et des mesures concrètes doivent être prises par les organisateurs pour prévenir les conduites à risque. Comment comptez-vous agir pour éviter de tels accidents et ainsi épargner des vies ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - La loi est claire : amener autrui, contre son gré ou non, à subir ou commettre des actes humiliants, dégradants ou à consommer de l'alcool de manière excessive lors de réunions liées au milieu scolaire, sportif ou socio-éducatif est puni de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 7 500 euros. Organiser ou promouvoir des soirées au cours desquelles un excès est encouragé est également puni.
Particulièrement sensible à cette question, j'ai agi de deux manières : facilitation des signalements et accompagnement des victimes, renforcement de la prévention. Sur ce dernier point, un guide des événements festifs a été élaboré, ainsi qu'une charte éthique et une fiche réflexe à destination des victimes et témoins, diffusée depuis 2022 et actualisée chaque année.
Ces dérives appellent une grande réactivité. Elles mettent en danger de jeunes gens promis à un bel avenir et peuvent favoriser des atteintes sexuelles. À cet égard, mon ministère mène depuis deux ans une campagne de communication intitulée « Sans oui, c'est interdit. » Nos actions ont été enrichies cette année à la lumière des travaux de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).
La fête n'a pas besoin de ces excès. Protégeons nos jeunes adultes !
M. Fabien Genet. - Merci pour ces rappels juridiques et l'affirmation de votre volonté. Les établissements doivent faire pleinement la lumière sur ces drames lorsqu'ils surviennent et en tirer toutes les conséquences.
Violences sexistes et sexuelles lors des événements d'intégration
M. Jacques Grosperrin . - D'après une étude récente, un tiers des étudiants ont été victimes ou témoins d'au moins une violence sexiste ou sexuelle lors d'un événement étudiant, notamment une soirée d'intégration. Pas moins de 11 % des étudiants déclarent avoir subi un bizutage incluant pratiques humiliantes et comportements dégradants, voire actes sexuels non consentis.
Pourtant illégal depuis 1998, le bizutage continue de bénéficier d'une tolérance liée à la persistance de certaines traditions. Les week-ends d'intégration font partie de la dimension business de nombreuses grandes écoles et contribuent parfois à leur réputation. Leur organisation hors les murs participe de la persistance d'une culture du bizutage.
La responsabilité des établissements et de leurs dirigeants est en tout état de cause engagée. Les règlements intérieurs doivent s'appliquer et, le cas échéant, des procédures disciplinaires être mises en oeuvre. Une procédure pénale est toujours possible.
Certains rites étudiants, même édulcorés, sont le paravent d'abus inacceptables. Monsieur le ministre, comment comptez-vous faire cesser les excès qui perdurent pour protéger les étudiants ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Comme il y a quelques instants, je commencerai par rappeler la loi : amener autrui à subir ou commettre des actes humiliants, dégradants ou à consommer de l'alcool de manière excessive lors de réunions liées au milieu scolaire, sportif ou socio-éducatif est puni de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 7 500 euros.
M. Jacques Grosperrin. - Merci pour votre réponse. Les universités sont autonomes : leurs présidents doivent prendre davantage leurs responsabilités. Il revient aux chefs d'établissement d'assurer la protection de leurs étudiants.
Avenir de l'école rurale
M. Rémy Pointereau . - L'éducation nationale est le socle de notre République. Elle doit garantir l'égalité des chances sur tous les territoires.
L'annonce de 4 000 suppressions de postes d'enseignants, dont 3 815 dans le premier degré, dans le projet de loi de finances pour 2025, a suscité de vives inquiétudes dans le monde rural.
Dans le Cher, 31 classes ont déjà fermé l'an dernier, et 19 postes ont été supprimés. Ces chiffres alarmants traduisent une tendance lourde à la dégradation de l'encadrement pédagogique, qui pénalise les élèves et creuse les inégalités territoriales.
En zone rurale, on ferme des écoles qui sont pourtant des lieux de vie essentiels. En zone urbaine, les classes sont surchargées, compliquant le travail des enseignants.
Je salue l'adoption de l'amendement d'Olivier Paccaud, rapporteur spécial des crédits de la mission « Enseignement scolaire », limitant à 2 000 la baisse du nombre de professeurs. Mais cela suffira-t-il pour répondre à l'urgence éducative dans nos territoires ?
« Ouvrir une école, c'est fermer une prison », disait Victor Hugo. L'instruction de nos enfants est un honneur pour notre pays. Comment comptez-vous éviter que le budget mis en oeuvre l'année prochaine, notamment en cas de censure, n'amplifie les fractures éducatives entre territoires ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - L'année scolaire 2024-2025 voit la forte diminution du nombre d'élèves se poursuivre. En conséquence, le taux d'encadrement s'améliore. Au primaire, il est de 21,3 élèves par classe, contre 23,2 en 2017.
La carte scolaire est avant tout un instrument de politique éducative. L'éducation nationale la mobilise pour s'adapter à la réalité de nos territoires, en constante évolution. Les travaux préparatoires donnent lieu à de nombreux échanges avec les élus - du moins il faut l'espérer. Ils se fondent sur une appréciation fine et objective de la situation de chaque école et des spécificités locales. La répartition des moyens dans le premier degré tient compte du caractère plus ou moins rural de chaque circonscription et même de chaque école.
Pour mieux répondre aux préoccupations des élus, le dialogue et la coordination ont été renforcés cette année, en amont des conseils départementaux de l'éducation nationale. Des réponses adaptées aux territoires ruraux ont été élaborées ces dernières années : allocation progressive des moyens et dispositif territoire éducatif rural (TER), notamment.
Dans le Cher, le taux d'encadrement s'est nettement amélioré : le nombre d'élèves par classe est de 20,6 - un taux plus favorable que la moyenne nationale.
Ruptures dans l'accompagnement des élèves en situation de handicap
Mme Jocelyne Guidez . - L'école inclusive repose sur un principe fondamental : offrir à chaque élève en situation de handicap les conditions nécessaires à sa réussite et son épanouissement.
Or de nombreux témoignages montrent que ce droit n'est pas toujours assuré. On constate des ruptures d'accompagnement et un manque de stabilité. Certains accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) sont déplacés en cours d'année, sans concertation. La continuité est pourtant essentielle à la réalisation de l'ambition inclusive.
Paul-Axel est atteint de troubles autistiques. Depuis 2022, il a connu quatre AESH. Il a été laissé sans suivi pendant une année complète et subit un nouveau changement en cours d'année.
Je rends hommage au travail remarquable des AESH, qui jouent un rôle clé dans la vie des enfants qu'ils accompagnent. Il est crucial de garantir la stabilité de leur présence.
Notre pays compte des centaines de Paul-Axel : ils subissent des ruptures d'accompagnement qui ébranlent leur confiance et mettent en péril leur inclusion. Comment comptez-vous leur garantir désormais la stabilité de leur accompagnant ? Allez-vous renforcer le dialogue entre les équipes éducatives et les familles pour sécuriser le parcours de ces élèves dans des conditions dignes ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Le droit à l'éducation est fondamental ; ne transigeons jamais avec ce principe essentiel de notre République.
Nous mettons tout en oeuvre pour assurer une scolarité de qualité à tous les élèves, quels que soient leurs besoins. Je rends hommage aux équipes pédagogiques, mobilisées dans cet objectif.
Nous comptons 519 000 élèves en situation de handicap, un nombre en augmentation de 8 % en un an. Parmi eux, 332 000 bénéficient d'un accompagnement humain, soit 28 000 de plus que l'année précédente. Nous agissons aussi pour renforcer l'accessibilité des apprentissages à travers des matériels pédagogiques adaptés.
Les AESH participent quotidiennement à la construction d'une école toujours plus inclusive. En quatre ans, 15 000 nouveaux postes ont été créés, dont 3 000 à la rentrée 2024. Ces moyens importants sont l'un des leviers pour garantir la continuité de l'accompagnement humain. La loi du 27 mai 2024, qui porte sur la pause méridienne, en est un autre.
L'attention portée aux familles est fondamentale pour garantir la confiance. Un pôle d'appui à la scolarité, dispositif issu de la dernière conférence nationale du handicap, a été créé dans cet esprit dans quatre départements préfigurateurs, afin d'améliorer la répartition des AESH et répondre plus rapidement aux besoins.
Mme Jocelyne Guidez. - Vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question. Je parle des AESH qui laissent tomber l'enfant au beau milieu de l'année et ne sont pas remplacés. Comment garantir aux enfants le même accompagnant pendant un an au moins ? C'est une question de respect !
ABF et projets des collectivités
M. François Bonneau . - À cause des exigences parfois ubuesques des architectes des bâtiments de France (ABF), certaines collectivités abandonnent des projets. C'est inacceptable.
Quelles mesures compte prendre le Gouvernement ? Comment simplifier les recours contre les décisions des ABF ?
M. Patrick Hetzel, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Je vous prie d'excuser l'absence de Rachida Dati, en déplacement avec le Président de la République.
Les ABF sont chargés de la conservation des sites protégés, qui contribuent au rayonnement et à l'attractivité de notre pays. Sans leur contrôle, le droit commun de l'urbanisme s'appliquerait. Les avis des ABF sont rendus au cas par cas et tiennent compte des enjeux locaux, la position des élus, notamment.
Seuls 7 % des 500 000 dossiers soumis aux ABF chaque année font l'objet d'un avis défavorable. En cas de désaccord, les porteurs du projet ou les élus peuvent saisir le préfet de région. En 2023, 1 350 recours ont été déposés auprès des préfets. Si le désaccord persiste, c'est le juge administratif qui est compétent.
Souvent, ces procédures donnent lieu à un second avis favorable. L'action des ABF n'est donc pas opposée à celle des maires : les deux se complètent. Les services de l'État doivent dialoguer avec les élus : leurs intérêts sont partagés. La conservation et la mise en valeur du patrimoine contribuent au développement des territoires et à la protection de l'environnement.
M. François Bonneau. - Je suis bien sûr très sensible à la préservation du patrimoine.
Les élus déposent toutefois peu de recours, car les procédures sont complexes. Aucune autorité ne contrôle l'action des ABF. Je le répète : certaines situations sont ubuesques. Les projets sont soumis au bon vouloir des ABF et certains sont abandonnés.
Indemnisation des commerçants lésés durant les JOP
Mme Catherine Dumas . - Bien qu'ils soient une véritable réussite, les jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) ont causé de nombreux préjudices à des commerçants, notamment dans le 17e arrondissement de Paris, en raison des dispositifs de sécurité instaurés par la préfecture de police. J'en profite pour rendre hommage aux forces de l'ordre et aux militaires.
Le préfet de région avait annoncé l'installation d'une commission nationale destinée à indemniser les commerçants concernés. Or ce n'est toujours pas le cas. Quand sera-t-elle mise en place ? Selon quelles modalités ? Les commerçants bénéficieront-ils d'une indemnisation juste et équitable ?
Mme Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'économie du tourisme . - Je vous remercie d'avoir salué l'action des forces de sécurité.
Malheureusement, l'accès à certaines zones a été restreint pour garantir la sécurité. Dès lors, certains commerçants ont été pénalisés. Les indemnisations ne seront versées que si les préjudices résultent des restrictions décidées par l'État. En outre, ceux-ci devront être certains, réalisés et spéciaux. Enfin, la baisse du chiffre d'affaires des commerçants devra être suffisamment importante.
À l'été, le précédent gouvernement a installé une commission ; l'instance émettra des avis sur les demandes courant 2025, lorsque les comptes des entreprises auront été arrêtés.
Outre cette procédure spécifique, les entreprises peuvent solliciter l'étalement de leurs dettes sociales et fiscales, ainsi qu'une remise de dettes, dans le cadre d'une procédure de conciliation, de sauvegarde ou de redressement judiciaire.
Enfin, les perspectives de réservation sont très bonnes pour l'année à venir.
Mme Catherine Dumas. - Merci pour votre réponse. Nous serons très vigilants. Je salue la présence en tribune d'élus, ainsi que de commerçants, essentiels à la vie quotidienne des Parisiens. Le Gouvernement doit les soutenir.
Taxes foncières pour 2024
M. Pierre-Jean Verzelen . - Il faudrait revoir la mise en page des avis de taxes foncières, modifiée récemment. Sur le haut de l'avis figure la mention « taxes votées et perçues pour la commune », et, en bas du document, il est précisé que la taxe est affectée aux collectivités et que les évolutions du taux sont déterminées par leurs organes délibérants.
La révision des bases n'est pas décidée par les communes.
Depuis la suppression de la taxe d'habitation, celles-ci ont reçu la part du foncier départemental : le taux départemental historique devrait figurer sur l'avis, pour que le contribuable puisse déterminer la part communale et l'ancienne part départementale.
Enfin, l'avis précise que la totalité des sommes est perçue au profit des communes. Pourtant, nombre d'entre elles contribuent à un fonds national de péréquation.
Je souhaiterais plus de transparence.
Mme Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'économie du tourisme . - Les taxes foncières sont établies par l'administration fiscale pour le compte des collectivités. Ce sont bien ces dernières et les EPCI qui déterminent leur taux, qui, dans la grande majorité des cas, reste constant d'une année à l'autre.
Les contribuables peinaient à identifier les bénéficiaires de ces taxes. C'est pourquoi l'intitulé des avis a été modifié en 2024, dans un souci de transparence. Nulle volonté des services fiscaux d'induire en erreur nos concitoyens, au contraire.
Les montants des taxes foncières résultent des taux d'imposition déterminés par les seules collectivités locales. Ceux-ci sont appliqués à des bases d'imposition calculées à partir des valeurs locatives, dont la révision relève d'un vote du Parlement. Cette année, la revalorisation devrait s'élever à environ 2 %, contre 7,1 % l'an dernier.
M. Pierre-Jean Verzelen. - Merci pour l'explication. Dans de nombreuses communes, 80 % du montant de la taxe va à la commune et 20 % au fonds de péréquation, depuis la suppression de la taxe d'habitation.
People & Baby
Mme Marion Canalès . - En 2022, la DGCCRF a reconnu elle-même que les groupes privés de crèches multipliaient les clauses illicites au code de la consommation ou des allégations trompeuses, entre autres.
Certains groupes, comme People & Baby, ont adopté des pratiques low cost aboutissant à la dégradation des conditions d'accueil des enfants et des conditions de travail des professionnels.
Malgré les alertes de la DGCCRF, malgré le retrait de la Caisse des dépôts de l'actionnariat du groupe, malgré plusieurs enquêtes de l'Igas, malgré les articles sur la fortune des anciens dirigeants, malgré la dette colossale du groupe qui l'a conduit à rogner sur les couches ou les repas, malgré l'exclusion du groupe de la Fédération des crèches privées, malgré les millions d'euros d'argent public, pourquoi rien n'a été entrepris contre ce système organisé ? Pendant ce temps, les salariés n'ont reçu qu'un acompte en octobre ; leur situation a été régularisée depuis.
Lutter contre les fraudes, c'est garantir aux Français que les deniers publics sont bien utilisés. Que compte faire Bercy ?
Mme Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'économie du tourisme . - Un rapport de l'Igas et plusieurs livres font état de ces dérives ; Agnès Canayer suit ce dossier de près.
Pour assurer le déploiement du service public de la petite enfance, 86 millions d'euros ont été inscrits dans le projet de loi de finances ; des crédits sont également prévus dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale via le fonds national d'action sociale des caisses d'allocations familiales (CAF).
Des contrôles seront effectués.
À plus long terme, le Gouvernement compte réformer le mode de financement des crèches, en le centrant sur la qualité de l'accueil. Les modes de financement, comme la prestation de service unique (PSU), devront évoluer.
Depuis le 18 novembre, People & Baby fait l'objet d'une procédure de sauvegarde accélérée, qui lui permettra de restructurer son passif, d'obtenir de nouveaux financements et de se relancer sur des bases saines, en vue de payer normalement les salaires.
Financement du plan France Très Haut Débit
M. Olivier Bitz . - L'État a lancé le plan France Très Haut Débit (PFTHD) en 2013, avec l'objectif de raccorder tous nos concitoyens à la fibre.
Or ce n'est toujours pas le cas dans certains territoires, comme dans l'Orne, même si 90 % des foyers y auront accès à la fin de l'année.
Certes, les derniers raccordements sont les plus difficiles à réaliser, mais ces difficultés fragilisent l'accès aux services publics dématérialisés, renforcent le sentiment de relégation des zones rurales et sapent leur attractivité.
Malgré ces enjeux cruciaux, le projet de loi de finances prévoit une baisse des crédits pour le plan, risquant ainsi de compromettre les objectifs 2025.
Comment le Gouvernement compte-t-il garantir le financement du plan et le respect des délais pour déployer la fibre partout ?
Mme Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'économie du tourisme . - Le développement de la fibre joue un rôle important en matière d'aménagement du territoire.
En dix ans, 40 millions de locaux ont été raccordés, soit 89 %, contre 30 % en Allemagne ou en Belgique. Cette prouesse industrielle a mobilisé 36 milliards d'euros d'investissement. Son succès résulte d'une alliance entre l'État, les collectivités et les opérateurs.
Depuis 2010, le soutien de l'État dans le cadre du plan s'élève à 3,57 milliards d'euros. L'État a mobilisé plus de 2,24 milliards d'euros pour soutenir les réseaux d'initiative publique (RIP), via l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT).
Dans les zones rurales, 14,6 millions de locaux sont éligibles - l'Orne ne déroge pas à la règle, puisque le département est couvert à plus de 90 %.
Sur le dernier kilomètre, l'ANCT a lancé un appel à projets doté de 150 millions d'euros pour garantir la raccordabilité des logements les plus complexes. Un nouveau dispositif prévu dans le projet de loi de finances et doté de 16,1 millions d'euros aidera les particuliers à s'équiper.
L'État sera au rendez-vous pour aider les collectivités à financer les travaux.
Retrait de Bpifrance du projet Niagara
M. Guillaume Chevrollier . - Le projet Niagara du groupe agroalimentaire LDC, reconnu comme l'un des dix projets prioritaires au niveau national et représentant plus de 150 millions d'euros d'investissement, vise à renforcer les sites mayennais de Lassay et Laval. Ce projet est crucial pour la résilience et la compétitivité de notre secteur avicole.
Cependant, leur demande d'accompagnement dans le cadre du plan France 2030 a reçu un avis négatif de la part de Bpifrance. Les critères du refus ne sont pas clairs.
Cette décision intervient au moment d'un potentiel accord avec le Mercosur qui désespère nos agriculteurs et menace notre souveraineté alimentaire.
Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour garantir un accompagnement transparent et équitable des projets stratégiques tels que Niagara ? Nos producteurs locaux seront-ils soutenus ?
Ce projet Niagara est vital pour l'ensemble de la filière avicole.
M. Philippe Tabarot. - Très bien !
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt . - Le sujet de la souveraineté alimentaire m'est très cher.
J'ai rencontré les dirigeants de LDC, leader européen actif sur toute la chaîne de production de la volaille.
Le 15 novembre 2023, LDC a déposé sa candidature pour le plan France 2030. Elle a été examinée par Bpifrance, les services de l'État et des experts indépendants. Les échanges avec l'entreprise ont été nombreux.
Le critère essentiel était l'incitativité de l'aide, alors que le régime des aides d'État est strictement encadré au niveau européen. Dans ces conditions, il n'a pas été possible de soutenir le projet Niagara.
Lors de ma rencontre avec les dirigeants de LDC, ils ne m'en ont pas parlé. En avait-il fait le deuil ? Je creuserai la question avec eux.
Si d'aventure je reste ministre de l'agriculture, à l'heure où la France se poulétise, je serai très attentive à la souveraineté alimentaire de la France en matière de volaille.
M. Guillaume Chevrollier. - Nous comptons sur votre engagement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Faible DETR pour les Alpes-Maritimes
M. Philippe Tabarot . - Au regard de la répartition entre départements, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) allouée au département des Alpes-Maritimes est faible.
Les Alpes-Maritimes comptent 1 million d'habitants, pour une DETR de 3 millions d'euros, soit 3 euros par an et par habitant.
Or, au-delà de la carte postale de la Riviera azuréenne, ce département compte de très nombreuses communes rurales et souffre d'un manque de soutien de la part du Gouvernement.
Le département de l'Hérault a une DETR de 10 millions d'euros pour 1,1 million d'habitants, soit 9 euros par habitant.
J'ai bien conscience de la gravité de la situation budgétaire que traverse notre pays, mais le Gouvernement va-t-il revoir sa copie ?
Mme Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'économie du tourisme . - La DETR est un puissant levier d'investissement local. Un milliard d'euros lui sont consacrés dans le PLF pour 2025. Le montant pour les Alpes-Maritimes, de 3,01 millions d'euros, soit 2,75 euros par habitant, est à mettre en regard des 2,41 euros dans les Yvelines ou des 2,99 euros dans le Rhône.
Certes, ce montant est inférieur à la moyenne nationale, mais les critères sont définis dans le code des collectivités territoriales : population, densité et potentiel financier des communes. La DETR est donc orientée vers les territoires les plus ruraux, aux faibles revenus. Malgré les contrastes de votre territoire, les Alpes-Maritimes sont plus denses et ont un potentiel financier important. En 2023, 57 projets ont été soutenus, dont 52 dans de petites communes.
M. Philippe Tabarot. - Il faudra envisager une modification des critères pour les entités rurales et montagnardes.
Approvisionnement d'aliments pour bétail non-OGM en Martinique
M. Frédéric Buval . - Les filières locales en outre-mer rencontrent des difficultés en matière de diversification alimentaire.
Dans le cadre des modifications du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (Poséi), l'Association martiniquaise interprofessionnelle de la viande (AMIV) a sollicité la réorientation d'une petite partie des aides, à budget constant, pour importer des aliments pour bétail non-OGM (organisme génétiquement modifié).
Cette décision, issue d'une concertation locale, a été validée par le comité d'orientation stratégique et de développement agricole (Cosda), par la collectivité territoriale de Martinique, à l'unanimité, puis par le ministère de l'agriculture et celui des outre-mer.
Cependant, cette modification, visant à garantir une production de viande saine en outre-mer, n'a pas été transmise à la Commission européenne. Quand le sera-t-elle ? Une notification complémentaire à la Commission, confirmant cette volonté politique d'une production locale saine et vertueuse, sera-t-elle possible ? C'est un enjeu majeur de santé publique pour les Martiniquais.
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt . - La Martinique poursuit un objectif de souveraineté alimentaire.
Le régime spécifique d'approvisionnement (RSA) du programme Poséi subventionne une part significative des importations d'aliments finis pour les animaux. Nous avions cherché tout d'abord à ne pas déstabiliser l'industrie provendière locale. Cependant, le redéploiement de l'enveloppe du RSA a permis de répondre à de nouvelles demandes, à budget constant, montrant la souplesse du dispositif.
Mes services ont travaillé pour modifier la notification à l'Union européenne. Toutefois, la notification initiale ayant déjà été faite, la décision finale de validation de cette nouvelle modification revient à la Commission. Je m'engage à ce que le RSA de la Martinique soit revu en conséquence.
Validité du permis de conduire ukrainien
Mme Nadia Sollogoub . - En tant que présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, je suis sollicitée presque tous les jours sur la question de la reconnaissance du permis de conduire ukrainien en France.
Les Ukrainiens que nous accueillons sont très compétents. Mais pour rester et travailler en France, il leur faut très souvent le permis de conduire. Où en sont les négociations sur ce dossier, prioritaire ?
M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations . - En activant l'article 5 de la directive de juillet 2001, les autorités européennes ont accordé la protection temporaire aux 10 millions de déplacés ukrainiens. Ce cadre légal a été complété par un règlement de juillet 2022 sur le droit à conduire des personnes placées sous cette protection temporaire.
Ainsi, les permis de conduire ukrainiens des personnes sous protection sont parfaitement valables, jusqu'à un an après un éventuel changement de statut juridique relatif au droit au séjour. Il n'est donc pas nécessaire de changer de permis de conduire.
Dans ces conditions, il n'est pas prévu de négociations bilatérales, le contexte n'est pas opportun. Cependant, le Gouvernement partage vos préoccupations ; nous souhaitons le meilleur accueil possible pour les réfugiés.
Mme Nadia Sollogoub. - Le conflit dure, et certains Ukrainiens s'insèrent réellement. Il faut qu'ils repassent leur permis au bout d'un an ; or repasser le code est très difficile. Le permis russe, lui, est reconnu ! Les plus jeunes, arrivés avant leurs 18 ans, n'ayant pas officiellement de résidence en France, ne peuvent simplement pas passer leur permis. Or ils veulent travailler. Ce point de blocage est ridicule.
Évolution du statut des forestiers-sapeurs
Mme Dominique Estrosi Sassone . - Mobilisés à l'occasion des tempêtes Claran en 2023 ou Xynthia en 2010, sur le théâtre des graves intempéries maralpines de 2015 et 2019, ainsi que dans l'entretien des 1 690 km de pistes de défense des forêts contre l'incendie (DFCI), les forestiers-sapeurs, agents sédentaires de la fonction publique, demandent légitimement à être reconnus en catégorie active, à l'instar de leurs collègues sapeurs-pompiers professionnels.
Cette juste reconnaissance des risques et de la pénibilité de leur travail autoriserait le versement de primes au regard des risques encourus et de la récurrence de leur mobilisation face aux catastrophes naturelles et climatiques. Ces forestiers-sapeurs jouent un rôle déterminant dans la politique de prévention et de sauvegarde de la biodiversité et soutiennent l'action de nos Sdis.
Le Gouvernement va-t-il créer un corps spécifique opérationnel pour reconnaître leur travail ?
M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations . - Les forestiers-sapeurs jouent un rôle essentiel dans la protection des forêts et la prévention des incendies, même si les moyens lourds d'intervention relèvent des sapeurs-pompiers.
Les forestiers-sapeurs ne sont pas reconnus en catégorie active, alors que ce statut autorise un départ anticipé à la retraite. Les emplois de catégorie active sont définis par un arrêté interministériel du 12 novembre 1969. Or la dernière réforme des retraites n'a pas donné lieu à une révision de son périmètre.
Nous devons mener une réflexion globale sur la définition de la catégorie active et sur la pénibilité et la dangerosité de ces emplois. Cependant, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) s'est autosaisi, le 16 octobre dernier, pour lancer une mise à jour de cet arrêté de 1969, et donc du répertoire des métiers visés.
À cette occasion, le classement des forestiers-sapeurs dans la catégorie active pourra tout à fait se poser.
Révision des critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle
M. Serge Mérillou . - En 2024, deux arrêtés ministériels ont rejeté l'ensemble des demandes des 170 communes de Dordogne au titre des mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols pour l'année 2023.
Les critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, issus de données météorologiques provenant exclusivement de Météo France, sont déconnectés de la réalité du terrain. Les sinistrés vivent ces décisions comme une injustice. Il faudrait intégrer les données des chambres départementales d'agriculture, tirées d'informations hydrométéorologiques locales - pluviométrie, bilans hydriques - qui sont précises, collectées en temps réel et plus accessibles que les données de Météo France, car disponibles sur des plateformes partagées entre techniciens et agriculteurs. Le Gouvernement compte-t-il prendre en compte ces données locales ?
M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations . - Les critères ont été assouplis à la suite de l'ordonnance du 8 février 2023, complétée par une circulaire interministérielle du 29 avril 2024.
L'un des critères utilisés est l'indice d'humidité des sols superficiels, établi par Météo France à partir de données scientifiques précises - températures, précipitations - issues de plusieurs milliers de stations implantées sur le territoire national. Ce modèle s'appuie donc déjà sur des données issues d'observations locales.
Les données agrométéorologiques des chambres d'agriculture ne font pas partie de la méthode validée à l'échelle nationale. Utiliser des données relatives à l'état des sols agricoles pour évaluer l'intensité d'épisodes sur les sols urbanisés fait en outre débat. La prise en compte de ces informations pourrait néanmoins être envisagée.
Les ministres Retailleau et Vautrin sont pleinement engagés pour apporter une aide maximale aux communes affectées par des épisodes exceptionnels.
Relocalisation d'une antenne de l'inspection générale de la gendarmerie nationale à Cahors
M. Jean-Marc Vayssouze-Faure . - À la suite de l'annonce en 2021, par le ministre de l'intérieur Gérald Darmanin, du redéploiement d'agents d'administration centrale en poste en Île-de-France dans certaines villes, Cahors avait été désignée pour recevoir une antenne de l'inspection générale de la gendarmerie nationale. Alors maire, j'avais salué cette initiative. Cette relocalisation était prévue en 2025, pour 32 agents.
Or le directeur général de la gendarmerie nationale m'a dit le 13 novembre dernier que les plans de relocalisation étaient remis à l'étude en raison de leur coût. Un renoncement du Gouvernement serait inacceptable et décrédibiliserait en outre les élus impliqués dans ce projet. L'État honorera-t-il son engagement ?
M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations . - Des travaux d'aménagement sont nécessaires dans les locaux identifiés pour cette relocalisation, pour 1,2 million d'euros. Pour le logement des militaires, la gendarmerie envisage des prises à bail.
Le contexte budgétaire étant incertain, la programmation immobilière découlant du projet de loi de finances pour 2025 sera prioritairement consacrée aux bâtiments les plus vétustes. Cette relocalisation pourrait toutefois s'y inscrire, à condition que les crédits budgétaires alloués à la gendarmerie nationale et au ministère de l'intérieur soient sacralisés.
M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. - Je n'accepte pas l'argument budgétaire. Ces locaux appartiennent à l'État, et avaient été abandonnés à la suite de la recentralisation de services. C'est donc un juste retour des choses. Un État qui ne tient pas ses engagements porte atteinte à la confiance en laissant la colère ronger les territoires. Le respect de la parole de l'État est un principe de crédibilité et de continuité, qui vaut pour votre gouvernement, comme pour celui qui pourrait vous succéder.
Effectifs policiers dans le Rhône
M. Thomas Dossus . - Malgré ma question orale de décembre 2023, les demandes répétées du maire de Lyon et les engagements pris dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, l'opacité demeure sur le déploiement, annoncé par le ministère de l'intérieur, de renforts de policiers et gendarmes nationaux à Lyon et dans le département du Rhône. Il faut pourtant améliorer le continuum de sécurité.
Les effectifs de la direction interdépartementale de la police nationale (DIPN) du Rhône sont passés de 3 000 agents en 2017 à 2 600 en 2022. Les renforts annoncés ne suffiront même pas à remplacer les départs. La situation n'est pas tenable. Le Gouvernement envisage-t-il de communiquer le solde net des effectifs de police aux élus concernés, comme il s'y était engagé ?
M. Othman Nasrou, secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations . - Le ministre de l'intérieur l'a dit, sa priorité est de rétablir l'ordre. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit 750 millions d'euros supplémentaires pour le ministère de l'intérieur. Des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien sont suivis par le ministre délégué Nicolas Daragon. D'autres outils dépendent des collectivités locales, notamment la vidéoprotection, à laquelle votre famille politique est encore hostile, qui n'est pas suffisamment déployée à Lyon. (M. Thomas Dossus proteste.) Le continuum de sécurité est une coproduction avec les élus locaux.
Vos chiffres ne sont pas exacts : les équipages de police secours sont au nombre de six par jour, et non d'un seul. Les effectifs de la DIPN du Rhône ont certes été ajustés pour sécuriser le centre de rétention administrative, mais tous les services de police du département sont mobilisés sur le terrain : deux compagnies républicaines de sécurité sont ainsi en renfort permanent à Lyon, soit 120 policiers supplémentaires. Nous regarderons si des renforts sont nécessaires à certains endroits. L'État n'a rien à cacher : les chiffres sont à votre disposition auprès des préfets.
M. Thomas Dossus. - La police municipale de Lyon est armée, il y a des caméras de surveillance à Lyon. Nous n'avons pas de leçon à recevoir ! Mais la transparence n'est pas effective.
Retour à la baignade dans la Marne et dans la Seine
M. Laurent Lafon . - À l'occasion des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, la qualité de l'eau de la Seine et de la Marne a été améliorée, rendant possibles des épreuves en eau libre au coeur de Paris. Pas moins de 37 des 47 communes du Val-de-Marne sont traversées par un cours d'eau et près de 75 % des habitants vivent à moins de 2 kilomètres de l'eau : le lien avec celle-ci est donc fort.
Les collectivités locales et l'État ont investi 200 millions d'euros dans des infrastructures de dépollution et d'assainissement, efforts essentiels pour rendre la Marne et la Seine baignables, comme à Nogent-sur-Marne et à Choisy-le-Roi. Or cette ambition nécessite un soutien fort et durable de l'État. Quelles mesures le Gouvernement met-il en oeuvre pour accompagner les efforts d'assainissement des élus val-de-marnais ? Comment donner aux habitants un accès sécurisé à leurs rivières ?
M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative . - Le plan Baignade est une réussite collective, dont il faut se féliciter, et un défi que l'État, avec les opérateurs de l'assainissement et les collectivités locales, a réussi en un temps record. Nous visons donc l'ouverture de sites de baignade pérennes dès 2025 dans la Seine et la Marne.
Il faut d'abord clôturer le plan initial, en résorbant les mauvais branchements restants. Ensuite, il faut ouvrir d'autres sites : 26 communes sont intéressées. Les travaux d'assainissement doivent donc être poursuivis au-delà du programme actuel, à l'amont de Paris comme à l'aval. L'agence de l'eau Seine-Normandie subventionne les travaux. Les services de l'État accompagnent en outre chaque collectivité pour la mise en oeuvre des procédures réglementaires préalables à l'ouverture des sites. Nous sommes donc pleinement engagés aux côtés des acteurs concernés.
Renouveau du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais
Mme Cathy Apourceau-Poly . - Les arbitrages budgétaires liés à l'engagement de l'État pour le renouveau du bassin minier auraient dû être fixés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025. Mme la ministre Valérie Létard est sollicitée sur cette question de toutes parts. Des millions d'euros ont été investis par les collectivités locales. Or les élus s'inquiètent, notamment du devenir des engagements du président Macron pris à Liévin. Où en sont les 100 millions d'euros prévus pour la restructuration des espaces publics ?
Selon les services de la préfecture de région, la réhabilitation de 9 000 logements a déjà coûté 124 millions d'euros, bénéficiant à 12 400 foyers. Mais quid des 13 100 restants ? L'habitat minier, transformé en habitat social, concentre des populations précaires. Quelle réponse pouvez-vous nous fournir ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Nous connaissons votre engagement en tant que présidente de l'association Mission bassin minier. L'État s'est engagé à cofinancer jusqu'en 2027 un programme de rénovation des cités minières à hauteur de 100 millions d'euros pour la rénovation des logements et 100 millions d'euros pour l'aménagement des espaces publics.
Sur le premier volet, les financements atteignent 124 millions d'euros fin 2024. Comme Valérie Létard s'y est engagée, le Gouvernement ajoutera 8 millions d'euros supplémentaires au budget 2025.
Sur le second volet, l'État a déployé, entre 2022 et 2024, plus de 42 millions d'euros, soit près de la moitié de l'enveloppe prévue. Les subventions sont donc en ligne avec le calendrier des projets. L'engagement de l'État de 17,5 millions d'euros a été confirmé pour 2025, tous crédits confondus. Ces crédits seront complétés d'ici à 2027. Pas moins de 170 millions d'euros sont donc d'ores et déjà engagés.
Isolation phonique du CDG Express
M. Fabien Gay . - Je salue la présence en tribune de M. Rachid Maiza, adjoint au maire de La Courneuve, et de Mme Mylène Bonhomme, collaboratrice.
Pas moins de 120 trains du Charles de Gaulle Express (CDG Express) traverseront chaque jour La Courneuve, en Seine-Saint-Denis, à 120 km/h.
La municipalité ne dispose d'aucune information claire quant à l'isolation phonique envisagée. Une étude d'impact de 2004 établissait déjà que la pollution sonore serait élevée, or elle ne prenait pas en compte le développement du territoire, avec mille logements créés dans la nouvelle ZAC.
La ville a proposé à Plaine Commune de mener une étude acoustique, mais le projet a avorté. Seulement 15 millions d'euros sont prévus pour la protection acoustique, ce qui ne couvre que la moitié du tracé. Va-t-on choisir une ville sur deux à la loterie ? C'est contraire aux engagements régionaux du schéma directeur de la région Île-de-France (Sdrif) et du plan Antibruit.
Il y a là un enjeu de transparence, de cohérence et d'égalité républicaine.
Les habitants de La Courneuve ne tireront aucun avantage du CDG Express, mais en subiront toutes les nuisances.
Le Gouvernement doit prévoir l'isolation de tous les bâtiments, augmenter le budget dédié aux protections acoustiques et imposer une concertation renforcée entre la maîtrise d'ouvrage et la ville de La Courneuve.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Très bien !
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Le CDG Express a été déclaré d'utilité publique en 2008, après une enquête publique menée en 2007, avant la construction de la ZAC. Les études ne portaient pas sur l'atténuation du bruit subi par les riverains puisqu'il n'y avait pas de riverains !
Cette infrastructure a, en outre, un intérêt national - ce qui n'enlève rien à la légitimité de votre intervention.
L'État a été attentif à limiter les nuisances au maximum et a alloué 15 millions d'euros spécifiquement à la lutte contre le bruit ferroviaire. Des travaux seront réalisés pour réduire le bruit à la source et améliorer la performance acoustique des bâtiments. Les diagnostics sont en cours. Les travaux se concentreront en particulier sur La Courneuve. (M. Fabien Gay s'exclame.)
Création d'un statut de l'élu local
Mme Elsa Schalck . - Nos 560 000 élus locaux ne comptent pas leurs heures pour faire vivre nos villes et villages. Pourtant, ils ne disposent toujours pas d'un statut.
Nous assistons à un véritable blues des maires. Depuis 2020, 2 400 d'entre eux ont raccroché l'écharpe ; pas moins de 57 000 sièges de conseillers municipaux sont vacants. Face à toujours plus de normes et de contraintes, les élus locaux ressentent découragement et solitude. Les maires sont en première ligne, face aux sollicitations de nos concitoyens.
Le 7 mars dernier, le Sénat a adopté à l'unanimité la proposition de loi créant un statut de l'élu local, afin d'améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux.
Au sortir du Congrès des maires et à deux ans des prochaines élections municipales, il est urgent de répondre à la crise des vocations. À quand un véritable statut de l'élu local dans notre pays ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Le Gouvernement partage l'objectif d'améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux. Il soutient déjà l'ensemble des élus.
La loi du 27 décembre 2019 a introduit de nombreuses mesures d'accompagnement des élus locaux, dont la revalorisation des indemnités des élus ruraux.
Contre les violences commises à l'encontre d'élus, le Gouvernement a soutenu la loi du 21 mars 2024, qui alourdit les sanctions pénales encourues par les agresseurs et prévoit une protection fonctionnelle automatique.
De nombreuses réflexions ont trouvé une traduction dans la proposition de loi que vous évoquiez. Comme annoncé par le Premier ministre lors de la clôture du Congrès des maires, cette proposition de loi sera examinée en février prochain par l'Assemblée nationale, si le calendrier est respecté. À cette occasion, Catherine Vautrin proposera des dispositions complémentaires.
Situation financière catastrophique des départements
Mme Marie-Jeanne Bellamy . - J'ai assisté aux assises de Départements de France.
Nos départements sont en sursis. Conseillère de la Vienne, j'y constate un effet ciseau significatif. Avec la baisse des recettes des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 23 millions d'euros entre 2022 et 2024 et une hausse des dépenses imposées par l'État et non ou mal compensées pour le même montant, on atteint 46 millions d'euros de perte en trois ans.
Pourtant, le projet de loi de finances exige un nouvel effort qui placera 85 % des départements dans une impasse budgétaire d'ici fin 2025. La Vienne doit économiser 16 millions d'euros. Or les dépenses des départements ne sont pas pilotables.
Je partage le constat du Premier ministre d'un modèle départemental qui a atteint ses limites et son souhait d'en inventer un autre. Que ferez-vous ?
Nos départements sont en première ligne. Quelle commune, quelle population devrons-nous abandonner ? Si rien n'est fait, au printemps prochain, trente départements, dont la Vienne, seront contraints de vous remettre leurs clés.
Le 49.3 et les motions de censure compliquent la donne. Je souhaite que le Gouvernement soit confirmé. Si tel est le cas, donnerez-vous suite aux propositions de Départements de France ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Je suis moi-même président d'un département. Aux assises, le Premier ministre a rappelé son soutien aux départements, sa connaissance de leurs difficultés et sa volonté de réduire significativement les efforts qui leur sont demandés.
Je salue l'esprit de responsabilité des élus départementaux dans cette situation.
Le Premier ministre s'est engagé à ce que les départements puissent relever de 0,5 point supplémentaire le taux des DMTO pendant trois ans, ce qui pourrait générer 1 milliard d'euros de recettes supplémentaires.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale acte la fusion des sections soins et dépendances au 1er janvier prochain pour 23 départements, qui devraient ainsi économiser 100 millions d'euros.
Par ailleurs, le Gouvernement enclenchera en 2025 la première étape de la réforme des concours de la CNSA. L'objectif est clair : qu'aucun département n'ait, en 2025, un taux de couverture de dépenses d'APA et de prestation de compensation du handicap (PCH) inférieur à celui de 2024. Pas moins de 150 millions y sont consacrés.
Je souhaite, comme vous, que le projet de loi de finances soit adopté pour que ces mesures soient mises en oeuvre.
Offre de trains Intercités sur Nantes-Lyon, Nantes-Bordeaux, Nantes-Lille
M. Maurice Perrion . - La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut) s'inquiète de la qualité de l'offre et du manque de fiabilité des liaisons Intercités.
Le nombre de voyages sur Nantes-Bordeaux a crû de 90 % entre 2019 et 2022, avec le passage de trois à quatre allers-retours par jour fin 2021. La liaison Nantes-Lyon est également passée de deux à trois allers-retours par jour. Or le nombre de rames disponibles est insuffisant, ce qui, par exemple, limite l'emport des vélos.
Le service est dégradé sur Nantes-Bordeaux à cause d'un tronçon en voie unique, d'une signalisation obsolète et de limitations de vitesse dues à la vétusté des voies.
Le parc roulant doit se développer pour répondre à la demande.
Un quatrième aller-retour Nantes-Lyon est-il envisagé ? Quid d'une liaison Nantes-Lille par Angers-Le Mans-Rouen ?
Le futur centre de maintenance des Intercités doit correspondre aux besoins actuels et futurs.
Le dynamisme démographique des Pays de la Loire plaide sérieusement pour un renforcement de l'offre ferroviaire sur l'arc Atlantique.
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Je suis particulièrement attaché aux trains d'équilibre du territoire.
Les lignes auxquelles vous faites référence ont bénéficié d'un renouvellement complet du matériel roulant en 2017 et d'une rénovation des infrastructures entre La Rochelle et La Roche-sur-Yon. On peut se réjouir de la hausse de fréquentation depuis la covid.
J'ai sollicité des études auprès de la SNCF et de la DGITM sur l'amélioration de la qualité de l'offre.
Sans attendre, les infrastructures seront rénovées à horizon 2027-2030.
Le réseau Nantes-Bordeaux fera l'objet de travaux de signalisation pour restaurer la vitesse et augmenter les capacités entre La Rochelle, Saintes et Bordeaux.
Le réseau Nantes-Lyon sera également rénové en 2027 pour supprimer la limitation de vitesse sur la section Bourges-Saincaize.
La limitation de l'emport de vélos est due à la conception même des trains. Plus il y a de vélos, moins il est possible d'accueillir de voyageurs, ce qui n'est pas souhaitable.
La mise en concurrence de ces lignes s'achèvera début 2025, pour les confier à un opérateur qui, on l'espère, accroîtra l'offre tout en proposant un coût maîtrisé pour les voyageurs et l'État.
M. Maurice Perrion. - Si l'on est dans les temps, ce sera convenable ; mais il ne faudra pas trop dépasser.
Vulnérabilité au risque inondation de la Camargue gardoise
M. Laurent Burgoa . - En Camargue, l'exposition au risque d'inondation menace gravement 30 000 habitants et 200 000 personnes supplémentaires en période touristique. Après les crues désastreuses de 1993, 1994 et 2003, le plan Rhône a été mis en place, sous l'égide de l'État, pour protéger les populations riveraines en améliorant les digues. Depuis lors, 220 millions d'euros ont été investis et 73 kilomètres de digues renforcés.
Toutefois, la Camargue gardoise, la Camargue insulaire et la plaine de Beaucaire restent aussi vulnérables qu'il y a vingt ans. Le Syndicat mixte interrégional d'aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer (Symadrem) a déposé, en avril 2022, une demande d'autorisation environnementale pour des travaux essentiels sur les digues du Petit Rhône. Ce projet, en parfaite conformité avec le plan Rhône et le plan de gestion des risques d'inondation 2022-2027, protégerait efficacement ces zones sensibles, tout en préservant l'équilibre environnemental et agricole du territoire.
Malgré les engagements pris dans le contrat de plan interrégional État-Région Rhône 2021-2027, cette demande d'autorisation est actuellement suspendue. Le temps presse. Nous devons éviter de nouvelles tragédies comme celles de 2003, d'autant que les élus de la Camargue ont soutenu les travaux en amont, sans bénéficier des protections qu'ils ont contribué à financer. Levez cette suspension pour autoriser la mise en enquête publique, afin que les travaux démarrent dès l'année prochaine. L'État ne doit pas tourner le dos à ses engagements.
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Depuis plus de vingt ans, l'État soutient les collectivités pour protéger les populations et la biodiversité contre les inondations du Rhône. Il a cofinancé les travaux à hauteur de 218 millions d'euros.
Le plan Rhône-Saône 2021-2027 prévoit 75 millions d'euros supplémentaires pour la protection, dont le renforcement des digues du Grand et du Petit Rhône. Le projet de sécurisation du Petit Rhône par le Symadrem s'élève à 127 millions d'euros, mais aucune demande de financement n'a été déposée auprès de services de l'État. Je leur demanderai de prendre contact avec le Symadrem. L'État reste engagé, sous réserve que ce projet prenne en compte différents enjeux : sécurité des habitants lors des crues, réduction des potentiels dommages, préservation de la biodiversité, maintien de l'agriculture en limitant la salinisation des sols.
Une étude de l'État a confirmé la nécessité, pour le secteur amont du Petit Rhône, de sécuriser en priorité les huit premiers kilomètres de la digue, tant en rive gauche qu'en rive droite, pour protéger le secteur très urbanisé de Trinquetaille à Arles, ainsi que la plaine de Fourques. Il a mis en avant des solutions alternatives aux digues pour le secteur aval. Ces orientations ont été transmises au Symadrem. Les services de l'État sont à votre disposition.
M. le président. - Monsieur Burgoa, pour défendre la merveilleuse Camargue...
M. Laurent Burgoa. - Je solliciterai les élus et la demande de financement vous parviendra dès cet après-midi : les élus de proximité sont toujours les premiers à répondre rapidement !
Stockage de déchets dangereux à Hersin-Coupigny
M. Jérôme Darras . - Depuis son annonce en 2022, le projet d'installation de stockage de déchets dangereux (ISDD) à Hersin-Coupigny, dans le Pas-de-Calais, suscite l'inquiétude générale. Le 18 octobre 2024, Veolia, qui pilote le projet via sa filiale Sarpi Mineral France, a déposé une demande d'autorisation environnementale auprès de la préfecture du Pas-de-Calais. Cette nouvelle a relancé les vives et légitimes craintes de la population et des élus.
Lors de la concertation publique, les élus d'Hersin-Coupigny, Barlin, Fresnicourt-le-Dolmen et Servins, unanimes, se sont opposés à ce projet, tout comme le conseil départemental, le conseil régional et plusieurs parlementaires.
L'inquiétude est d'autant plus forte que l'actuelle installation de déchets non-dangereux (ISDND) fait l'objet de dérogations du ministère de l'agriculture autorisant la livraison de déchets dangereux, comme récemment 150 tonnes de cadavres d'animaux fortement dégradés, soulevant des craintes sur le type de déchets stockés dans la future ISDD. Y seraient stockés également des déchets dangereux issus de près d'un quart de la France métropolitaine. Enfin, ce projet cumule des effets délétères pour la santé et pour la nature, en particulier pour le parc départemental d'Olhain.
Vous engagez-vous à ne plus accorder aucune nouvelle dérogation permettant le stockage de déchets dangereux dans l'actuelle ISDND ? Mettez un terme à ce projet d'ISDD à Hersin-Coupigny et recherchez un autre lieu pour accueillir le projet, de manière concertée avec l'ensemble des acteurs du territoire.
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Les ISDD sont des équipements importants pour la protection de l'environnement, afin de ne pas disperser les polluants dans le milieu naturel. Souvent, ils sont la seule solution de traitement adaptée pour les éliminer en toute sécurité. Selon les législations européenne et française, les installations respectent le principe de proximité : chaque région doit être la plus autonome possible pour gérer ses déchets sur son territoire. Les Hauts-de-France n'ont plus d'ISDD depuis la fermeture du site de Menneville en 1974. Les déchets dangereux de la région sont actuellement transférés vers des régions voisines, en contradiction avec ce principe.
Une concertation avec les acteurs locaux et les habitants a débuté il y a deux ans. La concertation préalable à l'automne 2022 sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP) a permis à l'exploitant d'améliorer son projet. Les services de l'État seront vigilants pour protéger au maximum l'environnement.
M. Jérôme Darras. - Les craintes sont vives : prenez en la mesure !
Subventions des agences de l'eau
M. Cédric Chevalier . - Dans le bassin Seine-Normandie, notamment dans le département de la Marne, les conditions d'éligibilité aux subventions de l'agence de l'eau limitent l'aide financière à la mise aux normes des systèmes d'assainissement non collectif (ANC) aux communes de moins de 200 habitants. Cela exclut de nombreux petits villages, comme Champguyon, 290 habitants.
Ce seuil prive les habitants de communes légèrement plus grandes mais tout aussi rurales et aux ressources limitées du soutien nécessaire pour se conformer aux normes environnementales. L'assainissement individuel représente un investissement important : nombre d'habitants de petites communes peinent à financer ces mises aux normes.
L'agence de l'eau étant un établissement public, réviserez-vous les critères d'éligibilité afin que cette subvention soit élargie à toutes les petites communes pour améliorer ces installations et préserver la qualité de l'eau et de l'environnement ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Le douzième programme de l'agence de l'eau Seine-Normandie élargit les aides à l'assainissement aux communes de plus de 200 habitants sous certaines conditions : présence en tête de bassin-versant sensible ou inclusion dans la zone d'influence microbiologique ; nécessité d'opérations de mise en conformité d'ANC ; en cas de pollution directe du milieu naturel par l'ANC ; absence d'aide à la création d'un système d'ANC.
Ces opérations devront être groupées et avoir un impact positif sur le milieu récepteur. Les collectivités devront aussi avoir un zonage d'assainissement cohérent approuvé après enquête publique. Les services du ministère sont à votre disposition.
M. Cédric Chevalier. - Cela a l'air bien complexe... Nous solliciterons vos services, car les élus risquent de se perdre dans les méandres administratifs.
Projet d'arrêté ministériel sur les grands cormorans
M. Patrick Chaize . - Dans l'Ain, les étangs de la Dombes forment un ensemble unique associant production piscicole et biodiversité singulière. Les pisciculteurs constatent avec amertume que le projet d'arrêté ministériel relatif à la gestion des populations de cormorans ne tient pas compte des discussions. Les modifications envisagées marqueraient un retour en arrière important, annihileraient le travail fructueux engagé et menaceraient l'équilibre de l'écosystème.
Une adoption en l'état de l'arrêté contredirait la note stratégique de fin 2023 du Haut-commissariat au plan, qui présente le développement de l'aquaculture comme un enjeu de souveraineté alimentaire. Allez-vous reconsidérer ce projet d'arrêté et reprendre les discussions avec les acteurs de la pisciculture extensive en étang continental, qui ont à coeur d'assurer une production de qualité tout en préservant la biodiversité ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Plusieurs partenaires ont fait parvenir leurs remarques et propositions d'évolution de l'arrêté. Celui-ci a fait l'objet d'une consultation du Conseil national de la protection de la nature (CNPN) le 16 octobre, puis d'une consultation publique du 18 octobre au 8 novembre, favorable au projet.
Les échanges se sont poursuivis par une réunion bipartite avec les représentants des pisciculteurs le 14 novembre et de nouvelles contributions reçues le 19 novembre. Le projet d'arrêté est en phase finale afin d'aboutir à un texte équilibré et sécurisé juridiquement, qui concilie, dans le respect de nos engagements internationaux, le maintien du bon état de conservation de l'espèce et la limitation de ses impacts sur notre pisciculture et sur les espèces protégées de nos rivières.
Les évolutions envisagées portent sur un meilleur suivi des destructions, un encadrement des dérogations sur les eaux libres, un aménagement de la période de destruction pour les piscicultures et des simplifications administratives.
M. Patrick Chaize. - La situation actuelle était équilibrée et répondait aux contraintes des uns et des autres. Pourquoi changer ce qui marche ? J'espère que la prise en compte de ces éléments ira dans le même sens.
M. le président. - Très bonne remarque !
Mesure de l'impact acoustique des éoliennes terrestres
Mme Kristina Pluchet . - Des porteurs de projets éoliens terrestres, qui respectaient pourtant les normes acoustiques définies par l'arrêté du 26 août 2011, ont été condamnés au motif que ces normes ne garantissaient pas efficacement la santé et la sécurité du voisinage. En effet, les basses et très basses fréquences et les modulations d'amplitude à la source des troubles ayant conduit à ces condamnations sont toujours ignorées, en dérogation à l'encadrement des nuisances sonores prévu par le code de la santé publique.
C'est pourquoi l'article 68 de la loi Aper du 10 mars 2023 a demandé un rapport d'évaluation des nuisances sonores occasionnées par les projets éoliens terrestres, notamment au regard de leur intensité et de leur répétition. Le dernier protocole de mesure du bruit, entré en vigueur en 2021 mais annulé par le Conseil d'État pour défaut d'évaluation environnementale en mars dernier, n'intégrait toujours pas ces critères.
Quand et comment comptez-vous garantir la prise en compte des impératifs de santé des riverains dans les instruments de mesure des nuisances sonores ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Oui, les nuisances sonores sont un fléau et peuvent avoir un impact majeur sur la santé publique. Le Gouvernement a lancé de nombreuses actions ces dernières années pour réduire le bruit, notamment des éoliennes. Avant toute autorisation d'un parc éolien, une étude d'impact est déposée, dont une étude acoustique. Depuis 2021, un contrôle acoustique systématique a lieu dans les douze mois suivant la mise en service.
La décision du Conseil d'État annulant plusieurs dispositions sur le bruit des parcs éoliens était fondée sur des motifs de procédure : elle ne remet en cause ni les seuils ni les méthodes.
Le rapport que vous mentionnez a constaté que les mises à jour des protocoles acoustiques, en 2022, ont amélioré les études d'impact acoustique et permis d'encadrer encore plus précisément le bruit des éoliennes.
Agnès Pannier-Runacher est attentive à ce que le déploiement d'éoliennes se fasse en bonne intelligence avec les riverains. Je relaierai votre question auprès d'elle.
Mme Kristina Pluchet. - L'instrument de mesure acoustique est inapproprié à l'éolien. Il est temps de prendre en compte les problèmes de santé publique et de mettre en place un outil homologué !
Chèque-énergie pour les résidents des communes accueillant des éoliennes
M. Olivier Paccaud . - Pour compenser l'impact des éoliennes sur nos paysages historiques, qui font la renommée de nos campagnes, certains producteurs et exploitants d'énergie éolienne proposent des « chèques-énergie » aux résidents des communes qui accueillent ces installations. Si l'intention paraît louable - redistribuer une partie des bénéfices et favoriser l'acceptation locale -, ces initiatives sont-elles conformes au droit français ? Peuvent-elles être interprétées comme des contreparties directes, voire des mécanismes visant à compenser l'impact de ces projets sur les paysages ?
Indissociables de notre patrimoine national, ces paysages, façonnés par des siècles d'histoire, sont le reflet de nos racines, de notre culture, et un atout majeur pour le tourisme et la vie locale. Face à leur transformation par les éoliennes, parfois imposées sans concertation, nos concitoyens se sentent impuissants.
Ces chèques ne risquent-ils pas de masquer le problème plus profond de la destruction progressive de nos horizons ? Peut-on laisser la réponse à des initiatives privées, sans un cadre national qui garantirait une gestion équilibrée et respectueuse de nos territoires ? Quid de l'équité entre communes ? La compensation ne devrait-elle pas relever d'un mécanisme institutionnel, qui prendrait en compte l'intérêt général, la protection du patrimoine et la transition énergétique ?
Quelles mesures le gouvernement entend-il prendre pour assurer que l'indispensable transition énergétique ne se fasse pas au détriment de nos paysages et de l'identité de nos territoires ?
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Je connais votre sensibilité sur ce sujet.
Il existe aujourd'hui un chèque-énergie qui est une aide de l'État à destination des ménages les plus modestes : il n'y a donc aucun lien géographique. Vous évoquez un autre outil, qui aurait pour objectif d'améliorer l'acceptabilité des éoliennes sur les territoires, en vous interrogeant sur sa légalité. En effet, selon le principe de péréquation tarifaire, deux consommateurs ayant le même profil de consommation, le même fournisseur et la même offre se verront facturer le même tarif, quelle que soit leur localisation géographique.
Peut-on prendre en compte des critères géographiques pour faire bénéficier certains de nos concitoyens de dispositifs plus généreux ? Agnès Pannier-Runacher avait proposé, dans le projet de loi Aper, un dispositif semblable visant à renforcer l'acceptabilité du déploiement des énergies renouvelables via un gain financier pour les territoires d'accueil - ce qui n'exclut évidemment pas d'autres considérations environnementales. Elle est tout à fait disposée à travailler avec vous sur la reprise de ce dispositif.
Décret sur le mécanisme de garantie rurale
M. Christian Bilhac . - L'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) a été instauré par la loi Climat et résilience du 22 août 2021, entraînant sur le terrain de nombreuses difficultés juridiques et pratiques. La loi dite ZAN 2 du 20 juillet 2023 a permis des ajustements pour faciliter la mise en oeuvre des objectifs et renforcer l'accompagnement des élus locaux.
Dix-sept mois après, allez-vous publier rapidement le décret relatif au mécanisme de la garantie rurale, qui assure à toute commune, d'ici 2031, une consommation d'espace naturel agricole et forestier d'un hectare minimum, dès lors qu'elle est couverte par un document d'urbanisme ou l'a prescrit avant le 1er août 2026 ?
Les territoires ruraux subissent une double peine. Je pense à une commune de l'Hérault qui n'a pas délivré de permis de construire depuis 2013 - n'ayant rien consommé, la maire a droit à zéro. La moitié de zéro, ça fait zéro !
Je vous demande donc, comme je l'ai fait dans une proposition de loi, s'il ne faudrait pas dispenser ces petites communes rurales vertueuses des obligations du ZAN.
M. le président. - Question pleine de bon sens...
M. François Durovray, ministre délégué chargé des transports . - Au cours des années passées, notre pays a urbanisé en moyenne 24 000 hectares par an, l'équivalent d'un département. Cela dit, l'impératif de sobriété foncière doit être différencié. La loi prévoit une trajectoire progressive. La construction dans les communes n'est pas bloquée. Les schémas régionaux, les documents de planification et d'urbanisme permettent aux collectivités de moduler l'objectif selon leurs besoins et leurs spécificités.
Par ailleurs, la loi dispose que toute commune couverte par un document d'urbanisme antérieur à août 2026 ne peut être privée d'un potentiel minimum d'un hectare de consommation d'espace sur la période 2021-2031. Cette garantie communale, fruit des retours de terrain, est d'application immédiate et ne nécessite donc pas de décret d'application. Elle permettra à une commune n'ayant pas du tout artificialisé ces dernières années de se développer en extension urbaine si nécessaire.
Michel Barnier a indiqué vouloir revoir les conditions du ZAN. J'espère que la période actuelle permettra d'atteindre l'objectif bien compris que vous évoquiez.
Agressions envers les élus
M. Stéphane Sautarel . - Séance pour le moins surréaliste, au regard du trou noir dans lequel notre pays risque d'être plongé demain...
S'en prendre aux élus, c'est s'en prendre à la République. La proposition de loi sénatoriale adoptée le 21 mars 2024 renforce les sanctions contre les auteurs de violence et d'injures envers les élus et facilite l'accès à la protection fonctionnelle et à l'assurance pour les élus et les candidats. Dans le Cantal, plusieurs élus ont été agressés ou menacés - je pense aux maires de Cayrols et Saint-Etienne-de-Maurs.
Face à des agressions de plus en plus fréquentes et violentes, il faut une prise en compte systématique des dépôts de plaintes afin que la justice s'en saisisse rapidement. Dans la pratique, les élus n'ont pas ou peu de contact, ni de réponse, des forces de l'ordre et des procureurs, et restent dans le flou quant aux suites données à leur plainte. Qu'envisagez-vous pour protéger les élus victimes d'agressions, en particulier quant à la diligence avec laquelle les procureurs engagent les poursuites ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Les agressions contre les élus portent atteinte au pacte républicain. Le Gouvernement est mobilisé à leurs côtés. Un plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus a ainsi été présenté le 7 juillet dernier, précédé d'une instruction interministérielle diffusée le 3 juillet 2023. L'action du ministère de la justice s'inscrit depuis plusieurs années déjà en cohérence avec les objectifs et actions de ce plan. Plusieurs circulaires ont intimé aux parquets de répondre de manière ferme et cohérente aux atteintes aux élus et à mieux accompagner ces derniers.
Cette action doit être poursuivie et renforcée. La loi du 21 mars dernier a élargi le spectre en incluant les candidats, en aggravant certains niveaux de peine ou en parachevant les mécanismes d'information des élus.
La réponse pénale est ferme et doit le rester. La Chancellerie a rappelé les outils à la disposition des juridictions et mobilisé l'ensemble de la chaîne pénale. Elle a adressé au procureur général un modèle de protocole relatif au renforcement des relations entre les parquets et les maires. Le garde des sceaux réunira à intervalles réguliers les référents dédiés aux atteintes aux élus, pour que les remontées de terrain nourrissent notre réflexion collective et, au besoin, de nouvelles mesures. Il rendra compte de ses travaux au Parlement.
M. Stéphane Sautarel. - L'arsenal juridique est en place, mais il est essentiel que les dépôts de plainte soient pris en compte et que des suites leur soient systématiquement données, afin que nos élus locaux, premières sentinelles d'une République bien fragilisée, soient assurés du soutien de la nation.
Brouilleurs au centre pénitentiaire de Bordeaux Gradignan
Mme Laurence Harribey . - Le nombre de détenus a battu un nouveau record en septembre, à 78 900. Il augmente de 450 tous les trois mois. En matière de surpopulation carcérale, la France est en troisième position en Europe, derrière Chypre et la Roumanie.
À la prison de Gradignan, en Gironde, le taux d'occupation du nouveau bâtiment livré en mai dernier est déjà de 140 %, avec 140 matelas au sol. J'ai été alertée par les surveillants : ni brouilleur ni dispositif anti-drones, des fenêtres en PVC trop fragiles.
Le garde des sceaux a annoncé un plan anti-drones : qu'en est-il ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Nos prisons sont dans une situation complexe. Le Gouvernement met en oeuvre un plan de lutte contre la surpopulation carcérale.
Les travaux de reconstruction du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan ont démarré en 2021, pour un coût prévisionnel de 183 millions d'euros. Il s'agit d'améliorer les conditions de travail du personnel, la prise en charge des détenus et de mieux intégrer l'établissement dans la cité.
La première phase des travaux est achevée. La seconde permettra l'installation de nouveaux équipements de sécurité : un dispositif anti-drone sera prochainement mis en service ; l'établissement est prioritaire pour l'installation d'un brouilleur ; l'amélioration des fenêtres est à l'étude.
Mme Laurence Harribey. - Merci beaucoup pour ces éléments de réponse concrets. La semaine dernière, j'ai accueilli au Sénat une délégation de l'administration pénitentiaire de Gironde : les personnels sont inquiets. Je suivrai avec attention l'avancée de ce dossier et en ferai un retour au garde des sceaux.
Reconnaissance du tilde
M. Michel Canévet . - Je pense à Amélie, qui vient de mettre au monde un petit Fañch, à qui je souhaite de connaître une longue et belle vie dans le Finistère. En Bretagne, Fañch s'écrit avec un tilde. Mais les procureurs de la République s'y opposent. Pourtant, on trouve de nombreux tildes dans l'ordonnance royale de 1539 de Villers-Cotterêts, qui a imposé le français comme langue de l'administration ! C'est donc bien que les tildes appartiennent à la langue française. Pourquoi cela est-il remis en cause, en Bretagne notamment ? En 2020, le garde des Sceaux avait promis de modifier la circulaire en date du 23 juillet 2014 qui régit l'usage des signes diacritiques. Qu'en est-il ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Aux termes de la circulaire de juillet 2014 relative à l'état civil, les seuls signes diacritiques autorisés sont les « points, tréma, accents et cédille ». L'Académie française l'a confirmé. Le tilde n'en fait donc pas partie.
En février 2019, le Premier ministre s'est engagé à ouvrir une réflexion sur les conditions d'intégration à l'état civil des signes diacritiques régionaux. Leur autorisation dans les actes de l'état civil a été envisagée à l'article 9 de la loi du 21 mai 2021, relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion.
Mais, dans sa décision du 21 mai 2021, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition au regard de l'article 2 de la Constitution qui dispose que « la langue de la République est le français. ». La modification de la circulaire du 23 juillet 2014 sur ce point n'est donc pas juridiquement possible.
M. Michel Canévet. - Je ne partage pas du tout vos arguments et je déplore votre réponse. On doit pouvoir utiliser le tilde : voyez l'ordonnance de Villers-Cotterêts ! Le nom du préfet de police de Paris comporte un tilde, alors pourquoi nos concitoyens ne pourraient-ils pas l'utiliser ?
Tableau des maladies professionnelles et sapeurs-pompiers
Mme Alexandra Borchio Fontimp . - Parlons de la santé de ceux qui, chaque jour, risquent leur vie pour protéger la nôtre : nos forces de sécurité, en particulier nos sapeurs-pompiers.
Depuis près de dix ans, je suis administratrice du Sdis des Alpes-Maritimes, qui a fait face à plus de 3 200 incendies en 2023. Découvrez les parcours de Thomas, Sylvain, Damien, Frédéric et Thierry, dans un documentaire diffusé le 13 décembre sur Public Sénat.
Dès 2022, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a reconnu que l'exposition à des fumées toxiques était cancérogène, confirmant les travaux de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). Le récent rapport d'Anne-Marie Nédélec et Émilienne Poumirol a remis le sujet sur la table.
À ce jour, seules deux maladies sont reconnues imputables à la profession de pompier. Il est grand temps de faire évoluer la reconnaissance des maladies professionnelles de nos soldats du feu - Bruno Retailleau, comme son prédécesseur, y est favorable. Cet empoisonnement se produit par inhalation, mais aussi par voie cutanée, voire par ingestion. Il est urgent de modifier les tableaux de maladies professionnelles. C'est notre devoir !
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Le ministère du travail est attentif aux risques professionnels auxquels sont exposés les sapeurs-pompiers. Du fait de son exposition aux fumées de combustion, la profession bénéficie des mesures de prévention prévues par le code du travail sur les expositions aux agents chimiques - minimisation des expositions et surveillance médicale renforcée.
En vertu des tableaux de maladies professionnelles nos 43 bis et 45, les pompiers bénéficient donc déjà d'une reconnaissance automatique en maladie professionnelle pour deux carcinomes.
Un rapport de l'Anses d'octobre 2024 fait état d'un lien avéré entre les cancers de la vessie, de la plèvre ou du péritoine et la profession de pompier. Le ministère du travail a entamé les démarches nécessaires à la révision des tableaux en ce sens.
Français en Israël
Mme Sophie Briante Guillemont . - Dès le 8 octobre 2023, les habitants du nord d'Israël ont été évacués. Ils ne sont toujours pas rentrés chez eux - un cessez-le-feu a été conclu, mais la situation reste fragile. Parmi eux, des centaines de familles françaises. Nos autorités consulaires ont recensé et soutenu ces familles, qui n'étaient pas toujours inscrites au registre des Français établis hors de France. Combien de personnes ont-elles été recensées et aidées ? Combien sont encore suivies ? Quel message adressez-vous aux Français d'Israël, binationaux à 98 % ? Car ils se sentent incompris, voire rejetés par la France, au gré de nos changements de ligne diplomatique.
Mme Sophie Primas, ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger . - Le Gouvernement suit très attentivement la situation de ces centaines de familles françaises résidant en Israël. Nous espérons que le cessez-le-feu du 26 novembre permettra le retour des déplacés. Nos services consulaires ont réalisé un important travail de recensement et d'aide à 5 000 personnes dans le nord d'Israël et 6 000 à la frontière de la bande de Gaza. L'enveloppe de secours occasionnel du consulat général à Tel-Aviv a été abondée de 50 000 euros, pour aider 500 familles en octobre et novembre 2023. Nous avons également accordé 20 000 euros à deux associations qui ont aidé des centaines de familles. Dès octobre 2023, une cellule d'écoute psychologique a été mise en place et quinze vols spéciaux vers la France ont été affrétés au profit de 3 000 personnes.
Le consulat général est là pour les Français d'Israël et nous continuons à être extrêmement attentifs à leurs besoins en cette période très troublée.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Merci beaucoup pour cette réponse précise. Nous devons montrer ce que la France fait pour ses ressortissants en Israël. Le malaise qui s'installe entre les Français d'Israël et la France ne doit pas se transformer en rupture.
Pharmacies à usage intérieur en milieu rural
M. Daniel Gueret . - Les pharmacies à usage intérieur (PUI) répondent aux besoins pharmaceutiques des personnes prises en charge au sein des établissements de santé, de certains établissements médicaux sociaux, ou encore par les services d'incendie et de secours. Elles jouent un rôle essentiel dans la qualité et la sécurité du circuit du médicament et des dispositifs médicaux stériles au sein de ces structures.
Cependant, en milieu rural, certains établissements, à l'instar des Ehpad, ont du mal à recruter des pharmaciens. Ceux-ci doivent en effet être titulaires du diplôme d'études spécialisées (DES) de pharmacie hospitalière. Une dérogation de 2017 autorise le recrutement de pharmaciens ayant exercé dans une PUI pendant deux ans au cours des dix dernières années ; mais cela n'a pas facilité les recrutements.
Sans une évolution rapide, nombre d'établissements installés en milieu rural seront hélas contraints de cesser leur activité.
Comptez-vous assouplir les conditions de recrutement ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Le problème de la démographie pharmaceutique nous a conduits à prendre des mesures fortes. Depuis 2022, le nombre de postes ouverts pour le DES a augmenté : 338 pour l'année 2022-2023, 401 pour 2023-2024, 441 pour 2024-2025. Des efforts restent à fournir, afin que les PUI continuent de fonctionner. Nous ne remettrons pas en cause l'exigence du diplôme universitaire de pharmacien hospitalier. Nous réfléchissons à renforcer les coopérations et les mutualisations entre les établissements de santé, pour répondre à l'enjeu démographique et pour lutter contre un exercice isolé dans certains territoires ruraux.
M. Daniel Gueret. - La mutualisation va dans le bon sens. Il faut une approche territoriale, car les établissements rencontrent des difficultés différentes. Souplesse et discernement sont nécessaires.
Sclérose latérale amyotrophique (SLA)
M. Jean-Claude Tissot . - Terribles nouvelles : le 10 octobre dernier, la HAS a refusé l'autorisation d'accès précoce au traitement Qalsody qui ralentit la sclérose latérale amyotrophique (SLA) SOD1 ; jeudi dernier, elle a émis un avis défavorable au remboursement du traitement.
Ces décisions sont incompréhensibles pour les patients. Dans la Loire, une patiente qui a suivi ce traitement, sur les conseils avisés d'une équipe médicale, a constaté une stabilisation de son état - des résultats scientifiques l'attestent. De plus, l'Agence européenne des médicaments (EMA) a approuvé ce traitement le 22 février 2024. Nous avons adopté une proposition de loi améliorant la prise en charge de la SLA, grâce au courage de notre collègue Gilbert Boucher.
Ces deux avis ne vont pas dans le bon sens : les patients doivent trouver par eux-mêmes des solutions pour payer un traitement à 30 000 euros. J'ai écrit au Premier ministre le 30 octobre dernier. Il n'est plus possible d'attendre. Que compte faire le Gouvernement ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Le médicament Qalsody, autorisé en accès compassionnel depuis décembre 2022, a permis de traiter cinquante-cinq patients. L'autorisation de l'EMA a été obtenue sous circonstances exceptionnelles : le laboratoire a pour obligation, post-AMM, de fournir des données d'efficacité et de sécurité d'ici le 30 septembre 2025.
La commission de la transparence de la HAS a considéré que les résultats de l'étude comparative n'ont pas démontré des résultats significatifs, d'où l'avis défavorable. Après échange avec la HAS et l'ANSM, le ministère de la santé maintiendra cette autorisation en accès compassionnel. Les autorités sanitaires garantiront la poursuite des traitements.
Médecine du sport
M. Jean-Raymond Hugonet . - La France compte 44 spécialités médicales, mais une discipline demeure absente : la médecine du sport. Or, avec les jeux Olympiques de Paris 2024, l'activité physique et sportive a été érigée au rang de grande cause nationale. Au grand dam de nombre de spécialistes, pratiquants et passionnés, le sport reste un angle mort de nos politiques publiques.
La transformation de cette compétence en spécialité médicale serait le vecteur d'une rationalisation de la profession. Il s'agirait de la première étape vers la mise en place d'un diplôme d'études spécialisées (DES) de quatre ans, commun à toutes les spécialités. Une telle reconnaissance enverrait un signal fort : le sport est indispensable à l'équilibre physique et mental.
Qu'attendez-vous pour reconnaître la médecine du sport comme spécialité à part entière ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - En France, la médecine du sport est intégrée dans un cadre dual : c'est une composante de la médecine physique et de réadaptation, une spécialité reconnue ; c'est une formation spécialisée transversale, qui permet à des étudiants en médecine générale, en rhumatologie ou en cardiologie d'acquérir des compétences spécifiques. Ce modèle favorise une approche holistique.
Une filière universitaire peut se construire sans qu'il existe un DES. La création d'une spécialité pourrait fragmenter la prise en charge globale des patients. La multiplication des spécialités n'est pas toujours bénéfique pour le système de santé et l'accès aux soins, d'où notre approche mixte.
M. Jean-Raymond Hugonet. - La politique est sportive ces derniers jours, mais le ministère de la santé ne semble toujours pas avoir compris la place du sport dans la société. Vos arguments ne me convainquent pas : quatorze pays européens ont reconnu la médecine du sport comme spécialité.
Situation du centre hospitalier Édouard Toulouse
Mme Mireille Jouve . - Les unités de soins psychiatriques du centre hospitalier Édouard Toulouse sont les seules à prendre en charge les malades des quartiers nord de Marseille. Alors que les besoins sont criants, une unité d'admission a fermé provisoirement, mais le provisoire dure... La capacité d'accueil a baissé de 30 % en sept ans.
Privilégier l'ambulatoire n'est pas adapté dans des cités dont l'accès est difficile. Faire sortir des patients non stabilisés crée une rupture de soins dommageable et fait courir le risque d'une crise, voire d'un passage à l'acte violent.
Le démantèlement des services de soins psychiatriques met en danger toute la société. Pourtant, le Premier ministre a souhaité ériger la santé mentale en priorité. Comment maintenir l'unité de soins psychiatrique d'Édouard Toulouse ?
Mme Salima Saa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes . - Le centre hospitalier psychiatrique connaît des problèmes de recrutement, d'où la fermeture provisoire de 12 lits sur 222. Les structures extra-hospitalières ont été renforcées, tout comme l'unité de soins intersectoriels de 24 lits ; 2 lits de crise ont été ouverts.
Pour rouvrir les lits, il faut assurer l'attractivité de l'hôpital, au travers d'une communication positive. Le Gouvernement a accordé 33,6 millions d'euros supplémentaires à la psychiatrie en 2023. Les dotations budgétaires de l'établissement n'ont jamais diminué.
La fermeture temporaire est liée à des vacances structurelles de postes, non à une diminution capacitaire. À Marseille, on compte 160 lits pour 100 000 habitants, contre 80 lits pour 100 000 habitants en moyenne. La protection de nos hôpitaux est une priorité.
Mme Mireille Jouve. - Venez avec moi visiter l'hôpital Édouard Toulouse ! La psychiatrie n'est qu'un mouroir. Il faut tout mettre en oeuvre pour que des situations déjà tendues ne s'aggravent pas davantage encore.
La séance est suspendue à midi vingt-cinq.
Présidence de Mme Sylvie Robert, vice-présidente
La séance reprend à 14 heures.