Colloque sur la Hongrie
La Hongrie parmi les nouveaux membres de
l'Union européenne
· Jean-Pierre PAGE, consultant au CERI-Sciences Po, Directeur du Groupe International de Recherche sur l'Europe Centrale et Orientale (GIRECO), Directeur de la publication « Tableau de bord des pays d'Europe centrale et orientale »
· Liliane PETROVIC, Economiste, CEMI (EHESS), membre du GIRECO, membre de l'équipe du « Tableau de bord des pays d'Europe centrale et orientale »
· Olivier LOUIS, chef de la Mission économique pour l'élargissement.
I. Le parcours de la Hongrie dans la transition : un examen comparé
Jean-Pierre PAGE
Le parcours de la Hongrie, dans la transition, est à bien des égards original. J'insiste d'abord sur un point : ce parcours a bénéficié du fait d'avoir été préparé très tôt, dès la période communiste. C'est en effet à partir de 1968 que la Hongrie a accompli sa révolution économique, avec la mise en place de nouveaux mécanismes. Ceux-ci s'articulaient en trois points : l'abandon de la planification centralisée pour laisser de l'autonomie aux entreprises (pouvant allouer leurs ressources en fonction de la demande) ; l'amorce d'un système d'intéressement des dirigeants et salariés aux résultats de l'entreprise ; enfin, la mise en place d'un nouveau système de formation des prix.
On se rend compte également qu'à la veille de la chute du Mur de Berlin, la Hongrie disposait déjà d'un contexte institutionnel, au sens large, déjà très propice au passage à l'économie de marché (contrairement à la Russie, par exemple). Ce pays a ainsi pu aborder la transition dans de bonnes conditions, et il l'a fait avec prudence : il n'y a pas eu de « thérapie de choc » mais un programme très progressif de réduction de la dépense publique. Si la Hongrie a connu des difficultés budgétaires au cours des années 90 (en particulier en 1995-1996), c'est surtout parce qu'elle traînait le boulet d'un très grand endettement. Depuis lors, elle a retrouvé une croissance régulière, oscillant entre 3 et 5 % par an, satisfaisante et relativement soutenable. En outre, sa performance industrielle est remarquable et elle a réussi à dégager un excédent commercial dans ses relations avec l'Europe des Quinze depuis 1998.
Dans son souci de rééquilibrage, la Hongrie a toujours fait preuve de prudence. Elle n'a pas cherché à réduire brutalement l'inflation et a sans doute eu raison en cela. Elle n'a pas non plus cherché à stabiliser coûte que coûte le taux de change de sa monnaie. Elle a enfin évité l'écueil de la privatisation de masse. La conduite des réformes, en outre, a toujours été marquée par la recherche du compromis social et de la légitimité politique, ce que l'on peut saluer.
Les années 2001-2002, marquées par la hausse des salaires et des déficits publics, ont été plus difficiles mais doivent être vues comme un rattrapage nécessaire, après des années au cours desquelles la priorité avait été donnée aux performances industrielles. Toute une partie de l'industrie hongroise a été modernisée mais se trouve aujourd'hui sous contrôle étranger (Belgique, Irlande ou Slovaquie), du fait de la place importante qu'ont pris les investisseurs étrangers dans ce processus de modernisation. De fait, la Hongrie a joué pleinement le jeu de la mondialisation, quitte à perdre une partie de sa souveraineté.
Le principal défi de ce pays, aujourd'hui, est d'ordre social : il devra prendre garde à ce que les inégalités - sociales et en termes d'aménagement du territoire - non seulement ne se creusent pas, mais se résorbent. Au-delà de cet enjeu, le parcours de la Hongrie peut être considéré globalement comme l'un des plus réussis, et notamment exempt d'à-coups, que de nombreux autres pays ont subis.
II. La situation économique de la Hongrie aujourd'hui
Liliane PETROVIC
Monsieur Medgyessy a déjà évoqué le contexte et les perspectives de la situation économique hongroise. J'ai cependant relevé une légère divergence de vue au regard du panorama qu'il a dressé pour la période récente. En effet, les investissements ont certes tiré la croissance hongroise, mais les exportations ont eu une contribution négative à la croissance, selon les données dont nous disposons. La consommation privée, en revanche, a contribué à la croissance du PIB de la Hongrie. La Banque centrale et le Gouvernement continuent d'ailleurs, de leur côté, d'interpréter différemment la situation économique du pays. Depuis la crise qu'a connue la Hongrie en 2003, la Banque centrale maintient des taux d'intérêt élevés, tandis que le taux de base a été ramené graduellement à 8,25 %. Le Gouvernement, lui, considère que l'import-export pénalise les exportations hongroises, notamment celles des petites entreprises. La hausse des importations hongroises s'est montrée assez robuste, à + 14 % en euros, mais est demeurée inférieure à la moyenne des pays d'Europe centrale et orientale .
Le Gouvernement considère que la politique de désinflation, pour réussir, doit contribuer à une croissance plus dynamique et mieux tirée par les exportations, synonymes de ressources budgétaires plus élevées - accélérant ainsi le processus d'assainissement des finances publiques. Celles-ci se trouvent en effet dans une situation délicate, avec un déficit révisé à la hausse à deux reprises, pour atteindre 5,3 % du PIB fin 2004. Un autre problème réside dans le déficit de la balance des paiements, qui atteint près de 9 % du PIB. Les prévisions pour l'année 2005 sont plus favorables, ce déficit devant être ramené à près de 7,5 %. Du côté de la politique monétaire, le Conseil monétaire de la Banque centrale a été élargi par la loi, malgré l'opposition du Président de la République et du Gouverneur de la Banque centrale, et ce pour une période de six ans. Aux yeux des observateurs, ces nouveaux membres ne se laisseront pas influencer par le jeu des partis politiques hongrois.
Enfin, il convient de dire un mot des salaires, dont le montant moyen était de 580 euros en 2004. La hausse des salaires a même affiché un taux négatif en 2004. Ils devraient logiquement croître en 2005, d'environ 5 %, après la hausse amorcée dans le secteur public dès le mois de janvier dernier.
Robert DEL PICCHIA
Quand la Hongrie pourra-t-elle entrer dans la zone Euro ?
Olivier LOUIS
Les nouveaux pays membres de l'Union européenne ont obligation d'adopter l'euro. Pour entrer dans la zone euro, il convient de satisfaire aux critères de Maastricht, qui sont au nombre de six :
· le déficit budgétaire, qui ne doit pas dépasser 3 % du PIB ;
· le niveau d'endettement public, qui ne doit pas dépasser 60 % ;
· le taux d'inflation, qui ne doit excéder de 1,5 % le taux d'inflation moyen des trois pays les plus performants de la zone pour une période de référence considérée ;
· les taux d'intérêt sur obligations d'Etat à dix ans, qui ne doivent dépasser de 2 % ceux des pays les plus performants de la zone Euro ;
· l'adhésion au mécanisme de change européen n° 2, durant au moins deux années avant l'entrée dans la zone ;
· la conformité avec l'acquis communautaire, du point de vue de la législation, en particulier quant au rôle et aux prérogatives de la Banque centrale (point sur lequel la Hongrie n'est pas tout à fait conforme aux dispositions prévues).
On constate pour le moment que la Hongrie ne satisfait qu'à un seul critère des fixés aujourd'hui : celui de l'endettement public. Que faut-il faire pour que ce pays se conforme davantage à ces critères ? Un programme de convergence, soumis au Conseil EcoFin il y a quelques jours, a été adopté. Il prévoit la réduction du déficit budgétaire (de sorte que celui-ci soit inférieur à 2,8 % du PIB en 2008). Ce programme table aussi sur un taux de croissance élevé, qui atteindrait 4,6 % en 2008. Il prévoit enfin que l'endettement public soit ramené progressivement vers le niveau de 45 % du PIB. Ce programme pourra-t-il être réalisé ? Il exige en tout cas des efforts budgétaires considérables et très ambitieux.
Robert DEL PICCHIA
La marge de variation de la monnaie hongroise, qui doit précéder son entrée dans la zone euro, ne risque-t-elle pas créer de fortes spéculations autour de cette monnaie ?
Olivier LOUIS
La monnaie hongroise a déjà été fortement secouée, dans le prolongement d'une tradition de volatilité du florin. Mais sous réserve que des politiques cohérentes soient menées, je crois que la perspective de l'entrée dans l'Union européenne constitue plutôt un facteur de stabilité de la monnaie.
Les nouveaux financements communautaires en Hongrie : quelles opportunités pour les opérateurs français ?
Pierre VERNHES
Conseiller commercial, responsable de la Cellule Entreprises et Coopération,
Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne
Le cinquième élargissement de l'Union européenne, intervenu en mai 2004, se caractérise par plusieurs spécificités : un nombre important de pays entrant (dix), mais surtout un écart de richesse élevé entre les nouveaux entrants (dont le PIB représente, au total, l'équivalent de celui des Pays-Bas) et les anciens Etats membres. C'est dans ce contexte qu'ont été mis en place des financements communautaires afin de faciliter et d'accompagner cet élargissement. L'accord financier de Copenhague a notamment prévu la mise en oeuvre de 6,71 milliards d'euros pour les nouveaux Etats membres en 2004. ce montant doit être porté à 7,63 milliards d'euros en 2005 et 9,69 % en 2006. Or la Hongrie, derrière la Pologne, représente l'un des principaux bénéficiaires de ces soutiens financiers. On peut rappeler que les pays d'Europe centrale et orientale avaient également bénéficié de financements de pré-adhésion représentant environ 3 milliards d'euros par an.
L'élargissement s'est ainsi traduit par une intensité accrue des flux de financement en provenance de l'Union européenne. La politique régionale, deuxième poste budgétaire de l'Union européenne après la politique agricole commune, animée par un objectif de solidarité et de renforcement de la cohésion économique et sociale, a constitué le principal vecteur de ces financements communautaires, à travers les fonds structurels (pour deux tiers des montants en jeu : FEDER, FSE, FEOGA, IFOP) et le fonds de cohésion (environ un tiers des financements). Ces fonds financent principalement des projets d'infrastructures et, notamment pour le fonds de cohésion, des projets d'infrastructure d'un montant supérieur à 10 millions d'euros.
Les fonds structurels se déclinent, en fonction de la situation économique des pays concernés, en trois « objectifs ». La Hongrie s'inscrit, pour toutes ses régions, dans « l'objectif 1 » (retard de développement estimé, avec un PIB par habitant inférieur à 75 % de la moyenne communautaire), qui se traduit par les financements les plus élevés. L'utilisation des fonds structurels est cependant soumise à certaines contraintes : ils ne peuvent intervenir qu'en tant que complément aux financements publics, et la contribution publique doit représenter au moins 20 % des coûts éligibles. En Hongrie, les fonds structurels se déclinent en programmes opérationnels totalisant plus de 2 milliards d'euros, qui se répartissent en plusieurs axes :
· compétitivité hongroise (22 %) ;
· développement rural et agricole (16 %) ;`
· ressources humaines (28 %) ;
· environnement et infrastructure (16 %) ;
· développement régional (18 %).
Le fonds de cohésion, qui répond à une logique de pays et non à une logique de région, s'élève à 1,1 milliard d'euros pour la Hongrie. Son mode de gestion, comme pour les fonds structurels, est décentralisé, avec approbation a priori des projets par la Commission. Il est à noter que l'accessibilité de vecteurs de co-financements est peut-être plus grande, pour les entreprises françaises, que les fonds structurels. Parmi les exemples de projets du fonds de cohésion hongrois approuvés par la Commission, on peut citer, dans le domaine de l'environnement, le traitement des eaux usées à Budapest (subvention de 305 millions d'euros) ou encore, dans le domaine des transports, la réhabilitation de la ligne ferroviaire Budapest-Szolnok-L. Köshàza (108 millions d'euros).
D'une façon générale, les opportunités offertes aux opérateurs français dépendront de la capacité des entreprises privées à se positionner localement sur les marchés relatifs aux fonds structurels et de cohésion, d'une part, et de l'action des « institutionnels » à créer des partenariats et à assurer un transfert de savoir-faire.
François LOOS
Secrétaire d'Etat au Commerce extérieur
Je suis heureux d'inaugurer l'année économique de la Hongrie en France, en particulier au Sénat, dont l'action pour les partenariats extérieurs de la France est importante. Je suis également heureux de la présence de Monsieur Janos Kóka, qui a participé à la préparation de cette manifestation, et avec lequel j'aurai tout à l'heure, ici même, un entretien bilatéral, afin d'évoquer un certain nombre de sujets d'intérêt commun. Je partage avec lui la conviction que les relations économiques entre nos deux pays entrent dans une nouvelle phase.
Au cours des quinze dernières années, la France a pris une part active à l'immense chantier que constituait la transition économique de la Hongrie. Néanmoins, force est de constater que cette action a surtout été le fait des grands groupes, et non des petites et moyennes entreprises. Il est temps aujourd'hui que toutes les entreprises prennent la mesure des opportunités de partenariat offertes par la Hongrie. C'est d'ailleurs dans cet esprit qu'un plan d'action commerciale avait été présenté en février 2004, qui prévoyait notamment le renforcement de nos actions de promotion vers la Hongrie, en particulier pour les PME. A ce stade, les premiers résultats de ce plan sont mitigés : on observe une progression constante des investissements français en Hongrie (3,5 milliards d'euros, plaçant la France au rang de 4 ème investisseur étranger dans ce pays), mais les exportations demeurent à un niveau qui peut être encore sensiblement amélioré.
Les secteurs de prédilection des entreprises implantées en Hongrie sont la pharmacie, les services, l'agroalimentaire et l'énergie. Les produits français couvrent déjà 33 % du marché laitier hongrois et 60 % du marché des fromages, à titre d'exemples, et la plupart de ces produits sont fabriqués en Hongrie. Sanofi vient de poser la première pierre d'un laboratoire de recherche, dans le cadre d'un projet de 15 millions d'euros. Michelin annonce 60 millions d'euros d'investissements dans ses unités en Hongrie. Les entreprises françaises participent aussi aux opérations de privatisation, et les investissements de nos entreprises dans ce pays n'hésitent pas à s'inscrire dans une perspective régionale. Renault vient ainsi d'y installer un centre de pièces détachées ayant vocation à servir l'ensemble des Balkans. Il semble bien que la Hongrie devienne un centre d'investissement de la France pour la région de l'Europe centrale et orientale, nos entreprises appréciant la compétence de la main-d'oeuvre et un environnement des affaires accueillant.
Les exportations françaises vers la Hongrie, à 2,1 milliards d'euros, demeurent néanmoins modestes : nos ventes n'ont pas suivi la croissance de la demande hongroise (+ 17 % par an en moyenne au cours des cinq dernières années) pour les biens importés. Il y a donc matière à mobilisation, pour nouer davantage de partenariats avec nos importateurs locaux et, en outre, mieux faire connaître nos produits et services. Par ailleurs, il convient de souligner la forte concentration des acteurs économiques français intervenant sur le sol hongrois : 90 premières entreprises exportatrices vers la Hongrie réalisent 70 % des exportations. Enfin, dans le domaine agroalimentaire, par exemple, nous ne représentons que 3 % des produits achetés par la Hongrie à l'étranger, alors que la France représente en moyenne 14 % de la consommation importée depuis l'Union européenne.
Nous devons donc conduire des actions d'information. Elles seront d'autant plus utiles que les échanges franco-hongrois recèlent, à court terme, de perspectives réelles. Les entreprises françaises sont déjà très présentes dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (avec 500 millions d'euros de contrats signés en 2004). Elles suivent également des projets dans le domaine des transports, notamment pour le métro de Budapest. Le plan d'action commerciale a entraîné une réelle mobilisation des partenaires du commerce extérieur et des entreprises françaises : 48 actions ont été menées en 2004, à l'initiative de ces différents partenaires.
Nous devons engager les entreprises françaises dans une vaste mobilisation, aussi bien s'agissant des investissements que des échanges. La Hongrie doit, dans les années qui viennent, moderniser ses infrastructures car elle est appelée à jouer un rôle clé en Europe centrale. Les entreprises françaises, pour leur part, doivent s'appuyer sur la Hongrie pour développer leurs actions régionales. Face à de tels enjeux, l'année de l'économie hongroise en France s'annonce prometteuse et je m'en félicite.
M. Janos KÓKA
Ministre de l'Économie et des Transports de Hongrie
Il existe en Hongrie une communauté politique et d'affaires fortement marquée par son admiration pour la France. Je suis donc très heureux d'avoir l'honneur de participer à cette manifestation, qui marque l'inauguration de l'année économique de la Hongrie en France.
Il est important de soutenir l'impulsion donnée il y a plusieurs années pour développer la coopération entre la France et la Hongrie du point de vue des importations, des exportations et de la recherche et développement. Après quinze ans de travail, la Hongrie peut se féliciter d'avoir mené à bien la transition vers un nouveau régime. Du point de vue des résultats atteints, il convient de se demander si nous avons commis des erreurs : certains investissements ont peut-être été tournés vers d'autres pays que la Hongrie ; nous devons alors nous demander pourquoi. Il nous faut avoir une vision claire des phénomènes à l'oeuvre. De nombreux éléments nouveaux caractérisent la situation actuelle de la Hongrie, et l'entrée dans l'Union européenne pose de nouvelles questions. Il nous faut trouver les moyens de résoudre les questions financières, savoir comment mettre à profit le principe de libre circulation des biens et des services, et plus généralement savoir comment tirer parti de toutes les opportunités dont est synonyme l'entrée dans l'Union européenne.
Nous avons achevé la période de transformation. Les indicateurs sont là pour démontrer que la Hongrie a atteint une position solide, avec une croissance annuelle de 4 %, un endettement maîtrisé et un taux d'inflation limité à 4 % du PIB. Les déséquilibres concernant le déficit budgétaire résultent d'investissements extrêmement intensifs qui ont été consentis au cours des dernières années. Le déficit budgétaire a été ramené de 9 % à 5 %, traduisant là une performance qu'aucun autre pays entré dans l'Union européenne n'a réalisée. Parallèlement, nous avons concentré nos efforts sur la consommation. Mais plusieurs éléments de la politique budgétaire ne relèvent pas du gouvernement hongrois, en particulier la politique économique et la politique monétaire européenne. L'appréciation de l'euro par rapport au dollar et celle du florin par rapport à l'euro sont vecteurs d'une forte baisse de la compétitivité des entreprises hongroises : la Hongrie a perdu ses avantages compétitifs traditionnels, qui résidaient en particulier dans le coût très bas de la main-d'oeuvre.
Nous souhaitons aujourd'hui mettre en avant d'autres atouts, en particulier l'avantage de notre localisation géographique, l'excellence de notre main-d'oeuvre et la qualité de notre recherche scientifique. Telles sont les raisons pour lesquelles la Hongrie doit demeurer une priorité de vos investissements. Nous travaillons également à développer les infrastructures et les savants de demain, dans différents domaines, car nos atouts géographiques ne suffisent plus et nous en sommes conscients. Nous devons d'ailleurs nous inspirer de l'exemple français, en renouvelant notre source de valeur ajoutée. La Hongrie a remporté la compétition ardue qui a prévalu dans la région pour ce qui est des investissements étrangers. Nous devons travailler de façon acharnée pour poursuivre dans cette voie. Nous envisageons déjà de doubler notre réseau d'autoroutes au cours des huit prochaines années. Nous travaillons également à la modernisation de notre réseau ferroviaire, afin que la Hongrie s'impose comme un véritable carrefour entre l'Ukraine, les Balkans et le reste de l'Europe.
Le gouvernement hongrois, dont je crois illustrer la jeunesse, envisage d'écrire l'histoire de la Hongrie pour les quinze prochaines années, par une politique de développement basée sur la meilleure utilisation possible des fonds européens.
Depuis cent ans, nous n'avons jamais eu une telle opportunité. Nous souhaitons vivement la saisir, et nous invitons les opérateurs français à participer à ce processus en profitant également des cofinancements dont bénéficie mon pays. Nous souhaitons notamment, pour cela, mettre en oeuvre une politique budgétaire et une politique monétaire qui soient stables et prévisibles. Dans un autre registre, les systèmes sociaux et d'infrastructure seront rendus plus efficaces et les obstacles qui peuvent encore exister seront peu à peu levés afin de faciliter l'initiative économique dans notre pays. Nous sommes bien conscients que l'Etat doit jouer un rôle de soutien des entreprises, et non constituer un frein à leur développement. Enfin, il nous faut définir des objectifs et des priorités claires. Il nous faut identifier nos principaux partenaires, et à l'évidence la France fait partie des trois partenaires prioritaires de la Hongrie. En termes de secteur, l'informatique, la biotechnologie, le tourisme, l'environnement ou encore l'automobile, déjà très développés, continueront d'être porteurs de formidables opportunités, grâce au soutien des fonds européens.
Nous souhaitons en fait donner un nouveau contenu à nos avantages stratégiques. Ces dernières années ont vu l'achèvement du processus de privatisation, avec un acquis important : avoir donné davantage d'efficacité aux entreprises et ainsi facilité l'intervention des investisseurs. Sont encore à l'ordre du jour, pour la période qui s'ouvre, la privatisation de l'aéroport de Budapest et celle de l'une de nos principales sociétés de télécommunications. La Hongrie offre aujourd'hui des conditions très différentes de celles qui prévalaient il y a quelques années : nous avons compris que nous devions être au service des investisseurs - et non l'inverse. Il importe également que de plus en plus de produits hongrois arrivent sur le marché français. De nombreuses opportunités s'offrent aux opérateurs français, qui peuvent eux aussi bénéficier des fonds européens s'ils font le choix d'investir en Hongrie. L'expérience internationale de la France et sa force capitalistique constituent de précieux atouts pour le soutien du développement économique de la Hongrie.
Je plaide également pour de nouvelles approches dans notre coopération : il faut convaincre davantage les petites et moyennes entreprises d'investir hors de leur territoire d'origine, car n'oublions pas qu'elles représentent une part essentielle du tissu et des acteurs économiques d'un pays. Je rappellerai enfin que l'heure n'est plus, au sein de l'Union européenne, aux raisonnements en termes de pays : il nous faut penser en termes de régions. La Hongrie entend prendre toute sa place dans cette nouvelle logique, notamment du fait d'une localisation qui la place au coeur de la nouvelle Europe.
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Xavier FRICOUT, Directeur « Identité marketing et Solutions », Oberthur Card systems (cartes à puce)
Nous venons de créer une usine de cartes à puce à Budapest. L'Europe va se doter de documents d'identité à puce dans les deux ans qui viennent. Quelles sont les décisions envisagées par la Hongrie dans ce domaine ?
Janos KÓKA
L'informatique constitue un des principaux secteurs sur lesquels la Hongrie souhaite miser pour son développement. Cela dit, les grands systèmes de notre pays doivent être modernisés de façon volontariste. Pour revenir à votre société, il existe au moins deux branches de services pour lesquelles vos produits me semblent assurés du succès : la santé, d'une part, et les communications d'autre part. Nous sommes ainsi en train de préparer des appels d'offres dans le domaine de l'informatique, appliquée aux transports ferroviaires en particulier. S'agissant de la santé, le retard d'informatisation, hérité du communisme, est encore très net. Il y a donc tout lieu de penser que des investissements importants d'informatisation se réaliseront dans ce domaine au cours des trois prochaines années.
Alain GUIBERT, Président-Directeur général, PEME Gourdin (mécanique)
Je ne trouve ni en France ni en Hongrie les financements disponibles pour investir, créer ou racheter une PMI : cela ne semble guère enthousiasmer les banquiers français, ni même les banquiers hongrois. A qui dois-je m'adresser ?
François LOOS
Pour les actions d'exportation, la COFACE peut intervenir et apporter une garantie des risques qu'un établissement bancaire prendrait en soutenant un investissement. Je vous invite donc à prendre contact avec cet organisme.
Janos KÓKA
Du côté hongrois, il existe de nombreux dispositifs d'aide pouvant être mobilisés pour le crédit et le développement de PME-PMI. Notre centre ITDH a pour mission de soutenir ce type de projet et vous pourrez, sur un document unique, consulter l'ensemble des aides disponibles. Je suis donc très confiant quant à notre capacité de vous aider à réaliser votre projet.
Hermann SCHNEIDER, Systra (ingénierie de transports à l'international)
Monsieur Kóka, la gestion des chemins de fers hongrois est placée sous votre responsabilité et se modernise, mais connaît aussi des difficultés financières. Le gouvernement hongrois entend-il développer de nouvelles opportunités d'investissement, y compris pour les partenariats franco-hongrois, en matière de service, maintenance et réhabilitation du matériel ?
Janos KÓKA
Je vous invite à nous soumettre des offres, car nous avons quinze ans de retard dans ce domaine. Nous aurons besoin de nombreux appuis et toutes les collaborations seront les bienvenues, eu égard à l'ampleur des chantiers à engager - ne serait-ce que pour les gages. Les acteurs privés seront d'ailleurs invités à participer à cet effort de rénovation. La modernisation des transports ferroviaires constitue clairement un axe important de réformes de la décennie à venir.
Jacques FOLLAIN, ADP Management (aéroport)
Vous avez évoqué la privatisation des aéroports. Quel est le contexte de cette privatisation et l'agenda envisagé ?
Janos KÓKA
Nous avons publié un appel d'offres pour l'aéroport de Budapest. Le cabinet Boston Consulting Group commence par ailleurs à développer les axes directeurs de la stratégie de privatisation, qui ne sont pas encore connus. Il s'agit là en tout cas d'axes stratégiques de développement, étant entendu que la Hongrie doit tirer parti de sa localisation géographique pour devenir un carrefour des communications en Europe. Notre volonté de faire de la Hongrie un grand pays touristique ne peut que renforcer ces orientations.