EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La transition numérique de notre société, de nos usages, de nos tissus économiques et industriels représente à la fois un bouleversement profond de nos modèles et un puissant levier vers de nouvelles voies de progrès et de compétitivité. Ces opportunités sont néanmoins porteuses de risques pour les individus et les entreprises qui interagissent et opèrent quotidiennement dans notre espace numérique.

Les technologies numériques ouvrent des possibilités considérables de diffusion du savoir, d'accès à la culture ou d'innovation. Elles constituent un levier de résilience de nos sociétés face aux crises telles que celle de la Covid-19. Toutefois, ces avancées peuvent être entravées par des mésusages du numérique lorsque celui-ci se retrouve vecteur d'expression de la haine en ligne, de manipulation de l'information, d'atteintes aux données personnelles ou au bien-être des mineurs lorsqu'ils sont exposés à des contenus inappropriés ou dangereux.  

Face à ces mutations, le rôle de l'État consiste donc à la fois à accompagner cette transition et à veiller au respect de nos valeurs communes et des principes cardinaux de notre contrat social.

Pour cela, deux principes doivent gouverner l'action publique : responsabilité et équité. Il convient en premier lieu de maîtriser les risques relatifs aux usages d'internet en responsabilisant les fournisseurs de services numériques afin de garantir que ce qui est illégal hors ligne le soit également en ligne. Il convient par ailleurs de faire en sorte que la concurrence sur les marchés numériques soit juste et équitable au bénéfice du consommateur, de l'innovation, et de la souveraineté des États.

L'adoption en Europe des deux règlements sur les services et marchés numériques (DSA et DMA) et du règlement sur la gouvernance des données (DGA) constitue une première étape fondamentale à l'avènement d'un marché unique du numérique européen fondé sur nos valeurs. L'Europe est le premier continent à poser un cadre entièrement nouveau pour régir l'activité et les impacts des services et des marchés numériques sur son territoire dans la fidélité à ses valeurs. La Présidence Française de l'Union européenne a été à la pointe de cette grande avancée en 2022 et le Gouvernement entend continuer de porter de hautes ambitions dans ce domaine. Le succès de la transition numérique, tant pour les citoyens que pour les entreprises et pour les services publics, dépend en priorité de notre capacité à créer les conditions d'un environnement numérique propice à la confiance, à la loyauté et à l'équité de l'économie et des échanges sur ces nouvelles interfaces technologiques. Ce nouveau cadre inédit et ambitieux doit continuer de s'incarner dans une mise en oeuvre nationale efficace et proche des citoyens.

La mise en oeuvre en France des deux règlements sur les services et marchés numériques et du règlement sur la gouvernance des données est une opportunité politique majeure à saisir pour affirmer notre engagement sur les deux enjeux que sont la responsabilité et l'équité dans notre espace numérique. Le présent projet de loi repose sur ce diptyque majeur. À ces deux axes, est ajouté un axe d'intervention sur le renforcement de la gouvernance de la régulation du numérique. Enfin, le quatrième volet traite des nécessaires adaptations du droit national au regard des nouveaux cadres instaurés par les règlements DGA, DSA et DMA et assure ainsi leur pleine effectivité en droit national.

Le titre Ier porte sur la protection en ligne des mineurs.

L'article 1er confère à l' Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) la mission d'élaborer un référentiel à valeur contraignante établissant les exigences techniques auxquelles doivent répondre les systèmes de vérification de l'âge mis en place pour l'accès aux sites comportant des contenus pornographiques, en matière de fiabilité du contrôle de l'âge des utilisateurs et de respect de leur vie privée, et permettant notamment de s'assurer que les utilisateurs souhaitant accéder à un contenu pornographique édité par un service de communication au public en ligne sont majeurs. Ainsi, seules les personnes majeures auront désormais accès aux sites comportant des contenus pornographiques via un système de vérification d'âge qui protégera de manière renforcée la vie privée de chacun. L'ARCOM pourra prononcer une sanction pécuniaire en cas de non-respect de ce référentiel.

L'article 2 renforce les pouvoirs d'intervention de l'ARCOM dans la lutte contre l'accès des mineurs aux sites comportant des contenus à caractère pornographique : l'article confère à cette autorité un pouvoir d'injonction administrative à l'encontre des sites contrevenants. L'article prévoit également la possibilité pour l'ARCOM, dans le cas où les sites litigieux ne se conformeraient pas à ces injonctions, d'ordonner aux fournisseurs d'accès à Internet le blocage de l'accès à ces sites, sans être contrainte, comme c'était le cas auparavant, de faire prononcer cette injonction par le juge. Cet article permet également à l'ARCOM d'imposer aux moteurs de recherche et annuaires de déréférencer ces sites. L'article prévoit enfin la possibilité pour l'ARCOM de prononcer des sanctions pécuniaires en cas de non-respect des leurs obligations par ces acteurs. L'article prévoit également que les agents assermentés de l'ARCOM pourront constater par procès-verbal qu'un service de communication au public en ligne permet à des mineurs d'avoir accès à un contenu pornographique. Cette disposition est de nature à faciliter grandement les missions de contrôle de l'ARCOM, contrainte aujourd'hui recourir à des huissiers de justice pour opérer ces constats, et permettra de sécuriser et de gagner en efficacité et en rapidité dans le recueil d'éléments de preuve dans le cadre de la procédure de blocage des sites pornographiques.

L'article 3 renforce la lutte contre la diffusion des contenus présentant un caractère pédopornographique. À l'instar des dispositions existantes en matière de retrait des contenus terroristes, cet article crée une obligation pour les hébergeurs de retirer les contenus pédopornographiques, sur injonction de l'autorité administrative, dans un délai de 24 heures. Le non-respect de cette obligation de retrait est pénalement sanctionné d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 250 000 euros d'amende. En cas de manquement habituel commis par une personne morale, la peine d'amende peut être portée à 4 % de son chiffre d'affaires mondial. Plusieurs garanties sont prévues pour conforter la proportionnalité du dispositif. Il introduit un recours devant le juge administratif à l'encontre des demandes de retrait, qui devra statuer dans un délai de 72 heures.

Le titre II porte sur la protection des citoyens dans l'environnement numérique vis-à-vis des risques présentés par (i) la propagation de contenus de médias menant des actions de propagande visés par des sanctions européennes au titre de la sécurité commune, (ii) les agissements graves et répétés de harcèlement sur les plateformes en ligne et (iii) les techniques d'hameçonnage utilisées par les cybercriminels.

L'article 4 étend les compétences de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) pour la mise en oeuvre des mesures restrictives européennes visant les médias, notamment les interdictions de diffusion, à de nouveaux opérateurs : d'une part, aux éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle, aux opérateurs de réseaux satellitaires et à leurs prestataires techniques, et d'autre part, aux services de communication au public en ligne. L'ARCOM pourra enjoindre à ces prestataires de respecter les interdictions de diffusion des contenus produits par des médias visés par les sanctions européennes.

L'article 5 prévoit que le juge, lorsqu'il condamne une personne pour des faits de haine en ligne, de cyber-harcèlement, ou d'autres infractions graves, pourra prononcer une peine complémentaire de suspension du compte d'accès au service de plateforme en ligne utilisé pour commettre ces infractions. La décision de condamnation sera signifiée au fournisseur de ce service de plateforme en ligne et celui-ci sera tenu de bloquer ce compte, sous peine de se voir condamné à une peine de 75 000 euros d'amende. Le fournisseur du service de plateforme devra également mettre en oeuvre des mesures pour procéder au blocage des autres comptes éventuellement détenus par l'intéressé et faire obstacle à la création de nouveaux comptes par cette même personne. Cette disposition permettra de lutter plus efficacement contre la haine en ligne et le cyber-harcèlement en évitant que les utilisateurs condamnés pour ces types de délits puissent recréer de nouveaux comptes lorsque le compte utilisé pour commettre les délits a été suspendu par le service de plateforme en ligne.

L'article 6 porte sur le déploiement d'un filtre national de cyber-sécurité à destination du grand public permettant d'alerter les internautes via l'affichage d'un message d'avertissement dans leur navigateur lorsqu'ils souhaitent accéder à une adresse internet pour laquelle il existe un risque avéré d'arnaque ou d'escroquerie, notamment vis-à-vis de leurs données personnelles. Les sites cybermalveillants seront identifiés par des agents habilités de l'autorité administrative sous le contrôle d'une personnalité qualifiée indépendante rattachée à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Lorsque les faits persistent au-delà d'une période de 7 jours ou lorsque l'éditeur du service associé à l'adresse internet n'est pas identifiable, l'autorité administrative pourra demander aux fournisseurs d'accès à internet, aux fournisseurs de systèmes de résolution de noms de domaine et aux fournisseurs de navigateur internet de prendre toute mesure destinée à empêcher l'accès au site. Le dispositif vise à protéger les citoyens contre les tentatives d'hameçonnage et réduire les risques d'arnaques financières (paiements contrefaisants), d'usurpation d'identité, d'utilisation de données à caractère personnel à des fins malveillantes ou de collecte de données à caractère personnel via des moyens frauduleux, déloyaux ou illicites. La loi renvoie au décret en Conseil d'État, après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés » pour fixer les modalités techniques de déploiement de ce filtre national de cyber-sécurité.

Le titre III promeut des dispositions en faveur de la confiance et de la concurrence nécessaires au développement d'une économie de la donnée équitable et innovante.

L'article 7 vise à réguler certaines pratiques commerciales aujourd'hui répandues sur le marché des services d'informatique en nuage qui altèrent la liberté de choix et le jeu de la concurrence lorsqu'une entreprise souhaite contracter avec un fournisseur de services d'informatique en nuage ou changer de fournisseur. Il fixe le principe d'un encadrement des pratiques commerciales consistant à offrir aux entreprises utilisatrices des avoirs d'informatique en nuage, s'agissant de leur durée de validité et de leurs conditions de renouvellement, et interdit la pratique consistant à facturer aux entreprises utilisatrices des frais au titre du transfert de leurs données vers leurs propres infrastructures ou celles de fournisseur tiers. Ces mesures répondent à une double problématique d'enfermement propriétaire des utilisateurs au sein de l'environnement de leur primo-fournisseur : les entreprises utilisatrices sont en effet fortement incitées à souscrire un contrat auprès des fournisseurs qui leur proposent des avoirs d'informatique en nuage, et deviennent ensuite captives de ces primo-fournisseurs en raison des barrières commerciales et techniques à la portabilité et l'interopérabilité. En particulier, ces fournisseurs peuvent alors pratiquer des tarifs élevés, en s'appuyant sur l'entrave à la migration que représente les frais facturés pour le transfert de données, décorrélés du coût réel de l'opération, ainsi que par l'absence d'interopérabilité technique avec les services tiers proposés par d'autres fournisseurs ou développés par les utilisateurs.

L'article 8 établit pour les fournisseurs de services d'informatique en nuage l'obligation d'assurer les conditions de la portabilité et de l'interopérabilité de leurs services avec des services tiers. En effet, les entreprises clientes des fournisseurs de services d'informatique en nuage sont généralement technologiquement captives des solutions acquises en primo-achat dès lors que ces solutions n'offrent pas de possibilité d'être progressivement rendues compatibles avec des solutions tierces. Cet article permettra aux entreprises utilisatrices de migrer plus facilement sur des offres plus compétitives, ou de recourir simultanément à plusieurs services tiers, et favorisera le développement des offres européennes.

L'article 9 prévoit, afin de garantir la mise en oeuvre des exigences de portabilité et d'interopérabilité visées à l'article 8, que l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes de la distribution de la presse (ARCEP) puisse préciser les règles et modalités de mise en oeuvre de ces exigences, notamment par l'édiction de spécifications d'interopérabilité et de portabilité ouvertes. L'article 9 favorisera également la transparence sur les pratiques des fournisseurs au travers d'une obligation de publication d'une offre de référence technique détaillant la mise en oeuvre de ces exigences.

L'article 10 prévoit que le contrôle du dispositif issu des articles 8 et 9 est confié à l'ARCEP et établit les pouvoirs d'enquête et d'accès aux données nécessaires à cette fin. L'ARCEP sera également dotée d'un pouvoir de règlement des différends en matière d'interopérabilité des servies d'informatique en nuage.

L'article 11 confie à l'ARCEP le rôle d'autorité compétente en matière de régulation des services d'intermédiation de données au sens du chapitre III du règlement DGA l'objectif d'accroître la confiance dans le partage des données sur la base de mécanismes sécurisés.

L'article 12 attribue à l'ARCEP de nouveaux pouvoirs d'enquête, d'accès aux données, de contrôle et de sanctions pour veiller au respect de leurs obligations par les prestataires de services d'intermédiation de données.

L'article 13 définit les modalités d'articulation entre l'ARCEP et la CNIL lorsque, dans le cadre de ses missions effectuées au titre de ses nouvelles compétences concernant les intermédiaires de données, l'ARCEP identifie des problématiques liées à la protection des données personnelles.

L'article 14 procède à un ajustement de coordination du code des postes et communications électroniques.

Le titre IV porte sur le développement en France de l'économie des objets de jeux numériques monétisables dans un cadre protecteur.

L'article 15 habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la mise en place d'un cadre protecteur permettant le développement en France de l'économie des jeux à objets numériques monétisables (JONUM). Le développement rapide et la mise à disposition de technologies dites « Web 3.0 », telles que la blockchain et les jetons non-fongibles (JNF) constituent de puissantes opportunités de développement pour le secteur du jeu en ligne. En effet, les caractéristiques des JNF, jetons numériques uniques auxquels peuvent être associés des droits et utilisables dans des jeux, rendent possible la création de marchés secondaires pour de tels objets numériques, intéressant d'autres joueurs ou des collectionneurs. Cependant, la législation actuelle n'est pas adaptée à ces nouveaux jeux, qui empruntent des caractéristiques à la fois aux jeux de loisirs (gaming) et aux jeux d'argent (gambling) et qui interrogent la pertinence des catégories actuelles de jeux et la sécurité juridique offerte aux acteurs du secteur. La mesure d'habilitation issue de l'article 15 permettra ainsi au Gouvernement de prendre toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de définir le régime, les objectifs et les modalités d'encadrement, de régulation et de contrôle des entreprises qui commercialisent des JONUM.

Le titre V porte des mesures permettant à l'État d'analyser plus efficacement l'évolution des marchés numériques

L'article 16 vise à renforcer les capacités de collecte des données du service à compétence nationale nommé « Pôle d'Expertise de la Régulation du Numérique » (« PEReN »), créé en 2020. Le PEReN est aujourd'hui reconnu comme un centre d'expertise unique dans l'appréhension des problématiques techniques parfois complexes suscitées par la régulation des plateformes numériques. Il constitue un outil majeur pour rompre l'asymétrie d'informations encore importante entre ces grands acteurs du numérique et les régulateurs du numérique. Le PEReN met son expertise à la disposition de l'ensemble des autorités compétentes en matière de régulation des plateformes numériques (CNIL, ARCOM, ARCEP, DGCCRF notamment) pour la mise en oeuvre de leurs missions, et ses apports sont solidement appréciés par l'ensemble de ses partenaires. Il constitue un relais puissant d'éclairage à la décision publique en matière de régulation du numérique. Toutefois, à ce jour, ses capacités restent encore limitées dès lors que, lorsqu'il n'intervient pas pour le compte d'une des autorités compétentes partenaires, son pouvoir en termes de collecte de données est cantonné aux seules fins d'expérimentation pour la conception d'outil techniques, à partir de données publiquement accessibles. L'article a ainsi pour objet de faciliter l'accès à des données publiques par le PEReN dans le cadre de ses missions de recherche publique.

L'article 17 a pour objet la généralisation d'un dispositif de centralisation des données de location de meublés de tourisme devant être transmises aux communes par les opérateurs de plateformes numériques. Ce dispositif vise à faciliter, par la création d'une plateforme de centralisation des informations, les transmissions de données prévues par le code du tourisme entre les plateformes numériques de mise en location de meublés de tourisme et les communes, afin notamment de permettre le contrôle du respect de la réglementation limitant la location de résidences principales à 120 jours par an. Il consiste à pérenniser et à généraliser l'expérimentation d'une interface de programmation applicative dénommée API meublés, dont le bilan s'est révélé positif. Contrairement à la situation actuelle où chaque commune doit saisir chaque opérateur numérique pour récupérer les données relatives aux locations de meublés, cette plateforme de centralisation deviendra l'interlocutrice unique de ces opérateurs et des collectivités concernées.

Le titre VI porte sur le renforcement de la gouvernance de la régulation du numérique

L'article 18 vise à consolider les capacités du « Coordinateur des services numériques » chargé de coordonner les différentes autorités compétentes impliquées dans la mise en oeuvre du règlement DSA. À cette fin, l'article promeut une collaboration avec le PEReN, qui pourra assister par son expertise technique le Coordinateur des services numériques dans l'exercice des missions.

Le titre VII complète et modifie le code de l'organisation judiciaire et le code de justice administrative afin de doter les juridictions agissant dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle d'une autorité de contrôle au sens du règlement européen sur la protection des données.

L'article 19 modifie le code de justice administrative afin de créer une autorité de contrôle au sein du Conseil d'État, compétente pour contrôler les opérations de traitement effectuées par les juridictions administratives.

L'article 20 modifie le code de l'organisation judiciaire afin de, d'une part, créer une autorité de contrôle au sein de la Cour de cassation, compétente pour contrôler les opérations de traitement effectuées par les juridictions judiciaires au titre de leur activité juridictionnelle et, par le Conseil supérieur de la magistrature, dans ses fonctions disciplinaires. D'autre part, préciser que la Cour de cassation est compétente pour connaître des recours contentieux dirigés contre les décisions prises par l'autorité de contrôle créée en son sein.

L'article 21 modifie le code des juridictions financières afin de créer une autorité de contrôle au sein de la Cour des comptes, compétente pour contrôler les opérations de traitement effectuées, dans l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles par les juridictions régies par ce code et leur ministère public.

Le titre VIII porte sur l'ensemble des mesures d'adaptation nécessaires à apporter aux différents corpus législatifs nationaux afin de les aligner sur le nouveau cadre établi par les règlements européens sur les services et marchés numériques, ainsi que sur la gouvernance des données.

Le chapitre Ier modifie et effectue une restructuration partielle de la loi nº 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement DSA.

L'article 22 modifie principalement les articles 1, 5 et 6 de la loi nº 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN).

L'article 23 adapte l'article 6-1 de la LCEN relatif à la lutte contre les contenus terroristes et pédopornographiques.

L'article 24 réorganise une nouvelle section au sein de la LCEN pour les dispositions dédiées à l'intervention de l'autorité judiciaire.

L'article 25 désigne les autorités nationales compétentes pour la mise en oeuvre en France du règlement DSA - ARCOM, commission nationale informatique et libertés (CNIL) et direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) - et organise l'allocation de leurs compétences respectives ainsi que les modalités de la coordination entre elles. Il désigne l'ARCOM en tant que « Coordinateur des services numériques » tel que prévu par le DSA. Il précise les pouvoirs d'enquête, d'exécution et de sanction de l'ARCOM pour la mise en oeuvre du règlement DSA.

Le chapitre II modifie le code de la consommation aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement DSA. 

L'article 26 procède à l'adaptation de certaines dispositions du code de la consommation afin de les rendre cohérentes avec la mise en oeuvre du règlement DSA. En premier lieu, de nouvelles dispositions habilitent la DGCCRF à contrôler les fournisseurs de places de marché en ligne au regard de leurs obligations prévues au règlement DSA. Les infractions à ce règlement qui les concernent (articles L. 133-1 et L. 133-3 nouveaux) sont punies d'une peine de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 300 000 euros, dont le montant peut être relevé à 6 % du chiffre d'affaires hors taxe pour une personne morale. Les enquêtes diligentées par la DGCCRF sont, enfin, encadrées conformément aux exigences procédurales du règlement DSA. Le juge pénal sera seul compétent pour prononcer les sanctions. Par ailleurs, à la demande de l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation, après que celle-ci en ait avisé le procureur de la République, la juridiction civile pourra enjoindre, y compris sous astreinte, à l'auteur des pratiques de se mettre en conformité (article L. 133-2 nouveau). La mise en oeuvre de ces pouvoirs fera l'objet d'une coordination étroite avec l'Arcom et la CNIL, qui sera formalisée par un protocole de coopération.

En second lieu, les dispositions existantes qui sont applicables aux plateformes en ligne, en particulier aux places de marché numériques utilisées par de nombreux vendeurs, sont révisées afin d'assurer leur conformité au droit de l'Union. La définition d'une « plateforme en ligne », instituée par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, est remplacée par la définition prévue au DSA afin d'éviter tout conflit. Les obligations de transparence et loyauté des contenus des plateformes en ligne (article L. 111-7) sont aménagées dans le respect du droit européen de la consommation. D'autres dispositions, tel que le pouvoir de la DGCCRF d'enjoindre à une plateforme de suspendre un contenu illicite (article L. 521-3-1, créé par la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020), font l'objet d'adaptations en vue de conforter leur sécurité juridique.

Le chapitre III modifie le code de commerce aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement DMA. 

L'article 27 complète et adapte certaines dispositions du code du commerce aux fins de la mise en oeuvre en France du règlement DMA. Il spécialise notamment plusieurs juridictions judiciaires dans les matières ressortant de l'application du règlement DMA. Par ailleurs, sont introduites les dispositions nécessaires afin de garantir l'habilitation de l'Autorité de la concurrence et de la DGCCRF, pour ouvrir des enquêtes sur des cas de non-respect éventuel des obligations imposées aux contrôleurs d'accès par le DMA. Cet article prévoit également les dispositions permettant à l'Autorité et la DGCCRF de porter assistance à la Commission européenne dans le cadre de la mise en oeuvre du DMA. Sont également introduites les dispositions désignant l'Autorité de la concurrence et la DGCCRF comme les autorités pouvant recevoir des tiers des renseignements portant sur tout comportement ou pratique mis en oeuvre par les contrôleurs d'accès et relevant du champ d'application du DMA. Cet article prévoit également la possibilité pour le Ministre de l'économie de solliciter auprès de la Commission européenne l'ouverture d'une enquête de marché prévue par le DMA.

Le chapitre IV (article 28) procède à des adaptations de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (Loi Léotard) aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement sur les services numériques (DSA).

Le chapitre V (article 29) procède à des adaptations de la loi n° 2018-1202 du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l'information aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement sur les services numériques (DSA).

Le chapitre VI (article 30) procède à des adaptations du Code électoral aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement sur les services numériques (DSA).

Le chapitre VII procède à des adaptations de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec les règlements sur les services numériques (DSA) et la gouvernance des données (DGA).

L'article 31 confie aussi de nouvelles attributions de contrôle et de sanctions à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, désignée comme autorité compétente s'agissant de l'altruisme en matière de données pour l'application du règlement DGA.

L'article 32 confie à la Commission nationale de l'informatique et des libertés de nouvelles attributions afin de faire respecter certaines règles du DSA par les fournisseurs de plateforme en ligne. Il lui attribue à ce titre de nouvelles compétences de contrôle et de sanctions.

Le chapitre VIII (article 33) procède à des adaptations de la loi n°47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques aux fins de la mise en oeuvre et de la mise en cohérence avec le règlement sur les services numériques (DSA).

Le chapitre IX (article 34) procède à des adaptations de la loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l'éthique du sport, du code de la propriété intellectuelle, de la loi n° 2021-1382 du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l'accès aux oeuvres culturelles et du code pénal.

Le chapitre X est relatif aux dispositions d'adaptation aux outre-mer ainsi qu'aux dates d'entrée en vigueur du texte.

L'article 35 habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à l'adaptation et l'extension des dispositions de la présente loi aux outre-mer.

L'article 36 prévoit les modalités et dates d'entrée en vigueur de différentes dispositions du projet de loi.