EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Une fois encore, les Maires, piliers de la République, sont en première ligne dans la crise sanitaire, sans précédent, que traverse notre pays. Leur mobilisation est particulièrement forte et exemplaire.

Dans un contexte très difficile, ils ont eu à organiser, dans l'urgence et avec parfois peu de moyens, le premier tour des élections municipales, puis l'accueil des enfants des personnels de santé, la continuité des services municipaux, la mise en place d'actions de solidarité essentielle vis-à-vis des plus vulnérables...

Leur rôle sera tout aussi important si ce n'est davantage dans le cadre du déconfinement dans lequel notre pays s'engage.

L'une des premières décisions annoncées par le Gouvernement, la réouverture des écoles, suscite une inquiétude toute particulière parmi les Maires en charge des écoles.

Ils s'interrogent en effet sur leur capacité à appliquer cette décision d'ouverture des écoles dans des conditions satisfaisantes du point de vue sanitaire, compte tenu des moyens limités dont ils disposent en termes de protection, de locaux, d'équipements, de personnels... et de la très grande difficulté à faire respecter les gestes barrières à des jeunes enfants dans une classe, un restaurant ou des transports scolaires.

Dans ces conditions, ils craignent que leur responsabilité puisse être engagée en cas de contamination d'un élève, d'un membre du personnel, d'un enseignant ou de tout intervenant nécessaire au fonctionnement de ce service public.

Cette question se pose plus largement pour toute décision prise par l'État, ou par d'autres collectivités locales, dont la mise en oeuvre nécessiterait son intervention ou relèverait de ses prérogatives.

Il en est par exemple ainsi de l'annonce du Président de la République de fournir des masques « grand public » à chacun de nos concitoyens dont la distribution pourrait être assurée au moins en partie par les communes.

Le Président de la République comptant confier un rôle prépondérant aux Maires dans la mise en oeuvre du déconfinement, il convient de renforcer leur protection juridique dans l'exécution de décisions qui ne relèveraient pas d'eux.

Depuis la déclaration de l'état d'urgence sanitaire, au-delà des Maires, de très nombreux responsables publics ou privés ont été amenés à mettre en oeuvre les directives énoncées par le Gouvernement. Il en ira encore ainsi peut-être davantage même, dans le cadre du déconfinement progressif, à partir du 11 mai prochain.

Tout en respectant les directives gouvernementales, susceptibles d'évoluer dans le temps, l'ensemble de ces acteurs participant à la mise en oeuvre du plan de déconfinement seront amenés à prendre des mesures qui pourraient à titre d'exemple ne pas suivre intégralement les avis du comité de scientifiques mis en place dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (Art. L. 3131-19 du code de la santé publique). Ces acteurs ne doivent pas se voir reprocher, sur le fondement de ces mesures, une faute caractérisée au sens de l'article 121-3 du code pénal.

La crainte d'un risque pénal est en effet susceptible d'engendrer des comportements ou attitudes néfastes à la recherche de l'intérêt général, par une inaction ou une action bridée qui contreviendrait par exemple au droit à l'accès à l'éducation ou à la relance d'une activité économique génératrice d'emplois et de richesses collectives. Un principe de précaution juridique mal apprécié ne doit pas devenir un principe d'inaction dont la société pâtirait dans son ensemble.

Ainsi, une limitation de la responsabilité pénale, uniquement pour des infractions non intentionnelles et pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, doit être envisagée. Rechercher la responsabilité pénale non intentionnelle d'un acteur (public ou privé) dans ce cadre serait toujours possible mais uniquement sur le fondement de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.

Cette limitation temporaire de responsabilité pénale permettrait de favoriser la mise en oeuvre de plusieurs principes constitutionnels, notamment l'accès de tous à l'éducation ou encore la liberté d'entreprendre.

Aussi, l'article unique de la présente proposition de loi prévoit que les décisions prises par un acteur public ou privé au cours de l'état d'urgence sanitaire et en lien avec lui, portant notamment sur la mise en oeuvre du plan de déconfinement défini par le Gouvernement, ne sauraient être constitutives d'une faute caractérisée au sens du quatrième alinéa de l'article 121-3 du code pénal.

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