EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Institution ancienne issue du Moyen Âge, la louveterie occupe toujours une place singulière dans la régulation de la faune sauvage en France. Si elle a vu le jour pour lutter contre les grands prédateurs, elle a évolué au fil des siècles pour devenir un maillon essentiel de l'équilibre entre activités humaines et dynamiques animales.

Aujourd'hui, ce sont les lieutenants de louveterie, nommés par le Préfet, qui interviennent bénévolement dans des contextes sensibles, notamment lors des battues administratives contre les espèces susceptibles d'occasionner des dégâts (ESOD). Dans un contexte de mutation profonde des équilibres écologiques, leur rôle est devenu plus stratégique que jamais. La prolifération de certaines espèces, comme les sangliers, entraîne des conséquences lourdes pour les exploitations agricoles, la forêt, la sécurité routière ou encore la biodiversité locale. Cette situation est d'autant plus préoccupante que, parallèlement, le nombre de chasseurs ne cesse de diminuer -- passant de 2,2 millions en 1975 à environ 950 000 en 2023 selon la Fédération nationale des chasseurs. Cette baisse fragilise tout l'équilibre agro-sylvo-cynégétique, renforçant la nécessité de disposer d'intervenants compétents, réactifs et bien encadrés.

Pourtant, les lieutenants de louveterie, au nombre de 1 800 selon l'Office français de la biodiversité, continuent d'exercer leur mission dans un cadre juridique peu structuré. Leur engagement repose sur le bénévolat, sans véritable statut, avec des moyens logistiques et matériels inégalement répartis selon les départements. Ce décalage entre les exigences croissantes de leurs missions et les conditions dans lesquelles ils les mènent crée un flou préjudiciable, tant pour eux que pour les services de l'État.

Cette situation est d'autant plus regrettable que les lieutenants de louveterie sont considérés comme des auxiliaires à part entière des pouvoirs publics.

La présente proposition de loi se donne donc pour ambition de moderniser leur cadre d'intervention, dans un esprit d'efficacité, d'équité territoriale et de reconnaissance des lieutenants de louveterie. Sans remettre en cause le caractère bénévole de leur engagement, elle vise à leur offrir une meilleure protection, une organisation plus homogène et un cadre légal cohérent avec les réalités de terrain.

Aussi, l'article 1er modifie l'article L. 427-1 du code de l'environnement afin d'inscrire dans la loi le principe du bénévolat des lieutenants de louveterie, aujourd'hui seulement prévu par voie réglementaire. Il introduit également la notion de « volontaire » lorsque ces derniers agissent pour le compte de l'État et précise leur rattachement préfectoral ainsi que leur rôle dans la régulation des espèces.

L'article 2 crée un nouvel article L. 427-1-1 qui reconnaît aux lieutenants de louveterie un véritable statut d'auxiliaires de l'État. Ce statut leur ouvre droit à la protection fonctionnelle, tout en les soumettant à des obligations de réserve et de neutralité.

L'article 3 clarifie les conditions de recrutement en s'appuyant sur les critères réglementaires existants. Il précise notamment les exigences d'âge, de nationalité, de compétence cynégétique, de résidence et de détention de chiens. Une dérogation permet, sous décision préfectorale, d'abaisser temporairement le nombre de chiens requis, à condition qu'une mise à disposition compensatoire soit assurée. Ce même article prévoit aussi la prise en charge des frais vétérinaires en cas de blessure des chiens lors d'une mission.

L'article 4 rend obligatoire une formation initiale pour les nouveaux lieutenants de louveterie, complétée par un dispositif de formation continue. Il s'agit ainsi de renforcer la professionnalisation des interventions, dans un souci d'efficacité et de sécurité.

L'article 5 introduit la possibilité pour les volontaires de conclure une convention de disponibilité avec leur employeur. Cet outil vise à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et engagement volontaire au service de l'intérêt général dans le cadre de la louveterie.

L'article 6 établit un droit à autorisation d'absence pour les lieutenants de louveterie dans le cadre de leurs missions, sauf si un impératif de service s'y oppose.

L'article 7 interdit toute sanction professionnelle à l'encontre des volontaires du fait de leur engagement, qu'ils soient salariés, agents publics ou étudiants, garantissant ainsi la neutralité de leur statut vis-à-vis de leurs activités professionnelle ou académique.

L'article 8 introduit une obligation de dotation initiale en tenues adaptées, ainsi que l'accès à un kit de premier équipement financé par l'autorité administrative. Il prévoit également un renouvellement des matériels de visée et de vision nocturnes tous les cinq ans.

L'article 9 encadre la prise en charge des frais liés aux missions (transport, repas, assurance, nuitées, soins vétérinaires), en rappelant qu'il ne s'agit pas d'une rémunération mais d'une compensation des coûts engagés.

L'article 10 prévoit la tenue, sous l'autorité du préfet, d'une réunion annuelle réunissant l'ensemble des acteurs concernés (administration, chasseurs, agriculteurs, associations, collectivités, vétérinaires...). Cette instance de coordination vise à dresser un bilan des actions menées, à identifier les difficultés rencontrées sur le terrain et à adapter les interventions en fonction des besoins locaux.

L'article 11 constitue le gage de cette proposition de loi.

La présente proposition de loi a été élaborée en lien avec l'Association des Lieutenants de Louveterie de France.

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