Proposition de loi relative aux professions de foi électorales bilingues dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle
N° 20
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 15 octobre 2002
PROPOSITION DE LOI
relative aux professions de foi électorales bilingues dans les départements du Bas-Rhin , du Haut-Rhin et de la Moselle ,
PRÉSENTÉE
Par M. Jean Louis MASSON,
Sénateur.
( Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement ).
Élections et référendums. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Une décision du Président du Conseil des Ministres
d'août 1919 avait disposé que pour les élections
législatives du 16 novembre 1919 (et elles seulement), les affiches
des candidats en Alsace-Lorraine pourraient être bilingues. Depuis lors,
l'usage s'est instauré, dans certains cantons des trois
départements concernés, de permettre aux candidats de faire
publier leurs professions de foi à la fois en allemand et en
français.
Cependant, aucun texte à valeur réglementaire ou
législative n'organise la publication de professions de foi bilingues,
ni pour ce qui est de la liste des cantons où les professions de foi
bilingues sont autorisées, ni pour ce qui est des modalités de
rédaction de ces propositions. Rien n'impose notamment que le texte en
allemand soit strictement identique au texte en français ou que les
photographies ou reproductions sur le texte en allemand soient les mêmes
que celles sur le texte en français.
Il y a dans ce domaine un total vide juridique et jusque récemment,
aucun contentieux n'avait fixé la jurisprudence. Répondant aux
questions écrites n° 51128 et 51221 (Journal Officiel de
l'Assemblée nationale du 9 décembre 1991), le ministre de
l'Intérieur fut cependant amené à préciser son
point de vue de la façon suivante : «
Le bilinguisme
des documents électoraux dans les départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et une partie de celui de la Moselle est un usage qui trouve son
origine dans la circulaire du président du Conseil, ministre de la
Guerre, évoquée par l'honorable parlementaire, confirmée
par des instructions verbales du ministre de l'Intérieur après la
Libération. Il ne se fonde donc sur aucun texte législatif ou
réglementaire, mais concerne en revanche toutes les élections
politiques. Cette tolérance permet de doubler les circulaires et
affiches établies en français par un document
rédigé en allemand. Il en découle que le document allemand
doit être la traduction du document français ; dans le cas
contraire, en effet, le candidat recourant au bilinguisme (ce qui reste
facultatif) diffuserait un nombre de documents électoraux double de
celui autorisé par le code électoral, lequel s'applique dans les
départements concernés comme ailleurs. Il reste que rien ne
paraît s'opposer à ce que, dans les affiches et circulaires
rédigées en allemand, certaines phrases ou certaines expressions
apparaissent en français, dès lors qu'elles ne feraient que
reprendre des phrases ou expressions figurant déjà dans la
version française. En revanche, les éventuelles photographies
doivent être identiques dans les deux versions, pour éviter que la
traduction ne se présente comme un document nouveau par rapport au texte
français ».
A la suite de cette réponse ministérielle, la Commission de
propagande du Bas-Rhin, pour les élections régionales de mars
1992, a estimé qu'elle devait faire preuve de rigueur et a refusé
les professions de foi de trois listes. La liste « Majorité
Présidentielle » dirigée par Gilbert Estève (PS)
n'avait pas traduit en français le slogan : « L'Alsace ne
s'est jamais faite sans courage ». La liste du Front National de
Walter Krieger avait laissé des phrases françaises dans le texte
allemand. Enfin, la liste de Théo Braun (France unie) avait
complété la partie allemande du texte par des photos du candidat
posant avec le Pape et avec le Président des États-Unis, la
légende étant en français (J.O. Sénat, questions
écrites n° 540 du 11 juillet 2002, 963 du 25 juillet 2002
et 2436 du 19 septembre 2002).
Les trois listes concernées ont dû réimprimer 700 000
professions de foi et un recours a été déposé
devant le Tribunal administratif de Strasbourg au motif qu'aucun texte
légal ne donnait à la Commission de propagande le pouvoir de
réglementer la mise en oeuvre du bilinguisme. Manifestement, il est tout
à fait anormal qu'il y ait dans ce domaine, une absence totale de
législation électorale. La présente proposition de loi a
pour but de remédier à cette carence.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
L'article L. 52-3 du code électoral est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les arrondissements des départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et de la Moselle où cet usage est actuellement
constaté, les candidats peuvent publier une profession de foi en
français et une autre en allemand. Un décret fixe la liste des
arrondissements concernés et les conditions de présentation
à respecter par les candidats ».