Instances représentatives des Français établis hors de France
N° 239
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 3 avril 2003
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
tendant à compléter et préciser le domaine de la loi en ce qui concerne les instances représentatives des Français établis hors de France ,
PRÉSENTÉE
Par M.
Christian COINTAT, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Jean-Pierre CANTEGRIT, Robert
DEL PICCHIA, Hubert DURAND-CHASTEL, Louis DUVERNOIS, André FERRAND et
Michel GUERRY,
Sénateurs.
( Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Français de l'étranger. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'article 4 de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003
relative à l'organisation décentralisée de la
République complétant l'article 39 de la Constitution consacre
solennellement l'existence des
« instances
représentatives »
des Français établis hors
de France qui doivent être régies par la loi.
La présente proposition de loi organique a pour objet de donner son
plein effet à cette innovation constitutionnelle dans l'esprit des
travaux préparatoires de la loi constitutionnelle du 23 mars 2003. Il
s'agit d'intégrer dans le domaine de la loi le statut des instances
représentatives des Français établis hors de France,
à l'instar des conseils des collectivités territoriales de la
République.
Actuellement, sauf en ce qui concerne les dispositions à
caractère électoral et quelques dispositions relatives au statut
des membres du Conseil supérieur des Français de
l'étranger (CSFE), le statut de ce conseil relevait du domaine
réglementaire, à la différence des conseils des
collectivités locales dont les compétences et les règles
d'organisation, et de fonctionnement relèvent du domaine
législatif en vertu de l'article 34 de la Constitution. Quant aux
comités et conseils créés, soit auprès du Ministre
des affaires étrangères, soit auprès des chefs de postes
consulaires, ils relèvent entièrement du domaine
réglementaire : décret ou même arrêté
ministériel.
Il n'est pas conforme à nos règles démocratiques que des
instances représentatives qui sont, en partie, l'équivalent pour
les Français de l'étranger des conseils des collectivités
territoriales ne soient pas complètement régies par la loi mais
relèvent de simples décrets ou arrêtés
ministériels, voire de simples circulaires, révocables ou
modifiables
ad nutum
par l'administration, sans concertation obligatoire
avec les élus ou les membres de ces conseils ou comités.
L'insertion dans l'article 39 de la Constitution d'une référence
expresse aux instances représentatives des Français de
l'étranger a eu pour objet de combler ce déficit
démocratique évident, particulièrement en ce qui concerne
le Conseil supérieur des Français de l'étranger dont 150
membres sont élus au suffrage universel direct.
Bien que l'article 39 de la Constitution dispose désormais que ces
instances représentatives sont régies par la loi, il a paru
indispensable de préciser et compléter le domaine de la loi en ce
qui les concerne. L'article 34 de la Constitution prévoit, en
effet :
« Les dispositions »
fixant le domaine
de la loi
« pourront être précisées et
complétées par une loi organique »
. Le terme
« compléter »
est ici parfaitement
clair : une loi organique peut étendre le domaine de la loi en y
incluant des matières autres que celles énumérées
par la Constitution et notamment par son article 34. Dans sa décision
n° 87-234 DC du 7 janvier 1988, le Conseil constitutionnel a
précisé que les lois organiques visées au dernier
alinéa de l'article 34 de la Constitution devaient avoir pour seul
objet :
« la détermination des matières qui
sont du domaine de la loi »
à l'exclusion des dispositions
« afférentes à la procédure
législative ».
Nous vous proposons, par conséquent, de préciser que la loi fixe
les règles concernant les compétences, l'organisation et le
fonctionnement des instances représentative des Français
établis hors de France ainsi que les garanties accordées à
leur membres pour l'exercice de leur mandat.
Le Gouvernement s'est déjà engagé sur le vote de cette loi
organique. Lors des travaux préparatoires de la loi constitutionnelle du
28 mars 2003, M. Patrick Devedjan, ministre délégué
aux libertés locales auprès du ministre de l'intérieur,
s'est engagé en termes précis à en accepter le vote au
printemps.
« il faut trouver une solution. On pourrait essayer des
la trouver dans le cadre de la loi organique qui suivra immanquablement le
vote de la réforme constitutionnelle ! Je propose à M.
Cointat d'engager une concertation sur ce sujet. Comme je l'ai dit à M.
Del Picchia, nous sommes à la disposition des élus des
Français de l'étranger pour essayer de trouver une solution (...)
J'ajouterai que la proposition du Gouvernement est honnête :
rendez-vous est pris, et il n'est pas renvoyé aux calendes puisque le
projet de loi organique sera examiné dès le premier trimestre de
l'année prochaine. M. Charasse, avec sa promptitude et sa
subtilité juridique habituelles, m'a précédé :
il est bien vrai que l'article 34 de la Constitution prévoit que les
dispositions qu'il contient peuvent être précisées et
complétées par une loi organique (...) Je propose, en attendant
l'examen du projet de loi organique, une concertation raisonnable avec les
représentants des Français de l'étranger »
(Sénat - Séance du 30 octobre 2002, article additionnel
après l'art. 1
er
, discussion de l'amendement n° 48
rectifié
ter
).
M. René Garrec, rapporteur de la commission des Lois a fait la
même proposition :
« Monsieur le président,
(...) les Français établis hors de France seraient (...)
mentionnés dans la Constitution. Pour le reste, il nous est apparu hier
en commission qu'une loi organique constituerait la bonne solution. »
(Ibid.).
En application du dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution,
l'article 1
er
de notre proposition intègre dans le
domaine de la loi la création, la composition, le régime
électoral, les compétences, l'organisation et le fonctionnement
des instances représentatives des Français établis hors de
France ainsi que les garanties dont ils disposent pour l'exercice de leur
mandat.
L'article 2
de notre proposition procède à des changements
d'ordre terminologique dans les lois organiques et autres textes
législatifs en vigueur. Le Conseil supérieur des Français
de l'étranger deviendrait « l'Assemblée des
Français de l'étranger » conformément aux voeux
de la Commission de la réforme du CSFE. Le bureau permanent du CSFE
deviendrait son bureau.
D'autres textes devront être envisagés lors des transferts de
compétence de l'Etat aux collectivités locales, afin qu'aucune
perte de droits n'en résulte pour les Français de
l'étranger.
Tels sont, Mesdames, Messieurs, les motifs de la présente proposition de
loi organique que nous vous demandons de bien vouloir adopter.
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
Article premier
La loi fixe les règles concernant la création, la composition, le régime électoral, les compétences, l'organisation et le fonctionnement des instances représentatives des Français établis hors de France mentionnées à l'article 39 de la Constitution ainsi que les garanties dont leurs membres disposent pour l'exercice de leur mandat.
Article 2
I. - Aux
troisième et quatrième alinéas de l'article 3 de la loi
n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du
Président de la République au suffrage universel et au premier
alinéa de l'article 5 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier
1976 sur le vote des Français établis hors de France pour
l'élection du Président de la République, les mots :
« le Conseil supérieur des Français de
l'étranger » et « du Conseil supérieur des
Français de l'étranger » et « du
Conseil » sont remplacés respectivement par les mots :
« l'Assemblée des Français de
l'étranger », « de l'Assemblée des
Français de l'étranger » et « de
l'Assemblée ».
II. - Au premier alinéa de l'article 5 de la loi organique
n° 76-97 du 31 janvier 1976 précitée, les termes :
« bureau permanent » sont remplacés par le
terme : « bureau ».
III. - Dans les dispositions législatives en vigueur, toute
référence au Conseil supérieur des Français de
l'étranger est remplacée par une référence à
l'Assemblée des Français de l'étranger et toute
référence à son bureau permanent est remplacée par
une référence à son bureau.