N° 62
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 novembre 2004 |
PROPOSITION DE LOI
tendant à lutter contre les violences à l'égard des femmes et notamment au sein des couples par un dispositif global de prévention, d'aide aux victimes et de répression,
PRÉSENTÉE
Par MM. Roland COURTEAU, Jean-Pierre BEL, Mmes Michèle ANDRÉ, Gisèle PRINTZ, M. Serge LAGAUCHE, Mmes Yolande BOYER, Monique CERISIER-ben GUIGA, Claire-Lise CAMPION, Jacqueline ALQUIER, MM. Claude LISE, Yannick BODIN, Mme Josette DURRIEU, MM. David ASSOULINE, Bernard ANGELS, Bertrand AUBAN, Mme Maryse BERGÉ-LAVIGNE, M. Jean BESSON, Mme Marie-Christine BLANDIN, MM. Jean-Marie BOCKEL, Didier BOULAUD, Mmes Alima BOUMEDIENE-THIERY, Nicole BRICQ, MM. Jean-Pierre CAFFET, Jean-Louis CARRÈRE, Bernard CAZEAU, Michel CHARASSE, Gérard COLLOMB, Pierre-Yves COLLOMBAT, Raymond COURRIÈRE, Yves DAUGE, Jean-Pierre DEMERLIAT, Mme Christiane DEMONTES, MM. Jean DESESSARD, Claude DOMEIZEL, Michel DREYFUS-SCHMIDT, Bernard DUSSAUT, Jean-Claude FRÉCON, Bernard FRIMAT, Charles GAUTIER, Jacques GILLOT, Jean-Pierre GODEFROY, Jean-Noël GUÉRINI, Claude HAUT, Odette HERVIAUX, Mme Sandrine HUREL, MM. Alain JOURNET, Mme Bariza KHIARI, MM. Yves KRATTINGER, André LABARRÈRE, Philippe LABEYRIE, Serge LARCHER, André LEJEUNE, Louis LE PENSEC, Mme Raymonde LE TEXIER, MM. Roger MADEC, Philippe MADRELLE, Jacques MAHÉAS, François MARC, Jean-Pierre MASSERET, Marc MASSION, Pierre MAUROY, Jean-Luc MÉLENCHON, Louis MERMAZ, Jean-Pierre MICHEL, Gérard MIQUEL , Michel MOREIGNE, Jean-Marc PASTOR, Daniel PERCHERON, Jean-Claude PEYRONNET, Jean-François PICHERAL, Bernard PIRAS, Jean-Pierre PLANCADE, Daniel RAOUL, Paul RAOULT, Daniel REINER, Thierry REPENTIN, Roland RIES, Gérard ROUJAS, André ROUVIÈRE, Mme Michèle SAN VICENTE, M. Claude SAUNIER, Mme Patricia SCHILLINGER, MM. Michel SERGENT, René-Pierre SIGNÉ, Jean-Pierre SUEUR, Simon SUTOUR, Mme Catherine TASCA, MM. Michel TESTON, Jean-Marc TODESCHINI, Pierre-Yvon TRÉMEL, André VANTOMME, André VÉZINHET, Marcel VIDAL, Mme Dominique VOYNET et M. Richard YUNG,
Sénateurs.
( Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Femmes. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La violence à l'encontre des femmes est un problème majeur qui concerne, tant la santé que les droits de la personne humaine. (Rapport Henrion, remis au ministre de la Santé, en février 2001).
L'Organisation Mondiale de la Santé (O.M.S.), reprenant les termes de l'Assemblée Générale des Nations Unies donne la définition suivante de la violence à l'égard des femmes : « tous actes de violences dirigés contre le sexe féminin et causant ou pouvant causer aux femmes, un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation de liberté... ».
Selon plusieurs enquêtes effectuées, depuis 1989, l'on constate que parmi les femmes accueillies pour coups et blessures volontaires :
- les victimes seraient plus nombreuses aujourd'hui, qu'il y a une dizaine d'années,
- la violence sur les enfants serait présente dans 10 % des cas, alors qu'elle était inexistante en 1989,
- les violences auraient lieu devant les enfants dans 68 % des cas,
- toutes les catégories sociales seraient concernées,
- seulement une femme sur onze aurait porté plainte.
Par ailleurs, selon une autre étude concernant les situations d'homicide sur les femmes, dans 31 % des cas, l'auteur de l'homicide est le mari, dans 20 % le partenaire, et seulement dans 15 % des cas, le meurtrier est inconnu de la victime.
Enfin, selon une Enquête Nationale sur les Violences Envers les Femmes en France (E.N.V.E.F.F.), portant sur un échantillon de 7 000 femmes, âgées de 20 à 59 ans, il résulte des données recueillies, entre mars et juillet 2000, que :
- 10 % des femmes avaient été victimes de violences au sein du couple, au cours des 12 derniers mois,
- les femmes les plus jeunes sont deux fois plus exposées que leurs aînées,
- de nombreuses femmes en ont parlé pour la première fois lors de l'enquête, (plus des 2/3 des femmes victimes de violences sexuelles avaient gardé le silence jusqu'alors et 39 % avaient caché les agressions physiques).
Il résulte de l'enquête que c'est dans la vie de couple que les femmes subissent le plus de violences physiques, psychologiques et sexuelles. Face à ces violences, tous les groupes sociaux sont exposés... mais les inégalités socio-économiques constituent, cependant, des facteurs aggravants... notamment, le chômage.
À noter que cette situation n'est pas propre à la France .
- Le rapport Henrion rappelle certaines études réalisées à l'étranger qui révèlent qu'au cours de leur vie, aux Pays-Bas, 26 % des femmes de 18 à 60 ans, déclarent avoir subi des violences physiques ou sexuelles au sein du couple. Elles sont 25 % au Canada, 21 % en Suisse, 22 % en Finlande. Et ... 14,2 % en Espagne, selon une enquête portant sur 20 000 femmes.
La fréquence des violences est plus faible en Europe du Sud Ouest, qu'en Europe du Nord et qu'en Europe de l'Est. Elle augmente avec l'inactivité du conjoint... et le jeune âge de la femme.
Selon l'O.M.S, les victimes de violences au sein du couple perdent entre une et quatre années de vie en bonne santé.
- De plus, les victimes de violences feraient 5 fois plus de tentatives de suicide par rapport à la population dans son ensemble.
- Selon le ministère de l'Intérieur, trois femmes meurent, du fait de violences au sein du couple, tous les 15 jours (données 2000-2001). On en dénombrerait 20 par mois, selon une enquête publiée cet été dans un quotidien national.
- On notera que les dépressions sont fréquentes et frappent plus de 50 % des victimes.
- De même, les violences retentissent à la fois sur la mère et sur le foetus (25 % des morts maternelles sont dues à des violences).
Il est donc clair que la violence à l'égard des femmes constitue bien un problème majeur, tout autant de santé publique que de respect pour la personne humaine .
LE TEMPS EST VENU DE LUTTER RÉSOLUMENT CONTRE DE TELS COMPORTEMENTS
Pourtant, les violences au sein du couple ont très longtemps constitué un sujet tabou dans notre pays. Il a fallu attendre le troisième millénaire pour qu'une enquête approfondie montre qu'une femme sur dix en serait victime, aujourd'hui, en France.
Le temps est venu de lutter résolument contre de tels comportements. Il s'agit là d'un préalable à tout approfondissement durable de l'égalité des sexes, de l'épanouissement des couples et de l'équilibre de leurs enfants .
Un certain nombre d'initiatives parlementaires ont été prises dans ce domaine. Deux d'entre elles méritent une attention particulière :
- la proposition de loi n° 1124 (douzième législature) de Mme Muguette Jacquaint relative à la lutte contre les violences conjugales formule des recommandations particulièrement pertinentes afin, d'une part, d'améliorer l'accueil, la protection et le suivi des femmes victimes de violences conjugales et, d'autre part, de promouvoir une égalité de traitement entre les violences au sein des couples mariés, liés par un pacte de solidarité ou vivant en concubinage ;
- la proposition de loi n° 847 (douzième législature) de Mme Ségolène Royal sur la prévention des violences faites aux femmes vise, pour sa part, à « rendre leur parole aux victimes de violences sexuelles » et préconise, en particulier, au titre de la protection des femmes victimes de violences conjugales, un certain nombre de mesures tendant à permettre leur maintien à domicile, ainsi qu'une plus grande sévérité dans les modalités de calcul des délais de prescription en cas d'agression sexuelle ou de violence.
L'objet de la présente proposition est de compléter ces divers apports et de les réunir dans un programme d'ensemble. En effet, seul un dispositif global de répression, de prévention et d'aide aux victimes de violences au sein du couple est à la mesure d'un phénomène d'une telle ampleur, pour imposer une tolérance zéro.
UNE RÉPRESSION PLUS DISSUASIVE
En premier lieu, les sanctions des violences dans les couples doivent être plus dissuasives .
Certains de nos voisins européens, comme l'Espagne, ont récemment décidé de renforcer leur arsenal répressif en la matière pour donner un coup d'arrêt à ces violences.
Ainsi, l'article 153 du livre II du code pénal espagnol, relatif aux délits, prévoit une peine de prison de six mois à trois ans à l'encontre de toute personne qui se livre de façon habituelle à des actes de violence physique ou psychologique sur son conjoint, son ex-conjoint, son concubin ou son ex-concubin. L'article premier du présent texte introduit un dispositif comparable dans notre droit pour incriminer les diverses formes de violence qui se développent de manière répétée au sein des couples (trois ans d'emprisonnement). Il convient de noter que ce nouveau dispositif s'ajoute à la répression des violences ponctuelles prévues et punies par l'article 222-13 du code pénal.
Notre droit comporte, par ailleurs, un certain nombre d'outils juridiques permettant de sanctionner les violences conjugales et d'apporter un soutien à leurs victimes. Cependant, certaines interdictions méritent d'être mieux mises en évidence dans notre droit pénal afin de renforcer leur effet dissuasif.
Il en va ainsi, du viol entre époux, concubins et partenaires liés par un P.A.C.S.
De manière générale, il convient de noter que la répression du crime de viol a été sensiblement aggravée par le nouveau code pénal puisque celui-ci est désormais puni de quinze ans de réclusion criminelle . Cependant, la loi ne mentionne pas explicitement le cas du viol entre époux.
Certes, une circulaire interministérielle (MES 99-280/SDEF n° 980014 du 8 mars 1999) relative à la lutte contre les violences à l'encontre des femmes au sein du couple rappelle que la chambre criminelle de la Cour de Cassation a admis, à deux reprises, qu'il pouvait y avoir viol entre époux. En effet, dans un arrêt de principe du 5 septembre 1990, cette haute juridiction a affirmé que « l'article 332 [aujourd'hui 222-23] du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 23 décembre 1980, qui n'a d'autres fins que de protéger la liberté de chacun, n'exclut pas de ses prévisions les actes de pénétration sexuelle entre les personnes unies par les liens de mariage lorsqu'ils sont imposés dans les circonstances prévues par ce texte ». La chambre criminelle a eu ensuite l'occasion d'affiner sa jurisprudence sur ce point, par un arrêt du 11 juin 1992 : elle a admis qu'il existait, du fait du mariage, une présomption de licéité des rapports sexuels entre époux, mais a surtout affirmé que cette présomption n'était pas irréfragable et pouvait être combattue par des preuves contraires, établies par tout moyen .
Dans le même esprit, l'article 2 de la présente proposition de loi vise à incriminer le viol entre époux en le mentionnant spécifiquement dans le code pénal. Il en va de même entre concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
L'article 3 vise, pour sa part, à combler un vide juridique en étendant aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, les dispositions pénales prévues pour réprimer les conjoints et les concubins violents.
Le code pénal prévoit, en effet, que la qualité de conjoint ou de concubin de la victime constitue une circonstance aggravante en cas d'atteinte volontaire à l'intégrité de la personne. La loi pénale vise spécifiquement les tortures ou actes de barbarie (art. 222-1 du code pénal), les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner (art. 222-7), les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (art. 222-9), les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours (art. 222-11) et les violences n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours (art. 222-13). Conformément à la proposition de loi n° 1124 (douzième législature) de Mme Muguette Jacquaint, relative à la lutte contre les violences conjugales, il paraît tout à fait équitable d'étendre ces mesures aux couples « pacsés ».
LA PREVENTION
Au titre de la prévention, qui constitue le second volet de la présente proposition, le I de l'article 4 prévoit, tout d'abord, de dispenser dans les collèges et les lycées une information sur les violences au sein des couples à raison d'au moins une séance annuelle.
- Ces séances pourront associer les personnels contribuant à la répression des violences à l'égard des femmes, à l'aide aux victimes, ainsi que tout autre intervenant extérieur. On relèvera sur ce point, comme sur d'autres, l'initiative particulièrement positive du Centre de Documentation, d'Information des Femmes et de la Famille (C.E.D.I.F.F.) de l'Aude.
En complément de cette information diffusée à tous les élèves, il convient de renforcer les campagnes générales de sensibilisation (par voie de presse, radio, télévision) à toutes les formes de violence au sein des couples. Une résolution adoptée en décembre 1999 par l'assemblée générale des Nations unies a proclamé le 25 novembre « Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
Dans le prolongement de cette initiative internationale, le II de l'article 4 prévoit d'instituer une journée nationale d'information et de prévention, par voie de presse, radio, télévision..., sur les violences à l'égard des femmes en général, et au sein des couples, en particulier.
Toujours sur le volet concernant la prévention, il convient de relever que dans 24 % des cas, la victime se confie, en premier lieu, au médecin ou aux associations quand elles existent bien avant de s'adresser à la police, à la gendarmerie ou à la justice.
Certaines études démontrent que les médecins considèrent légitimement que ces situations sont difficiles à gérer. « Les praticiens étant pris entre leur devoir de protection de la santé de leurs patientes et les impératifs du secret professionnel ».
Selon le même rapport Henrion, « la priorité est donc de convaincre les médecins qu'ils occupen t une position clé pour dépister les violences conjugales, conseiller les femmes, prévenir l'escalade de la violence et éviter les drames... ».
- Ainsi, l'article 5 pose le principe de la formation de tous les acteurs sociaux, médicaux et judiciaires afin d'améliorer l'accueil, la protection et le suivi des victimes de violences conjugales.
Dans un souci de prévention, de dépistage et de protection des victimes de violences conjugales, il est proposé de sensibiliser, notamment dans les programmes de formation initiale et continue, un certain nombre de personnels au service de la médecine, de la police ou de la justice.
L'article 6 a pour objet de protéger la victime en permettant explicitement au juge d'ordonner l'éloignement de l'agresseur du domicile du couple et d'obliger l'auteur des violences à se soumettre à une prise en charge thérapeutique adaptée.
À cette fin, il apporte deux précisions à l'article 138 du code de procédure pénale, le contrôle judiciaire pouvant être ordonné par le juge d'instruction ou par le juge des libertés et de la détention, si la personne mise en examen encourt une peine d'emprisonnement correctionnel ou une peine plus grave. Ce contrôle astreint la personne concernée à se soumettre, selon la décision du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention, à une ou plusieurs obligations énumérées par la loi. Parmi les seize cas prévus par l'article 138 précité on relève deux obligations spécifiques :
- 3° Ne pas se rendre en certains lieux ou ne se rendre que dans les lieux déterminés par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention.
- 10° Se soumettre à des mesures d'examen, de traitement ou de soins, même sous le régime de l'hospitalisation, notamment aux fins de désintoxication.
La présente proposition prévoit de compléter ces deux alinéas afin de marquer l'importance de leur utilisation en matière de violences au sein des couples.
LA LUTTE CONTRE LE SEXISME ET LES IMAGES DÉGRADANTES DE LA FEMME
Par ailleurs, afin de lutter contre les images dégradantes de la femme dans la publicité et contre les représentations incitant à la violence ou au sexisme, l'article 7 vise à faciliter la surveillance et l'intervention, en tant que partie civile, des associations qui ont pour objet de combattre les violences ou les discriminations fondées sur le sexe ou d'assister les victimes de ces violences.
L'AIDE AUX VICTIMES
L'amélioration de l'aide apportée aux victimes doit, enfin, compléter le renforcement de la répression et de la prévention des violences au sein du couple.
Les articles 8 et 9 visent à améliorer l'aide juridique accordée aux victimes d'agressions sexuelles ou physiques . Pour les victimes mineures, l'article 9 prévoit l'automaticité du bénéfice de l'aide juridictionnelle, sans considération des ressources dont disposent leurs parents ou tuteurs légaux. Pour l'ensemble des bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, mineures ou majeures, l'article 10 a pour objet de garantir la présence d'avocats formés à l'assistance aux justiciables victimes de violences sexuelles .
L'article 10 prévoit de donner les moyens financiers aux victimes pour faire face aux séquelles sociales, physiques et psychologiques provoquées par les violences au sein du couple.
Dans le droit en vigueur, l'article 706-3 du code de procédure pénale prévoit un recours en indemnité ouvert à certaines victimes de dommages résultant d'une infraction. Il permet, sans aucune condition de ressources, d'obtenir une réparation intégrale des dommages subis notamment par les victimes d'un viol, d'une agression sexuelle, d'un attentat à la pudeur ou d'une agression ayant entraîné une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail au moins égale à un mois.
La proposition de loi vise à intégrer de manière explicite dans le champ de cette possibilité d'indemnisation, outre celles visées par l'article 3 de la présente proposition, les infractions, au sein du couple : de meurtre (article 221-1 du code pénal), d'assassinat (article 221-3), d'administration de substances nuisibles (article 222-15), ainsi que les appels téléphoniques malveillants réitérés (article 222-16), les menaces de commettre un crime ou un délit (articles 222-17 et 222-18 ), le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente (article 223-1), le fait d'entraver volontairement l'arrivée de secours (article 223-5) et le fait d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer une personne (article 224-1).
L'article 11 pose enfin un principe : les victimes, ayant subi des violences délictuelles au sein du couple et ayant entraîné, une incapacité durable, relèvent de la solidarité nationale, dans la mesure où la victime ne bénéficie plus de ressources suffisantes. Il en tire également les conséquences en prévoyant une aide financière de l'État et un dispositif facilitant leur accès à un emploi public ou salarié adapté, dans des conditions déterminées par décret.
Tels sont, Mesdames et Messieurs, les motifs de la proposition de loi qui vous est soumise.
PROPOSITION DE LOI
CHAPITRE I ER
Aggravation des peines
Article 1 er
Après l'article 222-13 du code pénal, il est inséré un article 222-13-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-13-1 .- Est puni d'une peine d'emprisonnement de trois ans le fait par toute personne de se livrer de façon habituelle à des actes de violence physique ou psychologique sur son conjoint, son ex-conjoint, son concubin ou son ex-concubin et, dans le cadre d'un pacte civil de solidarité, son partenaire ou son ex-partenaire. »
Article 2
L'article 222-23 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La présomption de licéité des rapports sexuels entre époux peut être combattue par des preuves contraires établissant, par tout moyen, un viol. Il en va de même entre concubins ou entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité. »
Article 3
Le 6 o de l'article 222-3 du code pénal, le 6 o de l'article 222-8, le 6 o de l'article 222-10, le 6 o de l'article 222-12 et le 6 o de l'article 222-13, sont remplacés par l'alinéa suivant : « 6° par le conjoint de la victime, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ».
CHAPITRE II
Prévention des violences au sein du couple
et
formation des personnels au contact des victimes
Article 4
I.- Après l'article L. 312-17 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 312-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 312-17-1 .- Une information sur les violences au sein des couples est dispensée dans les collèges et les lycées à raison d'au moins une séance annuelle. Ces séances pourront associer les personnels contribuant à la répression des violences conjugales et à l'aide aux victimes ainsi que d'autres intervenants extérieurs. »
II.- Il est institué une journée nationale de sensibilisation aux violences au sein des couples. Cette journée est fixée au 25 novembre, en coordination avec la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
Article 5
Les médecins, ainsi que l'ensemble des personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats et les personnels de la police nationale et de la gendarmerie nationale, reçoivent une formation initiale et continue propre à leur permettre d'assister les victimes de violences conjugales et de prendre les mesures nécessaires de prévention et de protection qu'elles appellent. Cette formation est dispensée dans des conditions fixées par décret.
Article 6
L'article 138 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
I.- Au 3 o , après les mots : « ne pas se rendre en certains lieux », sont insérés les mots : « notamment au domicile du couple en cas de violences entre conjoints, concubins ou partenaires liés par un pacte de solidarité, ».
II.- Dans le 10 o , après les mots : « hospitalisation notamment aux fins de », sont insérés les mots: « prévention des violences au sein des couples ou ».
Article 7
Il est inséré, après l'article 48-3 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un article ainsi rédigé :
« Art. 48-4 .- Toute association se proposant, par ses statuts, de combattre les violences ou les discriminations fondées sur le sexe ou d'assister les victimes de violences au sein du couple peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit prévu par le deuxième alinéa de l'article 24. »
CHAPITRE III
Aides spécifiques aux victimes de violences au sein du couple
Article 8
L'article 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les mineurs victimes d'agressions physiques ou sexuelles peuvent bénéficier de l'aide juridictionnelle sans considération des ressources dont disposent leurs parents ou tuteurs légaux ».
Article 9
Après le premier alinéa de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991 précitée, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La victime a droit au concours d'un avocat formé à l'assistance aux justiciables victimes de violences sexuelles, notamment mineurs. »
Article 10
Le 2 o de l'article 706-3 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« - soit ont été commis à l'égard d'un conjoint, d'un concubin ou d'un partenaire lié par un pacte civil de solidarité dans le cadre des articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12, 222-13, 221-1, 221-3, 222-15, 222-16, 222-17, 222-18, 223-1, 223-5, 224-1 du code pénal ».
Article 11
Les victimes qui ont subi, au sein de leur couple, des violences de nature sexuelle, physique ou psychologique ayant entraîné une incapacité d'une durée supérieure à six mois relèvent de la solidarité nationale. Dans la mesure où la victime ne bénéficie plus de ressources suffisantes, elle peut prétendre à une aide financière de l'État et à un dispositif facilitant son accès à un emploi public ou salarié adapté, dans des conditions déterminées par décret.
Article 12
Les conséquences financières entraînées par l'application de la présente loi sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.