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N° 39
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 octobre 2008 |
PROPOSITION DE LOI
visant à prolonger l' application des articles 3 , 6 et 9 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers ,
PRÉSENTÉE
Par M. Hubert HAENEL,
Sénateur
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (LAT) apporte la réponse la plus opérationnelle possible à la menace terroriste, tant dans le domaine de la prévention qu'en matière de répression des actes de terrorisme. Elle vise également à contribuer à l'efficacité du dispositif de sécurité afin de concourir à la préservation de l'ordre public et à l'amélioration des contrôles frontaliers.
Elle comporte donc, à ce titre, certaines dispositions qui concernent la police administrative et d'autres, la répression des actes du terrorisme. Les articles 3, 6 et 9 qu'il s'agit de proroger jusqu'au 31 décembre 2012 relèvent des dispositions de police administrative. Le rapport annuel 2008 d'application de la loi du 23 janvier 2006 démontre leur pertinence opérationnelle et leur efficacité. Par ailleurs, leur mise en oeuvre n'a donné lieu à aucune contestation devant les services de la justice.
Ces trois articles concernent les contrôles d'identité à bord des trains internationaux, la réquisition de certaines données relatives à des communications électroniques et l'accès, par les services chargés de la lutte contre le terrorisme, à des fichiers de police administrative.
L' article 3 de la LAT prévoit les contrôles d'identité préventifs (article 78-2 CPP - Schengen) dans les trains transfrontaliers sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des 20 kilomètres de la frontière et sur certaines lignes internationales entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des 50 kilomètres suivants. L'arrêté ministériel désignant les lignes et arrêts concernés par ce nouveau dispositif a été pris le 26 avril 2006 et publié au Journal officiel le 10 mai 2006.
Cette disposition a d'ores et déjà été largement utilisée par le Service National de la Police Ferroviaire (SNPF) sur les liaisons ferroviaires avec l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la Suisse et l'Italie. Des patrouilles mixtes ont été créées et ont permis de nombreuses interpellations.
L' article 6 de la LAT prévoit la réquisition administrative des données de connexion relatives aux utilisateurs de communications électroniques afin de faciliter la prévention des actes terroristes par la collecte et la vérification rapide de renseignements opérationnels relatifs aux personnes susceptibles de se livrer à de tels actes.
Le 2 mai 2007, l'unité de coordination de la lutte anti terroriste (UCLAT) a mis en oeuvre une plateforme de gestion des demandes de données techniques adressées aux opérateurs de téléphonie, aux sociétés de commercialisation et de services ou aux fournisseurs d'accès Internet, conformément aux dispositions de l'article 6.
Les données pouvant faire l'objet de cette demande sont limitées aux données techniques relatives à l'identification des numéros d'abonnement ou de connexion à des services de communications électroniques, au recensement de l'ensemble des numéros d'abonnement ou de connexion d'une personne désignée, aux données relatives à la localisation des équipements terminaux utilisés ainsi qu'aux données techniques relatives aux communications d'un abonné portant sur la liste des numéros appelés et appelants, la durée et la date de la communication.
Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision d'une personnalité qualifiée, désignée pour une durée de trois ans renouvelable par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), sur proposition du ministre de l'intérieur. Autorité administrative indépendante, la CNCIS peut à tout moment procéder à des contrôles relatifs aux opérations de communication des données techniques et saisir le ministre de l'intérieur de recommandations lorsqu'elle constate un manquement aux règles définies précédemment ou une atteinte aux droits et libertés.
La plateforme UCLAT centralise les demandes de données techniques de connexion émanant des directions centrales habilitées, ainsi que de la gendarmerie nationale. Depuis le 2 mai 2007, 49 896 demandes ont été validées et envoyées aux opérateurs.
Le traitement des demandes par la plateforme se fait en temps réel par un suivi en continu dès réception et après décision de la personnalité qualifiée. Chaque requête est traitée afin d'être adressée à l'opérateur de communication électronique (OCE) le jour même de son émission. Depuis la mise en oeuvre de la plateforme, le délai de réponse par les OCE peut varier entre quelques heures (le jour même de l'envoi) et 5 à 6 jours selon la nature de la demande, la capacité de l'opérateur saisi et sa promptitude à se conformer aux obligations de l'article 6.
Les différentes investigations à caractère administratif conduites en application de cet article ont également permis de vérifier et de discriminer de nombreux renseignements. Les résultats obtenus ont permis de répondre à des interlocuteurs internationaux associés dans la lutte anti-terroriste pour certains réseaux (Espagne, Allemagne, Turquie, Sri Lanka, Europol, Interpol...) et de procéder à des vérifications sur des suspicions qui ne doivent pas être négligées en raison du danger potentiel de certains individus ou réseaux.
L' article 9 de la LAT a pour objet de définir les dispositions relatives à des traitements automatisés de données à caractère personnel dont la consultation est nécessaire à la prévention du terrorisme.
À ce titre, il donne la possibilité aux services spécialement chargés de la lutte contre le terrorisme d'accéder dans le cadre de la police administrative, à différents traitements automatisés existants (l'immatriculation des véhicules, le permis de conduire, les cartes nationales d'identité et les passeports) ou prévus par le code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, conformément à la loi « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978 et sous contrôle de la Commission nationale informatique et libertés.
L'utilisation de ces dispositions a permis de mettre à jour des faux documents réalisés par certains réseaux (ETA, islamistes ...) et de vérifier ou d'obtenir des éléments d'identité d'individus mis en cause dans des affaires judiciaires. Elle a permis également un gain de temps précieux s'agissant des vérifications des éléments d'enquête ou des renseignements souvent nombreux et longs à rechercher auprès des services préfectoraux ou même parfois impossibles à obtenir des opérateurs.
En l'état actuel, une prorogation de l'application des articles 3, 6 et 9 jusqu'au 31 décembre 2012 paraît nécessaire et adaptée et ce, dans un souci toujours constant de concilier la nécessité de lutter contre le terrorisme avec le respect des libertés individuelles.
L'ensemble de ces mesures s'inscrivent dans un cadre constitutionnel bien défini puisque le Conseil constitutionnel avait admis dans sa décision n° 2005-532 du 19 janvier 2006 que cette loi effectuait la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes et des biens, et la recherche des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde des droits et de principes de valeur constitutionnelle et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties telles que la liberté d'aller et venir, le secret des correspondances et le respect de la vie privée.
Tel est l'objet de la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
Dans le premier alinéa de l'article 32 de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, les mots : « jusqu'au 31 décembre 2008 » sont remplacés par les mots : « jusqu'au 31 décembre 2012 ».