Encourager à développer l'initiative « universités européennes » (PPRE) - Texte déposé - Sénat

N° 53

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 octobre 2024

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE


au nom de la commission des affaires européennes,
en application de l’article 73 quater du Règlement,


encourageant à développer l’initiative « universités européennes »,


présentée

Par Mme Karine DANIEL et M. Ronan LE GLEUT,

Sénatrice et Sénateur


(Envoyée à la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport.)




Proposition de résolution européenne encourageant à développer l’initiative « universités européennes »

Le Sénat,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier ses articles 6 et 165,

Vu les conclusions du Conseil du 10 juin 2021 sur l’initiative « universités européennes » – « Mettre en relation l’enseignement supérieur, la recherche, l’innovation et la société pour jeter les bases d’une nouvelle dimension pour l’enseignement supérieur » 2021/C 221/03,

Vu les conclusions du Conseil européen du 14 décembre 2017 ;

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 18 janvier 2022 sur une stratégie européenne en faveur des universités, COM (2022) 16 final,

Vu la recommandation au Conseil du 5 avril 2022 visant à jeter des ponts pour une coopération européenne efficace en matière d’enseignement supérieur, 2022/C 160/01,

Vu les conclusions du Conseil du 24 avril 2022 sur une stratégie européenne visant à renforcer les établissements d’enseignement supérieur pour l’avenir de l’Europe, 2022/C 167/03,

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 27 mars 2024 sur un schéma directeur pour un diplôme européen commun, COM (2024)144 final,



Vu la proposition de recommandation du Conseil du 27 mars 2024 relative à des carrières attrayantes et durables dans l’enseignement supérieur, COM (2024) 145 final,



Vu la proposition de recommandation du Conseil du 27 mars 2024 pour un système européen d’assurance et de reconnaissance de la qualité dans l’enseignement supérieur, COM (2024)147 final,



Vu les communiqués de Rome du 19 novembre 2020 et de Tirana du 30 mai 2024, adoptés lors de la conférence ministérielle de l’espace européen de l’enseignement supérieur,



Considérant le succès rencontré par l’initiative « universités européennes », les cinq appels à projets lancés par la Commission européenne ayant permis la constitution de 64 alliances d’universités européennes, un chiffre supérieur à l’objectif fixé de 60 alliances d’ici mi-2024 ;



Considérant que cette initiative couvre un champ large d’établissements et de pays, puisque 574 établissements représentant 35 pays sont impliqués dans ces 64 universités européennes ;



Considérant que les établissements français ont pris une part active à cette initiative, 64 d’entre eux étant représentés dans 55 universités européennes, et qu’ils ont été soutenus par un financement national complémentaire essentiel ;



Considérant que la diversité des modèles d’alliances constatée dépend de la stratégie d’intégration des établissements, et reflète notamment l’hétérogénéité de leur périmètre d’action, de leurs champs disciplinaires, de leur gouvernance et de leur mode de diplomation ;



Considérant que cette diversité – cohérente avec la volonté de la Commission européenne d’offrir de l’autonomie aux établissements – est une des richesses et un des éléments de réussite de l’initiative ;



Considérant les premiers résultats des projets pilotes de la Commission européenne sur la question du diplôme européen et du statut des alliances ;



Considérant l’effet « transformateur » de cette initiative pour les établissements concernés, notamment français, dans la mesure où elle offre de nouvelles opportunités à toute la communauté universitaire (étudiants, enseignants et personnel administratif), élargit et diversifie l’offre pédagogique, accroît l’attractivité à l’international des établissements participants, et contribue à la promotion des valeurs et de l’identité européenne ;



Considérant par ailleurs que le développement des alliances souffre d’un financement incertain qui questionne leur modèle économique ;



Considérant l’insuffisante prise en compte du volet recherche des établissements, qui constitue le « parent pauvre » de l’initiative ;



Considérant la fragilité du modèle de gouvernance des alliances, l’absence de structure ou de statut adapté pouvant entraver leur développement ;



Considérant la complexité de la mise en œuvre des programmes et diplômes conjoints – non résolue par le processus de Bologne – en raison d’un recours inégal aux outils de ce processus, mais également des divergences nationales existantes en matière d’éducation ou des obstacles normatifs internes à chaque État membre, notamment en France ;



Considérant l’insuffisante reconnaissance de l’engagement du personnel universitaire dans l’initiative des alliances européennes, et plus généralement dans les programmes de coopération transnationale ;



Considérant les autres freins au développement des alliances, comme l’implication différente des partenaires de l’alliance, la mobilisation parfois difficile de la communauté universitaire, y compris des étudiants parfois peu conscients du dispositif, la non-adaptation de certains équipements informatiques ou le faible niveau de compétence en anglais, notamment des personnels et étudiants français ;



Considérant que les objectifs ambitieux de la Commission européenne semblent difficilement réalisables à court terme, au regard notamment des difficultés identifiées – dont certaines, concernant les programmes conjoints, existent depuis longtemps ;



Estime nécessaire d’inscrire l’initiative des « universités européennes » dans le temps long en incluant à terme tous les établissements volontaires et en conservant une souplesse de mise en œuvre des alliances ;



Salue les trois textes présentés par la Commission européenne le 27 mars 2024(1) – et notamment la communication concernant le diplôme européen commun – qui contribueront au développement des alliances, sous réserve de certaines clarifications ;



Appelle à passer d’une logique de « projet » à une logique de long terme plus structurante, par une pérennisation des financements, une simplification de la coopération, une facilitation de la gouvernance et une promotion des programmes conjoints, de la reconnaissance de l’engagement du personnel et des outils numériques ;



Sur les obstacles à lever pour garantir le développement des alliances :



Demande la pérennisation et la simplification du modèle de financement des alliances, par le biais notamment d’un allongement de la durée des financements, à caler sur celle du cadre financier pluriannuel, et d’un contrat pluriannuel entre les alliances, les États membres et l’Union européenne ;



Souligne que l’initiative devrait mieux prendre en compte le volet recherche des établissements d’enseignement supérieur, en liant les stratégies de formation des alliances à une stratégie cohérente de recherche et d’innovation, et en offrant aux établissements un meilleur accès aux financements ;



Plaide pour la mise en place d’un mode de gouvernance et/ou d’un statut juridique pour le développement des alliances, qui soit adapté aux objectifs et spécificités de chacune d’entre elles et qui garantisse la représentation étudiante au sein de leurs instances gouvernantes ;



Recommande une meilleure reconnaissance de l’engagement du personnel universitaire dans des activités de coopération transnationale, et notamment dans les alliances d’universités européennes, par exemple, par des dotations spécifiques aux établissements ou des politiques de primes ;



Appelle à encourager la mise en place des programmes et diplômes conjoints, dans le cadre du processus de Bologne, d’une part via un recours accru à l’approche européenne d’assurance qualité et une réforme des lignes directrices (ESG – European Standards and Guidelines) pour y inclure une dimension recherche et employabilité et d’autre part, via une simplification des réglementations nationales, sur la base d’une coopération entre États membres, en veillant au respect de certaines spécificités nationales ;



Invite à des modifications des règles françaises, sur le modèle de certains pays comme l’Espagne, pour faciliter la mise en œuvre de diplômes conjoints, par exemple par une accréditation automatique de diplômes conjoints évalués selon l’approche européenne d’assurance qualité ou par des dérogations permettant de contourner les obstacles identifiés (crédits ECTS, parchemin unique, droits d’inscription…), tout en veillant au respect des spécificités nationales et du principe de subsidiarité ;



Sur la mise en place du diplôme européen, outil nécessaire pour lever les obstacles liés aux diplômes conjoints :



Estime que la proposition de la Commission européenne de mettre en place un label ou diplôme européen constitue un outil nécessaire pour encourager la mise en place de diplômes conjoints ;



Soutient l’approche progressive proposée par la Commission européenne consistant à passer d’abord par une phase intermédiaire couverte par l’attribution d’un label, pour mener à un diplôme conjoint européen ;



Salue également la proposition de la Commission de faire reposer ce label/diplôme européen sur des critères européens communs (sans ajout de critères nationaux) et une procédure d’accréditation simplifiée et invite à compléter ces critères afin de garantir le niveau de qualité des futurs diplômes européens, notamment par les deux critères utilisés dans le cadre du processus d’accréditation en France, à savoir l’adossement à la recherche et l’insertion professionnelle ;



Soutient la proposition de la Commission de confier l’évaluation des programmes conjoints à une agence nationale accréditée, qui conduirait à une reconnaissance automatique du label ou du diplôme européen dans le cadre des alliances, en s’appuyant sur des outils déjà existants du processus de Bologne et sur l’évaluation par les agences nationales existantes et propose une règle harmonisée de désignation de l’agence en charge de la procédure d’assurance qualité au niveau européen, qui pourrait revenir à l’établissement coordinateur de l’alliance ou du projet Erasmus Mundus ;



Considère indispensable une action coordonnée des États membres pour avancer vers un label et surtout vers un diplôme européen, au risque de voir persister les divergences nationales, qui constituent autant de blocages à l’élaboration de diplômes conjoints ;



Estime cependant nécessaire, dans la perspective de la mise en place de ce label ou diplôme européen, de veiller au respect du principe de subsidiarité et des spécificités des États membres et de prendre le temps nécessaire pour évaluer l’impact de tels dispositifs sur le cadre légal national, en tenant compte des éventuelles craintes des étudiants et des établissements d’enseignement supérieur ;



Insiste notamment sur l’importance de prévoir que les critères de ce futur label ou diplôme européen soient suffisamment flexibles pour s’adapter aux contextes nationaux différents, et garantissent un niveau de qualité suffisant des diplômes ;



Juge que ce futur diplôme européen ne devra en aucun cas remplacer les diplômes nationaux, et devra s’insérer dans l’architecture nationale existante, comme le prévoit l’actuelle proposition de la Commission européenne ;



Invite à encourager la mise en place d’un tel diplôme via par exemple un engagement accru des partenaires socio-économiques et une communication ciblée envers les étudiants ;



Sur la généralisation souhaitable des alliances :



Estime nécessaire d’encourager d’autres formes de coopération que les programmes conjoints, les alliances constituant un cadre idéal de mise en œuvre d’approches alternatives de formations et de coopérations universitaires européennes, telles que l’internationalisation des programmes nationaux, la pratique des micro-certifications, ou le développement des mobilités virtuelles ou hybrides ;



Soutient une généralisation du système des alliances européennes, offrant l’opportunité à tous les établissements qui le souhaitent d’en rejoindre une ;



Invite aussi à miser sur les autres outils de la coopération européenne en matière d’enseignement supérieur, notamment :



– en ne réservant pas les projets de label et de diplôme européen aux établissements membres des alliances ;



– en encourageant les autres manières de collaborer entre établissements d’enseignement supérieur, comme la coopération bilatérale ou les alliances transfrontalières existantes ;



Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations sur les trois textes présentés par la Commission européenne le 27 mars 2024, et sur le prochain cadre financier pluriannuel.

                                         

(1) Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 27 mars 2024 sur un schéma directeur pour un diplôme européen commun, COM (2024)144 final, proposition de recommandation du Conseil du 27 mars 2024 relative à des carrières attrayantes et durables dans l’enseignement supérieur, COM (2024) 145 final, proposition de recommandation du Conseil du 27 mars 2024 pour un système européen d’assurance et de reconnaissance de la qualité dans l’enseignement supérieur, COM (2024)147 final.

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