Financement de la sécurité sociale pour 2002
PROJET DE
LOI
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N° 24
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PROJET
DE LOI
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Le Sénat a adopté, en nouvelle lecture, la motion, opposant la question préalable à la délibération du projet de loi, dont la teneur suit : |
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numéros
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En
application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le
Sénat,
Considérant que le présent projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2002 a été
élaboré dans la plus grande improvisation, comme l'atteste le
dépôt par le Gouvernement d'un nombre élevé
d'amendements modifiant, en cours de navette parlementaire, la physionomie
même du texte initial ;
Considérant qu'il confirme et amplifie les montages financiers et les
errements déjà dénoncés, les années
précédentes, par la Haute Assemblée et n'a, au total, pour
objectif principal que d'accroître la contribution de la
sécurité sociale au financement d'une dispendieuse politique de
l'emploi dont l'Etat n'entend pas ou ne peut assumer la charge sur son propre
budget ;
Considérant que ces ponctions réalisées par
l'intermédiaire du Fonds de financement de la réforme des
cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)
dépouillent la sécurité sociale des recettes fiscales et
des réserves financières qui lui sont indispensables pour faire
face à un avenir désormais incertain ;
Considérant que ces ponctions sont contraires aux engagements
mêmes pris par le Gouvernement, selon lesquels le financement des
allégements de cotisations sociales patronales devait demeurer
« neutre » pour la sécurité sociale ;
Considérant qu'elles se traduisent, en outre, dans le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2002 par le recours
à des procédés dont la régularité même
soulève de graves questions de principe ;
Considérant, à cet égard, que l'imputation, sur les
comptes d'un exercice clos, en l'occurrence l'exercice 2000, de l'annulation de
la dette du FOREC à l'égard de la sécurité sociale
est contraire à tous les principes communément admis de la
comptabilité publique et privée ;
Considérant qu'une telle imputation n'obéit qu'à des
considérations « d'affichage » politique, et ne
saurait en aucun cas être justifiée, comme cela a
été affirmé par le Gouvernement, par le souci de
«
tenir compte de l'analyse de la Cour des
comptes
» ; que le Premier président de cette haute
juridiction a tenu à confirmer solennellement au président de sa
commission des affaires sociales que les «
dispositions contenues
dans l'article 5 du projet de loi ne peuvent être
considérées comme reflétant la position de la
Cour
» ;
Considérant que l'annulation de la dette du FOREC prive le régime
général de quinze milliards de francs de recettes au titre de
l'exercice 2000, et le rend ainsi lourdement déficitaire ; qu'elle
modifie, ce faisant, profondément les conditions générales
de l'équilibre financier de la sécurité sociale
déterminé par la loi de financement pour 2000 et par la loi de
financement pour 2001 agissant en tant que loi de financement
rectificative ;
Considérant, par ailleurs, que la nécessité toujours plus
impérieuse, pour le Gouvernement, de trouver les marges de manoeuvre
nécessaires au financement de sa politique le conduit à effectuer
des prélèvements rétroactifs sur les excédents 2000
de la branche famille ;
Considérant que ces prélèvements ont notamment pour but de
pallier la perte de recettes résultant, pour le fonds de réserve
pour les retraites, des diverses manipulations financières
opérées, au cours des deux dernières années, au
profit du FOREC ;
Considérant que ces prélèvements effectués, sans
concertation, sur les excédents de la branche famille privent celle-ci
des moyens de mettre en oeuvre une ambitieuse politique familiale qui fait
aujourd'hui manifestement défaut à notre pays ;
Considérant que se mettent ainsi en place des circuits de
dépenses, de prélèvements et de recettes,
parallèles aux objectifs de dépenses et aux prévisions de
recettes qu'il est demandé au Parlement d'approuver pour 2002 ou de
rectifier pour 2001 ;
Considérant que, de ce fait, il convient de s'interroger sur la
sincérité des comptes soumis à l'examen du Parlement ;
Considérant que, hors ces montages financiers, le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2002 ne contient rien qui
puisse s'apparenter à la définition et à la mise en oeuvre
de véritables priorités de santé publique, ni rien qui
puisse résoudre le problème à venir des retraites ;
Considérant qu'en première lecture le Sénat a
profondément modifié le projet de loi tel que
présenté par le Gouvernement et adopté par
l'Assemblée nationale ;
Considérant qu'il a tout d'abord souhaité restituer à la
sécurité sociale et au fonds de solidarité vieillesse la
totalité des recettes qui leur avaient été, directement ou
indirectement, « confisquées » au profit du
FOREC ;
Considérant qu'il a ainsi restitué, pour la seule année
2002, 30 milliards de francs de recettes supplémentaires au
régime général de sécurité sociale et 18
milliards de francs au fonds de solidarité vieillesse ;
Considérant que, ce faisant, le Sénat a notamment rétabli
les excédents de la branche famille et du fonds de solidarité
vieillesse et restauré ainsi les moyens tant de mener une politique
familiale ambitieuse que de contribuer à la garantie des
retraites ; qu'il a fait apparaître symétriquement l'ampleur
de la charge dont le budget de l'Etat s'est exonéré ;
Considérant que, par ailleurs, le Sénat a su se montrer
constructif en examinant les dispositions du projet de loi relevant
véritablement du champ des lois de financement de la
sécurité sociale ;
Considérant qu'en première lecture, il a ainsi adopté
vingt-sept articles conformes et qu'il en a amendé trente, notamment en
faveur des travailleurs victimes de l'amiante ;
Considérant qu'il a également tenu à enrichir et à
compléter le projet de loi ;
Considérant qu'il a ainsi souhaité favoriser la reprise d'un
dialogue confiant entre les professionnels de santé et la
sécurité sociale, en supprimant le dispositif des
lettres-clés flottantes, système pernicieux, absurde et injuste
et donc, au total, inefficace ;
Considérant qu'il a défini, dans le cadre du rapport
annexé à l'article 1
er
, les objectifs d'une
véritable politique nationale dans le domaine sanitaire et social ;
Considérant qu'il a aménagé, dans un sens plus favorable,
les règles de la compensation entre régimes spéciaux
d'assurance vieillesse ;
Considérant qu'il a, en outre, prévu d'associer le conseil
d'administration de la Caisse nationale d'assurance maladie à la
définition des conditions d'utilisation de ses excédents ;
Considérant, en revanche, que le Sénat a décidé de
rejeter solennellement l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie (ONDAM) ;
Considérant que cette décision est d'une exceptionnelle
gravité car cet objectif constitue un élément central des
lois de financement de la sécurité sociale, dont les auteurs ont
voulu, en 1996, qu'il exprime les priorités de notre système de
soins, telles que définies par le Parlement ;
Considérant cependant que, dépourvu de tout contenu de
santé publique, l'ONDAM n'est aujourd'hui qu'un arbitrage comptable,
inévitablement contesté, entre les contraintes financières
de l'assurance maladie et le souci des pouvoirs publics d'apaiser les tensions
que connaît notre système de soins ;
Considérant que le Sénat s'est, dès lors, refusé
à engager son autorité en approuvant un objectif pour 2002 dont
le Gouvernement s'empresse, d'ores et déjà, de s'affranchir ;
Considérant que le Sénat a pris cette décision en toute
connaissance de cause tant la dérive observée depuis quatre ans
lui a semblé traduire le dévoiement de l'ONDAM et devoir
être sanctionnée clairement ;
Considérant que le dévoiement de l'ONDAM constitue, au même
titre que le financement du FOREC, un point de désaccord fondamental
entre le Sénat et, sinon l'Assemblée nationale, du moins la
majorité qui soutient le Gouvernement ;
Considérant que l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, ne
s'est pas contentée d'acter ce désaccord essentiel ;
Considérant qu'elle a rétabli l'ensemble des circuits financiers
étrangers aux enjeux de la protection sociale et qui constituent autant
de détournements et de manipulations des recettes de la
sécurité sociale pour financer les trente-cinq heures ;
Considérant que ce rétablissement traduit une divergence
fondamentale, et irréductible, d'approche des deux assemblées sur
cette question essentielle ;
Considérant, de surcroît, que l'Assemblée nationale a non
seulement rétabli l'intégralité des dispositions
contestées par la Haute Assemblée, mais qu'elle a
écarté certaines des améliorations et corrections de bon
sens apportées par le Sénat, de même qu'elle a
supprimé cinq articles additionnels dont il avait souhaité
enrichir le projet de loi ;
Considérant que l'Assemblée nationale a ainsi entendu signifier
qu'elle avait dit son dernier mot dès sa première lecture ;
Considérant, en outre, que le Gouvernement a fait adopter par voie
d'amendement, en nouvelle lecture, une réforme considérable,
à la fois par sa portée et son volume, du cadre conventionnel
régissant les relations entre les caisses d'assurance maladie et les
professions de santé ;
Considérant que cet amendement a été déposé
le 20 novembre, soit la veille du débat en séance publique
à l'Assemblée nationale sur la nouvelle lecture du dernier projet
de loi de financement de la législature qui s'achève ; qu'il
n'a pu de ce fait être examiné de manière approfondie par
les députés et n'a pu faire l'objet de la nécessaire
concertation avec les professions concernées ;
Considérant que cette réforme, par son ampleur et ses
implications, avait, à l'évidence, vocation à figurer dans
le projet de loi initial, tel qu'il a été déposé
à l'Assemblée nationale le 10 octobre, et non à
être adoptée en nouvelle lecture, après réunion de
la commission mixte paritaire ;
Considérant, de ce fait, que l'on peut s'interroger sur la
constitutionnalité des conditions d'adoption de cette réforme par
l'Assemblée nationale ;
Considérant, de surcroît, que cette réforme laisse
subsister, pour les professions non signataires d'une convention, le
mécanisme des lettres-clés flottantes que le Sénat avait
supprimé en première lecture ;
Considérant que le Gouvernement a ainsi confirmé qu'il entendait
ignorer, par principe, la contribution du Sénat sur ce projet de loi.
Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération
sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
2002, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
En conséquence, conformément à l'article 44,
alinéa 3, du Règlement, le projet de loi a été
rejeté par le Sénat.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 29
novembre 2001.
Le Président,
Signé :
Christian PONCELET.