Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 24/01/2002

M. Roland Courteau attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les difficultés que connaît la viticulture méridionale. Face à une situation particulièrement grave, des réponses à très court terme et moyen terme s'imposent, sous la forme de soutiens conjoncturels et structurels. Dans cette perspective, un plan d'adaptation de la viticulture ambitieux a été présenté. Au-delà des mesures structurelles qui conditionnent l'avenir, ce plan comporte aussi des mesures d'urgence (élimination rapide des excédents, soutien aux jeunes viticulteurs, mesures d'urgence en faveur des viticulteurs en difficulté, mise en place de cellules départementales chargées de se pencher sur leur situation, accélération du règlement des retards de paiement, préretraite, etc). Compte tenu de l'urgence qui s'attache au traitement d'une situation extrêmement préoccupante, il lui demande de bien vouloir lui faire un point précis sur la mise en oeuvre des différentes mesures, tant conjoncturelles que structurelles, ainsi que sur les démarches, dans le cadre des adaptations à apporter à l'organisation commune du marché du vin.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 20/02/2002

Réponse apportée en séance publique le 19/02/2002

M. Roland Courteau. Cette fois encore, monsieur le ministre, mon intervention portera sur les graves difficultés que connaît la viticulture méridionale.
M. Paul Blanc. Eh oui !
M. Roland Courteau. Je parlerai donc aujourd'hui au nom de la plupart des parlementaires du Languedoc-Roussillon ainsi que des présidents de conseils généraux.
Je crois vous avoir déjà dit combien nous avions apprécié la mise en oeuvre d'un plan dont l'effet est bien à la mesure des défis qui nous sont lancés.
Je veux saluer ici votre engagement total et résolu pour sortir de cette crise. C'est un engagement responsable, comme vous l'avez vous-même dit, qui passe par la poursuite des investissements dans le savoir-faire humain, technologique, commercial, mais également dans la restructuration du vignoble et dans cette marche en avant pour la modernisation des caves et des pratiques oenologiques.
Cela dit, et au-delà des nécessaires mesures structurelles qui conditionnent l'avenir de la viticulture, je souhaite surtout aujourd'hui insister sur l'urgence qui s'attache au traitement de la situation particulièrement préoccupante d'un grand nombre de viticulteurs.
Face à la spirale à la baisse des prix, monsieur le ministre, vous avez sollicité des instances européennes une mesure d'assainissement par le retrait des excédents avec complément national de prix. Pouvez-vous, au lendemain du conseil européen des ministres de l'agriculture, nous faire un point précis sur une demande dont je sais qu'elle ne se situait pas dans un contexte européen des plus faciles ?
Cette mesure reste cependant indispensable pour favoriser la remontée des cours. Nombre de viticulteurs ont vu, en effet, leurs recettes mensuelles diminuer de 15 %, de 30 %, voire de 40 %, selon les cas, et connaissent actuellement de graves difficultés.
Monsieur le ministre - je sais que vous en êtes personnellement convaincu - le temps presse ! Je sais - nous l'avons tous perçu lors des réunions de travail qui se sont tenues à votre ministère - que vous avez la volonté de répondre à l'urgence de la situation, comme vous l'avez tout dernièrement démontré en révisant les critères d'attribution des aides aux jeunes viticulteurs afin qu'une plus large proportion des demandes présentées puisse être acceptée.
Oui, le temps presse, et il importe qu'un certain nombre de dispositions soient prises dans des délais très courts ! Je pense tout particulièrement à des mesures de soutien direct de trésorerie soit par subventions à l'hectare, soit par prêts à 1,5 % remboursables en 2005. Je pense également à des dispositifs complémentaires en faveur des caves particulières les plus endettées ou à des prêts de trésorerie aux coopératives.
Les représentants de la profession, que nous avons rencontrés voilà une semaine, proposent, également en accord avec l'ensemble des responsables du Languedoc-Roussillon, la prise en charge des cotisations sociales et de l'impôt foncier et renouvellent leur demande d'ouverture de contingents de préretraites qu'ils souhaitent voir arrêter à mille par an pour le Languedoc-Roussillon.
Enfin, ils insistent sur la nécessité d'ouvrir tout de suite, à Bruxelles, le débat sur la réforme de l'organisation commune des marchés, l'OCM, non seulement pour les mécanismes de marché mais aussi pour la reconversion différée, avec possibilité de cession de droits pour des raisons d'âge.
Conjugué avec un dispositif de préretraite, cet ensemble de mesures permettrait d'arriver à un mécanisme efficace pour la campagne 2002-2003.
Telles sont quelques-unes des mesures susceptibles d'aider les vignerons du Midi à passer ce cap difficile. Peut-on espérer les voir rapidement mises en oeuvre, monsieur le ministre ? Je vous fais confiance, car vous avez toujours su répondre rapidement et concrètement aux propositions qui vous étaient faites.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Courteau, je réponds avec d'autant plus de plaisir à votre question que je vous sais défenseur inlassable de la viticulture du Languedoc-Roussillon et homme à dire clairement les choses - il faut parfois du courage - sans jamais céder à la démagogie.
Il est vrai que la situation de la viticulture dans le Midi réclame notre attention. J'ai proposé, au mois de septembre, aux termes d'une très longue concertation, un plan que je crois complet et qui, justement, comprend les mesures de court terme nécessaires pour réguler le marché mais aussi les engagements à long terme indispensables pour achever la restructuration de ce vignoble. Ce plan avait été bien accueilli par tous les professionnels, et j'ai indiqué, à plusieurs reprises, à la représentation nationale dans quelles conditions il devait se mettre en place : les récentes dispositions ne font que confirmer mes propos d'alors.
Mon premier objectif, avec ce plan, était de rétablir l'équilibre du marché.
Au terme d'intenses négociations avec la Commission européenne, j'ai obtenu, après la distillation « alcool de bouche », une distillation de crise lors du dernier comité de gestion des vins qui s'est tenu le 8 février dernier à Bruxelles, avec l'octroi à la France d'un contingent de distillation de crise de 4 millions d'hectolitres. Notre objectif est de détruire 20 % de la production française de vin de table - ce n'est pas rien -, afin d'assainir le marché et de lui permettre de redémarrer.
Comme vous l'avez dit, nous nous heurtions à une difficulté liée aux prix, puisque nous voulions porter le prix d'achat de ces vins de 1,9 euro par degré hectolitre à 2,74 euros par degré hectolitre.
C'est pourquoi j'ai demandé au conseil « agriculture » l'octroi d'une aide nationale exceptionnelle. Cependant, une telle décision étant d'ordre budgétaire, elle doit être prise à l'unanimité. Or, une réserve a été émise par le Parlement danois. Hier, comme les jours précédents, je me suis donc efforcé de convaincre tant la ministre danoise de l'agriculture que les parlementaires danois de lever cette réserve.
Sans un vote favorable de la ministre danoise, notre proposition était vouée à l'échec, et c'est la raison pour laquelle nous avons estimé préférable, hier, de repousser le vote de quelques jours. J'ai maintenant l'assurance du Gouvernement et du Parlement danois que cette réserve pourra être levée vendredi, de sorte que nous avons la quasi-certitude d'obtenir satisfaction lors du Conseil européen qui se tiendra la semaine prochaine.
Grâce à nos efforts d'hier, une aide nationale pour la distillation de quatre millions d'hectolitres devrait donc être actée dans quelques jours.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'en viens à vos questions concernant les difficultés des vignerons.
Je suis tout à fait prêt, en plus des actions déjà engagées, à examiner les conditions de mise en place d'aides exceptionnelles afin de remédier aux situations les plus délicates. C'est ainsi que j'envisage de proposer, dans les tout prochains jours, des instruments très diversifiés, adaptés aux cas les plus divers, et je pense notamment aux prêts à taux bonifié que vous avez évoqués.
Pour être efficaces et, surtout, équitables, ces mesures devront être ciblées et plafonnées. Elles devront également tenir compte des efforts réalisés par les vignerons pour s'adapter au marché. Outre les instruments traditionnels, des aides ciblées comparables à celles qui ont été mises en place pour les éleveurs bovins sont, à ma demande, étudiées par mes services.
Enfin, je note que dans les Pyrénées-Orientales le couplage entre préretraite et arrachage est envisagé à titre expérimental. Je souhaite que, dans le cadre de la concertation qui se poursuit avec les professionnels, des propositions sérieuses et réalistes soient faites en ce sens, afin que les vignerons qui en ont le plus besoin puissent rapidement bénéficier de mesures concrètes.
Ces aspects conjoncturels ne doivent pas faire oublier le volet structurel du plan que nous avons annoncé le 25 septembre. Or, je tiens à le dire clairement à un parlementaire qui m'interroge lucidement, ce volet structurel n'a pas, à ce jour, suffisamment mobilisé les énergies à l'échelon local.
Je le rappelle, 100 millions de francs sont disponibles pour encourager - c'est essentiel - l'émergence de structures permettant de faciliter la commercialisation de notre offre de vins de pays et de vins de table. En outre, 15 millions de francs doivent permettre d'aider les coopératives à resserrer leurs liens avec ces structures de commercialisation.
J'insiste sur le fait que ces aides, qui avaient été demandées par la profession, doivent être utilisées. Or elle ne le sont pas assez, voire pas du tout !
Enfin, pour accélérer la reconversion du vignoble méridional et encourager le remplacement des cépages qui n'ont plus de marché, la reconversion progressive peut désormais être mise en oeuvre. Je souhaite aussi qu'elle soit appliquée de façon significative dès cette année pour éviter que l'an prochain nous nous retrouvions dans la même situation de surproduction.
En conclusion, je tiens à condamner l'attentat à la bombe dont a été victime la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de Montpellier hier matin. Ce type d'action, qui ne peut que nuire à l'image de la région Languedoc-Roussillon et de ses vins, rendra surtout plus difficile la mise en oeuvre de mesures pourtant indispensables étant donné la gravité de la situation.
M. Roland Courteau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, message reçu ! Ce sont d'excellentes nouvelles, et je tiens à vous remercier, simplement et sincèrement, de votre énorme investissement en faveur de la viticulture et, plus généralement, du monde agricole au cours de ces dernières années.

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